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#critiquedelivre
navisseli · 6 years
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No Home
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Auteurice : Yaa Gyasi
Maison d’édition : Le Livre de Poche
Date de publication : 2018
Nombre de pages : 480
Genre : Historique
Ce qu’en pense Seli : 
Une fois n’est pas coutume, je vais vous parler ici d’un excellent roman. Ce genre de roman qui vous touche, peu importe le genre de lecteur que vous soyez, quel que soit le genre que vous affectionnez.
No Home (ou Homegoing en anglais) est un cri du coeur de son autrice, Yaa Gyasi. Si on en croit la petite biographie présente dans le livre, elle aurait décidé décidé d’écrire ce roman après être retournée dans le pays où elle est née : le Ghana. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que cela se sent, autant dans ses thèmes que dans les messages qu’elle veut transmettre. Pour passer rapidement et ne pas paraphraser la quatrième de couverture, No Home raconte la destinée d’une famille déchirée entre deux pays, le Ghana et les Etats-Unis, détruite par la colonisation et l’esclavage, condamnée à se battre pour préserver sa dignité. Chaque chapitre suit un membre différent de la famille, en alternant à chaque fois entre deux pays et à une époque différente (l’histoire commence vers 1750 et se termine à l’aube des années 2000).
Bien, commençons très succinctement par parler des quelques menus défauts de cette oeuvre (je ne suis pas loin d’avoir perdu toute objectivité sur ce roman donc autant commencer par là). Le parti pris de raconter la vie d’un personnage par chapitre, à hauteur de 30 ou 40 pages à chaque fois est un parti pris intéressant mais qui ne va pas sans quelques problèmes. Déjà, un problème au niveau de l’attachement et de l’affection que l’on peut porter aux multiples héros. Il est compliqué de s’investir émotionnellement ou de comprendre quelqu’un si on ne le suit que pour un temps court : quelques années au maximum qui courent sur quelques pages, avant de passer à un autre. C’est surtout vrai pour les premiers chapitres, car une fois habitués au format, on passe aisément d’un personnage à l’autre. Par ailleurs, en début de roman est mis à notre disposition un arbre généalogique des deux branches de la famille, ce qui permet de nous y retrouver facilement. L’autre inconvénient de ce choix est la frustration que l’on peut parfois ressentir quand un chapitre se finit abruptement pour un personnage. Si parfois on apprend ce qui lui est arrivé grâce au chapitre consacrés à son enfant où à son petit-enfant, ce n’est pas toujours le cas, et à de nombreuses reprises je suis restée sur ma faim.
En ce qui concerne le deuxième défaut de ce roman, je ne me sens pas à même de juger mais je pense qu’il est utile d’en parler. A plusieurs reprises, quand l’autrice évoque la séduction ou la sexualité de ses personnages, on remarque de nombreuses comparaisons à des lion.ne.s où à d’autres animaux de la flore africaine “classique”, quelques fois à propos d’hommes, mais surtout à propos de femmes. Je crois savoir que les militants afro-féministes détestent ces comparaisons car elles rappellent sans arrêt l’amalgame noir/animal. Je m’étonne donc de la présence de ces comparaisons dans un ouvrage si engagé contre la négrophobie et écrit par une femme noire, mais n’étant pas moi-même noire, je ne me sens pas en droit de donner un avis définitif.
Mais passons plutôt à quelque chose de plus positif, à savoir tout le reste du bouquin, et en parler me mets profondément en joie.
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Naviguer entre les époques et les personnage donne au récit une très grande richesse et permet ainsi de traiter la quasi-totalité des thèmes liés à la colonisation européenne en Afrique et Amérique. On nous parle des conditions de vie des esclaves (leur capture, leur détention, la façon dont ils sont traités par les blancs, le viol des femmes noires, etc...), des conflits entre tribus ashanties et fantis durement alimentées par les Anglais, de métissage, de colonialisme économique, des ravages de la ségrégation, la capture d’esclaves libres pour les revendre (en toute légalité dans les états du sud), mais aussi, à plus petite échelle, des différences de traitement entre les noirs et les noires, entre ceux qui ont la peau plus ou moins claire, et surtout du racisme ordinaire et ses manifestations sur trois siècles. Et je pense très sincèrement en oublier. En résumé, un cours concentré de moins de 500 pages sur le racisme et ses origines. Que vous soyez sensibilisés ou non, ce roman vous touchera de toute façon par son côté militant. 
Et ces thèmes sont abordés bien évidemment au travers des très nombreux personnages qui animent le récit. Et pour parler d’eux sans écrire un traité en trois tomes, je vais parler du titre de ce roman. En anglais, il est titré Homegoing (ce qu’on pourrait traduire par “retour à la maison” ou “retour chez soi”), ce qui souligne très nettement le fait que tous les personnages sont en quête de leur identité après que leur passé et leur avenir soient brouillés par les blancs. D’autant plus qu’aucun personnage ou presque n’est maître de son destin et doit se contenter de le subir. Ils cherchent tous leur place, et peu réussissent à la trouver, si ce n’est vers la fin, où apparait une note d’espoir. En français, le roman est titré No Home. L’anglais a été conservé, mais pas le titre en lui-même, celui-ci pouvant être traduit par “sans foyer”. Cet autre titre, si différent, convient pourtant à la perfection. Les personnages sont complètement déracinés, par l’esclavage aussi, mais par d’autres événements également, perdent sans arrêts leurs repères, et oublient peu à peu d’où ils viennent. La ligné d’Esi en particulier perd très rapidement son histoire, si bien qu’au bout de trois générations, ballottée en tous sens injustement, la famille perd la totalité de son héritage ashanti, culturel si ce n’est génétique. 
{ZONE SPOILER} Cela est parfaitement illustré dans le chapitre final, où Marcus visite le Ghana où son aïeule Esi avait été réduite en esclavage, et où il remarque qu’il est “un noir touriste dans un pays noir”. {FIN ZONE SPOILER}
Du côté de la lignée d’Effia, restée au Ghana, la perte d’identité s’illustre par la colonisation, “traditionnelle” puis économique du pays par les anglais. Les personnages, comme Yaw, se sentent ainsi dépossédés de leur pays et leur histoire prise en otage par ce que permet l’histoire blanche (en effet, de nombreux lettrés ghanéen au XXème siècle étudient aux Etats-Unis ou en Europe). 
Pour continuer sur les personnages (en dire plus serait sans doute spoiler), je voudrai noter leur réalisme. Ils ne sont jamais idéalisés et ont de gros défauts pour la plupart. Par exemple, le personnage de James Collins est présenté comme bon, mais il est aussi négrier et responsable colonial au Ghana, et si il semble gêné par son commerce, il détourne les yeux plus qu’autre chose. Autre point important, sur quatorze personnages principaux la moitié sont des femmes, une parité parfaite, et tous ces personnages sont différents aussi bien dans leur caractère, leurs aspirations et leur statut social, un commentaire qui peut être aussi étendu aux personnages masculins. Et bien sûr tous noirs ou métisses, autant dire une superbe représentation. Ah et je suis surprise que ce bouquin n’ait pas reçu de sérieuses critiques de la part de certaines personnes, car les blancs sont les grands antagonistes de cette histoire, et à part James Collins et la famille Mathison, le portrait des blancs est peu reluisant. 
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source : publié par @obama sur Giphy.
Si je pense avoir fait le tour des thèmes évoqués dans ce roman, je pense qu’il est important de souligner celui qui m’a le plus marqué dans ce roman : celui de la femme noire comme victime automatique de l’oppression blanche (et également noire quand elle vient des hommes), et je vais prendre des (nombreux) exemples, donc ATTENTION je vais spoiler à mort les intrigues de certains personnages !
Tout d’abord, si on nous montre que l’esclavage touchait toutes les personnes noires sans distinction de genre, d’âge, ou même de classe sociale (Esi est la fille bien-aimée d’un Grand Homme, l’équivalent d’un chef pour son peuple), et que les conditions de détention dans les cachots sont les mêmes pour tous, les noires doivent subir un sévisse plus terrible encore : le viol, et en silence ! On nous montre en effet que c’est une situation habituelle, et que la victime du jour est incitée par ses compagnes d’infortune à subir en silence, car si le violeur est mécontent, il pourrait se venger sur le cachot entier. Anna quand à elle, bien que née libre aux Etats-Unis, est rattrapée par des esclavagistes qui voyaient en elle une proie sans défense. Enceinte, elle se donne la mort pour s’épargner, ainsi qu’à son enfant, l’esclavage. Malheureusement, ce dernier lui survit. Abena, vieille fille à vingt-cinq ans et née d’un homme malchanceux est catégorisée à vie comme une femme maudite, si bien que l’homme qu’elle aime ne peut pas la prendre comme amante et repousse sans arrêt sa promesse de l’épouser. Elle finit par tomber enceinte, s’exile, trouve refuge dans une mission chrétienne, pour finir définitivement noyée par un prêtre qui voulait la baptiser de force. Et je finis par Willie, née dans un petit village du sud qui se rend à New York pour faire carrière dans la chanson. Malheureusement, elle a “attendu trop longtemps”, donc elle se fait recaler à cause de son âge, mais aussi parce que sa peau n’est pas assez claire alors que les hommes noirs dans sa branche ne rencontrent pas de problèmes à trouver du travail, car le public blanc est friand de jazzmen. Il y a encore d’autres exemples, mais je voulais m’en tenir à ceux qui m’avaient le plus marqués et qui m’ont laissés dans un état de colère et de révolte tel que je n’en avait pas connu de tels depuis longtemps...
FIN ZONE SPOILER.
Il y a cependant deux autres choses qui m’ont marquées dans ce roman. J’y reviens mais la perte d’identité m’a été extrêmement douloureuse. Voir peu à peu des générations s’acculturer par nécessité ou par la force, oublier les noms et les combats de leurs ancêtres, qui étaient leurs dieux, quelles étaient leurs traditions, perdre leur langue, bref, leurs racines, tout en sachant, en tant que lectrice, tout ce qui les a mené là, ça m’a fait très mal. D’autant plus qu’une fois ce savoir perdu, il ne peut être retrouvé. Voir que Marcus et Marjorie, les deux derniers maillons des deux chaînes, ne connaissent rien de leurs ancêtres communs et se doutent, mais sans certitude, de ce qui les a séparés (SPOILER Marcus ignore complètement que ses ancêtres venaient du Ghana SPOILER), cela m’a rendue incroyablement triste. Et quand j’ai réalisé que ce destin avait du frapper des milliers de familles, je me suis sentie presque mal. 
Et pourtant, ce livre se dévore. Passées les cent premières pages, je voulais toujours en savoir plus, savoir ce qui allait arriver à ces pauvres familles qui tentaient de mener tant bien que mal leur vie. Je passais presque chaque instant libre de mes journées à lire quelques pages (quand on vit en communauté, c’est un peu relou pour les autres quand même, je me serai crue à l’époque où je relisais le tome 3 d’Outlander, où déjà, ça avait gavé tout le monde que j’ai le bouquin greffé aux mains). Et j’ai bien sûr eu la bonne idée de le finir la nuit, un peu après minuit, donc j’ai au passage ruiné ma nuit de sommeil à cogiter. Mais ça valait le coup. Vraiment. 
J’aime ce roman pour tout ce qu’il m’a fait ressentir. Pour ce qu’il est. Pour ce qu’il m’a apprit. 
Et je sens que je vais redevenir relou en le recommandant à tous bout de champs à tout le monde donc... LISEZ LE !!!
Ma note : 19/20
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komikku-san · 3 years
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** World's end Harem **
“Il y a des gens qui ont une bibliothèque comme les eunuques un harem.” - Victor Hugo
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Éditeur français 👉 @delcourttonkam
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Synopsis en commentaire.
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La critique en une phrase : un harem formidable, mais qui s'assume ?
Note : 1️⃣8️⃣ sur 2️⃣0️⃣
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🔞 Réservé à un "public averti", World's End Harem reste méconnu du grand public. Pourtant, les quelques planches sexualisées ne devraient vous rebuter.
🍑 Du sexe ? Oui, il y en a. Est-ce vulgaire ? Certainement pas. Qu'à cela ne tienne, World's End Harem est pourtant bien classé dans les shonen. De ce genre, il en prend d'ailleurs tous les codes pour se situer dans un mélange presque parfait entre shonen et hentai. "Presque", j'insiste sur ce mot car les auteurs, Link à l'écriture et Kotaro Shōno au dessin, semblent parfois ne pas assumer leurs tendances érotiques.
🍌 De cette manière, on se retrouve souvent avec avec des planches tout juste alléchantes, sexualisées à souhait. Elles sont juste censurées comme il faut pour ne pas classer l'œuvre dans un genre qui ne lui irait de toute façon pas.
✍L'histoire, elle, aborde différentes thématiques comme la place de la femme dans la société, la sexualités et les dérivés qui en découlent, la reproduction ou encore la surpopulation. Ce n'est, bien entendu, qu'un échantillon. Le fil rouge est bien tissé, les dialogues bien écrit. Ça se laisse boire comme du petit lait. Les cases sont bien découpées.
Quant au dessin, le trait est plutôt minimaliste. L'auteur n'en est pas à son premier essai et cela se rend. C'est agréable à l'œil. Personnellement , le trait m'a fait beaucoup penser à du SAO (version manga). Ce n'est certes pas aussi bien que de Miura, mais on n'est pas non plus au même niveau que du Togoshi. Le tout se marrie bien... pour notre plus grand plaisir.
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minagostarfc-blog · 5 years
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#CritiqueDeLivre: « Abarundi, nation désignée par Dieu: Secrétariat en anglais (édition swahili) , » Dr Levi Rukundo Ph.D. #VisionaryAline
https://goo.gl/3pJf6V
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crazyabtbooks · 2 years
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Lady Helen, T.1: Le club des mauvais jours - Alison Goodman
Le livre s’ouvre sur Lady Helen, une jeune demoiselle orpheline vivant avec sa tante et son oncle, un riche couple de la haute société londonienne, qui doit faire sa présentation à la reine. Au bal, elle rencontre Lord Carlson, qui l’aidera à comprendre le mystère de sa femme de chambre disparut. Son monde bascule alors quand elle découvre que de monstrueuses créatures existent, circulant librement dans le monde. Elle est l’une des 7 personnes dans le monde pouvant les voir et les combattre, elle sera alors face à un dilemme; quitter le monde qu’elle connait depuis toujours – les bals, les réceptions et les soirées – et se lancer dans une dangereuse aventure pour éliminer ces créatures, ou laisser des innocents mourir mais regagner la tranquillité du quotidien? Un choix qui s’avère plus difficile qu’il n’en parait car Helen ne veut pas faire de mal à ses proches.
 J’ai adoré ce livre car l’auteure a fait énormément de recherches pour mettre en place le décor et cela parait. Les lieux et costumes sont tellement bien décrits qu’on s’y croirait. Le mélange de fantastique, de romance et d’éléments historiques s’harmonise parfaitement. L’héroïne est une jeune fille courageuse, pleine de sang-froid, qui arrive à se faire respecter malgré le fait qu’elle soit une femme (le livre se passe dans les années 1820 donc dans ce temps-là les femmes étaient considérées inférieures). Elle apprend vite et se débrouille pour survivre dans ce monde complexe et mystérieux malgré les nombreuses erreurs qu’elle fait lors de son parcours. On découvre les multiples pouvoirs d’Helen en même temps qu’elle et plus l’histoire progresse, plus on en apprend sur les conséquences qui surviennent si Helen les utilise. Une histoire magnifique, dont on ne peut plus sortir une fois plongée dedans.
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