Tumgik
#fillexgarcon
murphyncoffee-blog · 7 years
Text
Fanfiction. Angle mort.
Tina ne rêve de rien d’autre que d’une vie calme et bien rangée ; c’est pour ça qu’il y a plusieurs mois, elle a décidé de tout recommencer en fuyant sa petite campagne pour la grande ville de Paris. Tina ne s’appelle pas Tina mais préfère ce mensonge à l’identité d’un passé qu’elle a préféré oublier. Elle a de long cheveux bruns et des yeux de la même couleur sur une peau un peu trop foncée pour faire croire qu’elle vient réellement d’ici, mais quand on lui demande, elle dit qu’elle est française, c’est ce qui est marqué sur sa carte d’identité, et c’est dans c’est ici qu’elle veut trouver sa place. Petite, Tina rêvait des vies en conte de fée, où elle serait une héroïne et où l’on exauserait ses souhaits. Puis Tina a grandi, elle s’est rendue compte que les grands méchants loups se déguisent en prince et que la vie n’est jolie que lorsqu’on la maquille sous des lumières artificielles. Alors seule dans sa grande reconstruit des espoirs, imaginant dans sa tête tous les plans d'un bonheur. Mais même ensemble, main dans la main, il est encore loin le paradis sur ce toit du monde, perché sur son trône, roi de la lune prince des ténèbres, il regarde la nuit et les étoiles se mêlent à ses rêves il voit les corps qui se mêlent à la rue et lui, il est en dehors, et en dedans en même temps : il fume mais c'est lui qui se consume. PROLOGUE Ça fait longtemps que ces petits bouts de lumière superficielle sont collés sur mon plafond. C'est Cassandre qui me les avait achetées pour mon déménagement, je m'en souviens. Des lumières en forme d'étoiles, des petites, des plus grandes, des scintillements qui me rendent ivre de poésie, et puis scintillent quand je suis ivre tout court aussi. Parfois, j'aime l'idée de m'allonger sur mon lit, éteindre toutes sources de lumière, les étoiles dehors, puis fermer les rideaux, éteindre les étoiles du plafond, tout éteindre jusqu'à ce que le monde se brise en mille morceaux de ne plus savoir où il va. Et puis tituber, encore (et toujours), comme si je m'étais trop battue, un peu, beaucoup, comme si je vivais juste pour ça, pour ce moment d'ivresse intense, vous savez ? puis m'écrouler sur mon lit (comme si le confort d'un matelas était en fait de la poussière de bonheur). Toi, moi, main dans la main. Les sentiments qui rendent flou, comme dans un rêve (ou comme quand on pleure), et puis on se tient immobiles, bien sages. Ma respiration pour unique musique. Toi qui me fixe. Ton regard angélique sur mes pensées les plus noires, les plus sales. Et on se saoule aux étoiles et aux comètes, et à nous deux aussi un peu. ________ CHAPITRE I - On ne me dit que du bien de toi.. - Oh. J’espère que tu leurs dis que c’est le photographe qui fais tout ? Ishmaël a esquissé un sourire en baissant les yeux, les joues légèrement teintées par la gène. Ishmaël est comme ça, à douter en permanence de son talent et à ne pas être capable d’accepter des compliments. Je sais que son sourire gêné est une réponse et qu’il n’ouvrira pas la bouche pour répliquer. - Le vernissage est réussi, c’est mérité. Je t’avais dis que tu n’avais aucune raison de t’inquiéter, continuais-je. - Le traiteur est réputé, ça joue. Je me suis contentée de lever les yeux au plafond en attrapant une des flûtes de champagne mis à disposition. Certes, les petits fours font la joie des visiteurs, et certains se servent plus que nécessaire, mais il est indéniable qu’Ishmaël a un vrai don pour photographier les personnes et les rendre belles. Je crois que c’est parce ce qu’il a toujours su voir le meilleur et surtout croire au meilleur de chacun. Et il sait parfaitement comment traduire cette beauté intérieur avec son appareil photo qu’il ne lâche pratiquement jamais. La galerie où il exposait été simple, pas très grande mais suffisamment pour qu’une centaine de personne puisse flâner dans la pièce et admirer les nombreux tirages grand format en noir et blanc accrochés aux cloisons blanches qui faisaient parfaitement ressortir le jeu de lumière caractéristique de ses photographies. La grande majorités d’entre elles représentaient les femmes dans leur intimité : un couple était enlacés devant une télévision, une jeune fille se maquillait devant son miroir, une autre lisant dans son lit.. On y trouvait de nombreux nus également, et c’est ce genre de photo que je préférais : Ishmaël savait faire ressortir la beauté de ce que ces femmes appelaient des défauts, comme les cicatrices, les grains de beauté, les formes.. Ces personnes faisaient partis de ses amies, de sa famille, parfois des inconnues, et c’est naturellement qu’en tant que son ex-petite-amie, j’avais trouvé ma place sur une grande partie de ses photos. Notre couple avait pris fin de façon douloureuse mais naturelle quelques mois plutôt. Nous avions parfaitement conscience que rester ainsi, aussi proche l’un de l’autre, était compliqué pour lui comme pour moi. Pourtant, nous avions aussi décidé de nous comporter en adulte. J’avais aimé Ishmaël, et sûrement qu’au fond je l’aimais encore un peu, mais il était mon ami bien plus que mon ex-petit-ami, et je me devais donc de le soutenir dans les événements important de sa vie. Son premier vernissage en faisait évidement parti. J’avalais une gorgée de champagne quand mon regard s’est posé sur un groupe de trois hommes en train de regarder, et de, visiblement, débattre longuement sur une des photographie. Ishmaël a probablement du ressentir mon malaise, puisqu’il s’est excusé pour aller les rejoindre, me laissant seul à les observer de loin. La photo en question me représentaient de dos, penchée à une fenêtre, avec pour seul vêtement une culotte en dentelle noire. J’avais coupé mes cheveux depuis, et je doute qu’ils puissent me reconnaître, mais si j’appréciais le talent et le rendu des photos d’Ishmaël, voir des personnes débattre d’une oeuvre dans laquelle j’étais représentée restait une situation plutôt gênante à vivre. Mais j’avais confiance en Ishmaël, il savait parfaitement gérer son travail, et c’est pour ça qu’il exposait : montrer ses oeuvres, mais aussi avoir des retours de personnes qu’il ne connaît pas, avoir des avis objectifs. J’essayais d’écouter la voix dans ma tête me disant que le groupe commentait le jeu d’ombre très subtile du cliché et non pas la taille de mes hanches. C’est seulement en finissant ma coupe de champagne que j’ai réalisé que mon ami avait l’air de les connaître ; il leur parlait de façon totalement détendu alors qu’Ishmaël avait toujours été d’une timidité presque maladive avec les inconnus. Cette idée n’a fait que ce confirmer quand je l’ai vu me pointer du doigts et que trois visage se sont tournés vers moi : Je les ai fusillé du regard. Ishmael a baissé la tête, gêné, et si deux de ces hommes se sont retourné après avoir réalisé leur impolitesse, l’un d’entre eux a soutenu mon regard que j’ai lâché très rapidement. J’étais en colère, sans avoir de réelle raison pourtant, et je n’avais pas envie de jouer à ce genre de jeu puéril de celui qui tiendra tête le plus longtemps. J’ai préféré me diriger vers Esther qui venait de finir sa discussion. J’ai parcouru la distance qui nous séparait et attrapé son bras pour me l'accaparer, hors de question que je reste seule quelques secondes de plus. - Ava ! Que me vaut cette enthousiasme pour ma personne si soudainement ? - Ton frère m’a lâchement abandonné. - Oh, tu viens toujours vers moi par intéret.. Elle a lâché un petit rire et je suis ai donné un coup de coude. Je ne pourrais pas qualifier Esther de grande amie, mais elle était la soeur d’Ishmaël et je la connaissais depuis assez longtemps pour que notre relation ait dépassé le stade de la cordialité. Je l’ai entraîné un peu plus loin, derrière des cloisons de façon à ne plus être à la vue de son frère et de ses amis. - L’homme avec qui j’étais en train de parler, figure toi qu’il travaille pour des collectionneurs d’art et que les photos d’Ishmaël l’intéresse. Il a des contacts sur Londre et Milan, regarde comment je tremble ! C’est moi qui doit gérer tout ça, je te jure, j’en reviens pas.. - Tu seras super Esther, tu sais parfaitement comment faire. Regarde le vernissage comment il est réussi, tout ça grâce à toi. Elle m’a répondu par un immense sourire. Comme son frère, Esther ne savait jamais vraiment comment répondre aux compliments, mais son visage était tellement expressif que je savais très bien que c’était ce qu’elle avait besoin d’entendre. Esther est née quelques mois seulement après son grand frère, leur différence d’âge minime et leur complicité les a toujours fait paraître comme jumeau aux yeux de ceux qui ne les connaissaient pas. Mais Esther était très solaire, elle irradiait, le genre de personne que l’on remarque tout de suite en rentrant dans une pièce, alors qu’Ishmaël était toujours en retrait, à se cacher ; il n’aime pas l’attention alors c’est sa soeur qui la revoie pour lui. Ils se complètent parfaitement, alors quand Ishmaël a commencé à avoir besoin de quelqu’un pour gérer sa carrière d’artiste, c’est Esther qui est apparu comme l’évidence même pour s’en occuper. Et elle a toujours parfaitement rempli son rôle. - Qu’est-ce que tu fuis ? J’ai froncé les sourcils, prenant un air interloqué, faisant mine de ne pas comprendre de quoi elle pouvait bien parler. - Ne me dis pas que c’est Ishm’ que tu évites, je pensais que vous aviez dépassé ce stade depuis longtemps.. - Mais pas du tout ! Me défendis-je, c’est.. plutôt ses amis que j’évite. Esther a froncé les sourcils, ce que je pouvais comprendre. Ishmaël n’avait jamais eu beaucoup d’ami, et j’avais passé tellement de temps avec lui que ses amis étaient vite devenu mes amis aussi et l’étaient restés même après notre séparation. Elle n’a pas attendu mes explications et a empoigné mon bras pour que se mettre à un endroit stratégique où l’angle de vue permettait de voir presque toute la pièce. J’ai parcouru la salle du regard et Esther en a fait de même, mais rien, et ils ne se trouvaient plus devant la photographie qui avait eu l’air de tellement les intéresser, et il ne semblaient pas être dans notre champs de vision. - Angle mort ? - Angle mort, concluais-je. Esther a grimacé, et j’ai haussé les épaules. Angle mort. L’expression de la petite bande que formaient Esther, Ishmaël et leur amis, et que j’avais intégré plus ou moins naturellement quelques mois plus tôt. Angle mort pour rien en vue. Angle mort pour rien à signaler. Mais aussi : Angle mort pour le genre de sujet que l’on ne veut pas aborder, pour les vérités que l’on refuse d’accepter, pour les responsabilités que l’on refuse d’assumer.. Ces deux petits mots tout bête répétaient des centaines de fois par Idriss, le meilleur ami d’Ishmaël quand il passait son permis, étaient devenus bien plus qu’une simple formule du code de la route, c’était devenu notre code secret, notre façon d’aborder les situations plus ou moins difficile que l’on doit traverser dans notre existence. - Regarde, à ta droite, troisièmes photos.. - Celle d’Emilie ? - Non la mienne ? - Où t’es à poil ? … Pardon t’es à poil partout. J’ai soupiré en attrapant son menton pour diriger son regarder vers l’homme en question ; il se trouvait un peu plus loin de la photo de tout à l’heure, et il était seul cette fois, mais j’étais bien certaine qu’il s’agissait de l’un des hommes avec qui Ishmaël discutait, l’un de ceux qui avait eu la gentillesse de détourner le regard quand j’ai tenté de faire comprendre qu’ils étaient trop indiscret. - Oh Syrine ! - Qui ça ? - Syrine. Il était dans la même école d’art qu’Ishm, en cinéma, il est réalisateur, il fait principalement des clips, un peu de pub aussi. C’est de lui dont tu parlais ? Ce n’est pas vraiment un de ses amis.. Je n’ai pas relevé le fait qu’elle semblait en savoir beaucoup sur ce simple camarade de classe de son frère, ni même ce que la fin de sa phrase sous-entendait, mais même son regard trahissait un brin de nostalgie, peut-être de la colère aussi. Mais je n’aime pas vraiment m'immiscer dans les histoires des gens et encore moins dans leurs pensées et leurs sentiments si je n’y suis pas invitée. J’observais ce Syrine depuis quelques secondes quand il fût rejoin par les deux autres hommes qui étaient avec lui. Leurs tenues faisaient presque tachent dans cette univers si propre et carré, nous avec nos robes, nos hauts talons et nos cheveux biens coiffés, eux et leurs jeans troués, leurs bombers et leurs casquettes sur le crâne. Étaient-ils réellement intéressés par la photographie ou étaient-ils venu en voyant la lumière et les filles nues ? Je n’aimais pas vraiment juger les personnes sur leurs styles vestimentaires ou leur classe sociale, j’étais bien placée pour savoir que l’apparence d’une personne ne signifie absolument rien, et ma conscience me fit grimacer. Arrête Ava, peut-être sont-ils là par simple curiosité, et c’est bien que des personnes s’intéressent au travail d’Ishmaël, surtout s’ils n’y connaissent rien. - Je crois que ce sont des rappeurs.. (La petite voix dans ma tête m’a forcé à ne faire aucune remarque. Ça ne veut rien dire, ne juge pas.) Syrine travaille beaucoup avec eux, ils réalisent leur clip, je crois qu’ils s’appellent .. 2005, quelque chose comme ça, ou 2015 peut-être. Je grimaçais, je n’en avais jamais entendu parler, mais le rap du peu que j’en avais entendu, n’était définitivement pas le genre de musique que j’appréciais. C’est à ce moment là que j’ai commencé à ressentir une présence presque pesante derrière mon dos. - Ava, Esther ? Qu’est-ce que vous cherchez ? La voix familière qui nous interpella nous fit sursauter toutes les deux, et nous avions parfaitement conscience que notre réaction était bien trop suspecte. Ishmaël nous observait en fronçant les sourcils. - Esther voulait me montrer le représentant des collectionneurs avec qui elle a parlé, il portait des chaussettes “persistance de la mémoire”, t’y crois toi ? Bafouer cette oeuvre d’art pour y mettre ses pieds ? Ishmaël n’a pas insisté et j’ai bien senti le soulagement d’Esther. J’avais toujours été très bonne menteuse, trop peut-être d’ailleurs, ce qui apportait parfois certaines tensions au seins de notre groupe et qui m’avait valu une intégration un peu difficile. “On ne sait jamais quand tu mens et quand tu es sincères”. J’ai vu Ishma’ lancer un regard à sa soeur qui lui a fait comprendre qu’elle lui expliquerait l’histoire du collectionneur plus tard, la vraie histoire, celle qui où il est intéressé par ses oeuvres. Je sais exactement pourquoi elle ne lui en parle pas maintenant, il est suffisamment stressé comme ça, il n’a pas besoin qu’elle en rajoute une couche maintenant, elle lui expliquera tout une fois que le vernissage sera terminé. - J’ai cru voir Syrine ? Qu’est-ce qu’il fait là ? Je me suis volontairement mis en retrait, les questions posées par Esther ressemblaient à des reproches, et je n’avais pas envie de me retrouver au milieu d’une dispute entre les Dahan. - Je l’ai invité.. Professionnellement parlant il a une très bonne vision des.. oh allez Esther, ça fait trois ans tu peux tourner la page.. Je voulais son avis sur mes photos et lui cherche des contacts pour tourner son prochain clip et -- - Je m’en moque du pourquoi tu l’as invité, t’aurais dû m’en parler histoire que je me retrouve pas comme une idiote ! J’ai presque pris mes jambes à mon cou. Esther n’était pas dû genre colérique, mais elle commençait à hausser le ton, et je préférais m’éclipser en espérant qu’ils aient l’intelligence de ne pas se donner en spectacle devant tout le monde. J’avais besoin d’une pause clope alors j’en ai profité pour sortir dehors. La nuit était déjà tombée depuis plusieurs heures et les rues étaient déserte ; l’exposition se trouvait dans un coin calme du treizième et seul le bâtiment où se trouvait le vernissage semblait abrité un peu de vie. Seul un homme au téléphone, un peu en retrait mais sans aucun doute un visiteur, brisait le silence du dehors. J’ai essayé de ne pas écouter la conversation en me concentrant sur ma cigarette que j’essayais d’allumer avec difficulté face au vent frais de ce mois de mai. L’homme raccrocha son téléphone et ma cigarette daigna enfin s’allumer. J’ai inspiré une grande bouffée avant de recracher la fumée avec un certain sentiment de libération. C’est en m'asseyant sur les marches du perron que j’ai remarqué que l’homme en question faisait parti du groupe de Syrine, et qu’il s’agissait en plus de celui qui avait tenté de soutenir mon regard. Dans cette nuit noire, le devant de la gallerie seulement éclairé par les lumières de l’intérrieur que laissé passé les grandes baies vitrés, je me suis laissée surprendre à le contempler d’un peu plus près : monsieur n’était pas désagréable à regarder, avec grands yeux sombres et ses lèvres fines, mais sa barbe et ses cheveux, ce n’était définitivement pas mon style. J’ai tout de même mis quelques secondes avant de réaliser que lui aussi me fixer, le même genre de regard mauvais que je lui avais lancé quelques secondes plus tôt. Je me suis retournée, morte de honte. - Faites ce que je dis mais pas ce que je fais, hum ? Me demanda-t-il d’une voix cassée en s’asseyant à quelques mètres de moi. - Pardon ? Questionnais-je, préférant jouer les idiotes. Il a haussé les épaules, et je lui ai tendu mon paquet de cigarette, plus par politesse et pour changer de discussion que par réel geste de gentillesse. Il a secoué la tête et j’ai rangé mon paquet dans mon sac. - J’ai arrêté. - C’est tout à votre honneur. Qu’est-ce que vous faites dehors alors ? J’ai préféré continuer de jouer le jeu de l’idiote, sachant parfaitement que nous savions tous les deux à quoi nous en tenir, et je pourrais presque dire que j’appréciais le fait qu’il rentre dans le jeu plutôt que de provoquer la vérité. - J’avais besoin de prendre l’air. Il fait trop chaud à l'intérieur, c’est étouffant. J’ai lancé un regard à son entre-jambe, en référence aux photos exposés, et il a laché un rire qui semblait plutôt sincère. - Désolé, vous n’êtes pas vraiment mon genre, dit-il, le sourire aux lèvres. - Vous n’êtes pas le mien non plus, soufflais-je. Il a souri simplement, et un petit silence s’est installé, sans que ce soit gênant pourtant. Il semblait fixer le ciel et les étoiles invisibles à cause de la pollution lumineuse, alors que moi je préférais poser mon regard sur ma cigarette qui se consumait lentement sous mes prises. - Je m’appelle Ken, lacha-t-il finalement. - Pardon ? Je pensais à une blague, mais j’ai tout de suite vu à sa tête qu’il valait mieux que je ne fasse pas de commentaire.. Ava. - Ava ? C’est ton vrai prénom ? - Tu t’appelles Ken et c’est toi qui me demande ça ? Il a eu un grand sourire et j’ai détourné le regard. - Pour une fois que c’est moi qui pose la question.. - Non. - Hum ? - Ava, ce n’est pas mon “vrai” prénom. La réponse paru le surprendre, j’ai lancé mon mégot dans le caniveau et il a semblé réfléchir quelques secondes. - Tu ne me diras pas la vérité je suppose ? - Pourquoi faire ? - Hé, si tu t’appelles Barbie je me moquerai pas. - Peut-être que je m’appelle Eliza.. J’ai vu à son expression que ma référence à Street Fighter semblait le surprendre, mais son sourire me laissait penser qu’elle lui plaisait aussi. Ce n’était pas mon but du tout, mais soit. Il n’a rien répondu, mais a détaché son regard du ciel pour mon visage, mais cette fois ci je n’ai rien dit. Qu’il me regarde, peu m’importe. - Ishmaël, c’est ton copain ? J’ai froncé les sourcils en entendant sa question. - Il ne vous a pas expliqué ? - Non. Il nous a seulement dit que tu es le modèle sur la plupart des photos. Je n’ai pas réussi à retenir mon sourire, contente que mon ami ait préservé cette part de notre intimité, bien que ça n’aurait pas dû me surprendre. Ishmaël n’aime pas trop parler de lui-même, et je savais que cette information qu’il aurait pû très facilement avoué montrait que, bien qu’elle soit terminée, il portait suffisamment notre histoire en estime pour ne pas la divulguer à des inconnus. - Ce n’est pas mon petit-ami. Bizarrement, la révélation n’a pas semblé le surprendre. - Tu es mannequin alors ? - Pas du tout. Je l’étais seulement sous le regard d’Ishma. - Je le comprend. T’as l’allure d’une égérie. J’ai eu l’impression que sa phrase était faite d’un sous-entendu que je ne saisissais pas, et je trouvais ça presque agaçant. Mais je n’ai rien ajouté, acceptant le compliment sans en discuter et laissant le silence s’installer, le même silence sans gène que quelques instants plus tôt, le même le genre que je partageais régulièrement avec Ishmaël, avant. Un frisson a parcouru mon dos à cette pensée, et je me suis levée pour retourner à l'intérieur. - Bonsoir Ken. - Bonsoir Ava. J’ai franchi la porte d’entrée de la galerie au moment où Syrine et l’autre garçon en sont sortis. CHAPITRE II Ma robe bleue nuit moulait mon corps bien plus que je ne l’aurais voulu, et je commençais sérieusement à regretter mon choix de tenue, d’autant plus que la couleur n’allait vraiment pas avec l’éclairage de la boîte de nuit qui la rendait noire, et donc tout à fait banal. J’essayais de me consoler en me disant que cette soirée n’était pas si génial que ça : le dj semblait prendre plus de plaisir que ceux qui essayaient tant bien que mal de suivre le rythme sur la piste de danse, et les boissons étaient vendues bien trop chère pour que l’on puisse réellement en profiter, même les garçons choisissaient bien la fille à qui ils allaient proposé un cocktail de peur de perdre de l’argent pour rien ; alors évidement, je n’avais eu le droit qu’à un pauvre verre de limonade offert par le frère de Sibelle et Mervé, et d’une vodka tonic que j’avais fini par m’acheter avec le peu de monnaie que j’avais emporté. - Je te promet que c’est la dernière fois qu’on suit Erol dans ses plans foireux, cracha Sibelle alors qu’on s’engouffrait toutes les trois dans les toilettes de la boîte de nuit. - Tu m’étonnes que l’entrée soit deux fois moins cher que les autres boîtes parisiennes.. enchaîna sa soeur en commençant à sortir son mascara pour une retouche. - Y a pas moyen de lui demander remboursement ? Ou de nous payer autre chose qu’un pauvre verre de limonade ? Demandais-je pour enfoncer les arguments. - Vous êtes venues ici pour l’ambiance ? Questionna une jeune blonde qui tentait de redonner vie à sa coiffure. - Un ami nous a conseiller l’endroit.. informais-je. - Il ne doit pas être un bon ami alors. - Pas vraiment non.. 6 euros pour une vodka tonic ? Même sur les champs c’est pas aussi cher ! Faut faire quoi, passer sous le bar pour avoir un prix convenable ? - Crois moi, y en a qui ne se gène pas, intervient une autre fille que je n’avais pas vu et qui visiblement, attendait que son vernis sèche. - C’est l’endroit parfait si t’es déjà raide morte ou que tu t’es fait refoulé des autres boîtes alentours, mais ce n’est définitivement pas mon premier choix, repris la blonde. C’est à ce moment là qu’une jeune fille, peut-être un peu plus jeune que nous, entra dans la pièce, le visage livide et une expression indéchiffrable sur le visage. Nous avons arrêté notre conversation pour l’observer, lui laissant même une place à l’un des lavabos. Elle se regarda longuement dans le miroire et se passa un peu d’eau sur la nuque sans que ça ne change quoi que ce soit à son état. Je voyais ses genoux trembler, et l’on s’est tous regardé : en un clin d’oeil, on avait tout compris. Je crois que c’est ce que je préférais dans les boîtes de nuit ; je n’avais jamais été très amusé par le fait de danser des heures sur des musiques qui écorchaient mes tympans et dans des chaussures qui bousillé mes pieds, et je n’aimais encore moins dépenser trois jours de travail pour deux verres d’alcool, mais par contre, les toilettes des filles, c’était ce que j’appelais le paradis. Cet endroit magique où les stéréotypes que véhicules notre société n’existent pas. Ici, personne n’était traité de pute pour avoir sucé un mec, personne ne crachait sous sa voisine parce qu’elle porte une robe similaire à la notre. - Ok ma jolie, respire on va s’occuper de toi ! La fille au vernis semblait savoir parfaitement comment gérer la situation, elle s’était mise derrière la jeune fille et l’avait attrapé par les épaules et la forçait à faire des exercices de respiration pour se calmer. - Tiens, prend ma robe, elle mettra tes seins en valeurs ! La jeune blonde avait déjà enlevé sa robe pour pouvoir l’échanger. - Il s’appelle comment ? Demanda Sibelle tout en sortant du maquillage de son soutient gorge, tentant de savoir quel rouge à lèvre irait le mieux à notre protégée. - Ylias.. souffla-t-elle. Un “aaah” de satisfaction sorti de nos lèvres, heureuse de connaître un peu plus sur ce garçon. Nous étions toute passée par là, notre première fois, le premier garçon que l’on a embrassé, aimé peut-être.. et c’est vrai que nous n’en gardions rarement un bon souvenir, et peut-être que c’est ça qui nous poussait toute à vouloir aider les plus jeunes : les garçons se pensent infaillible mais c’est bien souvent nous qui rattrapons les mauvais coups. Totalement métamorphosé en à peine cinq minute, notre protégée avait à présent une robe moulante qui remontait ses seins, un rouge à lèvre qui mettait ses lèvres en valeur, une nouvelle coiffure, et une confiance presque retrouvé. - Surtout, tu n’oublies, répéta la fille au vernis qui semblait s’appeler Vanessa, tu es une femme, tu es une warrior, tu as le pouvoir, tu es forte, on croit en toi, ce Ylias tu l’as dans la poche, tête haute, regard fatale, voilà ma belle, tu vas l’avoir ! - Oh, et prend ça ! Je sortis un préservatif de mon soutien-gorge pour le tendre à la jeune fille (Aline si j’avais bien entendue, qu’elle prit avec un sourire gêné). Aline prit une profonde inspiration avant de sortir des toilettes la tête haute, le regard fier, et avec une confiance retrouvé. Je continue de croire que si tout le monde se comportait comme les filles saoul des toilettes de boîte de nuit plutôt que d’accepter les stéréotypes de la société qui veut que toutes les filles se détestent et soient garce entre elle, le monde s’en porterait bien mieux. - Les filles, gardez ça pour vous mais.. Vanessa s’éclipsa dans un des toilettes pour en revenir avec un bouteille d’eau, je me suis fait offrir ça par le barmaid. Dans un endroit comme celui-là, les bouteilles d’eau n’étaient jamais des bouteilles d’eau. [ … ] - Ava ! Je crois que la voix d’homme a prononcé mon prénom plusieurs fois avant que je réalise enfin que je m’appelais Ava, et que c’était donc à moi qu’il parlait. Mais je n’ai pas arrêté de danser pour autant. Etant donné que je comprenais pas du tout ce que me voulait ce jeune homme, j’ai attrapé sa main pour qu’il danse avec moi : ses pas étaient mal assuré, et je voyais très clairement sur son visage qu’il n’aimait pas danser, ce qui pourtant, ne m’a pas du tout empêché de me déhancher à riant comme une gamine. L’alcool que nous avait passer Vanessa dans les toilettes était bien plus fort que je l’aurais pensé, et j’en avais perdu toute notion du temps, tellement que je n’étais même plus sûr d’être dans la même boîte de nuit ni même que ce soit passé ce soir-là. A vrai dire, je m’en moquais complètement. Le dj passait une musique sur laquelle je dansais quand j’étais encore au collège, et bien qu’elle soit totalement démodé, la nostalgie m’obligeait à me donner à fond, c’est à dire à sauter jusqu’à en perdre un poumon. Le garçon a hurlé quelque chose et je lui ai fais signe que je ne comprenais pas ce qui a paru le désespérer un peu. - Je suis Syrine ! - Enchanté Syrine ! - Un ami d’Ishmaël ! - Enchanté Ishmaël ! Il a rigolé et je n’ai pas trop compris pourquoi. J’ai attrapé sa main pour qu’il saute en rythme avec moi pendant que je hurlais le refrain dans un anglais approximatif, mais il n’avait vraiment pas l’air amusé à l’idée de montrer qu’il a got du feeling ouhoouhou. - Tu te souviens de moi ? J’étais au vernissage et-- Mes sauts non contrôlés m’ont poussé contre un homme qui m’a regardé avec des grands yeux. Je me suis arrêté quelques secondes avant de reprendre, et l’homme a rigolé, se métant lui aussi à sauter au même rythme approximatif que moi. J’ai explosé de rire en hurlant les paroles du refrain et l’homme fit de même, oubliant complètement Syrine. [ … ] Ma gorge était sèche, et j’avais tellement transpiré à sauter partout qu’il me faudrait l’équivalent de trois mois de douche pour ressembler à quelque chose. Je me suis dirigée vers le bar dans l’espoir d’avoir quelque chose à boire, mais rien en dessous de trois euros, et je n’avais que des capotes à offrir et un vieux baume à lèvre à la vanille que le barmaid à refuser sans même vouloir discuter. - Une eau à la menthe pour la demoiselle s’il vous plait. La musique avait suffisamment abîmée mes tympans pour la soirée, et l’alcool embrumé trop ma vue, pourtant j’étais certaine de connaître la voix qui venait de commander pour moi. Une voix cassée, presque amusée. L’homme faisait à peine une tête de plus que moi (et ça parce que j’étais plutôt petite malgré mes hauts talons) et j’avais l’impression d’avoir déjà vue sa veste noire quelque part. - T’as pas chaud avec ta veste ? Demandais-je, persuadée que c’était la meilleure chose à dire, là, maintenant, tout de suite. - C’est toi qui me donne chaud, bébé. Souffla-t-il en rigolant, comme si j’étais censée comprendre un sous-entendu, une blague dont j’étais la seule à connaître. Sobre, je n’étais pas très douée pour comprendre les paroles à double sens, alors saoule, ce n’était même pas la peine que j’essaye. - Ah mince, pardon. Il a rigolé encore une fois, et pourtant il n’y avait rien de drôle, mes excuses étaient sincères. Le barmaid a servi mon verre d’eau à la menthe, que j’ai siroté à la paille en fermant les yeux, comme si j'atteignais enfin la délivrance. La sécheresse dans ma gorge s’en alla, et j’avais presque l’impression de retrouvé un semblant de cohérence entre mes pensées et le monde qui m’entourait. - Excuse moi il est quelle heure ? - 2 heure du mat’. - On se connaît ? Je t’ai déjà vu nan ? - Au vernissage de Syrine, je suis Ken. - Ah. D’accord. J’ai continué de siroter mon verre, cherchant ce Ken dans mes souvenirs, mais rien. Mes pensées refusaient d’avoir un sens et l’accès à ma mémoire semblait être bloquée par la musiques qui occupait toute la place dans mon cerveau. - Tu te souviens de Syrine ? - La Syrie ? - Nan, Syrine ! - Je suis très nulle en politique.. Avouais-je, pas certaine que sa technique de drague soit très efficace. Visiblement, il y avait quelque chose que je n’avais pas compris, et j’étais presque certaine que ça avait avoir avec le dj qui augmenter le son à chaque nouvelle musique plutôt qu’à mon taux de vodka dans le sang. Le Ken en question attrapa ma main, m'amena dans un coin presque plus tranquille, à l’écart des basses où se trouvait plusieurs tables toutes occupées. - Syrine, c’est lui. Il me montra l’homme de tout à l’heure, celui qui avait essayé de danser avec moi et que j’avais même complètement oublié. Je me sentais un peu idiote et j’essayais de me convaincre qu’ils étaient tous aussi saoul que moi, et qu’ils auraient donc tous oublié demain. D’ailleurs, je n’essayais même pas de détailler le petit groupe entassé sur les canapés et autour de tables rassemblées. Je n’aimais pas attirer l’attention, encore moins quand je n’étais pas capable de me contrôler. - Salut Syrine ! J’essayais de me comporter de façon convenable et j'espérais y arriver plutôt bien. Ken avait repris sa place parmi son groupe, et Syrine s’était poussé pour me laisser un peu de place sur la banquette. J’essayais tant bien que mal de suivre ce qu’il me racontait à propos d’une maison, puis de ma maison, et d’Ishmaël, et d’un clip aussi, mais vraiment, j’étais incapable de suivre quoi que ce soit de son histoire. Pourtant, je savais que j’étais très douée pour faire croire que j’écoutais attentivement quelque chose, et je crois qu’il n’a absolument pas vu que je n’avais en réalité rien écouter de ce qu’il me racontait. Ce n’était pas faute d’essayer ; Syrine avait cette petite lueure dans les yeux, celle que je recherche systématiquement chez les personnes que je rencontre, la petite étincelle de passion pour quelque chose et quelqu’un, ce petit truc qui fait que chaque être est différent. Je savais que Syrine m’expliquait quelque chose qui lui tenait à coeur et que demain au réveil je me détesterai de ne pas avoir prêter suffisamment attention à ses paroles, et à son histoire. - Tu penses que ça serait possible ? Ça t’intéresserait ? - Oui oui bien sur ! Répondis-je tout sourire, bien que je n’avais aucune idée de ce que je venais d’accepter, de toute façon, ça ne pouvait pas être trop horrible. - Génial ! Donc, lundi, est-ce que ça t’irais ? - Euh.. une part de lucidité s’est soudainement emparée de moi, et trois secondes de réflexion intense m’ont permis de minimiser ma réponse : attend, tu veux pas qu’on en rediscute, parce que demain au réveil je suis pas bien certaine de me souvenir de notre conversation ! J’ai pris une serviette en papier qui traînait sur la table et je la lui ai tendu. Il a semblé comprendre et a sorti un stylo pour écrire son prénom, son numéro de téléphone et une date, le tout agrémenté d’un “urgent” en majuscule soulignées. - Génial merci ! J’ai plié la serviette que j’ai glissé dans mon soutien-gorge, le genre d’endroit secret qui me sauve la vie en soirée quand on ne peut pas prendre de sac et que les couturiers n’ont pas encore pensée à l’idée génial de mettre des poches dans des robes. - Tu me rappelles demain alors ? - Promis j’oublierais pas ! Bien sur que si, j’aurais oublié, mais je tomberais forcément sur la serviette un jour où l’autre en sachant très bien que l’idée vient de moi, et je serais donc obligé de le rappeler s’il n’a pas harcelé Ishmaël avant. [ … ] - Putain Ava ça fait trois heures qu’on te cherche partout ! Erol avait l’air vraiment énervé, et comme je ne l’avais jamais vu aussi énervé, je me suis mise à rire, ce qui l’a encore plus énervé. Il m’a attrapé la poignet malgré mes protestations, et j’ai entendu la voix de Vanessa hausser d’un ton sans réellement comprendre ce qu’il se passait. La musique était beaucoup trop forte et ma gorge me brûlait, pire encore, j’avais l’impression que tout tournait autour de moi. L’effet de l’alcool redescendait doucement, et je pouvais presque sentir le mal de crâne arrivé. - C’est bon Nessa, je le connais ! Elles sont où Mervé et Sibelle ? - J’en sais rien ! Elles sont pas avec toi ? - J’en sais rien ! - Oh bordel, je vous déteste.. Et je savais très bien qu’à cet instant, il le pensait très fort. Il a repris mon poignet et cette fois ce je l’ai suivi jusqu’au dehors. Il faisait encore nuit, mais la rue était bien éclairé par des lampadaires tous les deux mètres et par des projecteurs à l’entrée de la boîte. Erol a crié quelque chose comme bouge pas je reviens, ou comme rentre je reviens plus tard, je n’ai pas trop compris. La différence entre le bruit de l'intérieur et le calme du dehors était presque insupportable, mes oreilles bourdonnaient et même mes yeux avaient du mal à s’adapter au changement d’éclairage. C’est en avançant sur le trottoir que j’ai réalisé que je n’avais plus mes chaussures et que j’avais oublié ma veste je ne sais pas trop où. La descente promettait d’être très douloureuse, et j’ai préféré m’asseoir sur un potelet métallique suffisamment large pour ne pas être désagréable en attendant le retour d’Erol. - Ava ? Tu vas pas vomir au moins ? J’ai même pas eu le courage de relever la tête pour voir mon interlocuteur, je me suis contentée d’hocher la tête pour dire que non, ça va, je vais peut-être mourir d’un mal de crâne et perdre tous mes sens, mais vomir ça non. - Tien, de l’eau, elle est un peu chaude mais je crois que c’est mieux que rien. J’ai attrapé la bouteille sans trop réfléchir et bu plusieurs gorgées, suffisamment pour ne plus avoir l’impression de respirer de la laine de verre. Mes yeux commençait à s’habituer à la lumière aveuglante des spots d’entrée, et j’ai pu remarquer sans problème que la bouteille appartenait à Ken. L’alcool commençant à se dissiper, je n’ai pas eu trop de mal à le remettre en contexte : Ken, ami de Syrine, ami de Ishma. Je n’avais pas besoin de plus d’information, ça me suffisait. - Ca va aller ? .. Tu rentres comment ? .. Tu veux que je te raccompagne ? J’étais incapable de répondre à ses questions, même ma tête refusait de faire un signe, et si Ken n’essayait pas de me tenir la conversation, je me serais probablement endormie en plein milieu du trottoir. Alors forcément, quand il m’a aidé à me relevé, je n’ai pas vraiment cherché à comprendre ce qu’il se passait. - Eh Ava ! C’est en entendant la voix d’Erol que j’ai compris que je venais de créer des problèmes. Mon bras s’accrochait à celui de Ken qui essayait tant bien que mal de me maintenir debout. Je crois qu’il aurait très facilement pû me porter, mais qu’il ne voulait pas que ses gestes soient mal pris au vu de mon état. - Qu’est-ce que tu fous, t’es qui toi ? - Oh calme toi ! Je la connais, je suis un ami. - Mon cul ouais ! Dégage ! - Mais t’es sérieux mec ? - Dégage je t’ai dis ! - Et t’es qui toi ? - Ava tu le connais ? J’avais l’impression étrange d’assister à la scène de façon extérieur, mon corps était là mais mon esprit n’imprimait pas la situation, et je n’ai pas répondu, incapable de comprendre que c’était bien à moi que l’on parlait. Les mots échangeaient ensuite me paraissait tout aussi flou, d’autres personnes sont arrivés, j’ai senti les bras de mes amies Mervé et Sibelle me soutenir, j’ai même eu l’impression de voir Vanessa, par contre je suis certaine d’avoir vu Syrine et entendu le prénom d’Ishmaël, mais j’ai cru voir Esther dans le groupe de garçon qui s’était avancé et là j’ai compris que je divaguais complètement. - Wow Ava qu’est-ce que tu nous fais là ? - T’as mis quoi dans la bouteille ? - C’est de l’eau ! - Erol arrête ! Je n’étais même plus capable de distinguer les voix, mais j’avais suffisamment de lucidité pour être certaine de n’avoir aucune envie d’être à l’origine d’une bagarre, j’ai assez donné sur ce terrain là. J’ai attrapé une main qui devinez être celle de Sibelle et je me suis éloignée du groupe sans vraiment savoir où j’allais. Mervé a semblé rattrapé nos pas puisqu’elle nous a dirigé vers la station de métro la plus proche en hurlant quelque chose à son frère. Je ne sais plus vraiment comment on est arrivée à attendre devant le quai, ni même si nous étions sur le bon, mais j’avais un vague souvenir d’escalier descendu sur les fesses et d’escalade de tourniquet, et j’étais pratiquement certaine que mon corps serait recouvert de tache violettes d’ici trois quatre heures. Au point où nous en étions, nous nous sommes assises à même le sol. Nos robes étaient tachés de nos cascades, et j’étais presque sûre que la tache étrange sur le décolleté de Mervé était en réalité du vomis, et je crois que la mienne avait été arrosé de bierre. - Le premier métro arrive dans vingt minutes.. souffla Sibelle. - J’abandonne, laissez moi commencer ma nuit ici.. marmonnais-je avec difficulté - Erol va nous tuer.. - C’est lui qui nous a emmené là, retorqua sa soeur. Un silence c’est installé durant quelque seconde avant que je me mette à rire. Le genre de fou rire contagieux et inarrêtable qui empêche de respirer et fait mal aux côtes et aux abdos. Sibelle en roulait par terre et je voyais Mervé essuyer des larmes pendant que j’essayais de me calmer en vain. Je n’avais pratiquement aucun souvenir de ce qui c’était passé quelques heures au par avant, mais ce fou rire me permettait d’affirmer sans difficulté que j’avais passé une très bonne soirée. CHAPITRE III J’avais toujours détesté être réveillée par la lumière aveuglante, et même si le soleil se faisait rare à Paris ces derniers temps, ce matin-là n’échappait pas à la règle. A cause de mon esprit encore embrumé et de mon mal de crâne violent, j’ai hurlé quelque chose qui ressemblait à “maman éteint la lumière” avant que la réalité ne me frappe de plein fouet. J’étais allongé sur le sol de mon appartement dans une tenue de soirée, et regarder le plafond suffisait à me donner le tournis. J’avais l’impression de sentir un mélange écoeurant d’alcool et de tabac ajouter à ça un violent mal de crâne, il ne m’en fallait pas plus pour avoir la nausée. J’entrepris de ramper non sans difficulté jusqu’à la salle de bain histoire de me retrouver le plus proche possible des toilettes en cas de catastrophe. Une fois arrivé là-bas, j’en profitais pour me déshabiller, et c’est là que je me rend compte du nombre de chose que peux contenir un soutien-gorge en plus de mes seins : de la monnaie, une paille, des capotes, un bouchon de bière, une serviette en papier.. je laissais mes trésors sur le sol, et après avoir été certaine que je n’allais pas vomir, je me suis traînée jusqu’à la douche. Un indice de mon état : j’étais tellement à l’agonie que je n’ai pas attendu les quinze minutes réglementaires pour avoir un semblant d’eau chaude, j’ai supporté l’eau glacée sans râler, découvrant même un certain bien fait pour mon mal de crâne. Je tentais de faire disparaître les odeurs qui collaient à ma peau ainsi que mon maquillage qui avait collé sur mon visage tout ça en essayant de ne pas savoir ce qu’était la chose visqueuse qui se trouvait dans mes cheveux : mon expérience m’avait appris que ce que mon cerveau avait oublié des soirées que je passais .. valait mieux être oublié. Je n’avais pas de sang sur le corps, et c’était bien suffisant pour que je ne me pose pas de question. C’est seulement après avoir vidé mon gel douche à la vanille (le même que j’utilisais quand j’avais cinq ans, on ne change pas les vieilles habitudes) que je me suis jetée sur ma boîte à pharmacie à la recherche d’un cachet d’aspirine. Je me suis contentée de m'enrouler dans une grande serviette, les cheveux mouillés à l’air libre, pour aller jusqu’à la cuisine à la recherche d’un verre d’eau et de quoi me remplir l’estomac. Je me suis contentée de fruit par peur que mon estomac ne supporte pas, et c’est seulement une fois après avoir repris mes esprits que j’ai eu le courage de consulter mon téléphone. J’avais toujours mis un point d’honneur à sortir sans téléphone : déjà c’est un encombrement en moins, et de plus, ça m’évitait d’enregistrer le numéro de téléphone d’inconnus que je devais forcément rappeler la veille, et surtout ça m’empêcher d’appeler des personnes que j’avais définitivement rayer de ma vie par simple élan de nostalgie. Jusqu’ici je n’avais jamais regretté ma décision. J’avais seulement quelques appels manqués, presque tous d’Erol pendant la soirée (j’essayais de me souvenir mais je ne voyais vraiment pas pourquoi il avait voulu me joindre), Sibelle m’avait laissé un message incompréhensible pour me dire qu’elle et sa soeur était bien arrivée chez elles, et un sms envoyé par Monsieur Alphonse Jourdain de L’Etoille pour que je lui confirme mes horaires de la semaine prochaine. Je décidais d’envoyer d’abord un sms à Sibelle, quelque chose qui ressemblait à “je suis toujours vivante mais plus pour longtemps, je veux des roses rouges pour mes funérailles”, j’ai volontairement ignoré les appels d’Erol qui ne devait même plus me chercher à l’heure qu’il est, et je décidais de remettre ma réponse à Alphonse à plus tard, quand mon cerveau sera suffisamment opérationnel pour réfléchir. J’ai commaté un moment dans mon canapé, incapable de regarder la télévision, préférant même une petite sieste. Tout mon corps était douloureux et à chaque fois que je l’examinais je découvrais un nouveau bleu et de nouvelles bosses, voir même quelques égratignures. Je n’essayais même pas de comprendre où avaient disparu mes chaussures, espérant que Sibelle ou Mervé les avait récupéré ou même mieux, emprunté, mais je n’avais pas trop d’espoir. Le soleil se couchait presque quand j’ai enfin décidé que mon mal de crâne s’était suffisamment atténué pour que je m'adonne aux tâches ménagères. Mes trésors de la veille n’était pas bien glorieux : j’ai remis la monnaie dans un petit bol sur mon meuble d’entrée, les capotes dans mon porte feuille, la paille et le bouchon dans ma boîte à chaussure spéciale “trésor de soirée” (très longue histoire, disons que des trésors restent des trésors), et la serviette en papier attira mon attention. L’écriture était presque illisible, seul le URGENT repassé à plusieurs reprises était déchiffrable. Il me fallu un peu de réflexion pour me décider entre les 2, les 1 et 7 ainsi que les 5 et les 6. Un numéro de téléphone d’un certain Syrine. Ma cervelle un peu embrumé à tout de même tilté immédiatement : Syrine, l’ami réalisateur d’Ishmaël. J’avais vaguement le souvenir de l’avoir rencontré en boîte de nuit, mais rien de suffisamment concret pour savoir comment son numéro de téléphone c’était retrouvé dans mon soutien gorge. J’ai tout de même hésité quelques minutes avant de composer son numéro. Deux tonalités sont passées avant qu’il ne décroche : - Allo ? Répondit une voix cassée presque endormie. - Allo Syrine, c’est Ava. - Oh.. Ava, je l’entendis se racler la gorge et essayé de se donner une meilleure contenance, comment vas-tu ? - Euh difficilement, disons que l’on fait aller, je ne te dérange pas ? J’ai retrouvé ton numéro, mais je me souviens pas bien pourquoi je l’ai, il s’est retrouvé sur un bout de papier avec le mot urgent alors.. - Oui oui t’as bien fait de rappeler ! Par contre je viens de me réveiller, je t’avoue que c’est pas trop le moment.. est-ce que je peux te rappeler un peu plus tard ? Demain matin peut-être ? - Bien sur pas de soucis ! Syrine avait raccroché rapidement, et les voix en arrière fond me laissait sous entendre que mon appel tombait vraiment mal, mais je m’en fichais, c’est lui qui voulait que l’appel, pas l’inverse, je n’avais donc aucune raison de me sentir mal. Je suis parti m’habiller, ou plutôt porter une tenue plus convenable qu’une simple serviette de bain, un t-shirt et un short de nuit étaient bien suffisant pour le reste des taches que j’avais à accomplir dans la journée, c’est à dire rappeler Alphonse et relire mes cours de la semaine. J’ai repoussé la dernière tache, pas certaine que mon cerveau ait réellement envie de s’occuper d’histoire bien que je n’avais pas réellement envie de faire face à Alphonse cependant. J’appuyais sans grande envie sur le nom enregistré dans mon répertoire de téléphone, sachant très bien qu’il ne répondrait à la dernière tonation, une simple façon de faire croire qu’il était occupé alors qu’au pire des cas, il jouait au poker avec ses associés, rien de plus. - Bonjour, Monsieur Jourdain de L’Etoille ? Mademoiselle Costinho à l’appareil, je-- - Octavia, oui bien sur, bonjour, j’attendais ton appel. Les horraires tes conviennent j’espère ? Je sais que c’est bien plus que ce que ton contrat exige, mais je suis en déplacement pour les deux semaines à venir, Céline est en arrêt et Damien est en examen, je compte sur toi ! - Vous noterez mes heures en plus alors ? Il a rigolé sans se retenir, et j’ai compris qu’il ne s’attendait pas à ce que j’utilise mes droits. La fatigue, les nausés dû à la veille et mon manque de patience n’était pas un bon cocktail et j’avais décidé il y a plusieurs mois de ça que j’arrêtais de me faire marcher sur les pieds. - C’est un oui ? - On verra ça Octavia, si j’ai de bons retour ce -- - C’est donc un oui. - Très bien, j’espère n’avoir rien à redire sur ton travail-- - Jamais, Monsieur Jourdain de L’Etoille. Vous ai-je déjà mise dans l’embarra ? C’est qu’il me semblait. - Très bien Octavia. Je te souhaite une bonne semaine alors. - À vous aussi, Monsieur Jourdain de L’Etoille. Il a raccroché, et si mon portable ne m’était pas aussi précieux je l’aurais probablement fait exploser contre un mur pour extériorisé ma rage. Je détestais cet homme, je l’avais toujours détesté. Mais je n’avais jusqu’ici trouver aucun travail mieux payé tout en étant moins ingrat, alors je prenais sur moi. Alphonse Gontran Louis Maris Jourdain de L’Etoille troisième du nom, était un homme imbu de lui même, dont le mépris lui enlevé tous son charme. À peine la trentaine, il s’était contenté de ramasser la fortune de son père à sort ainsi que son entreprise de luxe et tous ses biens immobilier, attendant que sa chère mère crève, et bien sur, il employait de jeune étudiant pour lui tenir compagnie, il faut dire que ne rien faire est un travail à plein temps. J’essayais de ne pas ruminer ma rage, j’aurais une dure semaine et j’aurais dû mal à jongler entre mes heures et mes cours, mais je serais payée en plus et je pourrais mettre un peu de coté. Je décidais d’ailleurs de me mettre immédiatement à mes cours. Relire mes grands pavés avait le don assez étrange de me permettre de me calmer, malgré l’ennuie de certains sujets. Parfois, j’en oubliais même le temps, restant jusqu’à plusieurs heures sur le même cahier à relire un cours qui me passionne, mais la réalité était toujours très forte pour me rattraper. Cette fois ci, c’est la sonnerie de l’interphone qui me sortit de mes lignes d’écriture. Je n’attendais personne en particulier, mais j’avais pourtant une idée de qui pouvait venir sans prévenir à une heure pareille. J’ai ouvert la porte de l’immeuble sans même prendre le temps de saluer, de toute façon je connaissais assez bien Diane pour savoir qu’elle ne s’embêterait pas de ce genre de formalité, et je savais également très bien qu’elle ne s’embêterait pas à frapper à la porte d’entrée et à attendre que je lui ouvre. C’est d’ailleurs sans surprise qu’elle a débarqué dans mon salon quelques minutes après les bras chargés de sac en tissus recyclé par ses soins, un patchwork de vieux jeans et de vieux draps, le résultat n’était pas une très grande réussite pour moi, mais selon elle : “on y voit que du feu, c’est écologique, et ma banquière est contente aussi”. - Ava c’est quoi cette tenue ! - Bonjour Diane. Est-ce que tu peux baisser d’un ton s’il te plait.. - Oh pardon. Ton short est immonde, dommage que tu sois pas ma meuf, je me serais fait un plaisir de te l’enlever. J’ai soupiré avec un demi-sourire en rangeant mes classeurs sous la table basse. Diane avait tout du cliché que l’on peut se faire de la parisienne ; toujours bien habillée, cet air nonchalant et légèrement hautain qui ne la quitte jamais, fille unique, un appart’ payé par papa et maman dans le quatrième qui travaillent on ne sait pas trop où puisque leur métier comporte trop de qualificatif du genre directeur, artistique et communiquant et que lorsqu’on lui pose la question elle répond “ça consiste à plein de chose différents”. Diane a une vie saine et bien rangée, et elle place son avenir au même plan que ses amis, c’est pour ça qu’elle ne vient presque jamais au soirée, et encore moins dans les boîtes de nuit un peu étrange du quinzième que seul Erol connaît. - Combien de verres ? Sa question m’a fait prendre conscience que je suis un plus mal en point que je ne le pensais. D’ailleurs j’ai répondu par un rire franc parce que.. c’est quoi cette question ? Il n’y a que Diane et son “je ne dépasse jamais un verre de vin blanc, voir, au grand maximum, deux verres de kir, et dans les grandes occasions, la flûte de champagne”. - Je vois.. et bien tu as de la chance que ta meilleure amie est venue faire ses courses dans le coin, d’ailleurs je te conseille l’épicerie bio au coins de ta rue, génial, une valeur sûre. - D’accord super j’y penserais.. Je ne savais même pas qu’il y avait une épicerie bio au coin de ma rue, mais Diane semblait suffisamment heureuse de ma réponse pour s'éclipser dans la cuisine qui se trouvait dans mon angle de vue. Je savais très bien qu’elle allait encore me préparer un de ses remèdes étranges aux plantes que je détesterai boire mais dont je vanterais les bienfaits à Sibelle et Mervé dès demain. J’ai probablement dû m’assoupir puisque quand Diane est revenue avec un plateau repas j’ai eu du mal a émergé. J’ai dû me faire violence pour m’asseoir (plus ou moins..) et lui laisser un peu de place dans le canapé. Le plateau contenait plusieurs bol au contenue étrange et je l’ai laissé m’expliquer mais le mélange gueule de bois et manque de sommeil m’empêchait de réellement comprendre. - Tisane gimgembre, citron, miel, pour les nausées et les étourdissement ensuite là, purée de banane avec du sucre de canne pour le potasium, je t’ai même fait une bouillotte, et bien sur, une bouteille d’eau pour te réhydrater. - C’est quoi ces trucs-là ? - Oh ça c’est pour moi ! Oh me regarde pas comme ça, j’ai pas fait de folie hier, je peux me mettre bien aujourd’hui. D’ailleurs soit heureuse que je ne t’en veuille pas de ton état semi-comateux, parce que ça devient presque vexant de devoir te remettre sur pied à chaque fois que je viens chez toi. Je me suis contentée de faire une moue boudeuse pendant qu’elle insérait un de ses dvd dans le lecteur. Diane était certes, un peu spéciale, elle n’en restait pas moins une très bonne amie, le genre qui vient toujours ramasser mes morceaux dans les pires des situations. Et bien qu’elle soit très secrète et qu’elle donne parfois l’impression d’être distante, je sais très bien que je peux compter sur elle à n’importe qu’elle occasion. J’ai reconnu l’échelle de jacob sans même voir la pochette du DVD. - Encore ! - Eh, pas de commentaire, mange, bois, regarde, c’est le meilleur film de suspense de tous les temps ! - Même le meilleur film de suspense de tout les temps perds tout son suspense quand on l’a vu six cent fois et que l’on connaît le retournement de situation par coeur. - Ne le regarde pas pour l’intrigue, regarde pour la beauté du cinéma. - Il date de 1990, de quelle beauté tu-- - Chut ça commence ! Sans surprise, bien que la gueule de bois m’empêche de suivre correctement le film, j’étais prise dedans bien avant la première demie heure, et sursauté à plusieurs reprises et j’ai même du retenir un cris J’ai failli proposé à Diane de revoir le film en buvant de l’alcool, parce que vraiment, les films d’horreurs du genre en étant saoul ça doit être quelque chose, mais elle me donnait toujours des coup de coudes pour que je finisse ma tisane alors j’ai vite renoncé à l’idée (j’en parlerais aux soeurs Ozturk par contre). Et forcément, c’est à l’un des moments les plus angoissant du film que mon téléphone s’est mis à sonner ; Diane, tellement plongée dans le film a sursauté, renversant le bol de tisane que je tenais dans les mains et que je n’avais toujours pas fini, me brûlant les cuisses au passage. Et s’est confondue en excuse pendant que j’essayais de survivre à une brûlure au troisième degrés en épongeant ma peau et le canapé avec un vieux plaid qui traînait, mais elle s’est mystérieusement arrêté. - Quoi ? Qu’est-ce qu’il y a ? Toi aussi tu vois des trucs étranges ? Me dis pas que oui, tu connais le film, tu sais très bien comment ça va se finir.. - Non, non ! Tu sais que je n’aime pas intervenir dans la vie privée de mes amies, alors je te laisse lire ton message. - Diane, je n’ai pas de vie privée avec toi.. J’ai souris et elle a haussé les épaules, toute fière. Ce n’était pas un reproche, je n’avais pas vraiment de vie privée avec Diane puisque j’avais pour habitude de ne rien lui cacher, bien qu’elle aimait avoir son propre jardin secret dans lequel je ne forçais jamais l’entrée. Elle mit le film en pause et ralluma la lumière pour que je puisse essuyer le canapé comme il faut, mes cuisses allaient probablement survivre et je devrais laver mon plaid, mais la catastrophe était sous contrôle. C’est seulement une fois tout ça terminé que je pue enfin lire l’objet de notre surprise. - Oh. C’est Syrine. - “Oh c’est Syrine”, nan mais c’est tout ce que tu trouves à dire ? - Ok attend je répond ! .. Alors euh, Syrine, c’est un.. collégue d’Ishmaël et.. Elle a soupiré et à pris sa tête de meilleure amie qui va dire un conseil qui ne va pas me plaire mais qui est pour mon bien, alors je ne lui ai pas laissé le temps de répliquer. - Laisse moi finir ! Ils ne sont même pas amis, ils ont rien à voir. J’ai été au vernissage oui je sais tu m’avais dit de ne pas y aller, mais ça était, il n’y a pas eu de blanc ou de moment de malaise, ça va, mais il m’a présenté à ce Syrine, il est réalisateur je crois, un truc du genre, et je l’ai revu hier en soirée et-- - Attend attend, je reprend : Ishmael t’a présenté à Syrine et tu as vu Syrine hier ? C’est ça ? - Oui, voilà, et je ne sais pas trop pourquoi j’avais son numéro dans mon soutif et, non, arrête, ce n’est pas du tout ça ! Et donc je l’ai rappelé mais il était occupé alors je l’ai rappelé. Voilà. - … T’as appelé un mec qui t’a laissé son numéro dans ton soutien-gorge. - Bah.. C’était marqué urgent.. - Tu n’as absolument AUCUN instinct de survie c’est hallucinant. - ET DONC : là il me demande si on peut se retrouver vers dix heures demain à un café pour discuter. - Tu vas y aller ? J’ai laissé un petit blanc avant de soupirer. Je savais que je ne pouvais pas faire trainer les choses, que ma raison allait forcément reprendre le dessus et que j’allais regretter d’avoir trop réfléchi et de n’avoir rien faire : maintenant je fonctionne au coup de tête. J’ai laissé passé trop de belle chose par peur de ne pas suivre mon instinct. C’est pour ça que j’ai répondu immédiatement au sms sans attendre une seconde de pouvoir assimilé ce que je venais de lire. - Je lui ai dis que j’y serais. Je n’ai pas su déchiffrer l’expression sur le visage de mon ami. J’étais pourtant très douée pour savoir quand quelque chose ne lui plaisait pas et au contraire, je savais très bien quand quelque chose la rendait heureuse. Là, elle semblait évaluer la situation, peser le pour et le contre, et je crois que c’est encore bien pire qu’entendre qu’on a fait une erreur. - Je crois que c’est bien que tu tournes définitivement la page avec Ishmaël. C’est bien pour vous deux, je veux dire. Il faut que tu passes à autre chose. Je dis pas que ce Syrine est une bonne chose, surtout ne me fait pas dire ce que je n’ai pas dit ! Mais c’est un bon début. - Je n’ai pas accepté d’y aller pour ça… - Je sais.. Elle a soupiré en me prenant dans ses bras et je me suis laissée faire. Je détestais parler de sujet et Diane le savait très bien, et je lui en remerciais de savoir quand m’enlacer et quand se taire. Elle était l’amie parfaite, celle qui savait parfaitement où était sa place mais aussi quand intervenir quand il le faut. Alors non, je n’exagerais pas en disant que Diane m’a sauvé la vie plus d’une fois. Je ne saurais dire pourquoi j’ai accepté de voir Syrine, par pur impulsion ou par simple envie d’être désirée, je ne saurais pas trop dire. Je sais très bien mentir aux autres, mais mieux encore, je sais très bien me mentir à moi-même. Et pourtant je ne me faisais aucune illusion, j’étais pratiquement certaine qu’il voulait me voir à propos de son travail puisque c’était par ce biais là que nous nous étions rencontré. J’ai laissé Diane m’enlacer encore quelques minutes avant de remettre le film en route. Je m’occuperais de Syrine demain, pour l’instant je voulais profiter de ma soirée avec mon amie. CHAPITRE IV Le réveil avait été difficile, je n’étais toujours pas totalement remise de la soirée et mon corps comptait bien me faire payer mes frasques. Une douche bien chaude n’avait pas suffit à détendre et j’avais l’impression de découvrir une nouvelles blessures à chaque fois que mes yeux croisaient ma peau : des bleues, des écorchures, des coupures, des bosses.. la totale. Certaines marques étaient même impressionnante et la douleur me renvoyait en flash des images d’un tourniquet de métro. Vraiment, je ne voulais pas en savoir plus. Le soleil n’avait pas l’air décidé de se montrer aujourd’hui ce qui m’arrangeait bien : je n’aurais donc aucun effort vestimentaire à faire et je pourrais cacher mes blessures et garder au chaud ce qu’il me reste de ma dignité. - Bonjour Syrine. Je l’avais reconnu bien avant d’arriver devant le café, c’était l’un des rare client à s’être assis en terrasse malgré le ciel couvert et le léger vent. Par contre, j’étais incapable de reconnaître l’homme assis à côté de lui, pourtant j’étais certaine de l’avoir déjà vu quelque part. - Oh Ava ! Bonjour comment vas-tu ? On est arrivé en avance du coup on a déjà commandé, tu veux quelque chose ? - Un café renversé, merci ! Je l’ai embrassé et fait la bise à son ami en m'asseyant devant eux. Syrine a appelé le serveur pendant que j’essayais de mettre un nom sur le visage du garçon qui n’a pas eu de mal à deviner mon embarra. - Ken, je m’appelle Ken. - Oh oui ! Désolé, ça ne veut vraiment pas rentrer. Il m’a fait signe que ce n’était rien bien que j’ai remarqué qu’il était un peu vexé ce qui est compréhensible, et moi j’ai fait comme si je n’avais pas vu le sourire satisfait de Syrine à côté. Le serveur a apporté mon café et quelques viennoiserie. Je n’avais pas déjeuner avant de venir et j’eue du mal à ne pas me jeter dessus, attendant qu’un des garçon se servent en premier. - Alors, remise de la soirée ? Me demanda Syrine avec beaucoup trop de sous-entendu que je n’arrivais pas à comprendre. J’ai soupiré en voyant leur sourire, visiblement, j’en avais bien trop montré ce soir là. - T’en fais pas, ce qui se passe en soirée, reste en soirée, affirma Ken. - Je suis bien heureuse de l’apprendre ! Finalement j’ai pris un croissant que j’ai déchiré en deux et commencé à manger, seulement pour me donner un peu de contenance. Je commençais à être mal à l’aise, je n’avais même pas pensé que contrairement à moi, eux pouvaient très bien se souvenir de ce qu’il s’était passé. Et surtout, ils avaient l’air de savoir pourquoi j’étais là, alors que j’avais accepté le rendez-vous sans même me poser de question. Nous nous sommes échangés quelques autres banalités pour casser la glace, quelques phrases sur la soirée d’hier (d’eau à la menthe et de DJ déchaîné, j’ai bu mon café sans répliquer) ainsi que sur le temps de Paris et le match de foot qui se joue ce soir. - Ishmaël m’a dit que tu habitais dans une grande maison au XVIème ? Je ne sais pas si c’est l’accent parisien, ou le fait que je sois encore pas très bien réveillé, mais je n’ai pas tout de suite compris que la question de Syrine n’avait pas le même sens dans sa bouche et dans ses oreilles. Et j’aurais probablement dû mettre les choses au clair avant de continuer la discussion. Mais ce n’est pas ce que j’ai fait, mon dernier bout de croissant étant un peu plus passionnant que ce morceau d’histoire de ma vie. - Pas vraiment une grande maison, un château plutôt. - Wow, t’as pas l’allure d’une fille qui vit dans un château.. intervient Ken, remarque idiote que je préférais ignorer. - Tu pourrais la décrire un peu ? En fait je t’explique, on a un projet de clip à tourner pour, au maximum, dans deux semaines. On nous a annulé le lieu qu’on devait avoir et on est vraiment à court de temps, t’es un peu notre seul espoir.. sans vouloir te mettre trop de pression sur les épaules. Peut-être que c’est là que j’aurais dû comprendre qu’on ne se comprenait vraiment pas, mais je n’avais pas vraiment pour habitude de me méfier de tout et de n’importe quoi, surtout si l’histoire en question ne m’impliquait pas. Je lui ai décris la résidence du mieux que je pouvais, m’amusant même à dessiner un schéma qu’il a reproduit en plus grand sur une feuille de papier. Il a commencé à discuter avec Ken de truc plus technique, une histoire de plan séquence et de figurant. Même là mon cerveau n’a pas fait l rapprochement. Et quand il m’a demandé des indications sur les couloirs entre les différentes ailes, je n’ai pas non plus compris que quelque chose n’allait pas dans son raisonnement. - Tout est bon ? - Oui pour moi tout est bon, ai-je répondu sans vraiment comprendre ce qu’il voulait dire. - Pour tout ce qui est technique, ne t’en fais pas, on va gérer ça, dès demain on se débrouille pour le contrat, tu n’auras qu’à signer, le contrat comprendra une assurance, on n’a jamais causé de soucis jusqu’ici mais c’est mieux d’être trop prévenant que pas assez. Au niveau des dates, pour être large le mieux serait de commencer dès le week-end prochain, un peu plus tard ça va vraiment être compliqué, bien sûr c’est selon tes disponibilités mais ta présence n’est pas obligatoire et-- Là, j’ai enfin compris qu’on était pas du tout sur la même longueur. - Attend attend attend ! J’ai posé mon croissant, mon café, j’ai pris une grande inspiration, et j’ai essayé de mettre les choses au clair. On s’était forcément mal compris. Il avait mal compris ce que j’avais dit, et surtout, j’espèrais que ce n’était pas moi qui m’était mal exprimée. Mais plus je cherchais quoi dire et plus je voyais à leur visage qu’ils plaçaient tellement d’espoir au dénouement de ce rendez-vous que ça allait vraiment être compliqué. - De quoi t’es en train de me parler ? J’ai vu Syrine avaler sa salive et Ken passer une main sur son visage, et visiblement, on était tous les trois dans une merde totale. Qu’est-ce que j’avais encore bien pu faire.. - De... ta maison ? - De… ma… maison ? Répétais-je, certaine qu’il y avait effectivement une couille dans le pâté pour reprendre l’expression de Diane. - De quoi on parle depuis tout à l’heure ? T’as vraiment pas décuvé wow, s’il vous plait, une eau à la menthe pour la demoiselle ! Rigola Ken en interpellant un serveur, j’avais deviné qu’il utilisait la blague (que je n’avais pas vraiment saisi d’ailleurs) pour masquer sa gène ou pire, son stress. - Ishmaël m’a dit que-- - Ok. Stop. Temps mort ! J’ai levé les mains pour qu’on reprenne nos esprits deux minutes et qu’on reparte à zéro. - Je vais mettre les choses au clair, annonçais-je, Ishmaël.. je n’ai plus réellement de contact avec lui depuis plusieurs mois, alors je comprend pas trop ce qu’ils vous a dit mais visiblement y a un truc qui ne va pas. Ils se sont regardés et j’ai compris à leur regard que je venais de les mettre dans une situation super compliquée et c’était vraiment insupportable à voir. - Il nous a dit que tu habitais dans une maison suffisamment grande pour que l’on puisse y tourner. - Que j’habitais.. répétais-je en fermant les yeux, mettant enfin le doigt sur le problème. D’accord, deux minutes je réfléchis. Et je n’aurais probablement pas dû ajouter ça, malgré la méfiance, je pouvais voir un brin d’espoir dans leurs yeux, et je savais que je serais obligée de capituler. Mon cerveau tenté de s’organiser, et la menthe à l’eau que m’apporta le serveur au même moment était parfaitement de circonstance, j’avais besoin de sucre et de rafraîchir mes pensées. J’ai commencé à siroté le verre à la paille en faisant comme si je n’avais pas remarqué le sourire de Ken pendant que Syrine attendait patiemment. J’avais finir par conclure que se serait vraiment compliqué, très compliqué même, mais pas impossible. Je n’avais pas vraiment le choix de toute façon et surtout, je n’arrivais pas à trouver un coupable : Ishmaël pour ne pas avoir pris de mes nouvelles ? Syrine pour l’avoir cru ? Moi pour ne pas avoir compris ? Et le pire dans cette histoire c’est que j’avais forcément passer pour la méchante si je faisais tomber leur plan à l’eau, et je détestais cette facette de ma personnalité que voulais satisfaire absolument tout le monde alors que personne ne le mérite vraiment. - Je vais.. d’accord. Je vais me débrouiller. Ils n’avaient pas vraiment l’air convaincu par ma réponse, mais ils n’avaient rien de mieux à faire que de me faire confiance, et moi je n’avais pas trouvé mieux que de me mettre encore dans de nouvelles histoires. J’avais décidément un don pour me créer des problèmes. [...] Je n’avais pas revu Syrine ni son ami depuis notre rendez-vous, mais on continuait de se donner des nouvelles par sms ; lui m’informant de l’annoncer du projet, moi en assurant que j’avais la situation en main alors que ce n’était pas le cas du tout. J’étais dans la ligne 6 depuis un bon quart d’heure à essayer de trouver les bons mots pour le discourt argumenté que je m'apprêtais à faire au lieu de relire mon cours de la matinée. Je détestais ces situations, celles dans lesquelles tu te mets sans le vouloir et qui t’apportent plus de problèmes que de bien fait. C’est vrai, qu’est-ce que j’y gagnais moins dans cette histoire ? Je commençais à regretter d’avoir accepté de m’y impliquer, j’aurais dû refuser dès le début, et quand je dis dès le début, c’est que je n’aurais pas dû accepter de mettre le numéro de téléphone d’un inconnu dans mon soutien-gorge pour commencer. J’ai commencé mes exercices de respiration relaxatives en changeant de ligne pour la 9, mais rien n’y faisait. Je n’arrivais pas à enlever cette boule de mon ventre et mes pensées convergeaient toujours au même point : la discussion que j’allais avoir avec Madame Jourdain de l’Etoille. Comme d’habitude, tout était chronométré à la minute près : je suis entrée dans la résidence quand l’aide de soin en est sorti, je l’ai salué et sans plus, j’ai annoncé mon arrivé en sonnant deux fois, je suis entrée en enlevant mes chaussures que j’ai mis dans mon sac d’où j’ai sorti d’autre chaussure que je n’utilisais qu’ici, et je me suis annoncée en parlant volontairement d’une voix plus fort qu’à mon habitude : - Madame Jourdain de l’Etoille, Mademoiselle Costinho, je viens d’arriver, j’arrive, je suis à vous dans trente seconde. J’ai été rapidement dans la salle d’eau située à l’entrée pour me laver les mains, abusant du désinfectant, sachant pertinemment que sans cette odeur elle me renverrait me laver, et j’ai vérifié l’emploie du temps affiché sur le casier qui m’était réservé. Alphonse avait effectivement changé mes horraires et avait eu la gentilesse de me compter mes heures en plus, au moins, je n’aurais pas à raler pour ça, c’était un soucis en moins. - Bonjour Madame Jourdain de l’Etoille, comment allez-vous ? - Oh Octavia ! J’avais peur que tu ne viennes pas ! - Mais non Madame Jourain de l’Etoille, votre fils vous a bien dit que je serais là toute la semaine. - Oui mais vous savez, je ne peux pas m’empêcher de m’inquiéter. - Ah ça je sais bien, mais il ne faut pas, regardez, je suis là ! Comme à son habitude, Madame Jourdain de l’Etoille, où, Sidalia-Irène pour les intimes, était coiffé d’un chignon impécable ; elle portait à son doigt l’alliance qu’elle aurait pû enlever depuis déjà trente cinq ans, et autour de son cou, un fouloir coloré qui contrastait avec son tailleur sobre et triste, mais qui lui allait impecablement bien, comme tous les autres. Madame Jourdain de l’Etoille ne se déplaçait plus qu’en fauteuil roulant mais ça ne l’empêchait pas d’être toujours impeccablement soignée et présentable. - Bon, très bien. Tu seras là demain ? - Je serais là demain. - Tu en es sûre ? - Je serais là demain sans faute Madame Jourdain de l’Etoille, à 15h30, comme chaque mercredi. - D’accord, très bien. Je savais pourtant que je devrais le lui répéter au minimum trois fois avant de partir, et peut-être même que je devrais lui réexpliquer pourquoi je suis là aujourd’hui, mais j’avais l’habitude, et à force je n’avais même plus envie de m’énerver, je répétais tout ça d’une voix monotone et à peine fatiguée. Elle décida que le mardi était un jour parfait pour vérifier sa collection de bijoux, et je compris tout de suite que j’allais passer l’après-midi à entendre des vieilles histoires de famille, mêlant complot, guerre, ennuie, tromperie, et beaucoup de poussière. Rien de bien intéressant quand on connaît ses histoires par coeur et que la personne qui les raconte en oublie la moitié et mélange les personnages. - Est-ce que je t’ennuie Octavia ? - Oh mais pas du tout Madame Jourdain de l’Etoille ! - Tu m’as l’air bien soucieuse Octavia.. ne me dis pas que c’est encore ce Ishmaël… J’ai soupiré en rigolant. Bien sur, avec le temps je m’étais attachée avec cette dame, j’avais suivis ses problèmes de santé comme elle avait suivi mes problèmes de coeur. Elle aimait nos histoires de jeune adulte, elle répétait que ça lui rappelait sa jeunesse, et qu’elle aime voir à quel point les garçons ne sont pas si différents que ça aujourd’hui. Ça l’amuse et elle affirme que c’est bien mieux que les feux de l’amour. - Disons qu’Ishmaël a .. comment dire.. Elle m’a fait son regard, celui qui dit, “de mon temps..” et souvent suivi de propos un poil antisémite, mais je l’avais suffisamment sermonné à ce sujet pour qu’elle préfère se taire et n’utiliser que son regard. Étrangement, tout mon beau discourt que j’avais inlassablement répété dans le métro s’était envolé. Je ne me souvenais plus de rien. - Il m’a mis en contact avec un jeune réalisateur, il réalise des sortes de mini-film vidéo, pour illustrer des chansons, et-- - Octavia, j’ai des arrières-arrières-petits-enfants, je sais ce que sont les clips vidéos, alors s’il te plaît, parle moi jeune. - J’ai parlé avec le réalisateur de ce clip, il est très embêté parce qu’il ne trouve pas d’endroit pour tourner, et il doit absolument finir avant la semaine prochaine. Il aurait besoin d’une très grande maison. Elle m’a écouté et semblait attendre que je poursuive alors que j’espérais qu’elle comprenne sans que je n’ai besoin de formuler. Bien évidement, ce n’était pas le cas, Sidalia-Irène voulait paraître jeune et encore “à la page”, mais elle avait fêté ses 92 ans cette année, et ce n’était pas négligeable. - Je me disais que votre résidence serait l’endroit parfait.. - Oh. Elle paru réfléchir alors j’ai attendu quelques minutes avant de l’interrompre, puisque visiblement, elle ne devait même plus se souvenir du sujet auquel elle devait répondre.. - Je sais très bien que je dois demander l’autorisation à Monsieur Jourdain de l’Etoille mais-- - Voyons Octavia, je ne suis pas sénile ! Je peux très bien prendre ce genre de décision toute seule ! Expliquez moi le projet, je veux tout savoir ! J’ai essayé de lui expliquer ce que Syrine m’avait raconté, l’histoire de plan séquence, l’histoire du clip, j’ai même réussi à lui dire quelques paroles mais je n’avais pas retenu le nom du chanteur ni le nom de la chanson. - Du rap, ça c’est une histoire amusante que je pourrais raconter à mes arrières-petits-enfants ! Je pourrais rencontrer ces garçons ? - Oui bien sur, ils proposent un contrat et-- - Edgar s’en chargera, c’est très bien. Je suppose qu’ils seront là demain avec toi ? - Euh.. oui, oui ! J’ai préféré affirmé, sachant qu’il ne vaut mieux pas la contrarier et puisque les choses se passent bien, autant continuer ainsi. Et de toute façon, si Syrine tient autant à son clip, je suis certain qu’il pourra se libérer une heure pour négocier et discuter. J’ai envoyé immédiatement un sms à Syrine pour le prévenir de bloquer son après-midi de demain pour discuter contrat, et ce n’était pas négociable. Il m’a répondu plus briévement que d’habitude, visiblement il avait compris que je ne lui laissé pas le choix, et même si je regrettais d’être un peu sec dans mon message, je voulais garder les choses sous contrôle. - Octavia.. Tu ne comptes pas faire d’enfant avec l’un de ces garçons j’espère ? - Bien sur que non ! - Ah, tu me rassures. Tu as raison, ça n’a pas marché la première fois, c’est mieux que tu restes comme tu es, tu es une femme forte, tu n’as pas besoin d’homme, j’espère que tu l’as compris. J’ai soupiré. C’était typiquement le genre de réflection que je préférais qu’elle garde pour elle. Sidalia-Irène avait passé sa vie à suivre les règles sociales qu’on lui imposait sans jamais se soucier de ce qu’elle désirait vraiment. Aujourd’hui elle mettait un point d’honneur à faire comprendre à ces assistantes de vie qu’elles devaient construire leur propre vie et ne pas se soucier de ce qu’on attend d’elles. Mais parfois, elle le faisait comprendre de manière très brusque. Elle connaissait une très grande partie de mon histoire, et évidement, elle touchait toujours là où ça faisait mal. - C’est l’heure de la collation ! Je vais préparer votre thé et les petits gateaux. J’ai préféré changer de sujet, et bien évidement, j’avais opté pour son favoris. - Oh super ! En plus il fait beau, on va s’installer dans la véranda. Tu regarderas mes orchidés, Alphonse m’en a apporté des nouvelles de Madagascar, elles sont magnifiques ! Et n’oublie pas les cartes, j’ai une revanche à prendre sur notre dernière partie de crapette.. J’ai souris en poussant son fauteuil jusqu’à la véranda. Travailler avec des personnes agés n’est jamais un travail facile, mais j’avais connu bien pire et je m'efforçais de me satisfaire de ce que j’avais.
1 note · View note
murphyncoffee-blog · 7 years
Text
Nouvelle. L'amour a ses coeurs fanés.
1// - Anatol est rentré. Isis avait lancé ça, comme ça, en plein dîner, entre une bouchée de pommes de terre et d’un bout de pain. J’étais pas vraiment certain qu’elle attendait une réponse, alors j’ai simplement haussé les épaules pour montrer que j’avais entendu, mais que je n’avais rien à dire, comme souvent ces tant-ci. Je ne connaissais aucun Anatol, et je crois qu’à ce stade, la liste des amis de ma femme m’importait plus. Je l’ai entendu posé bruyamment sa fourchette, et si elle n’avait pas soupiré de mécontentement, je n’aurais même pas pris la peine de lever les yeux vers elle. - Quoi ? Elle avait les bras croisés sur sa poitrine, les dents serrés, et je crois même qu’elle était au bord des larmes. Ce fut à mon tour de soupirer, agacé de passer pour le méchant de l’histoire. La situation devenait réellement pesante pour nous deux, et j’avais beau y mettre du bien, la façon dont Isis avait de se placer systématiquement en victime avait pour don de me mettre hors de moi. - Anatol. Mon frère. J’ai froncé les sourcils. Non, vraiment, je ne voyais pas. Et je la connaissais sa famille, ça oui, ses oncles, ses tantes, ses neveux, ses parents.. Mais son frère Anatol, en plus de ne pas connaître le prénom, le seul vrai que je lui connaissais s’appelait Felix. J’étais en train de me repasser mentalement les noms des invités de notre mariage quand elle s’est finalement décidé à préciser sa pensée. - Ana, mon frère militaire. - Ah, oui ! Il est rentré ? C’est bien, ça. Voilà pourquoi je n’avais aucun souvenir de lui. Isis en parlait que très peu, et durant nos cinq ans de vie commune, je ne l’avais jamais rencontré. Il était dans l’armée depuis ses dix huit ans, et il n’avait pas pour habitude de prendre des semaines de vacances. Isis haussa les épaules, et je compris finalement que si elle était au bord des larmes, ce n’était pas à cause de mon manque de réaction. - Oh, Iz’, viens. J’ai ouvert les bras pour qu’elle vienne s’y blottir, ce qu’elle a fait dans la seconde, se laissant finalement aller aux sanglots. L’idée ne m’avait pas traversé l’esprit une seule seconde, pourtant, c’était évident. On ne rentre de la guerre que pour une permission, pour une blessure ou dans un cercueil. On est resté comme ça de longues minutes, sans rien dire, le bruit de ma respiration et ses pleurs comme seuls mélodies. Etrangement, j’arrivais presque à en apprécier la situation, comme si voir Isis souffrir était la seule chose qui arrivait encore à me rappeler à quel point je l’aimais. Aujourd’hui encore, je m’en veux de ce genre de réflexion.
2// - Diane m’a invite au bungalo. Elle et Ana vont y rester quelques temps.. et j’ai pensé que se serait une bonne idée, pour nous. - Pour nous ? C’est toi qu’elle a invité, pas moi. Elle avait encore balancé ça en milieu de repas, à croire que c’était le seul moment où elle arrivait à rassembler assez de courage pour m’adresser la parole. L’histoire restait encore flou pour moi, j’avais juste cru comprendre que son frère était sorti de l’hôpital, et que ses séquelles étaient plus psychologique que physique. L’air de la mer devait probablement lui faire le plus grand bien. Quant à moi, je n’avais ni le temps, ni même l’envie, pour une réunion de famille au bord de la plage. - Mais je vais pas y aller toute seule.. c’est à six heures d’avion d’ici et je – - Isis, tu penses vraiment que dans la situation actuelle, me retrouver parmi ta famille, c’est réellement une bonne idée ? - S’il te plait ! On a pas pris de vacance ensemble depuis des années, ça nous ferait du bien, je suis sûre que – - Mais du bien de quoi ? Tu veux des vacances à deux ? Bien, très bien, partons à deux. Ou quoi ? T’as besoin d’un arbitre ? Tu veux enfin que quelqu’un te prenne à pitié et t’excuses pour ce que t’as fait ? C’est pas plutôt ça que tu veux ? - Ça n’a rien à voir ! Elle est sortie de table avant que je n’ai eu le temps de l’arrêter, mais j’étais certain d’avoir vu des larmes. J’étais pourtant bien trop énervé pour m’en soucier. Qu’elle pleure, tant pis, elle ne peut s’en prendre qu’à elle-même.
3// Je l’ai regardé se ronger les ongles, le dos collé au siège, pendant dix bonnes minutes avant d’enfin lui prendre sa main en soupirant. - On va pas se crasher. Détends-toi, on en a pour toute la matiné. Elle m’a lancé un de ses regards assassins. Je connaissais très bien sa peur de l’avion, mais depuis notre mariage et la routine qui s’était installé, nous n’avions jamais pris de vole et je restais novice dans ce genre de situation. Et ma patience ayant pris un sacré coup ces derniers mois, je n’avais pas réellement envie de la consoler de quoi que ce soit. Pourtant, mon manque de gentillesse à son égard commençait doucement à me faire me sentir coupable, comme si au fond, j’étais le coupable et qu’elle était celle qui prenait tous les coups. C’est pour ça que j’avais d’abord refusé ces vacances. Je ne voulais pas être entouré de personnes qui prennent parti pour notre situation. Nos amis avaient eu la grande bontée de nous laisser régler cette histoire sans s’en mêler, mais je savais très bien que la famille d’Isis serait beaucoup moins partiale. Je ne les connaissais que très peu. J’avais rencontré Isis peu après qu’elle ait quitté sa famille pour l’autre bout du pays, et le voyage était plutôt onéreux, nous ne nous étions pas permis de rendre visite à chaque Noël, nous contentant du mariage, de quelques coups de fils, et de visite exceptionnelle. Mais je savais qu’Isis avait du mal à se passer de sa soeur et de ses frères. Encore plus en ce moment. Isis était la petite dernière, la plus précieuse, peut-être la plus aimée aussi. Sa grande soeur, Ella, son frère Andy -dont j’avais totalement oublié l’existence jusqu’à récemment-, et son autre frère Driane étaient ce qu’elle aimait le plus dans sa vie. Elle avait grandit avec eux dans l’une des plus grande ville du pays avant de débarquer dans la capitale. Contrairement à moi, elle venait d’une famille très aisée dont l’argent n’avait jamais fait parti de leur préoccupation. Si sa grande soeur avait choisi de suivre une voie artistique, du genre chef de décor dans l’industrie du cinéma, ses frères et elle avaient suivi la voie de leurs parents en devenant médecin. Andel était (d’après ce qu j’ai compris) médecin militaire, Driane s’occupait de la chirurgie plastique et Isis s’était dirigée vers la neurologie. Moi, avec mon pauvre petit poste d’enseignant d’histoire dans un lycée public, je me sentais rarement à ma place dans ces dîners de famille. Je n’étais pas le genre idéal, et j’en avais parfaitement conscience. Isis m’en avait fait prendre conscience. C’est pour ça que j’appréhendais, persuadé que je passerais ces deux semaines à encaisser les leçons de morales et les règles d’un mariage sacré qu’Isis avait pourtant bafoué sans scrupule. - Ella a réarrangé le bungalow.. à la mort de papa, elle voulait s’occuper, aller de l’avant, ça reste très semblable d’après les photos, mais plus moderne. Le salon s’est agrandi, elle a abattu le mur de la bibliothèque, c’est plus grand, c’est bien. Elle a arrangé le chemin vers la plage aussi, avec des pierres et tout ça, pour que ce soit plus soigné, tu vois ? Apparemment y aurait une douche aussi.. Il fait un peu froid pour se baigner en ce moment, mais c’est une bonne idée.. J’ai laissé Isis parler toute seule, préférant garder sa main dans la mienne en fermant les yeux. Elle n’était pas quelqu’un de bavarde, surtout pas quand elle me savait de mauvaise humeur. Mais elle était stressée, peut-être morte de peur, et je savais qu’elle essayait de se changer les idées en tournant la conversation sur quelque chose qu’elle maîtrise et qu’elle connaît. Tant mieux si ça la rassure, mais qu’elle ne s’attende pas à ce que je discute nuance de peinture avec elle pendant toute la durée du vol.
4// - Isis ! J’ai reconnu la voix d’Ella immédiatement, et Isis aussi, lâchant ma main pour sauter dans les bras de sa soeur. Elles se ressemblaient énormément, les mêmes traits de visage, même couleur de peaux, de cheveux, le même rire espiègle. Leur différence d’âge se trahissait dans le sourire plus enfantin d’Isis, et dans les quelques rides du visage d’Ella qui parcouraient son front et entouraient ses lèvres. J’avais l’impression d’avoir à faire à deux gamines qui se retrouvaient après des semaines de séparation, et bien sur, c’était le cas. J’ai rejoins le petit groupe, nos valises à la main, essayant d’éviter les quelques passagers du train encore sur le quai. Ce n’est qu’à ce moment-là que j’ai remarqué l’homme qui se tenait un peu en retrait. Malgré son sourire à la vue de ses soeurs, on ne pouvait échapper à l’air fatigué qui creusé son visage. - Andy ! Il se joignit aux embrassades, et moi je suis resté là, comme un con, avec cette impression que je n’avais rien à foutre ici.
5// - Alors, comme ça, c’est toi qui a épousé ma soeur ? La voix d’Andel était beaucoup plus douce que je ne l’avais imaginé. Roque, mais douce. Le parfait mélange d’une âme meurtri dans un corps jeune. J’ai croisé son regard dans le miroir du parsoleil et j’ai tenté un sourire. Les Morgenstern n’avaient pas oublié ma présence mais je sentais bien que je n’étais pas totalement intégré à la famille, la faute à Isis, peut-être, qui avait tendance à se mettre de le plus loin de moi, même dans la voiture où elle s’accrochait à la portière plutôt qu’à moi. - Faut croire. J’en déduis que tu es le frère dont on ne m’a jamais parlé ? Il a tourné la tête sur Ella qui continuait de fixer la route, se concentrant sur sa conduite plutôt que sur son frère. Même si je devinais un malaise, il ne l'accentua pas. - Comme on dit, loin des yeux loin du coeur. - C’est toi qui a décidé de partir, souffla Isis, mais je n’étais pas certain que quelqu’un d’autre que moi l’ai entendu. J’ai froncé les sourcils, mais elle fixait le paysage plutôt que de répondre à mes questions silencieuses. - Mais ces quelques jours nous permettront de faire connaissance. J’ai cru comprendre que tu enseignais ? - C’est ça. Je ne sauve pas des vies, mais j’aime ce que je fais. - Tu construies des vies, ajouta Isis, cette fois-ci, elle avait parlé suffisament fort pour que sa soeur et son frère l’entende.
6// - Le bungalow est magnifique, finit par dire Isis afin de briser le silence pesant qui s'installer dans la chambre que l’on nous avait attitré. Je défaisais soigneusement ma valise, rangeant mes habits dans les armoirs, tout en haussant les épaules à sa remarque. Je connaissais l’endroit, nous y avions passé quelques étés ensemble, avec sa famille aussi, puis son père est décédé, et cette disparition a ébranlé la famille, suffisament pour que les habitudes se perdent. J’ai froncé les sourcils avant de me tourner vers Isis. Le visage collait à la fenêtre, elle essayait de deviner la mer malgré la noirceur de ce début de soirée. - Ton frère n’était pas à l’enterrement de ton père ? Je ne me souviens pas l’y avoir vu.. - Candelane ? - M’oblige pas à apprendre son prénom.. Elle a esquissé un sourire. Ils avaient tous des prénoms étranges dans sa famille, une particularité à laquelle que sa mère tenait tout particulièrement. Isis pour Isidora, Ella pour Petronella, Driane pour Valesdrian et Andy ou Andel pour Candelane. A telle point que sa mère a été surprise quand je lui ai répondu que Bianca n’était pas un de mes surnoms. - Non, il n’était pas là. L’armée ne laissent pas rentrer ses soldats pour si peu.. maman ne lui a jamais pardonné si tu veux tout savoir. - Tu lui a pardonné, toi ? Elle a semblé réfléchir, puis elle a recommencé à fixer la fenêtre. - Ce n’est pas ce que je lui reproche..
7// -Isis m’a raconté ce qui s’est passée.. Ella a parlé tout bas, exactement de la même façon que sa soeur quand elle a peur d’aborder un sujet. Mais je n’ai rien dit, continuant de frotter le plat avec mon éponge pendant qu’elle essuyait les verres et qu’Isis et Andel discutait dans la salle à manger. -Elle n’aurait jamais dû faire ce qu’elle a fait. - Mais ? Demandais-je, m’attendant à ce qu’elle lui trouve une excuse. - Y a pas de mais. Elle n’aurait pas dû faire ce qu’elle a fait. Les rôles auraient été inversé, j’aurais tout fait pour qu’elle te quitte. Je n’avais vraiment pas envie de parler de ça. Pas avec elle, pas avec ma femme dans la pièce d’à coté. -Je comprend que tu ne lui pardonnes pas. Pourtant t’es là. Toujours. Tu l’aimes. J’ai lâché un rire plutôt mauvais. -Ouais, c’est merveilleux l’amour, hein. Si je n’étais pas aussi en colère contre Isis, contre Ella, contre moi-même aussi, je me serais surement mis à pleurer. -Et elle t’aime aussi, elle – -Ne t’avance pas sur ses sentiments. On sait tous que ce n’est pas vrai. Elle a soupiré, cherchant ses mots. -Tu connais Isis.. tu sais qu’elle fuit les problèmes, qu’elle ne se bat que pour ce qui lui importe.. -Tu veux quoi ? Que je lui remercie de ne pas avoir demandé le divorce. La cafetière a bipé, signalant que le café était près, mettant court à notre discussion. -Elle ferait tout pour pouvoir se racheter et faire oublier ses erreurs.. merci de lui en laisser la chance.
8// Je suis parti me coucher sans boire de café, fatigué par le voyage, par les sourires forcés et la fausse joie qui m’oblige à faire croire que mon mariage est heureux alors qu’on sait tous qu’il se noie. Isis est restée tard, parlant et rigolant avec sa soeur et son frère. Je lui en veux pas, elle ne les a pas vu depuis très longtemps. J’étais déjà endormi quand elle est venue se coucher, embrassant mon front comme à son habitude, et je n’ai pas eu la force de la repousser quand elle a m’a enlacé en posant sa tête sur mon épaule.
9// -Ella et Isis sont parties faire des courses pour se midi, expliqua Andel en lançant une nouvelle tournée de café. Encore endormi, habillé d’un vieux pull et d’un vieux jogging, j’ai seulement hoché la tête sans réellement comprendre ce qu’il venait de me dire. Malgré l’hiver, le soleil était fort présent, baignant le bungalow d’une lumière jaune aveuglante. -Je pense qu’elles vont en faire souvent, des sorties comme ça. Alors j’espère que t’es un peu bavarde parce qu’on risque de vite s’ennuyer. J’ai frotté mon visage en soupirant. -Tu le découvriras après mes trois tasses de café. Il a sourit et sortit trois tasses propres de placard. -J’ai hâte.
10// Je m’étais lancé dans la confection d’une salade grecque pour l’entrée du midi, et étrangement, Andel semblait très enthousiaste. Ce n’est que bien plus tard que j’ai compris que la variété de nourriture en afghanistan était bien limité. Les filles n’étaient toujours pas rentrée mais téléphonait toutes les dix minutes pour avoir un avis sur les aliments à acheter. -Tu fumes, remarquais-je alors qu’il allumait sa troisième cigarette de la matiné. -Et tu bois, rétorqua-t-il en pointant mon verre du doigt. Son sourire laissait sous entendre que sa remarque était purement innocente, mais mon regard a surement lui faire comprendre que la situation était bien plus compliqué que ça.
11// -Andel est bien silencieux.. soufflais-je au creux de l’oreille d’Isis, allongé sur moi dans le hamac. Elle portait un chpeau de paille qui recouvrait une partie de son visage alors que je me contentais de mes lunettes de soleil. Nos pieds emmelaient, mes bras enlacées sa taille.. ces moments de douceurs et ce genre de trêve étaient bien rare, j’en profitais autant que je pouvais. L’air n’était pas vraiment chaud, mais le soleil tapait suffisamment pour que nous restions dehors avec un simple plaide pour nous couvrir. -Il l’a toujours été.. c’est pire depuis qu’il s’est engagé.. - Tu t’en souviens. Elle a hoché la tête en soupirant. -Je venais d’avoir seize ans.. mes parents ont pété un cable. Aucun de nous n’a compris.. -Et il est revenu.. -Quelques années, le temps de faire ses études de médecine. Puis il est reparti. J’ai l’impression qu’il fuyait quelque chose.. ou quelqu’un. -Ton père ? -Non.. elle semblait réfléchir, je n’ai jamais trouvé qui. Mais quelqu’un qu’on ne connaissait pas sans aucun doute. -Il repartirait encore, tu penses ? -Il est revenu parce qu’il n’avait pas le choix.. il trouvera un autre moyen pour fuir. J’ai tourné la tête en direction d’Ella et Andel, assis sur la terrasse à quelques mètres de nous. La jeune femme dessinait dans son carnet de croquis pendant que son frère avait l’air de tresser des fils.. un bracelet peut-être ? -C’est ça que tu lui reproches ? Ai-je finalement demandé en me rappelant de notre conversation de la veille. Elle n’a rien dit, mais je la connaissais suffisamment pour savoir qu’elle avait besoin que je la sers un peu plus fort contre moi.
12// Je n’ai pas été surpris en me réveillant dans un lit vide, Isis m’ayant prévenu qu’elle et sa soeur irait en ville se renseigner sur les événements festives du week-end. Mais il était encore tôt, le soleil ne perçait pas encore entièrement les rideaux, et dans le silence étrange du bungalow, seuls des cris étouffés trahissait une présence. Par pur réflexe, je me suis levé, encore en caleçon pour vérifier ce qu’il se passait. J’ai hésité quelques secondes en réalisant que les plaintes, transformés en cris provenaient de la chambre d’Andel. En ouvrait, je l’ai trouvé endormi, le visage abimé d’une grimace épouvantable, comme s’il devait supporter une douleur physique insoutenable. Je ne comprenais pas ce qu’il disait, mais ses gémissements ne m’ont pas fait douter. -Andel ! Hey ! Réveille toi ! Je l’ai secoué assez violemment afin de le réveiller. Il a sursauté, me sautant presque au coup, les mains en position d’attaque. Le souffle haletant, je l’ai vu observer la pièce à la recherche d’un quelconque danger. Je me suis risqué à poser ma main sur son épaule nue. -C’est moi, Bianca, le mari d’Isis, il n’y a rien, t’es en sécurité ici. Son regard continuait d’analyser la situation, comme s’il n’était toujours pas sorti de son cauchemar. On est resté comme ça de longues minutes, lui encore en alerte, moi répétant inlassablement qu’il ne craignait rien. Il a fini par se calmer, prennant son visage dans ses mains, essayant de calmer son fou rire nerveux. -Désolé.. j’ai.. vraiment passé un sale nuit. -C’est rien.. je vais aller te faire du café. J’ai tenté un sourire auquel il a répondu maladroitement. Je comprennais doucement que cet homme était bien plus abimé qu’il ne laissait paraître.
13// -trouble du Stress Post Traumatique, expliqua Ella quand à table le soir, nous nous étions retrouvé à trois, Andel ayant décidé de se coucher plutôt. Isis a froncé les sourcils, buvant une nouvelle gorgée de sa tisane. -Il revit la guerre dans son sommeil, c’est ça ? Demandais-je. -Ca c’est quand il arrive à dormir, la plus part du temps il est en état de d’hyperstimulation, de l’hypervigilance.. il a des médicaments mais je suis pas certain qu’ils aident beaucoup. Je voyais bien qu’Ella s’efforcait de rendre l’exeplication simple alors qu'évidemment, Isis avait dû deviner dès le premier regard. On ne parlait pas beaucoup de son métier à deux. Elle m’avait fait comprendre dès le départ qu’elle ne voulait pas que sa vie de couple se confonde avec le boulot. Cette déclaration sonne étrangement amer à présent.. mais je m’étais toujours efforcé de respecter cela. Les rares fois où elle en parlait, c’était lorsqu’elle avait réussi une opération avec succès ou que l’échec était trop dur à supporter pour ses épaules. -On peut pas faire grand chose, hum ? Demandais je puisque qu’aucune des deux ne semblait décider à parler. -C’est un psy qui lui faut, souffla Isis. -Il en voit déjà un, informa Ella, me laicant l’impression qu’il s’agissait d’un reproche à l’égard de sa soeur. -Alors il lui manque du temps. Il est revenu il n’y a que trois semaines. Il lui faudra des années pour s’en remettre.. en admettant qu’il s’en remette un jour. La remarque d’Isis plongea la pièce dans un nouveau silence qui ne fut rompu que lorsque qu’Ella alla se coucher.
14// -T’es vraiment trop con ! Le rire d’Isis explosa dans la pièce alors que je continuais de la coincer sous moi. Ella et Andel étaient partis tot ce matin et Isis avait jugé que c’était une raison suffisante pour me réveiller à coup de baiser. J’étais de bonne humeur bien que fatigué, une chance pour elle. J’avais enduré ses baisers mais elle je semblais pas amusés de mes caresses sur les zones que je ne connaissais trop bien et qui la faisait rire à chaque fois que j’éffleurais ça peau. -Bianca arrête ! Je vais m’étouffer. -Mince tu as découvert mon plan machiavélique ! Elle
0 notes
murphyncoffee-blog · 7 years
Text
Celeste. Prequel.
J’avais le vieux sac à dos noir de mon frère sur le dos ainsi que son sweat en guise de rempart minable contre la pluie. Mais la capuche n’offrait qu’une maigre protection et la distance entre le studio de danse et mon appart était bien suffisante pour que je me retrouve intégralement trempée en quelques minutes. Mais la pluie, ce n’était rien, au pire des cas j’attrapais un gros rhume et je m’en remettrais. Mais la séance de danse de ce soir avec mes nouvelles chaussures m’a complètement détruit les pieds et mes basquettes n’empêche pas les plaies de saigner. J’habitais dans le quartier des Perséides depuis ma naissance et je n’avais jamais vraiment eu peur de cet endroit, même la nuit. Les gens me connaissaient, je les connaissais aussi plus ou moins ; je savais qui approcher ou non, qui détourner le regard, les fauteurs de troubles et ceux qui viennent te voir quand tu t’attardes trop dans la rue. Puis surtout, Eole avait pris son rôle de grand frère très à coeur, et si je portais le juste-au-corps, je savais aussi parfaitement me battre et utiliser mes poings. Rentrer du studio de danse aussi tard ne m’avait donc jamais angoissé, bien que je ne prenais pas ça pour une partir de plaisir, particulièrement pas quand il pleuvait à ce point que j’avais raté le dernier bus de la soirée. - Hey ! Je l’avais vu venir, ou du moins, entendu, la voiture qui me suivait depuis la grande avenue, j’avais hésité à lui demander de me prendre, c’était un taxis après tout, mais je n’avais pas d’argent et le fait d’être suivie comme ça ne m’inspirait de toute façon pas confiance. La rue était déserte, c’était celle qui reliait le quartier industriel au Perséides, le quartier des pauvres, des défavorisés comme ils disent à la TV. Quand les gens viennent ici, généralement il prennent par l’avenue du Port, c’est plus sécurisé, à ce qu’il parait. Du coup je me retrouve sur le trottoir d’une rue déserte avec un mec en taxis pratiquement à l’arrêt pour pouvoir suivre la vitesse de ma marche. - J’ai pas de fric, et j’ai une capuche, j’ai dit aussi fermement que possible. Je me suis énumérée mentalement où se trouvait ma bombe lacrymogène, mon portable et vérifié si je savais toujours comment désarmé quelqu’un ou du moins le surprendre suffisamment pour m'enfuir avec mes pieds blessées. - Je te demande pas d’argent. Je fixais mes pieds depuis le début mais j’ai fini par m’arrêter et le regarder dans les yeux. Il a fait de même. La nuit sombre, la pluie et la lumière faible des réverbères ne me permettait pas de voir son distinctement son visage ce qui était le but ; essayer de l’identifier, s’il m’arrivait quelque chose, j'espérais que Eole puisse se charger de trouver une vengeance convenable. Il devait avoir un peu plus de la trentaine, une coupe de cheveux qui laisse à désirer avec des boucles devant ses yeux, un regard sombre et une barbe de quelque jour. Il n’avait rien d’un méchant, son sourire m’inspirait presque confiance, mais je venais de le classer dans la catégorie “gros lourd” et je préférais ne pas tenter le diable même si j’avais conscience qu’il ne me lâcherais pas, et que la douleur dans mes pieds commençait à devenir trop insupportable pour ne pas envisager l’idée de le laisser me racompagner. - Qu’est-ce que tu demandes alors ? - Un verre ? J’ai laché un rire mauvais en reprenant ma marche. - T’arrives vraiment à te faire des filles comme ça ? - Pas vraiment non.. Sa sincérité m’a fait sourire, pas suffisamment pour que je cède du moins. - C’était minable. Tu manques cruellement de technique. - Contre un sourire alors. - Oh pitié.. Il garde définitivement sa place dans la catégorie gros lourd. - S’il te plait ? J’ai soupiré bruyamment. J’ai toujours eu horreur qu’on me force là main, et dans ce genre de contexte encore plus. Qu’est-ce qu’il voulait ? Mon corps était douloureux, mes pieds ne ressemblaient plus à rien et après deux heures de sport intensif et une pluie torencielle, même mon visage ne ressemblait à rien. Je me suis arrêtée de nouveau pour lui faire face, essuyant l’eau qui inondait mon visage. - Je veux pas rentrer dans ton putain de taxis. J’avais essayé d’être ferme encore une fois, de bien faire comprendre que non, c’est non, je ne monterais pas. Mais ma voix tremblait, et entre l’adrénaline de l’énervement et de la peur, je devais paraître plus terrifiait qu’autre chose. Sans compter que mes dix sept ans, ma silhouette frêle et mes cheveux blonds ne jouaient pas en ma faveur. J’avais l’allure d’une demoiselle en détresse et l’image n’était pas loin de la réalité. Il a soupiré, l’air profondément agacé en se frottant le front, comme le ferait un père qui tente de raisonner son enfant en essayant d’éviter toute violence. - Il est minuit passé et t’es toute seule. Je crois pas que ce soit moi la plus grosse menace dans ce quartier minable. J’ai froncé les sourcils, vexée. - J’habite dans ce quartier minable. Ca l’a fait rire aux éclats. - Moi aussi j’habite dans ce quartier minable. Je crois avoir capté un léger accent et ça m’a fait sourire. Mais toujours pas assez pour accepter de monter avec lui, alors j’ai repris ma marche et lui a continuer de rouler au pas, sans rien dire. - Qu’est-ce que tu veux ? - Un sourire, je t’ai dit. Ça avait l’air de le faire rire, je savais bien que la situation l’amusait. - Non. Qu’est-ce que tu veux vraiment ? La question a paru le prendre de court, comme s’il n’en savait rien, comme si aborder les jeunes filles la nuit pour les effrayer était devenu tellement habituel pour lui qu’il en oubliait pour quoi il le faisait. - Tu veux me baiser ? Je tente, on sait jamais, généralement c’est ce qu’ils veulent, pas besoin de chercher plus loin. - Non. Sa réponse a paru sincère et cette fois, c’est moi qui fut dérouté, et lui qui en profita. - Je suis pas ce qui a de plus dangereux dans le coin, je sais que t’habites à la cité des Astres et je voudrais pas qu’il t’arrive quelque chose et l’avoir sur la conscience. - Oh, tu la joues super héros alors, génial. Je crois que ça l’a gène que je pense ça, ou du moins que je le formule à voix haute, comme s’il ne voulait pas que l’on connaisse cette aspect de sa personne. - T’inquiète pas Batman, je te balancerai pas. ...
0 notes