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#je suis traumatisée par ce film
swedesinstockholm · 25 days
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chifourmi · 1 month
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J'ai vu Wish.
⚠️ Attention spoils ⚠️
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Je partais très négative vu les avis mais il y avait quelques points positifs au début du film. L'énorme point fort c'est la construction du méchant. Son histoire est expliquée donc on le comprend. Il a été traumatisé, il est devenu parano et du coup veut un peu trop protéger son royaume. Ça se tient. Il est méchant pour une raison crédible, wow!! Puis avec le temps il a pris la grosse tête parce qu'il a réussi à construire un royaume tout seul et que son pouvoir lui est monté à la tête.
L'énorme problème c'est que son personnage régresse au fil du film. Il s'emporte, part en roue libre et devient juste un énième méchant ridicule et pas crédible. Il y avait quelque chose à faire avec lui, ça aurait pu être un méchant qui se rend compte de ses erreurs et qui... va juste voir un psy?
Surtout que sa relation avec sa femme est touchante, elle arrive à trouver les mots pour le raisonner au début. Donc pourquoi ils ont cassé tout ça de manière pas du tout intelligente? Y avait vraiment quelque chose à creuser à ce niveau là!! C'est comme dans Encanto, la grand-mère est un peu considérée comme la méchante mais au final sa relation avec sa famille évolue grâce à la ✨️communication✨️. C'était super intelligent comme développement et trop chouette à voir. Ils ont vraiment gâché cette opportunité dans Wish.
À part ça, j'ai l'impression que les personnages ne sont pas assez développés. Ils manquent de profondeur. À part le pote grincheux d'Asha que j'ai adoré parce qu'il sonnait très vrai.
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Et on en parle de la chèvre qui était complètement inutile?? Ils peuvent pas arrêter de créer des petits partenaires qui sont là juste pour faire rire mais qui au final ne sont pas drôles du tout??
Au niveau des chansons, j'ai vu beaucoup de gens dire qu'aucune n'était marquante. Là je ne suis pas du tout d'accord! Il y en a une qui s'est tellement démarquée! "Ma promesse" m'a fait verser quelques larmes. Par contre, c'est vrai que les autres n'étaient objectivement pas folles. Mais perso j'ai beaucoup aimé l'ambiance de "Ce n'est plus mon roi" où on entend vraiment la détermination du groupe qui se rebelle.
Par contre Lambert Wilson chante si mal pour qu'on doive mettre autant d'effets sur sa voix??? Sa chanson de méchant "Ma récompense" sonne trop bizarre à cause de l'autotune.
Fin voilà, je pourrais dire beaucoup plus de points négatifs mais pour résumer j'ai juste eu l'impression qu'ils voulaient nous en mettre plein les yeux mais qu'au final on y croit pas trop parce que ça manque de vrai, ça manque d'âme, c'est pas convaincant. Mais en vrai je m'attendais à bien pire donc ça m'a pas empêché d'être quand même surprise positivement. (Genre il n'est pas aussi nul que Raya et le dernier dragon pour moi)
(05/04/2024)
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pauline-lewis · 2 years
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Baby it's cold outside
Je suis désolée de parler météo, mais l'automne m'a un peu terrassée cette année avec ses grosses bourrasques de vent et ses litres d'eau (bienvenus après l'été que la pluie vient chasser, soit). Je me suis mise dans une sorte de mode pré-Noël un peu maussade, j'ai même regardé mon premier téléfilm de Noël sur W9 dimanche dernier, c'est dire. Je suis malgré tout toujours rassurée de savoir qu'il y a chaque année sur ma télé l'histoire d'une énième avocate dynamique qui retrouve le sens de la vie à l'auberge du flocon de neige. Et qu'il y a une personne flemmarde sous un plaid pour la regarder.
Je me suis dit que j'allais me faire une thématique feel good avec uniquement des fictions/musiques qui m'ont fait du bien ces derniers temps. Même si le plus grand réconfort, je le trouve toujours dans les plus petits instants de la vie (c'est cliché mais que voulez-vous, je suis une personne qui regarde des téléfilms de Noël sur W9). Regardez par exemple, hier, je rentrais du tram à pieds dans mon quartier désert et au milieu des maisons aux volets fermés et des lampadaires allumés, le ciel plein de nuages s'est déchiré en deux pour laisser apparaître la pleine lune. J'écoutais la reprise de Sweet Child o'Mine par Taken By Trees, et même sur le capot affreux des SUV, les reflets de la nuit étaient sacrément beau.
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Broadway Limited, Un dîner avec Cary Grant de Malika Ferdjoukh (École des loisirs)
J'ai commencé à lire Broadway Limited en revenant de vacances et immédiatement ce livre m'a ravie et fait beaucoup de bien (je remercie Mathilde qui m'en avait parlé et qui avait visé juste !). Il raconte les histoires croisées des habitant·es d'une pension new-yorkaise : Jocelyn le jeune français encore traumatisé par la guerre, la mystérieuse Manhattan qui cherche encore qui elle est, Hadley qui a dansé avec Fred Astaire…
Avec son écriture légère mais précise, Malika Ferdjoukh nous entraîne dans le New York de la fin des années 40, dans les salles de spectacle de Broadway et dans l'ambiance particulière de l'après-guerre. C'est bourré de références toujours bien placées et jamais forcées à la comédie musicale, aux grands standards musicaux de l'époque et aux stars passées et futures du cinéma. Tout cela suffit à expliquer que j'ai aimé ce roman mais je peux vous ajouter que toute la fin nous plonge dans un New York enneigé autour de la période de Noël, qu'il y a beaucoup d'histoires d'amour et de plot twist et que c'est aussi un très joli roman d'initiation. Le seul problème c'est que j'avais pas mal de lectures prévues que je vais devoir mettre sur pause pour lire les deux autres tomes. Oups.
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Shall we dance ? de Masayuki Suo
En feuilletant un livre Taschen des plus grands films des années 90 que j'avais acheté quand j'étais ado, j'ai lu une double page sur le film de Masayuki Suo Shall We Dance. Dans ma jeunesse, j'ai bien évidemment vu mille fois l'autre grand film sur la danse de salon, Ballroom dancing de Baz Luhrmann, mais je ne connaissais pas du tout ce pendant japonais.
Shall we dance ? raconte l'histoire d'un homme en pleine mid life crisis qui décide de s'inscrire à des cours de danse de salon, après avoir été intrigué par le regard perdu dans le vide et mélancolique de la professeure. Par peur d'avoir l'air ridicule (on nous explique au début du film que la danse de salon a mauvaise presse au Japon), il n'en parle pas à sa famille et cette activité devient son petit jardin secret. Il se lie d'amitié avec les autres danseurs du cours, des personnages plus ou moins fantasque, et finit par nouer une relation assez émouvante avec la mystérieuse prof de danse.
Je n'étais pas particulièrement emballée par le côté "crise de la quarantaine" et pourtant ce film a su me surprendre et me toucher. La danse de salon devient un moyen pour le héros de s'épanouir, de s'évader de son job de bureau, d'envisager son corps autrement, de nouer des amitiés. Il contourne intelligemment l'histoire d'amour en partant dans d'autres directions, plus subtiles à mes yeux. Un film assez simple mais qui m'a fait du bien. (Il y a un remake avec Richard Gere qui a l'air assez nul, mais je suis intriguée)
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Barbra Streisand, Live at the Bon Soir
Mon obsession du moment a la forme d'un live inédit de Barbra Streisand, enregistré au début de sa carrière en 1962. Je suis tombée amoureuse de Barbra il y a quelques années, en regardant Funny Girl, pour toutes les raisons qui font qu'elle est elle et pas une autre : son humour, sa voix incroyable et sa capacité à mélanger les émotions, qui semble instinctive.
Le Live au Bon Soir est un objet absolument fascinant, dans lequel elle déroule des morceaux merveilleux avec un orchestre de jazz qui l'alpague de temps en temps. On a vraiment l'impression d'être dans la salle, tant sa voix enregistrée garde toute l'émotion intacte, comme si on pouvait faire un bond dans le temps pour la rejoindre à New York. Et puis elle est drôle, si drôle. Elle est capable de balancer blague sur blague puis de chanter Cry Me A River en mettant toute la salle à genoux. J'ai l'impression d'entendre sur l'enregistrement les larmes des gens rouler sur leurs joues, en marge de leurs rires éclatants. Vraiment un disque dans lequel je vais me blottir tout l'hiver jusqu'à ce que les premiers rayons du soleil viennent me récupérer.
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Starstruck
Je suis un peu en retard pour parler de cette série de Rose Matafeo qui raconte l'histoire d'une jeune femme qui rencontre par hasard un acteur très connu et commence une relation un peu compliquée avec lui. Tout le monde a dû faire cette comparaison mille fois, mais c'est une sorte de Coup de foudre à Notting Hill inversé. Je n'ai pas encore regardé toute la série donc si ça se trouve la série dans son intégralité n'est pas du tout feel good (il n'y aura pas de remboursement, ce blog est toujours gratuit) mais pour le moment, le personnage de Rose Matafeo me plaît énormément. J'adore son humour, sa légèreté, sa présence. Et puis une petite romcom, c'est de saison amiright ?
Allez je vous remets aussi ma playlist automnale ! Je la trouve assez feel good mais pareil — je ne peux rien promettre.
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quatschdetoni · 2 years
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Smiling at work
Hier, en allant voir Smile au cinéma, je me suis demandé si les films d’horreur de notre époque ne parlaient pas souvent d’une manière ou d’une autre de notre rapport au travail. Je m’explique.
Dans de nombreux films d’horreur récents, j’ai l’impression que la thématique du travail occupe une place importante. Dans Smile, une jeune psychiatre assiste au suicide d’une de ses patientes devant elle. Une scène avant, la médecin est épuisée par son travail, son chef de service lui demande de prendre du repos après sa garde. Elle prend ses affaires, se prépare à partir, quitte son bureau. Le téléphone sonne dans la salle vide, le personnage est parti, le plan donne juste à voir ce téléphone, puis la psychiatre revient et décroche le téléphone. Le devoir l’appelle. Le film développe ensuite le topos des films dans lesquels un personnage perd pied : on demande à la psychiatre de quitter son emploi quelques temps ( de prendre un « leave of absence », je crois que j’ai entendu ça des dizaines de fois dans des films et séries en langue anglaise). C’est l’angoisse, la psychiatre ne veut pas quitter son boulot, elle le prend comme une punition dont découle une honte. Elle subit.
Pendant le film, cette scène m’a rappelé une discussion que j’avais eue avec ma mère, il y a un an. On parlait du travail et elle m’a dit « Tu vas voir Antoine, ce que tu expérimentes c’est l’aliénation par le travail. Tu passes tellement de temps à travailler, ça prend tellement de place dans ta vie, qu’une fois le travail terminé, tu ne sais plus quoi faire, et ça te manque. » Comme si le travail absorbait une partie de toi, prenait tellement de place qu’il empiétait sur le reste, et une fois privé de travail, on est aussi privé de cette partie de nous, le « moi qui travaille » et qui ne peut plus exister. On est en vacances et on sait pas quoi faire de sa peau, on se sent désoeuvré (dépossédé d’une oeuvre, d’un truc à faire). On développe tout une partie de notre être dans ce travail (comportement, actions, relations, savoir-faire, etc…) qui est coupé de notre vie normale, notre autre vie.
Alors la psychiatre ne veut pas partir. Je trouve ça assez bien trouvé d’utiliser ce topos à ce moment là parce que le « leave of absence » fait directement suite à un trauma, et le personnage ne peut plus faire ce qu’elle savait faire, elle est dépossédée d’une partie d’elle-même au moment où elle se sent déjà percée, vidée, détruite, chancelante. Elle doit partir.
Ensuite, je trouve que c’est intéressant de noter que le traumatisme est directement causé par son travail. Elle est épuisée, elle fait un métier du care et ne peut pas bien faire les choses justement parce qu’elle est épuisée. Elle fait passer le besoin de son travail avant le sien, ce qui la met en position de vulnérabilité, de danger (source de l’horreur et de la peur). Le traumatisme arrive sur son lieu de travail, un lieu qui n’est pas safe, un lieu où elle est exposée à des dangers. Le travail se fait dans des conditions qui mettent en danger le travailleur. La psychiatre travaille pas à la mine, elle travaille dans un hôpital, mais elle se retrouve dans une situation de danger, qui mène au traumatisme.
Tout le propos du film tourne autour d’une métaphore des traumas qui nous suivent et nous poussent à traumatiser d’autres gens, dans une espèce de cercle vicieux des traumas (l’idée est pas mal : si on vit un trauma, on perd pied, puis on finit par blesser d’autres gens, même si le lien est pas non plus ultra clair, on capte ce truc du blessé qui devient blessant, de l’attaqué attaquant, etc…). Et du coup la psychiatre est prise dans cette « malédiction » qui la menace de mort : elle est traumatisée et va finir par traumatiser d’autres gens en se tuant elle-même. Double peine pour la psychiatre qui a pas particulièrement envie de mourir et qui est pas super réjouie par l’idée de traumatiser des gens.  Mais si on revient au truc du travail, je trouve ça pas mal qu’elle soit obligée de prendre ce leave of absence parce que ça ajoute un truc au topos, comme elle est psychiatre. En fait, la pauvre fille se dédie à son travail, elle finit traumatisée, et la réponse du travail c’est « va te reposer pour pas faire tes conneries ici. Maintenant qu’on t’a bien aliéné, que t’es plus qu’une demi-personne qui a abandonné l’entièreté de ton être pour donner une partie de toi à ton boulot, on te renvoie, en morceaux, à la maison. » C’est pas comme si elle bossait dans un service psy.
J’aime bien le fait que le film mette en scène cette peur de l’abandon dans le travail. On se dédie à un travail qui peut à tout moment décider de nous virer, de nous abandonner. La rupture de contrat partage des similarités avec la rupture amoureuse. On est seul, on ne peut plus retourner sur les lieux où on a existé, on doit faire le deuil d’un soi passé.
Ça m’a plu parce que je me suis dit que ça montrait bien que l’aliénation au travail c’était un sacrifice. à part le salaire, tu gagnes pas grand chose, tu construis ce toi travaillant qui sait faire tous ces trucs qui existe 8 heures par jour, et le reste de toi, c’est un toi fatigué, crevé, détruit, traumatisé, etc… On travaille pour vivre, parce qu’il faut de quoi se nourrir, mais on abandonne sa personne en travaillant. C’est comme si on détruisait l’objet en mettant en place des stratégies pour le conserver.
Bon après ya plein d’autres trucs cools dans le film (faut voir la scène où elle décide de retourner au taf avec un grand couteau pour tuer un de ses patients devant son boss et le traumatiser à son tour ou celle où elle offre sans faire exprès le cadavre de son chat à son neveu pour son anniversaire. ça rappelle des scènes de films où le personnage est épuisé, ailleurs (au boulot?) et ne parvient pas à répondre aux injonctions sociales), mais ça m’a surtout fait me dire que plein d’autres films d’horreur parlaient peut-être d’une manière détournée de travail. On sait que l’horreur est un genre qui parle de nos angoisses en utilisant les formes (détournées) du récit et de la métaphore  être possédé, perdre le contrôle de soi, être attaqué sans raison, envahi, hanté, etc…). Du coup, je me dis que le travail c’est quand même une des grandes sources d’angoisse contemporaine ( perdre son travail, le harcèlement au travail, l’impossibilité de se reposer, de dormir, le burn out, le pétage de câble, la stigmatisation, etc..).
Les histoires de séquestration, d’enfermement, d’agressions ont peut-être à voir avec le boulot. On a peur d’être forcé de faire un truc qu’on veut pas faire et de ne pas pouvoir s’en sortir. J’aime bien Sinister pour ça, d’ailleurs. Déjà parce que ça fait pas mal peur, mais aussi parce que le personnage principal est un écrivain qui écrit sur des affaires sanglantes, et son souci, c’est qu’il a pas de bureau, donc il travaille à la maison. C’est son travail qui le pousse à ramener la malédiction de boogeyman chez lui ( très bon argument pour dire qu’il ne faut jamais ramener de travail à la maison). Son gamin est terrifié, ce qui met bien en scène un travail qui déborde, prend trop de place, déteint sur tout ( les gens qui ont eu des parents stressés par leur boulot comprendront). Je me souviens aussi d’un truc d’horreur dans lequel un enfant tombe sur les dossiers de meurtre que son père/ sa mère policier.e a ramené à la maison. Mais je sais pas si je l’ai imaginé ou si je confonds.
Dans REC, la pauvre journaliste se retrouve enfermée dans un immeuble infesté de zombies à cause de son boulot. Dans Mirrors, le pauvre concierge devient fou à cause du batiment qu’il doit surveiller. Je dis « les pauvres » parceque c’est le sentiment qu’on a quand on voit ces films. On se dit « Ho mon/ma pauvre, tu t’es bien fait.e avoir ». Souvent, le travail est un prétexte scénaristique (le flic est amené à être séquestré à cause de son boulot de flic, sans que ce boulot soit questionné comme source de peur, danger, horreur). Mais parfois ça occupe une vraie place dans la peur et sa construction. Qu’est-ce qui empêche ces employés de dire « fuck you, je m’en fous de ce job, je prends ma peau, je la sauve et je me barre. »? Peut-être l’aliénation au travail.
D’ailleurs, même dans Alien, le travail occupait une place importante. On dit tout le temps que Alien ça parle de l’aliénation dans le corps, du corps de la femme qui est colonisé par des trucs qui grossissent et la détruisent ( bébés, cancers, même combat). Mais il y a aussi tout un discours sur le travail, avec l’androïde qui veut à tout prix rapporter l’alien sur terre, car c’est sa mission. Le meilleur employé n’est même pas celui qui s’est aliéné. Il est créé par l’entreprise pour servir l’entreprise, et n’existe pas en dehors de l’entreprise. Il est tout entier à l’entreprise, et n’existe pas en dehors d’elle. Et peut-être que les deux sont même reliés. On utilise le corps de la femme pour qu’il soit colonisé, pour l’exploiter, pour le détruire.
Parfois le travail est vécu comme une horreur. Un cauchemar. Et un plan social, ça n’aurait pas à voir avec un slasher? One by one, on élimine les personnages du plus faible au plus fort, à celui qui tient le coup le plus longtemps, à celui qui s’accroche. Accroche-toi !
Travailler plus pour crever plus lentement.
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lightsovermaloski · 3 years
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Partie I. H-8
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Warning/s: peur, sang, mort
Word count: ~4500 mots
« - C’est fou ça !
- De quoi tu parles, Aurora ?
- Je viens de recevoir un message de mon cousin. Un mec vient de le contacter sur Twitter, car ils étaient ensemble en maternelle. Il lui a même envoyé des photos ! C’est trop marrant ce genre d’histoire. J’aimerai tellement que ça m’arrive. T’imagines, toi, peut-être que quelque part… »
La fille aux cheveux d’or continua de parler, sans remarquer que son amie ne prêtait plus aucune attention à ce qu’elle lui disait. Les pensées de Nora ne cessaient de divaguer. Elle se sentait incapable de se concentrer sur quoi que ce soit. Bien qu’elle ne voulait plus y faire attention, son cerveau tournait en boucle sur ce rêve.
Et si cet Adrian existait réellement ?, se surprit-elle à penser. Quelle idiote. C’était inconcevable. Mais tout de même… La question n’arrêtait pas de faire un bout de chemin dans sa tête. Il paraît qu’il est impossible d’inventer des visages dans ses rêves. Mais ce n’est pas un visage que voyait la jeune fille, juste une silhouette.
Les silhouettes ont forcément des visages
Elle fut sortie de ces pensées par Aurora qui bondit. Nora perçut un léger bruit strident. Sûrement la sonnette, pensa-t-elle. À cet instant précis, Nora se mit à haïr son ouïe qui lui faisait défaut. Depuis ses 5 ans, la jeune fille était atteinte d'hypoacousie de l'oreille droite. Autrement dit, son oreille droite n'entendait plus aussi bien qu’avant - n’entendait plus en réalité. La jeune fille loupait les sons trop faibles ou trop aigus ou trop graves, et son oreille lui faisait parfois entendre des sons qui n'existaient pas, comme des légers sifflotements.
Aurora se dirigea vers la porte. Elle sautillait. Si elle était bien attachée à quelque chose, c’était bien à ces soirées d’été avec sa bande. Nora devait bien avouer qu’elle n’échangerait pour rien au monde ces moments. Sa maison, à la peinture rouge, était au bord de la rivière d’Akerselva. Siroter une bière sur sa terrasse, avec ses copains, tout en profitant des dernières lueurs, quelque peu glaciales, du soleil laisserait une trace indélébile dans la mémoire de la petite rousse. Oslo n’était pas Hawaï, mais c’était déjà bien suffisant.
« - Nora ?, hurla la blonde pour que son amie l'entende. Viens voir. Ça a sonné, j’en suis certaine. Pourtant, il n'y a personne.
La porte était effectivement grande ouverte, mais personne n’était à son embrasure. Une légère inquiétude picota Nora. Le vent frais souleva légèrement ses cheveux. Le quartier était calme. Valma, le labrador des voisins d’en face, était sagement allongée sur le porche. Elle n’aboyait pas, mais remuait la queue.
- Ce n’est rien, sûrement juste les petits Olsen qui font une blague », tenta de se rassurer Nora.
Aurora commença à fermer la porte. Sans crier gare, un homme surgit devant la porte en hurlant. Son visage était recouvert d’une cagoule. Le cœur de Nora fit un bond dans sa poitrine, et l’angoisse qu’elle ressentait depuis ce matin-là s’amplifia. Aurora hurla, et tenta de claquer la porte. Un pied l’en empêcha. Ilan sortit de sa cachette. Il ne pouvait pas s’arrêter de rire. Son visage était rouge, aucun son ne sortait de sa bouche. Comme à chaque fou rire qu’il avait, il se tenait fermement le ventre.
L’inconnu retira son masque, dans un éclat enfantin.
« Bordel, Elias, je vais te tuer ! », cria Aurora.
Amusé par l’air mécontent d’Aurora, Elias se mit à l’imiter. « Maman, j’ai eu peur ! ». Ilan, qui avait commencé à se calmer, se remit à rire de plus belle, tenant toujours fermement son ventre.
Aurora grommela quelque chose comme « Vous êtes des gros crétins » et s’engouffra dans la maison lumineuse. Elias la suivit de très près.
Ilan essuya une larme provoquée par son fou rire. Il renifla bruyamment, un sourire amusé plaqué sur son visage, et ramassa le sac qu’il avait posé à terre. Les bières s’entrechoquèrent quand il prit Nora dans ses bras.
« - Comment ça va ? Tu m’as raccroché au nez ce matin. Déjà qu'on ne se voit plus beaucoup...
Ilan était parti à Bergen, étudier le sport dans une Høgskolen - haute école. Bergen était à environ 7h de route d'Oslo. Mais le jeune homme ne manquait pas de rentrer à chaques vacances. Sa famille et lui habitaient dans une petite maison jaune, dans le même quartier que Nora. Inséparables depuis l'enfance, cela faisait trois ans qu'ils s'appelaient régulièrement en FaceTime et dès que le grand châtain rentrait, ils se retrouvaient toujours fourrés ensemble.
Nora esquissa un léger sourire.
- Ça va. Juste un peu… Fatiguée.
Le grand gaillard toisa son hôte.
- Fatiguée ? C’est ce rêve encore ?
- Oui… ». Nora soupira. Ses yeux regardaient la route. Cherchait-elle Adrian du regard ? Rien n’était moins sûr. Son regard se replanta rapidement dans celui de son ami. « J’ai l’impression que c’est… Réel. Vraiment réel. Cette silhouette, cet Adrian… c’est comme si ça m’était familier. »
Le vent fit bouger légèrement les feuilles des arbres plantés dans la rue dans un petit crissement que Nora sentit à travers la caresse glaciale du souffle.
Ilan ne répondit rien. Il fit cette mimique avec son visage qui signifiait qu’il ne savait pas quoi dire. Ils rentrèrent rejoindre Aurora et Elias.
Nora prit soin de fermer la porte à clé. Réflexe assez étrange, elle qui disait toujours que le quartier était sûr et que rien ne pourrait arriver. Elle avait, au contraire, pour habitude de ne jamais fermer la porte - ce qui pouvait agacer son père et son petit frère, mais elle n’y prêtait jamais attention. Ce soir-là, elle laissa même les clés enfoncées dans la porte. Ne sait-on jamais, songea-t-elle. Comme si un danger imminent pouvait pénétrer dans la maison. Personne n’avait remarqué ce geste, mais si quelqu’un l’avait vu, il aurait compris à quel point Nora était angoissée. D’une nature très sereine, si elle montrait des signes de stress, c’est que la situation n’augurait rien de bon. Mais personne n’y fit attention, et personne ne pouvait se douter du danger qui flottait dans l’air.
La petite troupe s’installa sur la terrasse en bois au bord de la rivière. Elias décapsula quatre bières. Chacun entrechoqua la sienne avec celle des autres. Ils prirent tous une gorgée.
« Ça vous dit une soirée film d’horreur ce soir ? Je suis d’humeur. Il y a un nouveau court métrage terrifiant, à ce qu’il paraît, qui vient de sortir », demanda soudainement Elias.
Aurora protesta. Nous étions en plein mois de juillet, ce n’était pas Halloween, il était donc hors de question de regarder des films qui font peur. Après un débat acharné de quelques minutes, elle céda. Mais un seul film, avait-elle tout de suite ajouté.
Nora se leva et mit deux pizzas au four. Elle sortit des chips du placard de la cuisine et retourna les poser sur la petite table dehors. Ilan se jeta dessus. Les chips aux oignons, c’était son pêché mignon.
Tous les quatre restèrent dehors un moment, oscillant entre discussions et jeux de cartes. Les deux pizzas avaient été englouties, et il ne restait que des miettes des chips. Quelques cadavres de bière jonchaient la table. Elias n’en n’avait bu qu’une. Il détestait boire, car il ne savait jamais quand il comptait reprendre le volant de sa voiture bleue de sport. Et il voulait toujours être prêt à le faire. C'était sans compter les fois où il buvait à s'en brûler la gorge et se retrouvait à appeler un taxi pour rentrer.
Le vent finit par se lever, et les adolescents rentrèrent à l’intérieur. Ils se préparaient pour leur soirée d’horreur. Les deux filles s’étaient enroulées dans des plaids, prêtes à se cacher les yeux si le film devenait trop gore. Aurora s’était collée à Elias. Elle espérait que le garçon la prendrait dans ses bras si elle avait trop peur - elle ne se doutait pas que cela le ferait mourir de rire. Nora, elle, avait collé sa tête contre l’épaule d’Ilan, mais comptait bien ne regarder le film qu’un minimum - suivre suffisamment pour comprendre, mais ne pas regarder les scènes trop choquantes pour éviter d’être traumatisée. Pour mener cette technique à bien, elle avait sorti son téléphone et scrollait continuellement Twitter.
Aurora, emmitouflée dans deux plaids, sortit le bout de son nez lorsque le générique se mit à défiler.
« - C’était terrifiant.
- Ce ne sont que des lapins tueurs, Aurora, rien de bien méchant ». L’audace de la voix d’Elias déplut à Aurora qui se jeta sur lui. Le grand brun ne mit pas longtemps avant de l’immobiliser et de la chatouiller. Tous deux avaient fini au sol. Aurora riait tellement fort que ce fut le seul son qui raisonna dans la maison pendant quelques instants.
Nora s’était redressée et lâcha son téléphone pour la première fois depuis le début du film. Elle rejeta les plaids par terre et but un verre d’eau d’une seule traite. La peur donnait soif à la jeune fille, c’était étrange, mais elle s’était habituée à cette sensation depuis sa plus tendre enfance.
Un bruit sourd retentit. Ilan distingua chez Nora une vague de panique, qui ne parvient pas à identifier l’origine de cette nuisance. Il mit sa main sur son épaule, et tenta de la rassurer.
« Hé, ne t’inquiète pas Nora. C’est sûrement de l’orage. » Celle-ci fronça les sourcils, en signe d’interrogation. De l’orage ? Cela faisait bien des années qu’il n’y avait pas eu à Oslo. Certes, le temps n’y avait jamais été très joyeux, mais l’orage était un événement largement exceptionnel.
L’inquiétude de Nora grandit à l’intérieur de son corps. Un frisson parcourut le sommet de son crâne jusqu’à ses orteils. L’angoisse lui prit à la gorge. Elle se sentait coincée. Et elle ne savait pas pourquoi. Ilan ressentit son trouble.
« Tu es certaine que tout va bien ? », murmura-t-il, espérant ne pas trop attirer l’attention des deux autres. Elias et Aurora étaient adorables, mais jamais très compatissants. Surtout Elias. Et surtout s’il s’agissait de Nora.
La petite rousse se contenta de hocher la tête. Elle n’avait pas la force d’entamer cette conversation. Mais Ilan en décida autrement. « C’est le rêve, c’est ça ? ».
Les yeux dans le vide, Nora revit encore la scène. Cette silhouette, cette voix… Adrian. Adrian. ADRIAN ! Elle déglutit. Les larmes lui montèrent aux yeux.
Avant qu’elle n’ait pu dire quoi que ce soit, la maison fut plongée dans le noir. Elle sursauta violemment, et entendit Aurora crier. Elias éclata d’un rire assez hystérique. « C’est le courant qui a sauté, mon pote ! ».
Nora soupira. L’orage, le courant qui saute… tout ça ne disait rien de bon à la jeune femme. Machinalement, elle activa la lampe torche de son téléphone. Très vite suivie pas tout le monde. Elle se leva et sortit du salon. Elle voulait se diriger vers la cuisine, pour attraper des lampes torches - qui étaient rangées dans les tiroirs, à côté du frigo. Mais pour rejoindre cette pièce, il fallait traverser le couloir.
Le couloir semblait long, infiniment long. Il était glacial et sombre. La lumière de son téléphone ne permettait pas de distinguer la porte de la cuisine. Elle hésita un long moment puis fit un pas. Quelque chose l’attendait à la fin du couloir, mais cette dernière ne savait pas quoi - ou plutôt qui. L’ambiance était devenue pesante, et Nora avait l’impression de suffoquer. Un éclair illumina le couloir. Derrière la baie vitrée de la cuisine, celle-ci jura voir une silhouette.
Une silhouette.
Elle poussa un cri étouffé et se cogna dans quelque chose. « Ilan, bordel, tu m’as fait peur ! ». Le jeune homme parut surpris que la jeune fille s’adresse à lui de cette manière.
« - Désolé, ce n’était pas mon intention. - Viens avec moi dans la cuisine, s’il te plaît », supplia Nora. Le ton de cette dernière inquiéta un peu plus Ilan. De quoi pouvait-elle bien avoir peur ?, se demanda le garçon. Mais il se dit que c’était sûrement l’orage.
Ilan passa devant Nora, et s’avança vers la cuisine. La jeune fille resta sur place quelques instants, persuadée de le voir disparaître dans un cri d’effroi, engloutit par la silhouette. Mais rien de tel ne se produisit. Le garçon arriva tranquillement à la cuisine, et sortit une des lampes torches. Il éclaira la pièce, laissant entrevoir une cuisine déserte. Il se retourna vers la jeune fille, en se demandant pourquoi elle ne le suivait pas. Il en était certain maintenant, quelque chose n’allait pas. Nora se décida finalement à le rejoindre, la boule au ventre. Elle se dépêcha d’attraper des lampes torches à son tour et retourna aussi vite que possible au salon, tout en surveillant qu’Ilan suivait ses traces.
Chacun des adolescents prit une lampe torche. Nora, prévoyante, en déposa deux autres sur la petite table basse beige. Elle se rassit sur le canapé, vite rejointe par Ilan. Ce dernier la fixait avec de grands yeux, essayant de décrypter son visage. Qu’est-ce qui pouvait lui faire aussi peur ? Ce n’était pas l’orage qu’elle craignait, c’était quelque chose d’autre. Mais il ne parvint pas à déterminer cette autre chose. La voir dans cet état ne le rassurait pas. Nora n’est pas du genre à flipper pour rien, ne cessait de lui répéter son esprit. Mais il faisait de son mieux pour chasser cette pensée négative et profiter de la soirée.
Elias et Aurora étaient assis par terre, l’une en tailleur et l’autre affalé contre le meuble télé. Ils discutaient tranquillement. Puis Aurora reçut un message, et se désintéressa de ce que racontait Elias. Ce dernier eut une idée.
« - Je peux vous raconter un truc ?, son ton n’annonçait rien de bon.
- Un truc ?, questionna Ilan. Ce dernier savait reconnaître quand son meilleur ami allait faire une connerie, et il en était persuadé, c’était ce qui allait arriver. Elias se contenta de hocher la tête, un sourire étrange plaqué sur le visage.
- Une petite légende qui court en ce moment sur le complexe de Cecile Bombeek. »
Cecile Bombeek était un endroit situé à quelques kilomètres d’Oslo. Il regroupait plusieurs bâtiments : une ancienne école pour garçons, et un asile psychiatrique aux méthodes douteuses. Nora avait toujours trouvé stupide d'avoir deux lieux aussi différents aussi proches l'un de l'autre. Une dernière bâtisse, assez imposante, était également présente sur le site, mais il était impossible de dire à quoi elle servait exactement.
Elias prit sa lampe torche et la faisait vaciller autour de son visage. Les ombres formées mirent en valeur ses traits durs. Son allure prit une tournure terrifiante.
Ilan fixait Nora. Elle regardait Elias avec un air étrange. Il ne sut le décrire. Il se décida à tapoter l’épaule de la jeune fille, perdue dans ses pensées, qui sursauta. « Partante pour la légende ? ». Elle hocha lentement la tête, sans détourner ses yeux de la silhouette, inquiétante, de celui qui s’apprêtait à bouleverser l’existence des trois autres.
« - C’est l’histoire de ce gars, Jonas. C'est mon cousin qui m'en a parlé. ». Elias prit une voix rauque terrifiante. Instinctivement, Nora se rapprocha d’Ilan, cherchant du réconfort face à son angoisse grandissante. Angoisse qui n’allait sûrement pas s’arranger avec cette foutue légende. « C'était un garçon solitaire et très renfermé sur lui-même. Sa situation familiale était terrible. Son père frappait sa mère comme si c’était un punching-ball. Un soir, son vieux était complètement saoul. Il avait frappé sa mère tellement fort qu’elle gisait au sol, incapable de se relever. Jonas est devenu fou de voir sa mère dans cet état. Il a attendu que son père s’endorme devant la télé, des tâches de bières sur le marcel, une odeur dégoutante de cigarette dans l’air. Jonas s’est muni d’un grand couteau de cuisine et l’a poignardé de 70 coups de couteau. Plus rien ne l’arrêtait. Il avait 20 ans. »
Elias fit une petite pause, laissant le suspens flâner dans l’air. Nora était captivée par les paroles du jeune garçon. Elle était terrifiée. L’histoire lui semblait tellement familière. Elle voulait en savoir plus.
« - Il a tout de suite été interné à l’asile Cecile Bombeek. Pendant cinq ans, il n’a pas fait parler de lui. Sage comme une image. Mais, durant toute cette période, il était traité comme un moins que rien. Les médecins de l’époque avaient des pratiques plus que douteuses. Ils se servaient du pauvre Jonas comme d’un cobaye : choc électrique, opérations diverses et j’en passe. Jonas répertoriait tout dans un carnet. Le soir du massacre, il a caché ce carnet dans un des casiers de l’école Cecile Bombeek. Il ne voulait que personne ne puisse mettre la main dessus. »
Nora prit une grande respiration. Elle sentait son cœur lourd. C’était comme si ce dernier était écrasé par un camion. L’angoisse continuait de prendre le dessus sur le reste de ces sentiments. Et elle n’aimait pas cette sensation.
« - Un soir, en juillet, il a donc pété un plomb. Une méchante remarque de trop, un coup de ciseaux de trop. Il a réussi à s’échapper de l’asile, non sans faire de victimes. Plusieurs infirmières ont succombé à des coups de poings. Un médecin a fait une crise cardiaque en le voyant tabasser l’une de ses employées. En sortant, il s’est muni d’une hache. À l’époque, il y avait d’énorme hache près des extincteurs pour pouvoir en briser la vitre en cas d’incendie. Sans réfléchir, il se dirige vers l’école juste à côté. D’ailleurs, si vous voulez mon avis, il faut être stupide pour avoir construit une école près d’un asile mais bon. Le gardien de nuit, Tobias, tente de stopper la course folle du garçon. Mais ce dernier lui défonce le crâne avec la hache. Le veilleur décède sur le coup. Jonas monte les étages et rentre dans différentes chambres. Poussé dans son délire, il tue douze d’entre eux. Heureusement, c’était un soir d’été. La plupart des enfants était rentrée chez eux. Seuls restaient ceux qui ne pouvaient pas rentrer ou ceux qui n’avaient pas de famille. Certaines enfants ont tenté de fuir en voyant leur camarade tomber comme des mouches. Mais Jonas ne leur en a pas laissé la chance. Le jeune garçon s’est ensuite dirigé vers l’infirmerie. La pauvre infirmière de garde ne se doutait pas le moins du monde de ce qu’il se passait. Elle était occupée à changer de disques. Elle n’a même pas entendu Jonas arriver derrière elle. Il l’a abattu d’un simple coup de hache dans le crâne. Certaines racontent qu’elle a été coupée en deux. Le jeune fou s’enferme ensuite dans la salle de bain commune. Ses mains pleines de sang, il réalise ce qu’il vient de faire. Il réalisé qu’il vient d’ôter la vie à douze enfants, sept infirmières, un homme et un médecin indirectement. Il réalise qu’il est un monstre et se tranche la gorge. Son fantôme est coincé dans l’enceinte de Cecile Bombeek. Condamné à vivre avec ceux qui l’ont torturé et ceux qu’il a lui-même tué. Au fil des années, son fantôme serait devenu assoiffé de revanche. Il serait rempli de rancœur et de haine. Et pour évacuer tous ces sentiments, il tuerait et torturait tous ceux qui oseraient pénétrer dans l’enceinte de Cecile Bombeek. »
Cette histoire terrorisait Nora. Ce n’est qu’une histoire, juste une histoire, tentait-elle de se convaincre. Son corps entier tremblait comme une feuille.
Elias reprit le fil de son monologue. Sa voix était plus terrifiante que jamais, et les ombres vacillaient dangereusement autour de son visage. « Mais, pour déclencher cet amas de haine, il faut jouer au jeu maudit. Rien de plus simple : il faut aller dans la salle de bain commune. Trouver le miroir devant lequel Jonas s’est tranché la gorge. Ensuite, en fixant ton reflet, il faut prononcer trois fois le nom de Jonas. »
Le jeune brun fit, à nouveau, une pause dans son récit. Le temps semblait interminable. « Jonas, Jonas, Jonas…. », fit-il d’une voix à glacer le sang.
Jonas, Jonas, Jonas
« - Tu me fous la trouille, Elias, arrête…, supplia Aurora.
- Ce n’est pas fini, ma belle. Après avoir susurré son nom, il faut fermer les yeux pendant 10 secondes. Vous imaginez comme 10 secondes doivent sembler durer une éternité dans ce moment-là… Et là, sans un bruit, Jonas apparaît derrière toi. Si ton regard croise le sien, tu es foutu. Puis, la silhouette disparaît lentement. Tu te dis qu’il te reste un dernier espoir de t’enfuir. Alors, tu cours, cherchant une sortie. En vain. Tu es prisonnier de l’école. Et quand tu t’y attendra le moins, Jonas viendra et te tuera dans d’atroces souffrances. Du moins, c’est le destin de ceux qui ont joué. Et les poules mouillées qui se dégonflent au dernier moment et ne jouent pas, ils sont condamnés à errer dans Cecile Bombeek. Prisonniers de Jonas et de toutes ces folies. »
Aurora frissonna. Elle sentit la peur la gagner. Se doutait-elle que son amie était dans le même état - voir pire ?
« Sympa. Enfin, c’est qu’une légende stupide », soupira Ilan.
Le regard d’Elias s’assombrit. Ses yeux noirs lancèrent presque des éclairs.
« C’est parce que tu n’as pas entendu la suite. » Elias se tut quelques instants, voulant laisser un peu de suspens. « Depuis quelques mois, de nombreuses personnes se sont rendus à l’école. Aucune n’est revenue. Pas plus tard qu’il y a une semaine, un gars s’y est rendu avec ses potes. Personne ne les a revu depuis. C’est passé aux infos. Je crois qu’il s’appelait Adrian ou un truc dans le genre ».
Nora écarquilla les yeux. Sa tête se mit à tourner et elle dût se contrôler pour ne pas vomir dans le salon.
Adrian. C’était le nom de la silhouette. Ça n’a sûrement rien à voir, pensa Nora. Mais cette dernière sentit le regard appuyé d’Ilan sur elle. Lui aussi avait tilté. Lui aussi avait reconnu le nom de la silhouette. Et il ressentit le besoin d’aller vérifier par lui-même. D’aller voir si cette légende est réelle, si cet Adrian est le même Adrian qui hante les rêves de son amie.
« - C’est des conneries. Je ne suis pas sûr d’y croire, il faudrait vérifier par nous-même.
Elias afficha un petit sourire presque pervers.
- Genre aller à l’école et faire le jeu ou un truc comme ça ?
- L'orage s'est calmé, il fait de nouveau beau…Pourquoi ne pas y aller…
- C’est HORS DE QUESTION ! ». Le cri d’Aurora retentit dans toute la maison, et même peut-être dans tout le quartier. Le salon devint, d’un coup, silencieux. Elias et Ilan échangèrent un regard. Sans un mot, les deux garçons comprirent qu’ils étaient sur la même longueur d’onde : il fallait aller à Cecile Bombeek. Tous les deux se sentaient attirés par l’endroit, comme appelés par une force inexplicable. - par une silhouette.
Elias posa sa main sur celle d’Aurora dans un geste tendre et rassurant. Le jeune homme était bien décidé à aller mettre son nez à Cecile Bombeek, et d’une manière ou d’une autre, Aurora serait de la partie. Il voulait quelque chose, il l’avait. Et c’était tout.
« Ne t’en fais pas, Aurora. Ce n’est qu’une légende débile. On ne risque rien, je te le promets. » Elias se mit à chuchoter dans son oreille. Finalement, elle hocha la tête doucement, et le brun afficha un sourire satisfait.
« - Tu es d’accord, Nora ? », demanda Ilan. La jeune fille hésita un moment avant de répondre. Ses amis avaient les yeux braqués sur elle. Tous attendaient qu’elle dise oui. Allait-elle seulement accepter ? Une partie d’elle cirait oui. La vie est faite de coïncidences, ce n’est rien, disait-elle. L’autre partie était angoissée, en alerte et refusait de quitter son salon si chaleureux. Une dernière voix se mêlait au chaos qui régnait à l’intérieur de son crâne. Elle semblait lui dire de venir, qu’on l’attendait. La silhouette, Adrian ?
Ils t’attendent, ils t’attendent
D’un mouvement impulsif, Nora accepta de se rendre à Cecile Bombeek. Idiote ! lui hurla une voix dans sa tête. Elle choisit de l’ignorer, elle et les autres voix, et de suivre ses ami.e.s. Après tout, que pouvait-il lui arriver de si terrible en compagnie de deux ceintures noires de karaté ? Rien.
« Enfin, si quelque chose tourne mal, Elias, ce sera entièrement de ta faute ! », ajouta Nora, sur un ton taquin - elle savait pourtant que c’était bien la vérité. Cela va mal tourner, mais Elias ne sera sûrement pas le seul responsable, pensa Nora. Il avait été assez débile pour parler de l’histoire, mais Ilan s’était montré tout aussi con, et les deux jeunes filles n’étaient pas totalement innocentes, non plus. Elles pouvaient toujours refuser. Ce n’était pas un flingue collé sur leur tempe qui leur avait fait accepter. Mais c’était toujours plus simple de rejeter la faute sur les autres quand les choses virent au noir.
Elias émit un léger rire. « Ne t’en fais pas, Nora. C’est vrai, quoi, à part notre temps, on ne perd rien à jouer au jeu maudit. Ce n’est pas comme si on allait mourir ! ». Après avoir prononcé ces quelques mots, il partit en fou rire. Il se leva, et se dirigea vers le garage.
Mourir dans d’atroces souffrances
Nora mit sa peur de côté. Elle tentait de se rationaliser. Elle décida d’envoyer un sms à son père. Elle ne voulait pas qu’il s’inquiète s’il rentrait et trouvait la maison sans courant et sans sa fille. Celle-ci prit soin de prendre les lampes torches et vérifia que la batterie de son téléphone était chargée. 80 %. Elle décida que ce n’était pas assez, et fila chercher une batterie externe, qu'elle glissa dans la poche de son jean. En passant devant le miroir, elle réalisa qu’elle ne portait qu’un simple tee-shirt à manches longues. Elle remonta les escaliers et enfila un sweat. Elle en prit un autre pour Aurora - elle n’était pas sûre que son amie avait pensé à en prendre un en venant. La jeune fille décida de prendre, également, une bouteille d’eau. J’aurais sûrement soif, pensa-t-elle, se préparant à vivre les heures les plus terribles de sa vie. Nora avait l’impression de partir en expédition funeste.
Elle enfila son sweat et en profita pour y glisser les lampes torches et sa batterie externe, laissant sa bouteille d'eau trônant devant le miroir. Elle sourit à l'allure de kangourou que cela lui donnait. Sourire qui s'effaça rapidement.
D’un pas qui se voulait assuré, mais l’on voyait à des kilomètres qu’il tremblait, Nora rejoignit à son tour le garage où se trouvait la voiture d’Elias. Il mettait toujours son bolide - comme il appelait - à l’intérieur pour ne pas que quelqu’un puisse l’abîmer dehors.
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nicoprat · 4 years
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Être fan des Strokes en 2015: “Je ne me fais pas trop d'illusions”
Toujours aussi rares sur scène (et encore plus en studio), les Strokes, apparemment de nouveau potes mais désireux d’aller voir ailleurs, continuent d’entretenir le doute sur leur avenir. Et les fans dans tout ça ? Ils attendent. 
Pas facile d’être fan (vraiment fan) des Strokes en 2015. Si nous avons régulièrement des nouvelles de chacun des membres du groupe, un sixième album ne semble pas à l’ordre du jour, malgré, ici et là, des rumeurs. Ils seront certes, tous ensemble, sur scène, pour la prochaine édition du festival Primavera (Casablancas et Hammond Jr. s’y produiront également en solo) et en concert à Hyde Park (où ils joueront sans doute un rappel du 18 juin) mais il faut bien l’admettre: difficile de crier notre joie. Barcelone, Londres, et deux dates américaines. C’est tout. Aucune tournée. Leur dernier album, Comedown Machine, paru en mars 2013, n’avait d’ailleurs pas été réellement défendu sur scène. Après les cinq années de transition entre First Impressions Of Earth et Angles, et deux albums coup sur coup, on croyait l’affaire réglée, les cinq copains de retour aux affaires. Mais non, même pas. Certes, il semble loin le temps des petites phrases, des news alarmantes du NME, de Julian critiquant ouvertement les autres, du groupe enregistrant un disque sans même croiser le regard de son chanteur. En 2015, reste un certain vide. Et le doute, pour des centaines de fans qui se demandent si un jour, leur groupe préféré redeviendra, vraiment, un groupe. 
Ils sont fans des Strokes, à des degrés différents. Ils s’appellent Arthur, Juliette, Annelise et Louis-Henri. Et ils ont ici carte blanche pour raconter leur relation avec le groupes, leurs espoirs, et pourquoi, finalement, les choses sont peut-être mieux ainsi.
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Arthur Weiland: “Je suis au collège entre 1998 et 2002. J'avais 13 ans quand est sorti Is This It, à l'époque on découvrait la musique à la télé ou à la radio avant d'aller télécharger la chanson ou les clips vidéo sur Kazaa, Soulseek ou des sites bien obscurs genre Videopimp. On lisait très peu la presse. J'avais la chance d'avoir MTV2 et des parents qui m'emmenaient à la Fnac chaque dimanche pour acheter des disques. c'était un privilège. Dans la cour de récré on recensait les skateurs (punk rock), les jeunes qui écoutaient du rap (Skyrock) et les filles qui écoutaient du R'n'B (M6, MCM, MTV), trois gothiques qui écoutaient Korn, quelques freaks qui écoutaient du grunge et ceux qui n'écoutaient pas de musique (une majorité). J'ai découvert les Strokes à la télévision, pendant l'émission de Zane Lowe sur MTV2 il me semble. C’était la chanson “Last Nite”.
Juliette Bucaille: “Le première fois que j’ai entendu les Strokes, c’était une version live de “Juicebox” sur un sampler de Rock&Folk en décembre 2005. J'avais comme tout le monde déjà entendu “The End Has No End” avant, mais sans savoir qui ils étaient. C'est la première fois que j'ai fait un lien conscient entre le groupe et l'un de ses titres”.
Louis-Henri de la Rochefoucauld: “En 2001, je fête mes 16 ans, et à l'époque, j'écoute Oüi FM. C'est comme ça que je découvre les Strokes. Par "Last Nite" ? Je ne sais plus… Je me souviens par contre très bien du jour où je suis allé acheter Is This It en CD à la Fnac des Ternes, avec cette pochette qui avait ce je-ne-sais-quoi d'érotique”.
Annelise Berthiau: “Bizarrement et je le regrette presque pour l'histoire, je ne les découvre pas dès l'EP The Modern Age. Je ne suis pas une fan de la première heure, je n'étais pas à leur premier concert parisien. Dans les soirées d'école de journalisme, loin de Paris et de Ouï FM, un pote passe “Last Nite” et “Take It Or Leave It”: crush pour la musique, l'album ensuite mais pas pour le groupe dont je ne sais rien, même si j'ai bien vu leur jolie frimousse dans la pochette de l'album. J'aime mais j'oublie un peu, comme beaucoup de Français la pub EDF, avec “Tthe End Has No End”, me rattrape. J'écoute Room on Fire en boucle et je commence à creuser”. 
Arthur: “Quand j'ai vu le clip de “Last Nite” pour la première fois, j'ai compris que quelque chose allait changer. Je crois que le premier truc que je me suis dit était "il faut que je fasse écouter ça à Hélène" (la fille que j'essayais de draguer à l'époque). Je découvrais le "vintage", la musique new yorkaise, les Converse, les jeans slim, la nouvelle cool attitude qui allait enfin bouleverser le paradigme des skateurs. Bon ok, pour créer un paradigme encore plus pénible, celui des baby rockeurs, mais enfin... Pendant deux ans... C'était bien”. 
Juliette: “Presque instantanément, j’ai su que ce groupe allait être important pour moi, oui. La chanson ne ressemblait à rien de ce que je connaissais à ce moment là donc ça a été un choc assez important. J'ai ensuite lu leur interview dans le magazine et j'ai rapidement compris. Après ça j'ai acheté leurs albums précédents et me suis mise à lire tout ce que je pouvais trouver sur eux”.
Louis-Henri: “Pour être honnête, si j'aimais déjà beaucoup les Strokes, je n'ai eu l'illumination que deux ans plus tard. La première fois que j'ai entendu "12:51" à la radio (Oüi FM, encore !) m'a traumatisé. Là, ça a été mon chemin de Damas - la révélation ! En 2003-2004 j'étais en classe prépa en pension: cette année-là, dans mon lit avant de m'endormir, j'écoutais tous les soirs Room on Fire dans mon Walkman CD”. 
Annelise: “Je ne lis pas la presse rock pendant ces années, mais en 2005, je rentre à Paris, et je replonge. Ouï FM, Newcomer… Et ça tombe bien, les Strokes reviennent bientôt: le concert du Trabendo le 3 décembre 2005 est une entrée en religion, tardive mais fervente. Dans la salle, c’est la révélation ! Je découvre In Transit, le film de leurs débuts, et en cherchant un peu, je trouve le forum des fans français et plonge dans un monde jusqu'alors inconnu. Et ça dépasse le groupe, grâce aux Strokes je découvre Adam Green, Regina Spektor, Ben Kweller, les Kings Of Leon, et accessoirement (ou pas) le Shebeen et la scène rock parisienne de l'époque”.
En 2006, le groupe sort son troisième album. La tournée qui suit est mondiale. On ne le sait pas encore, mais il n’y aura aucun nouvel album du groupe avant 2011. 
Arthur: “C'est pendant l'enregistrement de First Impressions Of Earth qu'on disait que Julian ne voulait plus voir les autres en studio. Oui, ça sentait le sapin à l'époque mais l'album m'avait plu. Je me disais juste que ces tensions étaient rock'n'roll et qu'ils continueraient malgré tout. Car ça ne doit pas être évident de devenir un groupe mondialement connu en si peu de temps, d'être les prescripteurs d'une mode et de garder le cap, de savoir ce qu'on fait et où on va. ils ont peut être fait une pause pour trouver les réponses à ces questions”.
Juliette: “Dès l'instant où Albert a sorti son premier album solo (donc assez peu de temps après First Impressions Of Earth), il était clair qu'on aurait probablement pas de nouvel album avant minimum fin 2007, puisqu'il allait tourner avec. Puis quand il a annoncé un autre album solo, ça a vraiment officialisé le hiatus, ils se sont mis à tous faire leur truc dans leur coin”.
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Louis-Henri: “Rappelons ici que le premier album solo d'Albert Hammond Jr. est sorti en 2006, soit la même année que First Impressions Of Earth ! Je n'ai jamais eu l'impression d'une coupure. Leur break de cinq ans a été meublé de cinq albums (deux Albert, un Fabrizio Moretti, un Nikolai Fraiture, un Casablancas): il y avait donc de quoi s'occuper”. 
Annelise: “Je me souviens que First Impressions Of Earth est le moment où ils commencent à balancer dans les interviews, l'ambiance pendant la tournée Room on Fire, trop longue, trop intense, trop de drogues aussi. Tu sens que tout n'est pas rose dans la bande de potes sauveurs du rock. Là c'est le moment où l'attente est fiévreuse, où la moindre intervention ou collaboration est guettée. J'ai même un projet de bouquin sur le groupe, qui n'aboutit pas mais canalise un peu cette passion”.
Arthur: “Les trucs d'Albert ne m'intéressaient pas dès la première écoute, j'ai survolé Little Joy le projet de Fabrizio. Nikolai a fait un truc ? Je ne savais même pas. C'était le groupe ou rien et je doutais fortement qu'ils allaient arrêter pour quelques petites erreurs de parcours”. 
Juliette: “C'était assez normal que les membres du groupe aient envie de faire leur propre truc après avoir passé trois albums un peu dans l’ombre de Julian, sans jamais composer. J'en ai un peu voulu à Albert au moment de son second album solo puis en y réfléchissant cette évolution des choses m'a paru assez naturelle: les Strokes ont eu le même line-up depuis leurs débuts, ce qui est extrêmement rare pour un groupe. Ils ont été ensemble en permanence pendant environ huit ans, c'était évident qu'ils aient besoin de prendre un peu leurs distances après la fin de la tournée de First Impressions Of Earth. Ils se sont en plus mis à faire des gamins et à déménager hors de New York, les choses ne pouvaient pas rester comme elles l'avaient été jusque là. Certains ont arrêté drogues et alcool et d'autres pas, ce qui peut aussi avoir un impact non négligeable sur un groupe”.
Louis-Henri: “Le premier Albert Hammond Jr, Yours To Keep, est à mon avis une merveille. Il y a aussi plein de sommets sur son deuxième album. Et j'avais beaucoup aimé le Little Joy (Fabrizio Moretti), donc je m'en foutais de cette séparation, je ne retenais que le positif : plein de bons disques dans des veines différentes”. 
Annelise: “Fab fait des trucs avec sa copine de l'époque, Binki Shapiro. J'en ai presque voulu à Albert Hammond Jr, il avait tellement l'air de s'éclater sur scène seul, avec d'autres musiciens (dont le batteur remplaçant des Strokes et roadie Matt Romano). Et puis j'étais fan des Strokes mais aussi de chacun, donc c'était une porte ouverte sur leur univers et plus seulement celui de Julian, je trouvais ça intéressant, même si forcément moins fort que les Strokes. Mais quand Julian annonce que lui aussi va sortir un album solo, là je me dis que c'est fini”. 
Julian Casablancas sort son premier album en 2009. Une merveille, certes, mais qui semble encore un peu plus assombrir l’avenir des Strokes, et retarde un éventuel nouvel album commun. 
Arthur: “Je n'ai jamais écouté le premier album solo de Julian”
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Juliette: “C'est un album de Julian et pas des Strokes. Les Strokes n'avaient à ce point là jamais été aussi électroniques, et le traitement de la voix de Julian n'avait pas grand chose à voir avec ce qu'on avait pu entendre sur leurs albums précédents. Ca m'a toujours énervée qu'on considère cet album comme un "album des Strokes". S'il existe en tant que tel, c'est en bonne partie parce que les Strokes comme unité ne voulaient pas travailler sur ces morceaux, car ils ne représentaient pas ce que pouvait être l'esthétique du groupe. Par ailleurs je trouve que le premier album solo d'Albert est la meilleure chose qui soit sortie de leurs diverses tentatives hors Strokes”.
Louis-Henri: “Je ne pense pas que ce soit "l'un des meilleurs Strokes". Je pense que c'est LE meilleur Strokes ! Je me souviens très bien du jour où j'ai vu le teaser mélancolico-synthétique de Phrazes for the Young pour la première fois. C'était en juillet 2009, j'étais chez mes grands-parents à Pargny-les-Reims (Marne, 51). Un choc ! Jusqu'à la sortie de l'album en octobre, j'ai passé trois mois à rêver de ce disque toutes les nuits - et à la sortie, il a dépassé toutes mes espérances. Mon album préféré au monde”. 
Annelise: “Il annonce ce que seront les deux derniers Strokes. Passion pour cet album, que j'écoute en boucle”.
Absents des Studios, les Strokes le sont aussi de la scène. Les fans n’ont que leurs souvenirs. 
Arthur: “Je les ai vu trois fois il me semble, une fois au Trabendo (il fallait récupérer ses places dans une Fnac un jeudi matin, les gens se marchaient dessus, l'enfer), une fois au Zénith et une fois aux Eurockéennes. Donc trois situations très différentes. Le concert au Trabendo était spécial pour moi, j'ai passé 45 minutes en larmes en repensant à mon ex. Pas Hélène, une autre. Ouais les mecs m'ont bien aidé à pécho à cette époque. Quand j'étais à fond, j'étais prêt à tout. les Strokes à Benicassim ? Je suis chaud. Mais quand on est lycéen et qu'on n’a pas une tune, on se contente de leurs venues à Paris. Et aujourd'hui ça ne me dit rien, les voir au Zénith, à vingt mètres de distance chacun. Non merci”. 
Juliette: “Ils n'ont pas fait de tournée à proprement parler sur nos terres depuis 2006. J'ai eu la chance de les voir sur cette tournée là alors que je n'avais que 14 ans (à l'occasion des Nuits de Fourvière en juillet 2006), et beaucoup de gens de ma génération les ont raté car ils étaient trop jeunes au moment où le groupe faisait encore de vraies tournées et pas quelques dates de festivals par ci par là. Je les ai revus à l'été 2011 quand ils ont fait le Zénith de Paris mais à part ça ils n'ont pas fait de dates hors festivals en France et même en Europe, à part un petit concert à Londres pour genre 300 personnes, pour lequel les places sont parties en un quart de seconde. Je les ai vus les deux fois de ma vie où ça a été géographiquement et financièrement possible. Je vais les revoir au Primavera en mai mais je ne me rends pas au festival uniquement pour eux, ma décision de faire le déplacement est plus due à la présence de Brand New qui pour le coup sont encore moins souvent en France qu'à celle des Strokes (qui finiront bien par repasser par chez nous car ils conservent un public important et dévoué ici, malgré les derniers albums pas top). Je serai bien évidemment présente pour leurs prochains concerts français, une fois qu'ils seront annoncés. Après ça n'est pas non plus un groupe systématiquement génial sur scène, ils ont des jours sans et niveau présence scénique c'est pas nécessairement des champions, Julian avec les Strokes c'est assez souvent le degré zéro de l'interaction avec le public”.
Louis-Henri: “J'ai bizarrement plus vu Casablancas (quatre fois) que les Strokes (trois fois). Albert une seule fois. L'Himalaya reste et restera jusqu'à notre mort à tous, fans français, le concert du 3 décembre 2005 au Trabendo. C'était une toute petite salle, les Strokes étaient au comble de leur aura, il avait fallu se battre pour avoir des places - et mon Dieu ça en valait la peine… Je suis une personne âgée (30 ans) et n'ai jamais fait de grands voyages pour voir des concerts. Donc pas de déplacement loin, non. J'avais quand même pris le train pour voir Casablancas à Arras en 2010”. 
Annelise: “Disons que j'ai rattrapé mon retard sur les premiers concerts parisiens: Trabendo en décembre 2005, Zénith le 29 juin 2006, London Natural History Museum le 6 juillet 2006, Lyon Fourvière en juillet 2006, Rockness le 13 juin 2010, Zénith le 20 juillet 2011, et Albert Hammond Jr. trois fois: Maroquinerie, à Paris, en décembre 2006, Rock En Seine en 2007, et de nouveau la Maroquinerie en 2013. Quant à Julian, quatre fois. J'ai hésité pour Primavera, en espérant qu'ils feraient d'autres concerts en Europe, j'ai même espéré un des festivals français, les Eurocks ou Rock en Seine. Donc non pour l'Espagne mais bien sûr je serai à Hyde Park le 18 juin. Immanquable”. 
Les fans prennent donc leur mal en patience. Amour ? Haine ? La relation se trouble. 
Arthur: “Je ne me suis jamais senti lésé. Ils font ce qu'ils veulent et ne devraient pas être mis sous pression par les attentes de leurs fans”. 
Juliette: “Le fait que les fans aient toujours l'impression qu'un groupe ou un artiste leur doit quelque chose est à mon sens la portion la plus toxique de la culture fan. Ce sont des êtres humains qui ont leurs propres vies dont on ne sait pas tout et qui n'ont pas de comptes à nous rendre. Par exemple si leurs relations interpersonnelles sont meilleures sans le groupe, on n’a pas à réclamer un album supplémentaire juste parce qu'on a l'impression qu'ils "nous doivent bien ça comme on les a soutenu toutes ces années". Si on veut vraiment le bien du groupe, on ne peut pas mettre nos attentes personnelles avant eux”.
Louis-Henri: “Cela m'est complètement égal qu'un groupe soit distant avec ses fans, je n'ai pas du tout cette fixette "fandom". Il me semble par contre que via son label Cult Records, Casablancas (et donc la galaxie Strokes) essaie de plus communiquer qu'avant”. 
Annelise: “Dans ma tête, de façon un peu naïve, ce n'est pas un groupe marketé donc ils font ce qu'ils veulent et les fans ne sont pas une donnée marketing qui entre en ligne de compte. Quoiqu'ils ont avoué avoir joué quelques festivals en 2010 tout simplement parce qu'on leur proposait une tonne d'argent, impossible à refuser. Et puis j'ai vu la semaine dernière à Londres qu'entre les teesh Rolling Stones et One Direction, il y a maintenant des tee shirts The Strokes chez Primark, alors est-ce que du coup ils sont devenus mythiques comme les Stones ou marketés comme les 1D ? Ou de simples objets pop qui dépassent la musique et leur existence en tant que groupe ?”
Puis, en 2011, le groupe annonce la sortie d’un très attendu nouvel album, leur quatrièms, Angles. Un album apparemment enregistré dans la douleur, Julian posant sa voix séparemment du groupe enregistrant ses parties. 
Arthur: “Je ne pourrais jamais être objectif sur leur travail, l'affecte prendra toujours totalement le dessus sur l'analyse. je n'ai qu'une trentaine d'albums sur mon iPhone, et ceux là sont dessus depuis deux ans. Je les écoute encore régulièrement dans les transports, plus par habitude que par amour”.
Juliette: “J'aime certains titres sur Angles mais étant une fan absolue de First Impressions Of Earth, il m'a quand même pas mal déçue car il était très loin d'être à la hauteur de mes espérances (qui n'étaient certes pas du tout raisonnables après cinq ans d'attente). J'aurais préféré un album moins différent de FIOE, avec des guitares plus lourdes et intéressantes et pas des synthés ou du rock plus banal / classique. Je ne suis pas du tout contre un petit “Ask Me Anything” de temps en temps, mais c'était quand même pour moi un album forcé, même si quelques titres comme “Life Is Simple In The Moonlight” sont quand même magiques et m'ont rappelé pourquoi ce groupe était si important pour moi à la base. Comedown Machine par contre n'a suscité aucune émotion chez moi. Ils l'ont clairement fait pour pouvoir être débarrassé de leur contrat et pour moi ça se sentait. Je lui redonnerai peut être sa chance un jour ou l'autre mais pour moi il était vraiment trop générique, et il est sorti à un moment où les albums sonnant comme ça ne m'intéressaient pas”.
Louis-Henri: “Pour moi, les Strokes n'ont enregistré qu'un seul morceau moyen : "Juicebox". Tout le reste, c'est le haut du panier. Je suis comme un vieux fan des Stones ou des Stooges incapable de résister à une nouvelle sortie de ses héros. Comedown Machine était évidemment mon album préféré de 2013”. 
Annelise: “Angles, je l’aime moins forcément que les premiers albums mais il y a quelques chansons biens. Oui j'aime certaines chansons, après la voix de Julian et quelques gimmicks des Strokes ça me suffit. A vrai dire, je les ai beaucoup moins écouté”.
Durant ces cinqs années, entre First Impressions Of Earth et Angles, ce fut le bal des rumeurs et des petites phrases. Split, engueulades, tensions...
Arthur: “Quelles rumeurs ? Non pas vraiment”. 
Juliette: “Initialement, j’ai tout suivi de très près car j'étais très impliquée dans leur forum américain, on y discutait évidemment beaucoup du groupe et le moindre de leurs agissements était scruté, analysé et commenté. Les gens ont progressivement un peu lâché l'affaire sur le forum à cause du manque d'actualité et de trop nombreux faux espoirs (certains projets solo causaient également pas mal d'énervement et de dispute au sein des fans). Au bout d'un moment, spéculer et attendre a juste cessé d'être drôle, mais je suis quand même toujours restée à l'affut des rumeurs, malgré les régulières déconvenues”.
Louis-Henri: “Je suivais, bien sûr, mais sans me faire de mauvais sang. Comme répondu plus haut, j'aimais leurs albums en solo, donc j'étais content”. 
Annelise: “C'est drôle comme à chaque sortie d'album, on en apprend un peu plus sur le précédent, l'ambiance d'enregistrement ou le manque de. Donc forcément en fan avide d'info, je guettais la moindre phrase ou collaboration de l'un ou l'autre, Valensi qui bosse avec Sia, Albert Hammond Jr joue dans Gossip Girl ou se marie, Fab Moretti qui vient à Paris faire du dessin avec Luz chez Perrotin, Julian lance un label (Cult Records, avec de nouveaux groupes très sympa), Nikolaï a un nouveau groupe Summer Moon. Avec Instagram et Twitter, il y a une proximité et un contact presque continu avec certains et pas seulement au rythme des interviews de sortie d'albums ce qui est plutôt cool... Quand Julian débriefe les interviews mal retranscrites après coup sur Twitter, quand tu es fan t'as l'impression d'avoir un truc plus direct, plus personnel, un accès moins restreint, même si tout cela est très maitrisé”.
Julian Casablancas tourne pour promouvoir son deuxième album solo (enfin, avec The Voidz), intitulé Tyranny. Sur scène, un manque se fait-il ressentir ?
Arthur: “Je vois un mec hyper doué, un songwriter déterminé et visionnaire qui continuera à faire ses trucs quoiqu'il arrive. à mon avis les Strokes n'étaient qu'un tremplin pour sa carrière. Ce mec a encore beaucoup de choses à nous apporter”.
Juliette: “Quand il joue des titres des Strokes, oui. Même si les autres membres ne sont pas les compositeurs initiaux de la majeure partie des morceaux, ils ont quand même leur style de jeu bien particulier et qui contribue grandement à ce qu'est le son des Strokes. Nick et Albert sont des guitaristes remarquables avec des personnalités importantes qui font partie intégrante du son et de l'image du groupe, et je ne pense pas qu'ils soient remplaçables. Les Strokes ont toujours été pour moi une unité indivisible, même si Julian a longtemps tenu tous les rennes en main. C'était un des trucs qui les rendaient unique: ils avaient un leader sur le plan musical mais qui ne se définissait pas comme tel, mais qui était le garant de l'union de l'ensemble et de leur intégrité musicale. Tant que les autres étaient ok avec ce deal le groupe pouvait continuer d'exister, et évidemment ça a fini par ne plus être le cas. C'est normal mais c'était probablement pas la meilleure chose qui est arrivée à leur son.
Et l’avenir ?
Arthur: “L’avenir du groupe, je le vois ronflant, probablement. comme celui de Blur non ? Des projets solos de Julian à la pelle et une tournée de reformation dans quinze ans. juste de quoi ne pas nous faire oublier nos premiers amours, nos premières crises de nerf, nos premiers stage diving. Notre adolescence”. 
Juliette: “Au point où on en est je pense qu'ils feraient peut-être mieux de se séparer car les deux derniers albums n'ont pas fait grand chose pour la "legacy" du groupe. Je peux comprendre qu'ils en aient marre de jouer toujours les mêmes morceaux, de voir toujours les mêmes têtes et qu'il soit nécessaire pour eux d'évoluer, et c'est pour ça que je ne voudrais pas qu'ils se "forcent" à continuer de faire des trucs ensemble si le cœur n'y est plus. On comprendra s'ils ont envie de passer à autre chose pour de bon, personnellement je ne le retiendrais pas contre eux. Après, faire partie des Strokes c'est quand même une bonne façon de gagner sa vie et de nourrir ses gosses, et j'imagine que ça joue aussi un rôle dans le fait qu'ils ne se soient jamais vraiment séparés. Ils ont un truc que les gens aiment et qui est une source de revenus stable et je peux comprendre qu'il leur soit difficile de s'en séparer”.
Louis-Henri: “Là aussi c'est bizarre, mais je m'en fous. Je n'ai pas du tout le côté fan nostalgique qui veut foutre ses idoles au Musée Grévin (en gros : qui veut qu'ils ressassent ad libitum leurs débuts). Je vois les Strokes comme de vieux compagnons de route à qui je souhaite d'aller de l'avant, de tenter des trucs, de se planter pourquoi pas, de rebondir, etc... Par ailleurs, j'adore les personnalités de Casablancas et Hammond Jr. Ce qui compte à mes yeux, c'est leur épanouissement artistique. Si celui-ci passe par les Strokes, génial. Si c'est par leurs albums en solo, super aussi”. 
Annelise: “Je ne sais pas, j'ai envie de façon un peu égoiste forcément qu'ils continuent, mais s'ils n'ont plus envie de jouer (d'être?) ensemble”.
Arthur: “Cela m'étonnerait qu'ils jouent pour le fric. J'aime à croire qu'ils sont comme un vieux couple qui s'en ait mis plein la gueule, trahi, déçu, mais qui n'oubliera jamais ce qu'il a traversé et construit ensemble”.
Juliette: “Je pense sincèrement que ça va mieux entre eux maintenant qu'il y a deux-trois ans par exemple, mais ne suis pas à même de juger s'ils prennent à nouveau du plaisir ou non à jouer ensemble. Ils ont maintenant des familles et des responsabilités en dehors du groupe, c'est l'une des raisons pour lesquelles il leur est difficile d'exister aujourd'hui en tant que groupe de la même manière qu'ils existaient avant, en étant juste un gang de potes. C'est difficile de les blâmer pour ça, c'est plus des ados un peu attardés. Ils ne sont plus aussi libres de leurs mouvements qu'avant, mais le groupe demeure probablement essentiel pour eux. Mais là encore ça n'est que de la spéculation par rapport à ce que j'ai pu observer ces dernières années, peut être que je suis loin du compte mais impossible de savoir exactement où ils en sont sans leur poser la question directement. Peut être que maintenant qu'ils sont libérés de leurs obligations de contrat ils vont pouvoir enfin faire un premier vrai album collectif cohérent et intéressant, qui renouera avec ce qui avait fait d'eux initialement un groupe différent des autres. On ne peux que l'espérer, mais je ne me fais pas non plus trop d'illusions”.
Louis-Henri: “Il ne faut pas faire l'autruche : j'imagine que sous le label "Strokes", devenu iconique, ils touchent des cachets faramineux. Nick Valensi n'a jamais rien fait en solo. Il a peut-être besoin d'une nouvelle piscine ? De nourriture pour son chien ? Ces concerts ne sont peut-être qu'un grand Restau du Coeur pour Valensi ? Plus sérieusement, je pense qu'a défaut de l'amitié d'antan, la camaraderie perdure, qu'il y a encore des liens forts entre certains d'entre eux (Albert avait sorti son EP sur le label de Julian), et qu'ils laissent la porte ouverte à un sixième album, donc… Le jour où ils se détesteront vraiment, je fais confiance à Casablancas pour renvoyer tout le monde dans son coin”.
Annelise: “Je crois qu'à un moment (assez tôt) ils en ont eu marre d'être les sauveurs du rock et d'avoir à refaire Is This It? en portant des Converse sous peine d'être accusé de trahison. Est-ce qu'ils sont toujours potes ? Je n'en sais rien. J'espère. Est-ce qu'ils ont toujours envie d'enchaîner les concerts et d'être ensemble non stop comme à 20 ans alors qu'ils ont des familles maintenant ? Non je ne pense pas. Valensi vit à LA, les autres à NY je crois,  c'est forcément moins simple que quand ils étaient colocs, mais bon quinze ans pour un groupe c'est pas mal non? Pourquoi ne pas se séparer? Bah parce que si des promoteurs les paient grassement pour jouer quelques festivals tous les deux ans et il y a encore des fans, il n'y a pas de raison d'arrêter ! "We'll be in this race until the very end", comme ils le chantent sur “Welcome to Japan”. 
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thefrencknews · 4 years
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Interview de 24heures de Lausanne.
Elodie Frenck s’installe sur la banquette de cette brasserie typiquement parisienne dans le quartier de Courcelles après trois bises.  «Vous voyez, je m’adapte!» Le serveur arrive. «Je voudrais un jus de pommes s’il vous plaît.» Elle se sent obligée de justifier son choix: «Comme c’est l’heure de l’apéro, j’aurais normalement choisi un petit verre de rosé, mais je veux faire bonne impression dans le journal. Oh et puis allez, tant pis pour ma réputation, je prends le rosé. De toute façon je n’ai pas du tout envie de jus de pommes!» Mais envie de parler comédie, ça oui! Depuis le temps que vous êtes ici, vous êtes passée de Lausannoise à Parisienne, non? Absolument pas, je ne me sens pas du tout Parisienne. Ça fait 26 ans que je vis à Paris, mais je n’arrive pas à savoir ce qui me manque pour me sentir d’ici. Mais maintenant que vous me demandez d’y réfléchir vraiment, en toute sincérité je me sens toujours Lausannoise! Être Suissesse, c’est assez exotique pour vous faire décrocher des rôles?Non! Même pas! J’ai en plus perdu l’accent depuis le temps, même s’il m’arrive parfois encore de dire «cornet» au lieu de sachet. Par contre, je tiens à mon «nonante». C’est ancré depuis bien trop longtemps. Télévision, cinéma, théâtre, vous êtes une vraie touche à tout ou vous prenez ce qui vient? Ce qui dicte mes choix, c’est avant tout le personnage. Le support vient après. Aujourd’hui, les choses ont changé et télévision ou long métrage, finalement, ce n’est plus si différent. L’époque où on pensait que la télé c’était de la merde, et qu’il n’y avait que le cinéma qui comptait, est révolue. Quand on est comédienne, le plus important c’est qu’il y ait un beau personnage à faire exister, une vraie histoire à raconter. Dans cette perspective, une série c’est le rêve, parce que vous pouvez faire évoluer le personnage sur la durée... Le cinéma, ça fait toujours envie parce que c’est de l’artisanat. On a beaucoup de temps, pour faire et refaire les choses, pour aller dans le détail. Approfondir un rôle, c’est surtout ça qui m’intéresserait. En télé, tout va si vite qu’on est obligée de travailler beaucoup seule et de sans cesse foncer. Avec l’arrivée d’acteurs comme Netflix, les frontières entre les genres sont de toute façon extrêmement floues. C’est certain. L’évolution se situe surtout au niveau des budgets. Ce genre d’entreprise met énormément de moyens dans ses productions, notamment très en amont, au moment de l’écriture, et après elles engagent souvent des acteurs incroyables. Donc le résultat peut être totalement dingue. Mais ce n’est pas garanti non plus! Vous n’êtes donc pas comme ces comédiennes qui ont régulièrement besoin de sentir le contact direct du public au théâtre? Je ne ressens pas ce besoin, non. Heureusement d’ailleurs, parce que ça doit bien faire cinq ans que je ne suis pas remontée sur les planches! Quand je joue, je pense bien évidemment au plaisir que ça va donner. Le retour d’audience a de l’importance pour moi. Avec la série «Les petits meurtres d’Agatha Christie», par exemple, on fait des projections publiques et d’entendre les gens rire me touche. Je me dis: «Bravo, là t’as réussi, c’est juste!» Enfant et adolescente, j’ai ressenti plein de choses très fortes en regardant des films, des téléfilms ou des pièces. Aujourd’hui, j’aimerais bien redonner ça aux gens. Mais je ne choisis pas pour autant mes rôles en me demandant sans cesse «est-ce que ça va plaire ou pas?». On dirait même que vous affectionnez les paris risqués, non? C’est vrai que j’aime essayer totalement autre chose, comme récemment quand j’étais sur un projet au théâtre qui ne s’est finalement pas fait (ndlr: «Palace!», mais dès les lectures le courant n’est pas du tout passé avec le metteur en scène et elle a préféré dire stop). Ou comme l’année passée où j’avais trois jours pour passer du personnage de Marlène, ultramaquillée, pour «Les petits meurtres d’Agatha Christie» qui se tournait dans le nord, à une policière, Marina, pour «Le Pont du Diable» qui se tournait dans le sud. Oui, j’aime la difficulté, mais pour réussir il faut être accompagnée et c’est parfois ce qui manque. Moi j’aime répéter, faire des lectures, apprendre à connaître les gens. Je ne suis pas une tête brûlée, je suis toujours très inquiète de bien faire. À vous entendre, on dirait que vous traînez des ratés qui vous auraient traumatisée… Alors franchement, non! Il y a des trucs qu’on me proposerait aujourd’hui que je ne voudrais plus tourner. Mais quand j’avais 20 ans, il fallait bien apprendre, voir ce qu’était un plateau. Parfois il faut accepter des choses pour aller plus loin, ou simplement, c’est vrai, pour pouvoir s’en sortir financièrement. Être actrice, c’est sans cesse sortir de sa zone de confort… Oui, je sors de ma zone de confort bien malgré moi. Enfin, je dis ça, mais où est-elle? Je ne suis confortable nulle part! Je rencontre des gens qui semblent à l’aise où qu’il soient. Eh bien, ce n’est vraiment pas mon cas. C’est pour ça que cette série Agatha Christie était bien agréable, avec des rendez-vous réguliers… Avant ça tu vis en permanence dans une certaine insécurité: tu te dis que tu as bien gagné ta vie, mais pour combien de temps? Avec «Agatha», je respirais, je savais que dans cinq mois j’allais à nouveau tourner. Mais je me suis immédiatement dit: attention au confort! Tant que tu es dans ce genre de plan, tu ne cherches pas vraiment autre chose…
Et qui dit succès dit pression, non? Je n’ai rien ressenti de spécial. J’aimais beaucoup la série, donc je comprenais que ça plaise. Mais les propositions de rôles n’ont pas afflué. Et évidemment les gens ne m’arrêtent pas dans la rue parce qu’ils ne me reconnaissent pas. Devenir Marlène était une sacrée transformation physique. Je l’appelais la travelo, Marlène, d’ailleurs. Mes partenaires ont pu surfer sur le succès de cette série, moi pas. Ce qui est étrange et finalement pas mal. Bon, j’aimerais bien avoir une boîte à lettres pleine de scénarios, mais j’avoue apprécier de pouvoir acheter ma baguette tranquille. 
Sur le vif : 
Qu’est-ce qui vous endort, Élodie Frenck? «Le sommeil! Je vous promets que quand on a deux enfants en bas âge, c’est avec une fatigue très saine qu’on se couche le soir.» Un plat que vous vous êtes promise de ne jamais manger ? «Du fenouil. C’est plus un mets qu’un plat, je suis d’accord. Et rien à voir avec le goût: j’y suis mortellement allergique. C’est bien simple, si j’y touche, je gonfle, mais je gonfle...» Quel défaut avez-vous hérité de vos parents (ndlr: le pédiatre péruvien Nahum Frenck, l’écrivaine et enseignante française Sylviane Roche)?  «Sans aucune hésitation, l’impatience!» Quelle serait votre madeleine de Proust?  «Elles sont multiples pour une expatriée comme moi! J’en ai plein et toutes suisses. Les rösti, la saucisse aux choux et papet de poireaux ou l’émincé de veau à la zurichoise. Et bien évidemment les classiques que sont la raclette ou la fondue. Mais si je devais choisir, ce serait le carac. Ou le ramequin au fromage. Oh et puis non, le carac quand même!» Avec qui n’envisageriez-vous jamais de partir en vacances? «J’imagine plein de monde. Mais je vais éviter les orientations politiques et les personnages célèbres. Donc je vais répondre que je ne partirai jamais en vacances avec un radin!» Si vous ne deviez garder qu’un seul des quatre éléments, ce serait lequel? «Clairement l’eau. Je dois avouer que mon lac me manque énormément à Paris. Et là, je viens de réussir à me baigner dans la mer à Deauville sur le tournage de «Meurtre à Pont-l’Évêque» en plein mois de décembre! Le bonheur absolu.» De quel personnage, mort ou vivant auriez-vous aimé vivre la vie?  «Ah mais de nouveau il y en a plein! Vous savez quoi? J’aimerais bien être une sorcière. Une sorcière moderne et urbaine. Donc ni celle de la série, la bien-aimée qui fait des trucs mignons avec son nez, ni celles du passé qui terminaient sur un bûcher.»
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deescontinuity · 5 years
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01:48
Depuis que je me suis prouvé avec Good omens que je peux lire de vrais livre en anglais (alors que je lisais déjà des fanfics/essais), je veux en lire plein d'autres, car j'ai l'impression de vraiment voir ce que l'auteur voulais faire passer, mais je suis limité par ceux disponibles sur le réseau de bibliothèques, et c'est quasi que des Harry Potter, ou sinon faut acheter mais j'ai pas vraiment l'argent...
Mais pour l'instant voici ma liste (j'aime les listes je me rends compte) :
The portrait of Dorian Gray - Oscar Wilde (même si je pense que si j'arrive à le lire en français c'est déjà pas mal)
Fragile things - Neil Gaiman
Coraline - Neil Gaiman (déjà lu en français il y a longtemps mais traumatisé par le film)
Billy Elliot - Melvin Burgess (que j'ai emprunté en français)
1984 - Georges Orwell
Dr Jekyll and Mr Hyde - Robert Louis Stevenson
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12- L'ABUS
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Un film qui m'a traumatisé, c'est "Le livre de Jérémie" d'Asia Argento. La réalisatrice joue le rôle principal, une prostituée junkie qui trimbale son fils de six ans partout avec elle sur la route. Ce dernier pendant l'absence de sa mère se travestit en baby doll et se fait abuser par l'amant de sa mère joué par Marilyn Manson. C'est là que j'ai compris un des aspect tragique de la pédophilie.  Des prêtres catholiques sud-américains ont vraiment qualifiés les enfants qu'ils avaient abusés de "los niños perversos" insinuant que les prêtres étaient des victimes et que les enfants les avaient séduits. Dans le film, l'enfant utilise un stratagème qui chez des adultes serait de séduction. Il est clair qu'en réalité l'enfant délaissé reproduit un comportement d'adulte qu'il voit toujours récompensé par de la tendresse. Les ignobles prédateurs pensant avoir été séduits sont en fait  des monstres qui n'ont pas voulu entendre l'appel au secours d'un enfant en manque d'affection. La sexualité ne fait pas partie de leur conscient mais laisse des traces indélébiles dans leur inconscient.
J'ai été abusé sexuellement à l'âge de 8 ans mais miraculeusement je ne souffre d'aucun traumatisme, je m'en suis seulement rappelé 30 ans plus tard.
Malakoff dans les années 70 est un mélange de cultures extraordinaire. Mon éducation religieuse m'enseigne que nous sommes tous frères et sœurs et jamais il n y a eu un doute sur cela. Les noirs, les arabes, les juifs, les asiatiques et les blancs bien sûr, toutes les communautés sont représentées dans mon école, dans la congrégation spirituelle, et vivent en bonne harmonie. Nous habitons un petit pavillon de banlieue et nos voisins sont Algériens. Ma mère achète une couscoussière comme la voisine. Il y a deux éléments, une grande marmite où les légumes mijotent et une plus petite qui s'adapte sur le dessus de la première. Il y a des trous dedans comme une passoire, on y met la semoule de couscous, la vapeur des légumes du dessous la  fait cuire. La voisine dit qu'il faut utiliser du beurre rance pour le faire comme les algériens. Nous n'avons jamais de beurre rance. Nous utilisons aussi comme elle dit de la semoule au grain moyen mais ca passe au travers de la passoire, il faut mettre un torchon sous la semoule pour que la vapeur passe sans que la "graine" ne tombe. En général on fait le couscous au poulet mais les grands jours on le fait aussi à l'agneau. C'est presqu'aussi bon qu'au restaurant le Bagdad à Paris, rue du faubourg Montmartre. Le Bagdad, c'est cher, c'est pour quand mon frère Pascal est là. Il a deux ans et demi de plus que moi, vient deux week-ends par mois à la maison et pendant les vacances. C'est pas vraiment un frère c'est plutôt un copain. Le fils de la voisine, Abdelkader a 20 ans et me fait régulièrement "la toilette" avec un gant mouillé d'eau tiède , je suis tout propre après. Un jour Pascal est là et il va nous faire la toilette à nous deux. Nos parents respectifs ne sont pas là, pourquoi pas.  Mon frère et moi sommes nus sur le ventre allongés sur la table de la cuisine et Abdelkader devient très brusque. Notre derrière est très sale, le gant ne passe pas seulement entre nos fesses, il doit rentrer aussi dans le trou. Ca fait mal. Avoir mal fait partie de mon quotidien, je ne me plains jamais, à qui d'abord, certains disent que je suis un enfant martyr. Pascal ne le voit pas de la même façon et raconte notre après-midi chez le voisin à Maman. C'est une catastrophe. Nous devons raconter en détails et séparément notre expérience pour savoir si nos récits concordent. Tout le monde crie, il est interdit de ne plus jamais retourner chez la voisine. Je ne comprends pas pourquoi, on aurait dû rien dire, le couscous de la voisine est bien meilleur que celui de Maman.
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asexualiteinfo · 6 years
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Est-ce que je suis asexuel·le ?
Vous vous demandez si vous êtes sur le spectre de l’asexualité ? vous aimeriez vous positionner avec certitude quelque part sur le grand schéma de l’orientation sexuelle ? 
J’ai une bonne et une mauvaise nouvelle : il n’y a pas d’examen à passer et personne ne peut - et ne devrait - vous dire votre orientation. C’est à vous de décider si le concept décrit partiellement ou totalement votre expérience et s’il vous semble confortable et approprié pour vous.
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Vous préféreriez répondre à un « test » pour déterminer votre asexualité ? Il consisterait en une seule question :
Avez-vous très peu à pas du tout d’attirance sexuelle envers d’autres personnes ?
Si vous avez envie de répondre oui à cette question, alors vous êtes probablement sur le spectre de l’asexualité, et les articles de ce site ou d’autres sites relatifs à ce sujet vous aideront peut-être dans vos interrogations et défis quotidiens.
Qu’est-ce qu’on trouve dans l’asexualité ?
La définition proposée ici, la plus large et inclusive possible, laisse une belle marge de manoeuvre pour des expériences assez diversifiées :
Est-ce que j’ai très peu à pas du tout de libido ou de fonction sexuelle ?
Est-ce que je ne trouve pas vraiment, ou vraiment rarement, ou jamais, d’autres personnes sexy, dans le sens où je ressens du désir sexuel ou de l’excitation, ou dans le sens où j’ai très envie de les toucher de manière sexuelle ? (Oui c’est une tentative de clarification de ce qu’est l’attirance sexuelle, mais oui, si vous en avez eu besoin, vous êtes probablement sur le spectre !)
Est-ce que je peux ressentir de l’attirance sexuelle très ponctuellement mais je ne ressens pas l’envie ou l’intérêt de poursuivre ou concrétiser ce sentiment ? 
Est-ce que je pense que le sexe ou les pensées sexuelles peuvent être agréables, mais que ce n’est pas vraiment intéressant ni important ? Est-ce que je m’en passe plutôt bien, voire très bien ?
Est-ce que le concept même d’attirance sexuelle n’est pas très pertinent ou important dans mon expérience ?
Est-ce que je ne comprends pas trop tout le tralala autour du sexe et/ou des relations sexuelles et que ça me semble fortement exagéré ? Est-ce que les scènes de sexe dans les films m’ont souvent semblé non justifiées ou plutôt ennuyeuses ?
Est-ce que je me rends compte que ma vision ou mon expérience du sexe est différente de la plupart des gens ? Est-ce que j’ai déjà eu à exagérer mon propre intérêt pour le sexe dans une conversation ?
Est-ce que je n’ai pas ou quasiment jamais de pulsion sexuelle ? Le sexe, ce n’est pas mon affaire ?
Est-ce que je ne ressens pas l’envie, le besoin d’intimité sexuelle et de sexe avec des partenaires ? (voire cela me gène !)
Est-ce que j’ai assumé que j’étais hétéro (mais peut-être pas très doué·e !), puis j’ai cru que je pouvais être bi parce que je ne ressentais pas de différence entre les personnes, puis je suis tombé·e sur le concept d’asexualité et ça fait tilt ? Ou peut-être que j’ai toujours perçu une différence avec les expériences de mon entourage ?
… si vous avez répondu « oui » à une de ces questions, vous êtes probablement sur le spectre de l’asexualité !
Asexuel·le et... ?
- OK je suis dans le spectre, et plus précisément ?
Cette notion de spectre vise l’inclusion. Les expériences humaines sont toutes uniques en leur genre, et l’asexualité reflète cet éventail des possibles ! Quand on découvre le concept, cependant, cela peut paraître large et difficile à comprendre. Comment s’y retrouver ?
Vous pouvez vous arrêter à la notion d’asexualité, spectre ou pas, si elle vous correspond bien personnellement, et décrire si vous le souhaitez vos expériences avec vos mots. 
Vous pouvez aussi explorer des concepts complémentaires qui ont été proposés par la communauté asexuelle.
On peut avoir des béguins pour d’autres personnes et tomber amoureux·se et se considérer comme asexuel·le car on n’est pas attiré sexuellement par ces personnes. La communauté asexuelle est peut-être la première à avoir proposé une lecture des orientations fragmentée (devenue parfois très fragmentée !), en séparant l’orientation romantique (hétéroromantique, homoromantique, biromantique, aromantique, etc.) de l’orientation sexuelle. Elle est allée jusqu’à imaginer une attirance amicale, esthétique, sensuelle, etc. Il y a plein de manière d’éprouver de l’intérêt pour d’autres personnes… ou non !
On peut avoir une libido (et se masturber ou non) et se considérer comme asexuel·le car on n’est pas attiré sexuellement par d’autres personnes. Certain·e·s appellent ça « libidoïsme ». Souvent, les personnes asexuelles penseront à des situations ou des objets, à la rigueur à des personnes pratiquant un acte sexuel mais sans se mettre elles-mêmes en scène dans leurs fantasmes et sans trop de détails sur les corps de ces personnes, ou alors avec un partenaire non visible, sans visage… c’est alors l’acte et l’excitation autour de l’acte qui va faire marcher la libido, et non la représentation de personnes. A l’inverse, il peut y avoir des fantasmes liés à des personnes que l’on considère inaccessibles (célébrités, personnages de fiction…), qui permettent d’imaginer un acte sexuel en s’assurant qu’il n’y ait pas de concrétisation. Certaines personnes peuvent aussi imaginer plein de choses sans aucune connotation sexuelle, c’est un voyage de l’esprit !
On peut pratiquer des activités sexuelles avec des partenaires et se considérer comme asexuel·le car on n’est pas attiré sexuellement par ces personnes mais on le fait pour d’autres raisons (c’est agréable, ça leur fait plaisir…). C’est la différence entre l’orientation et les pratiques et goûts en matière de sexe. Les personnes sexuelles peuvent être dégoûtées par le sexe (avec ou sans partenaires), indifférentes, ou trouver ça pas mal, même sans désir pour l’autre ! 
On peut avoir été, et être encore, traumatisé·e sexuellement et se considérer comme asexuel·le car on n’est pas attiré sexuellement par d’autres personnes et qu’on sent que ce concept nous correspond. C’est malheureux mais il y a plein de personnes traumatisées tous les jours dans le monde ; certaines s’identifient comme asexuelles, la majorité, non. Et inversement beaucoup de personnes asexuelles n’ont pas eu de trauma sexuel dans leur histoire. Il n’y a pas de lien statistique entre le trauma et la sexualité. C’est bien la façon dont se sent la personne qui détermine son orientation.
On peut ressentir de l’attirance sexuelle dans de très rares cas (graysexualité) ou seulement après avoir forgé des liens intimes avec une personne (demisexualité) et se considérer comme asexuel·le car on n’est que très peu ou presque jamais attiré par d’autres personnes et que notre expérience nous semble très différente de ce que renvoie le reste de la société. C’est une expérience qui appartient bien au spectre de l’asexualité.
Asexuel·le ce n’est pas…
L’abstinence : avoir des désirs sexuels et s’abstenir d’y donner suite pour des raisons extérieures (religion, attendre le bon partenaire, etc.) ne relève pas de l’asexualité, c’est un choix de pratique sexuelle - ou plutôt de non pratique, indépendant du désir !
L’absence de sentiments : le désir sexuel, le désir romantique, ne sont que quelques uns des types de sentiments que l’on peut ressentir vis à vis d’autres personnes. Il y en a plein d’autres tout aussi forts et importants, et en fait chaque sentiment est unique aux personnes qu’il relie !
Un problème médical : il peut arriver d’avoir une baisse (moins souvent une hausse !) soudaine de libido due à une pathologie ou des médicaments, mais un désintérêt durable pour le sexe sans aucun autre symptôme n’est pas une maladie.
Voir aussi la série : Qu’est-ce que l’asexualité n’est pas ?
Un problème de santé et L’Asexualité n’est pas une maladie 1 et 2
Un problème féminin... et blanc
Un problème de vocabulaire
Un problème d’attractivité
Un problème d’âge ou d’expérience
Un problème
Autre chose qu’une orientation sexuelle
Et si je ne suis toujours pas sûr·e ?
Utilisez les concepts qui vous sont utiles en respectant ce qu’ils signifient pour les autres.
Si les choses changent ou deviennent plus claires pour vous, utilisez alors les concepts qui vous semblent plus appropriés, avec le même respect.
Ne vous cassez pas trop la tête, et pas la peine de tomber dans l’idolâtrie. L’orientation sexuelle n’est pas un diagnostic officiel, c’est la description d’une expérience : prenez-la comme un outil, qui vous aide à vous construire, et à construire votre communauté.
Conclusion : je suis probablement sur le spectre de l’asexualité. Que retenir ? 
C’est OK. C’est complètement valide, naturel, acceptable : je suis moi et je suis très bien comme ça. Vraiment !
Bienvenue au club ! Je ne suis pas seul·e, il y a plein d’autres personnes qui partagent cette expérience, et si elles ont le droit d’être différentes, moi aussi !
Je peux me faire confiance. Si je sens que mon expérience d’attirance ou de pensée sexuelle est différente du commun, c’est mon ressenti qui prime. Je peux m’écouter moi-même, pas ce que je pense que je “devrais” faire ou ressentir. 
Ça peut être le début du chemin de l’acceptation : si j’avais besoin de ce mot, peut-être que comme beaucoup de personnes asexuelles je me sentais cassé·e. Avoir un mot, un concept, c’est commencer à pouvoir vraiment réfléchir, identifier, vivre avec cette expérience. Je peux me passer de ces concepts, me les approprier, ou les utiliser puis m’en détacher.
Je n’éprouve pas certains désirs… et donc je peux choisir quoi faire avec ça. Je peux tester des trucs si j’ai envie, mais je peux aussi me dire que je n’ai pas envie et que je ne veux pas me forcer, et respecter mon non désir. Et c’est complètement valable. Mieux comprendre ce concept et mon lien avec lui me permet de décider en conscience de ce que je veux vraiment faire, et vivre en me respectant moi-même et mes possibles partenaires.
Et c’est ce que je vous souhaite le plus sincèrement.
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navisseli · 6 years
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Là où les mots n’existent pas
A comme Association, tome 5
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Déso pour la qualité, j’ai pas trouvé mieux pour cette édition... #Seli
Heureusement que je suis là :p #Naviss
Auteurice : Erik L’Homme
Maison d’édition : Folio junior
Date de publication : 2011
Nombre de pages : 210
Genre : Fantastique
Ce qu’en pense Seli : 
Replonger dans A comme Association, c’est comme replonger à nouveau dans les tréfonds de mes émois littéraires d’adolescente. Et pour une fois, c’est mon tour de raconter ma vie...
J’ai toujours été une lectrice dévoreuse de pages et de romans à la chaîne. Je me souvient d’ailleurs qu’il me tardait d’apprendre à lire pour pouvoir lire Harry Potter, et que je rongeais mon frein en attendant d’enfin entrer au CP. Je venais de voir le premier film et j’avais déjà conscience que prendre mon indépendance de lectrice me permettrait d’aller beaucoup plus loin que les petites histoires que mes parents me lisaient le soir. Cependant, une fois que j’eus appris à lire, je restais relativement sur un terrain balisé. J’avais beaucoup de mal à ouvrir mes horizons littéraires. L’enfant que j’étais devait singulièrement manquer de curiosité... ou avoir une immense peur de commencer quelque chose qui pourrait potentiellement la décevoir. 
Arrivée au collège, je me suis fait tout un groupe d’amies aussi férue de lecture que je l’étais, à un détail près. Elles connaissaient bien plus de romans jeunesse que moi. Ainsi que l’envie de les partager... J’ai un souvenir très précis du premier roman qu’on m’a prêté à cette période, et c’était Eragon. Mais après est venu Pierre Bottero, qui est le second créateur d’histoires à avoir chamboulé ma petite vie (la première étant J.K Rowling, et les troisièmes et dernières en date, les soeurs Wachowski...). Je me suis pleinement investie dans son univers, ses histoires, ses personnages. C’est Bottero qui a instillé en moi l’envie de créer à mon tour, d’écrire et de partager des histoires. Il m’a ouvert les portes de l’imaginaire et depuis elles ne sont toujours pas refermées. Je me souviens encore avec nostalgie de cette époque où ils nous arrivait de discuter bouquins durant les récrés et de commenter les romans et mangas qui passaient de mains en mains... J’ai également découvert Erik L’Homme à cette époque, dont j’appréciais aussi beaucoup les romans. Puis est venue à nos oreilles la nouvelle que Bottero et L’Homme travaillaient sur un projet commun. Il me semble que cette année là, ils étaient allés tous les deux aux Imaginales, pas très loin de chez moi. J’ai regretté des années de ne pas y avoir foutu les pieds plus tôt. Puis vint le drame... 
Un matin de 2009, je ne sais plus comment, j’apprends la mort de mon idole.
Vide. Trou noir. Néant. Infinie tristesse. Rien que d’y penser, j’ai les larmes qui remontent... 
Pourquoi j’en parle ? Parce qu’en lisant aujourd’hui ce roman, tout est remonté. 
En effet, Bottero a disparu alors que A comme Association était encore en cours de publication. L’Homme rédigeait les histoires de Jasper, Bottero celles d’Ombe. Arrive le cinquième tome, et L’Homme se retrouve avec une héroïne et une saga toutes deux orphelines. On sent tout du long que cette perte l’a marqué, et pour développer, je vais devoir spoiler...
{ZONE SPOILER} Comme il l’a dit en interview, L’Homme n’a pas voulu reprendre le personnage d’Ombe, et celle-ci meurt au début du roman, creusant un grand vide en Jasper au moment où celui-ci réalise qu’il l’aimait profondément (mais pas romantiquement, ce dont il était persuadé jusque-là). Traumatisé par cette perte, Jasper se met en tête de se venger, et au fur et à mesure qu’il avance dans sa quête, ses réflexions internes trouvent une réponse inattendue : la voix d’Ombe qui résonne dans sa tête. Le doute plane : est-ce juste une projection du souvenir d’Ombe ? Est-ce-que l’esprit d’Ombe, décédée dans des circonstances encore non-élucidées, s’est accroché à celui de Jasper et y demeure dans un coin ? Le doute semble planer. Comme Jasper ne semble pas choqué, soit il est conscient que c’est juste son cerveau qui lui joue des tours, soit c’est ce qu’il imagine et Ombe est bien là... Je trouve que les deux théories se défendent, et dans tous les cas, c’est un bon moyen de se séparer d’Ombe sans l’effacer complètement de l’histoire.
Il demeure que la mise en abîme est très touchante. Pas besoin d’avoir fait khâgne pour comprendre que l’auteur parle de la douleur d’avoir perdu son ami, et de son deuil. J’imagine parfaitement L’Homme en train de rédiger son texte tout seul, et qui imagine ce qu’en aurait dit Bottero au fur et à mesure, sachant qu’il s’agit d’un projet commun qui leur tenait à coeur, à l’image de l’histoire de Jasper et Ombe. Ce tome est entièrement centré sur les conséquences du décès d’Ombe, non seulement sur Jasper, mais aussi pour la suite. De la même façon, on comprend les conséquences de la mort de Bottero sur son ami et leur oeuvre : Ombe disparait et L’Homme est forcé de se réapproprier le projet pour le finir seul. {FIN ZONE SPOILER}
Lire entre les lignes le deuil de l’auteur est déjà fort. Encore plus si on le partage, même si ce n’est qu’à une moindre mesure. 
C’est pour cette raison que je ne parvient pas à me sentir légitime quand je critique ce qui m’a manqué dans ce roman. Déjà, la courte durée des tomes ne permet pas de développer l’univers autant qu’il le devrait, ce qui me donne toujours l’impression que ses limites sont floues. Le postulat de départ est simple, sans prise de tête, mais je reste parfois sceptique sur quelques points, même si il s’agit de détails. Disons que j’accepte parce que c’est orienté jeunesse et centré essentiellement sur les personnages. Ensuite, l’aspect transitionnel de ce tome saute aux yeux. Déjà parce qu’implique la prise de direction par un seul auteur, mais aussi par le fait que les enjeux montent d’un cran et ouvrent l’univers sur quelque chose de plus grand. Les événements de ce roman sont un levier pour mener vers la suite, et du coup j’ai l’impression de lire une bande annonce.
Pour ce qui est du reste, je retrouve ce pourquoi je préférais les tomes du point de vue de Jasper : la pratique de la magie. Contrairement au reste, je la trouve concrète et détaillée, empruntant beaucoup à la wicca, mais ayant du coup un fonctionnement clair. Je reste quand même dubitative quand à la facilité de réaliser des sortilèges impressionnants avec trois fois rien : passer dans un autre plan avec une rose et beaucoup de concentration, c’est un peu comme si on disait qu’il est possible d’inventer un téléporteur avec un miroir de poche, un verre à dents et du scotch...
Ce roman m’a fait éprouver de nombreuses émotions (qui demeurent cependant dans ma palette entre “mélancolie” et “envie de pleurer”), rien de mieux quand on s’apprête à passer une petite soirée relax avant d’aller doucement s’endormir... Résultat me voici à rédiger une chronique à deux heures cinquante du matin avec internet qui saute toutes les deux minutes... Bonne nuit !
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Source : Daily-b99.tumblr.com
Ma note : 15/20
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mercitherese · 2 years
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Chronique 41 // Je me suis fait larguée
Vous savez, ce genre de douleurs dans la poitrine qui fait une étrange sensation. Comme si quelqu’un prenait votre coeur et le serrait très fort. Moi ça faisait depuis 2013 que je n’avais pas eu une douleur du genre. 
Pas de rupture-surprise, de descente aux enfers depuis tout ce temps. J’avais complètement oublié la sensation quand soudainement, après un mois de vacances chacun de son côté, avec C., on se retrouve enfin. Il m’a manqué, on ne s’est pas vraiment écrit, je savais qu’il se retrouvait en famille et avec lui-même. 
Il m’a écrit par contre une fois revenu sur la terre orléanaise, avec l’envie de me voir vite. Je suis aux anges, je lui propose ce mardi soir de nouvelle lune. La soirée se déroule au mieux, et puis sur les coups de 23h, dans la conversation, j’évoque son absence numérique, loin de moi. Et si, loin des yeux, loin du coeur ? Je le taquine mais j’ai envie d’une discussion légère, sans pression. 
Il s’engouffre dans un récital de rupture que je n’avais absolument pas vu venir. Il ne peut pas donner autant que moi. « Y’a une évidence entre nous mais il me manque un truc ». Pardon… Je suis choquée, je lui dis que du coup, on ne se reverrait plus. Il est embêté mais il comprend. Je le raccompagne en bas de chez moi… et le voilà qu’il ne part pas. On est là comme des ronds de frites à mourir d’envie de rester ensemble encore longtemps. Je l’invite à remonter chez moi et attendre le petit matin si c’était un départ définitif. 
Il accepte. Une fois remontée, j’adopte un comportement bizarre : profitons de la vie. Je me rends bien compte qu’on est sur le fil, la rupture est imminente. Je joue mes dernières cartes. Il semble être dans un état d’esprit similaire, il profite des moments passés avec moi jusqu’au dernier. On s’enlasse, on rit, on s’embrasse. Comme s’il était soulagé d’un truc… On fait l’amour comme si c’était la dernière fois, c’est puissant. On s’endort pour la dernière heure avant le réveil, dans les bras l’un de l’autre. Le grand jeu… Un film. Je pense secrètement qu’il est impossible de me dire adieu à 6h du matin devant le pas de ma porte.
Et pourtant, c’est ce qu’il fait. Je lui repose deux fois la question : « on se revoit pas? T’es sur? » Il semble sur, il tente de se convaincre. « Prends soin de toi », me dit-il des sanglots dans la voix. Je reste traumatisée sur mon palier, le regardant s’éloigner pendant de longues minutes. Trois fois, il se retourne et me regarde, l’air perdu. Comme un générique de film qui défilerait longtemps. On verrait notre relation se dissiper comme lui au fil de la rue.
Quand je décide de m’enfermer chez moi, je pleure comme un bébé. J’ai mal dans la poitrine, j’ai l’impression qu’on m’a arraché le coeur. Cette douleur je la connais, elle n’a pas changé depuis 2013. Avoir le coeur brisé, c’est quand même une sensation incomparable pour laquelle il devrait y avoir des remèdes brevetés par l’industrie pharmaceutique…. Car autant, à 20 ans j’acceptais de passer trois mois à bader, mais aujourd’hui, j’ai juste envie d’oublier très vite cette histoire. Que ce poids dans mon ventre me laisse tranquille, que je retrouve un peu d’appétit, que je réponde à nouveau à mes potes pour des apéros en terrasse. Je me vois taper « comment se remettre vite d’une rupture » sur youtube, passer des heures à mes copines pour qu’elles me réconfortent, tirer les cartes en espérant qu’on me prédise le come back de Mister C dans ma vie… bref, je me suis larguée et ça craint de ouf
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valeriehervo · 6 years
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Nous défendons une liberté d’importuner, indispensable à la liberté sexuelle »
Tribune. Le viol est un crime. Mais la drague insistante ou maladroite n’est pas un délit, ni la galanterie une agression machiste.
A la suite de l’affaire Weinstein a eu lieu une légitime prise de conscience des violences sexuelles exercées sur les femmes, notamment dans le cadre professionnel, où certains hommes abusent de leur pouvoir. Elle était nécessaire. Mais cette libération de la parole se retourne aujourd’hui en son contraire : on nous intime de parler comme il faut, de taire ce qui fâche, et celles qui refusent de se plier à de telles injonctions sont regardées comme des traîtresses, des complices !
Or c’est là le propre du puritanisme que d’emprunter, au nom d’un prétendu bien général, les arguments de la protection des femmes et de leur émancipation pour mieux les enchaîner à un statut d’éternelles victimes, de pauvres petites choses sous l’emprise de phallocrates démons, comme au bon vieux temps de la sorcellerie.
Délations et mises en accusation
De fait, #metoo a entraîné dans la presse et sur les réseaux sociaux une campagne de délations et de mises en accusation publiques d’individus qui, sans qu’on leur laisse la possibilité ni de répondre ni de se défendre, ont été mis exactement sur le même plan que des agresseurs sexuels. Cette justice expéditive a déjà ses victimes, des hommes sanctionnés dans l’exercice de leur métier, contraints à la démission, etc., alors qu’ils n’ont eu pour seul tort que d’avoir touché un genou, tenté de voler un baiser, parlé de choses « intimes » lors d’un dîner professionnel ou d’avoir envoyé des messages à connotation sexuelle à une femme chez qui l’attirance n’était pas réciproque.
Cette fièvre à envoyer les « porcs » à l’abattoir, loin d’aider les femmes à s’autonomiser, sert en réalité les intérêts des ennemis de la liberté sexuelle, des extrémistes religieux, des pires réactionnaires et de ceux qui estiment, au nom d’une conception substantielle du bien et de la morale victorienne qui va avec, que les femmes sont des êtres « à part », des enfants à visage d’adulte, réclamant d’être protégées.
En face, les hommes sont sommés de battre leur coulpe et de dénicher, au fin fond de leur conscience rétrospective, un « comportement déplacé » qu’ils auraient pu avoir voici dix, vingt ou trente ans, et dont ils devraient se repentir. La confession publique, l’incursion de procureurs autoproclamés dans la sphère privée, voilà qui installe comme un climat de société totalitaire.
La vague purificatoire ne semble connaître aucune limite. Là, on censure un nu d’Egon Schiele sur une affiche ; ici, on appelle au retrait d’un tableau de Balthus d’un musée au motif qu’il serait une apologie de la pédophilie ; dans la confusion de l’homme et de l’œuvre, on demande l’interdiction de la rétrospective Roman Polanski à la Cinémathèque et on obtient le report de celle consacrée à Jean-Claude Brisseau. Une universitaire juge le film Blow-Up, de Michelangelo Antonioni, « misogyne » et « inacceptable ». A la lumière de ce révisionnisme, John Ford (La Prisonnière du désert) et même Nicolas Poussin (L’Enlèvement des Sabines) n’en mènent pas large.
Déjà, des éditeurs ­demandent à certaines d’entre nous de rendre nos personnages masculins moins « sexistes », de parler de sexualité et d’amour avec moins de démesure ou encore de faire en sorte que les « traumatismes subis par les personnages féminins » soient rendus plus évidents ! Au bord du ridicule, un projet de loi en Suède veut imposer un consentement explicitement notifié à tout candidat à un rapport sexuel ! Encore un effort et deux adultes qui auront envie de coucher ensemble devront au préalable cocher via une « appli » de leur téléphone un document dans lequel les pratiques qu’ils acceptent et celles qu’ils refusent seront dûment listées.
Indispensable liberté d’offenser
Le philosophe Ruwen Ogien défendait une liberté d’offenser indispensable à la création artistique. De même, nous défendons une liberté d’importuner, indispensable à la liberté sexuelle. Nous sommes aujourd’hui suffisamment averties pour admettre que la pulsion sexuelle est par nature offensive et sauvage, mais nous sommes aussi suffisamment clairvoyantes pour ne pas confondre drague maladroite et agression sexuelle.
Surtout, nous sommes conscientes que la personne humaine n’est pas monolithe : une femme peut, dans la même journée, diriger une équipe professionnelle et jouir d’être l’objet sexuel d’un homme, sans être une « salope » ni une vile complice du patriarcat. Elle peut veiller à ce que son salaire soit égal à celui d’un homme, mais ne pas se sentir traumatisée à jamais par un frotteur dans le métro, même si cela est considéré comme un délit. Elle peut même l’envisager comme l’expression d’une grande misère sexuelle, voire comme un non-événement.
En tant que femmes, nous ne nous reconnaissons pas dans ce féminisme qui, au-delà de la dénonciation des abus de pouvoir, prend le visage d’une haine des hommes et de la sexualité. Nous pensons que la liberté de dire non à une proposition sexuelle ne va pas sans la liberté d’importuner. Et nous considérons qu’il faut savoir répondre à cette liberté d’importuner autrement qu’en s’enfermant dans le rôle de la proie.
Pour celles d’entre nous qui ont choisi d’avoir des enfants, nous estimons qu’il est plus judicieux d’élever nos filles de sorte qu’elles soient suffisamment informées et conscientes pour pouvoir vivre pleinement leur vie sans se laisser intimider ni culpabiliser.
Les accidents qui peuvent toucher le corps d’une femme n’atteignent pas nécessairement sa dignité et ne doivent pas, si durs soient-ils parfois, nécessairement faire d’elle une victime perpétuelle. Car nous ne sommes pas réductibles à notre corps. Notre liberté intérieure est inviolable. Et cette liberté que nous chérissons ne va pas sans risques ni sans responsabilités.
Les rédactrices de ce texte sont : Sarah Chiche (écrivaine, psychologue clinicienne et psychanalyste), Catherine Millet (critique d’art, écrivaine), Catherine Robbe-Grillet (comédienne et écrivaine), Peggy Sastre (auteure, journaliste et traductrice), Abnousse Shalmani (écrivaine et journaliste).
Adhèrent également à cette tribune : Kathy Alliou (curatrice), Marie-Laure Bernadac (conservateur général honoraire), Stéphanie Blake (auteure de livres pour enfants), Ingrid Caven (actrice et chanteuse), Catherine Deneuve (actrice), Gloria Friedmann (artiste plasticienne), Cécile Guilbert (écrivain), Brigitte Jaques-Wajeman (metteuse en scène), Claudine Junien (généticienne), Brigitte Lahaie (actrice et présentatrice radio), Elisabeth Lévy (directrice de la rédaction de Causeur), Joëlle Losfeld (éditrice), Sophie de Menthon (présidente du mouvement ETHIC), Marie Sellier (auteure, présidente de la Société des gens de lettres).
Merci mesdames,
Comme cela fait du bien de lire des propos sensés, et responsables.
Je rage contre  ce courant puritain , qui au nom d un féminisme destructeur enferme les femmes dans la victimite aigue.
C'est à croire qu’aujourd’hui  dire avoir été agressée sexuellement ou reconnaître une maladresse  narcissise!
Pour ma part, je suis bien avec moi même quand je suis en accord avec mon élan de désir. J ai envie; je dis"oui"; je n'ai pas envie:"je dis non". Aussi étrange que cela puisse paraître pour certains, je vais au contraire être en colère contre moi-même si je ne sais pas dire "non" ou aller dans mon désir. Et je vous promets que cet échec est de ma responsabilité. Pas celle de l autre!
La liberté d'importuner n interdit pas la liberté de dire "non"!!!!
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extrabeurre · 4 years
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Top 10: Les plus grands psychopathes du cinéma
Je suis retombé sur cet article que j’avais écrit pour l’édition de novembre 2013 du magazine Summum, et ça me semble un survol encore assez complet des figures les plus marquantes du cinéma d’horreur, alors je le republie ici à quelques jours de l’Halloween. 
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 10 - Jigsaw (Saw)
Alors que la majorité des psychopathes les plus inoubliables du grand écran ont fait leur marque pendant les années ’70 et ’80, le règne sanglant de Jigsaw est plus récent, ce sinistre personnage ayant fait son apparition dans le premier film de la série Saw en 2004. On y découvrait alors ses méthodes cruelles, qui consistent à emprisonner de pauvres individus dans de dangereux pièges et à les mettre au défi de trouver le moyen de s’en échapper vivant. Tordu à souhait, son but ultime n’est pas de tuer ses victimes, mais plutôt de leur faire apprécier la vie… s’ils survivent. Ce désir malsain de tester la nature humaine est venu à Jigsaw après qu’il eut appris qu’il avait une tumeur au cerveau inopérable et qu’il eut tenté de se suicider sans succès.
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 9 - Frank Booth (Blue Velvet)
Dennis Hopper a trouvé un de ses rôles les plus mémorables dans le film Blue Velvet de David Lynch. Il y incarne Frank Booth, un criminel sévissant dans une petite ville de la Caroline du Nord, où il entretient notamment une relation trouble avec une chanteuse de cabaret jouée par Isabella Rossellini, qu’il violente et humilie à répétition. Ayant par ailleurs l’habitude d’inhaler un gaz mystérieux, Booth kidnappe, mutile et tue diverses personnes à travers le film, en plus de terrifier tous ceux qu’il rencontre avec ses personnalités multiples. La rumeur veut que plusieurs acteurs aient refusé le rôle, qu’ils trouvaient trop répugnant. Hopper, par contre, s’est écrié qu’il « devait » jouer Frank, car il « était » Frank!
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  8 – Alex DeLarge (A Clockwork Orange)
D’abord créé par Anthony Burgess dans son roman A Clockwork Orange, c’est sous les traits de Malcolm McDowell dans le film du même nom de Stanley Kubrick que le personnage d’Alex DeLarge a traumatisé d’innombrables cinéphiles. Commettant divers crimes allant du simple vol au viol et au meurtre, le jeune homme au costume blanc, au chapeau noir et à l’œil maquillé ne semble faire preuve d’aucune logique dans ses actions. Quiconque croise son chemin peut devenir la prochaine victime de ses « droogs » et lui. Il ne démontre aucun remords. Pire : il semble prendre plaisir à faire le mal, comme lorsque qu’il chante Singin’ In the Rain en esquissant quelques pas de danse pendant qu’il attaque un pauvre couple…
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 7 - Leatherface (The Texas Chainsaw Massacre)
Le visage recouvert d’un masque fait de chair humaine et brandissant une tronçonneuse, Leatherface est une vision cauchemardesque comme on en a rarement vu au cinéma. Apparemment inspiré du véritable tueur en série Ed Gein, qui portait lui aussi un masque de chair humaine, Leatherface n’est pas seul dans sa folie meurtrière. En effet, il est généralement entouré du clan Sawyer, une famille de consanguins qui pratiquent le cannibalisme. Dans le film original de 1974 et dans ses suites, Leatherface ne prononce jamais un mot alors qu’il traque et exécute ses victimes, ce qui le rend encore plus effrayant. Certains estiment qu’il est probablement déficient mental ou du moins comme un « gros bébé », pour reprendre les mots de Tobe Hooper, le réalisateur des deux premiers films de la série.
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  6 - Jack Torrance (The Shining)
Adapté du célèbre roman de Stephen King, The Shining met en vedette le grand Jack Nicholson dans le rôle de Jack Torrance, un écrivain qui accepte de s’occuper du mythique Overlook Hotel pendant un hiver. Enfermé dans ce lieu isolé avec sa femme et leur jeune fils, Torrance sombre lentement mais sûrement dans la folie et en vient éventuellement à vouloir massacrer sa propre famille. Ceci mène à une séquence iconique, réalisée de main de maître par le légendaire Stanley Kubrick, où Jack poursuit ses proches à travers l’hôtel, armé d’une hache avec laquelle il défonce une porte où il se glisse ensuite la tête pour livrer sa réplique classique : « Here’s Johnny! »
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  5 - Jason Voorhees (Friday the 13th)
Alors que le premier film de Friday the 13th avait pour antagoniste la mère de Jason Voorhees, ce dernier a pris le contrôle de la série à partir du deuxième épisode. Dès lors, il massacre sans répit les malheureux ayant la mauvaise idée de séjourner aux abords du Crystal Lake. Laissé pour mort à la fin de chaque film, Jason trouve toujours le moyen de ressurgir la fois suivante pour continuer son carnage. Généralement le visage caché derrière un masque de gardien de but et armé d’une machette, Voorhees est une véritable force de la nature. Sean S. Cunningham, le réalisateur de Friday the 13th, le compare d’ailleurs à un grand requin blanc, soit un prédateur impitoyable avec lequel il est impossible de raisonner...
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  4 - Freddy Krueger (A Nightmare on Elm Street)
Frederick Charles Krueger, Freddy pour les intimes, a envahi le subconscient des amateurs de films d’horreur en 1984 dans le premier film de la série A Nightmare on Elm Street de Wes Craven. Armé d’un gant muni de lames de rasoir et éternellement vêtu d’un chapeau et d’un chandail rayé, ce tueur en série au visage défiguré se distingue de la majorité des autres psychopathes du grand écran par sa nature foncièrement surnaturelle. En effet, c’est dans les rêves de ses victimes que Freddy leur fait subir divers sévices mortels, dont les conséquences se répercutent dans le monde réel lorsqu’ils se réveillent. Tel que joué par Robert Englund, Krueger se démarque aussi par l’humour noir dont il sait faire preuve, pas tant dans le film original, mais plus particulièrement dans ses suites.
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  3 - Michael Myers (Halloween)
Michael Myers (à ne pas confondre avec Mike Myers, la star d’Austin Powers!) commet son premier meurtre à l’âge de six ans, alors qu’il tue sa propre sœur le soir de l’Halloween. Interné dans un asile pendant une quinzaine d’années, il reprend du service après s’être évadé, terrorisant les adolescentes de sa ville natale, dont la gardienne d’enfants Laurie, jouée par Jamie Lee Curtis. Portant un masque et ne disant jamais un mot, Myers est une véritable figure cauchemardesque, un horrible monstre que même la mort ne peut pas arrêter. Il semble en effet être tué à la fin de chaque film, mais il refait toujours surface tôt ou tard. Selon le réalisateur John Carpenter, Michael Myers est « presque une force surnaturelle, une force maléfique qui s’est déchaînée. »
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 2 - Hannibal Lecter (The Silence of the Lambs)
C’est d’abord dans les pages des romans de Thomas Harris qu’on a fait sa connaissance, puis Brian Cox l’a interprété dans le film Manhunter en 1986. Mais il est indéniable que c’est lorsque Anthony Hopkins s’est glissé dans sa peau dans l’adaptation cinématographique de The Silence of the Lambs que le personnage de Hannibal Lecter est devenu plus grand que nature. Cet effroyable tueur cannibale, aussi psychiatre à ses heures, diffère de la plupart des psychopathes du grand écran par sa grande intelligence et par son charisme à glacer le sang. Loin d’être une simple brute silencieuse, Lecter parvient à entrer dans la tête de tous ceux qu’il croise et à les troubler profondément, même lorsqu’il est immobile dans une cellule de prison.
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 1 - Norman Bates (Psycho)
Il est un des premiers psychopathes à avoir fait des siennes au cinéma et, 53 ans après la première du film d’Alfred Hitchcock le mettant en vedette, Norman Bates demeure un des esprits les plus tordus qu’on ait jamais pu découvrir au grand écran. Incarné par Anthony Perkins, le propriétaire du Bates Motel souffre d’un trouble dissociatif depuis la mort de sa mère, dont il conserve le cadavre chez lui, en plus de régulièrement enfiler ses vêtements et d’adopter sa personnalité pour commettre des meurtres. Le plus inoubliable étant évidemment celui de Marion Crane (Janet Leigh), pour qui une simple douche est devenue un bain de sang...
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shesaidwithirony · 4 years
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Virginie Despentes : « Cette histoire de féminité, c’est de l’arnaque »
Extraits d’un article du monde publié le 9 juillet 2019 
Je ne serais pas arrivée là si…
Si je n’avais pas arrêté de boire à 30 ans. Je me sens formidablement chanceuse de l’avoir décidé assez tôt. Et d’avoir vite compris que ça n’allait pas avec tout ce que j’avais alors envie de faire. L’alcool a probablement été une des défonces les plus intéressantes et les plus importantes de ma vie. Mais il m’aurait été impossible d’écrire King Kong théorie et tous mes derniers livres si je n’avais pas arrêté. Et si je me sens aussi bien aujourd’hui, à 48 ans, disons, beaucoup plus en harmonie, et dans quelque chose de plus doux, de plus calme, de très agréable à vivre – ce que j’appelle l’embourgeoisement – je sais que c’est lié à cette décision.
La vie, c’est comme traverser plusieurs pays. Et ce pays dans lequel je vis depuis plusieurs années, il n’a été accessible que par une réflexion, une discipline et un effort par rapport à la dépendance envers les drogues douces, et particulièrement l’alcool. Je suis favorable à la légalisation de toutes les drogues. Mais ce n’est pas parce que c’est légal que c’est anodin. Les gens ne s’en rendent pas compte et n’ont aucune idée de la difficulté à arrêter. J’ai donc l’intention de m’attaquer à ce sujet pour mon prochain livre.
Quand avez-vous commencé à boire ?
La première fois, j’avais 12 ans, je m’en souviens parfaitement. C’était à un mariage à Nancy, en 1982. J’ai bu un verre et je suis tombée en arrière en pensant : « Waouh ! Quel truc ! Ça s’ouvre à moi ! » Et je suis tombée amoureuse de l’alcool. Vraiment amoureuse.
Pour la griserie qu’il procure ?
Oui. J’avais trouvé ma substance. Et très vite, adolescente, j’ai eu une pratique de l’alcool très sociale, dans les bars, les fêtes, les bandes de copains. En fait, tout ce que je faisais à l’extérieur de chez moi, j’ai appris à le faire avec l’alcool et, entre 13 et 28 ans, avec un vrai plaisir, un vrai enthousiasme, une vraie férocité. Dans mes lectures, j’ai trouvé beaucoup d’amis buveurs. Des tas d’écrivains ont une histoire d’amour avec l’alcool et truffent leurs livres de beuveries épiques. J’ai donc été une jeune personne qui a bu de façon totalement assumée et heureuse très longtemps.
Et puis à 28 ans, j’ai eu un déclic. Ça ne collait pas avec le fait de devenir auteur. Ces déjeuners dont je ressortais incapable de faire quelque chose du reste de la journée. Ou ces inconnus avec lesquels je créais soudainement des rapports intimes, et déplacés, parce que j’étais complètement bourrée…
Vous n’aviez plus le contrôle.
Non. Et je me rendais compte que j’étais incapable de confronter une situation sociale sans boire. Et comme il y a de l’alcool partout en France… Alors, aidée par mes agendas où je note tout, j’ai commencé à me demander si les beuveries de la dernière année avaient valu le coup. Deux ans avant, j’aurais répondu : oui, c’était génial. Mais là, j’étais bien obligée de répondre que non. Que la plupart du temps, j’avais fait ou dit des choses qui m’avaient mise mal à l’aise le lendemain. Et que le nombre de fois où je m’étais réveillée en me disant « pfffttt… » était considérable.
Je devais faire quelque chose. Mais c’est très compliqué ! C’est pas « boire ou ne pas boire ». C’est un mode de vie qui est en jeu. Et un personnage, jusqu’alors défini par l’alcool, qu’il faut complètement réinventer. J’ai découvert à 30 ans que j’étais timide par exemple. Je ne le savais pas.
Vous vous êtes fait aider ?
J’ai surtout rencontré quelqu’un qui a arrêté de boire en même temps que moi. Et on a réappris à faire les choses, une par une. Sortir, dîner, aller au concert. Tout était à réinventer. Et on s’est aidé mutuellement. Impossible de flancher quand on a engagé sa responsabilité vis-à-vis de l’autre. Et puis quand on est clean, on a la chance de pouvoir débriefer et d’analyser les choses, en rentrant à la maison.
En y repensant, je pense que ça m’a aussi permis de progresser en réfléchissant à ce que c’est d’écrire, et aussi pourquoi ça génère une telle angoisse. Ça fait 25 ans que j’écris et l’angoisse est toujours là. J’ai simplement fini par accepter que c’est un élément du paysage et qu’elle n’empêchera pas le livre d’aboutir. Mais il faut en passer par ces étapes où on est absolument convaincu qu’on n’y arrivera pas, que le livre est nul et qu’on n’écrira plus jamais.
Est-ce un sentiment très partagé par vos confrères écrivains ?
Bien sûr. Mais je me demande si cette conversation sur l’angoisse d’écrire, je ne l’ai pas plus fréquemment avec les femmes. Je ne sais pas si c’est parce qu’elles confessent plus facilement leurs moments de vulnérabilité ou si un inconscient collectif nous rend plus sujettes à l’angoisse de s’autoriser à écrire et publier. Ce serait intéressant de s’interroger là-dessus. S’autoriser à publier, c’est un truc très viril en vérité. Raconter des histoires et l’Histoire a été une prérogative masculine pendant des siècles et des siècles. Nous héritons de ça. Et au fond, nous transgressons beaucoup plus que nous le pensons.
La transgression d’une femme bûcheronne est évidente. Celle de la femme écrivain ne l’est pas, et pourtant… Ce n’est d’ailleurs pas un hasard s’il y a eu tant de discussions sur l’opportunité de féminiser le mot. Personne ne s’est roulé par terre quand on a parlé de factrice. Mais que de hurlements quand on a dit écrivaine, auteure ou autrice ! Comme si on affrontait encore un problème de légitimité.
Vous avez toujours écrit ?
Ah oui ! Toujours ! Dès que j’ai lu La Comtesse de Ségur, j’ai commencé à écrire des histoires dialoguées de petites filles. C’est même l’un des rares moments d’encouragement de ma mère. Je me souviens de lui montrer une histoire, écrite sur un grand cahier, et de la voir un peu bluffée. Pour une fois, j’avais l’impression d’avoir fait un truc bien.
Et puis surtout j’écrivais des lettres. A tout le monde. Mes cousines, des filles de l’école… J’avais une activité épistolaire dingue. Je recevais une lettre et je répondais dans la journée. J’avais un tel bonheur à recevoir du courrier. Et j’ai continué lorsque je suis arrivée à Paris à 24 ans. J’écrivais des lettres de dix, douze pages et en recevais de magnifiques, qui racontaient l’époque. J’ai hélas tout jeté.
Vous étiez donc une enfant très sociable.
Oui. Très ouverte sur les autres et le monde extérieur. Très en demande : « Qu’est-ce que tu vas m’apporter de merveilleux et d’incroyable aujourd’hui ? Qu’est-ce que tu lis ? Qu’est-ce que tu penses ? Qu’est-ce que tu connais et que je ne connais pas encore ? » Convaincue que le monde recélait des tas de choses géniales que je devais vite découvrir. J’aimais bien l’école, j’étais même déléguée de classe, mais je piaffais.
Pourquoi alors cet internement en institution psychiatrique à 15 ans ?
J’étais une petite bombe, avec une envie de vivre géniale mais incontrôlable. J’avais l’impression que le monde m’appelait avec une telle urgence qu’il était inimaginable que je reste chez moi. Je ne pouvais pas rater un concert à Paris pour lequel j’avais prévu de partir en stop. Je ne pouvais pas rater un festival prévu en Allemagne. Impossible.
Je me souviens parfaitement de ma chambre d’ado et de cette brûlure au ventre : « Laissez-moi sortir ! » C’est dehors que ça se passait. Dehors que m’attendait l’aventure. J’avais 15 ans, quoi ! L’âge où chaque rencontre te modifie, chaque découverte te bouleverse. Un squat en Allemagne ? Waouh ! Encore un monde qui s’ouvre.
Avec l’âge, je comprends le désarroi de mes parents, cette peur qui les a conduits à me boucler. C’est un sujet dont je ne reparle pas avec eux, mais si c’était à refaire je sais qu’ils ne le referaient pas. Ce qui me frappe, c’est qu’on n’aurait jamais enfermé un jeune garçon qui, comme moi, marchait bien à l’école et n’avait aucun problème de sociabilité. On boucle plus facilement les filles. On l’a toujours fait. Dans des couvents, dans des écoles. Pour les contenir. Ça n’a bien sûr rien résolu.
En rentrant, comme on m’avait dit que si j’avais mon bac et un concours pour une école je pourrais partir, eh bien je les ai eus. Et à 17 ans pile, toute seule, j’ai débarqué à Lyon. Avec un bonheur de vivre et d’apprendre.
Et c’est à 17 ans, après une virée à Londres, que vous êtes violée en rentrant en auto-stop.
Oui. C’est d’une violence inouïe. Mais je vais faire comme la plupart des femmes à l’époque : le déni. Parce qu’on est en 1986, avant Internet, et je ne sais pas que nous sommes nombreuses à vivre ça. Je crois que je fais partie de l’exception, des 0,0001 % des filles qui n’ont pas eu de chance. Et qu’au fond, puisque j’ai survécu, c’est que j’ai la peau dure et que je ne suis pas plus traumatisée que ça. Alors autant se taire et aller de l’avant. Comme ces millions de femmes à qui on dit, depuis des siècles : si ça t’arrive, démerde-toi et n’en parle pas.
Les choses sont différentes en 2017. En cliquant sur le Web, tu comprends que ça arrive tout le temps, que c’est même un acte fédérateur qui connecte toutes les classes sociales, d’âges, de caractères. Tu lis même que Madonna a osé raconter avoir été violée, à 16 ans. Eh bien je t’assure que cette prise de parole est une révolution et qu’elle m’aurait bien aidée à l’époque.
Quelles ont été, pensez-vous, les conséquences sur votre vie ?
Qui aurais-je été sans ça ? C’est une question que je me pose souvent et je ne sais pas quoi répondre. Puis-je me dire, trente ans après, que c’est passé ? Ou bien est-ce qu’on reste toute sa vie quelqu’un qui a été violé ? Ce qui est sûr, c’est que c’est obsédant. Que j’y reviens tout le temps. Et que ça me constitue. Le viol est présent dans presque tous mes romans, nouvelles, chansons, films. Je n’y peux rien.
« J’imagine toujours pouvoir un jour en finir avec ça. Liquider l’événement, le vider, l’épuiser. Impossible. Il est fondateur », écrivez-vous, en 2007, dans King Kong théorie.
Oui. Il est au cœur de ce livre que je n’ai pas écrit légèrement. Car tu n’es pas heureuse d’écrire là-dessus. Et tu ne sais pas si, à sa sortie, tu seras insultée ou lynchée. Tu t’attends au pire et tu te sens samouraï. Mais tu sais que c’est important. Comme une mission. Presque un appel. Alors tu y vas. Et le lien que ce livre a créé avec les lecteurs est absolument magnifique.
Les premières années à Lyon se passent autour de la musique – le rock alternatif – et dans une incroyable liberté.
Totale ! Je vis en bande, punk parmi les punks les plus affreux. Accessoires cloutés, cheveux courts, teintures de toutes les couleurs. On se déplace de ville en ville pour les concerts, les municipalités n’aiment pas nous voir traîner sur les places et on passe souvent la nuit au poste. Je lis beaucoup, j’écris des nouvelles, j’ai une énergie folle, de la tendresse pour les personnages de mon groupe et chaque fin d’année, je me dis : « Quelle merveille ! Tous ces gens que je rencontre ! Tout ce que j’apprends ! »
Il y a bien sur des galères, une mise en danger, mais j’ai cette chance de connaître un de ces rares moments dans la vie où tu vis sans contraintes et sans concessions.
Parmi les jobs que vous enchaînez au fil des ans – notamment autour du disque – il en est un qui est loin d’être anodin…
La prostitution occasionnelle. Pendant deux ans. Et grâce au Minitel. Idéal pour gagner 4 000 francs en deux jours. Net d’impôts. Un smic.
N’aviez-vous pas l’impression de franchir un tabou suprême ?
Beaucoup moins qu’en faisant ma première télé. La sensation de perte de pureté, de vente de mon intimité, ce fut après une interview sur Canal+, pour parler de mon premier livre, Baise-moi. Des inconnus me reconnaissaient le lendemain dans la rue, je ne m’appartenais plus tout à fait et perdais l’anonymat si précieux de Paris.
Mais avec mon premier client, franchement pas. J’étais tellement épatée de gagner tant d’argent en une demi-heure ! Terminé mon boulot à la con chez Auchan ! Et le côté « fille de mauvaise vie » n’effrayait pas la jeune punk que j’étais. Et puis faut dire la vérité : à cette époque, j’étais très intéressée par les garçons et par le sexe. Ce n’était pas comme si j’avais eu trois histoires dans ma vie. Je trouvais ça génial de coucher avec tout le monde. Point. Alors il a suffi de m’affubler d’une jupe courte et de hauts talons et je suis rentrée dans ce boulot avec une vraie facilité.
Ça s’est dégradé plus tard, quand je suis arrivée à Paris où j’avais moins de repères et où l’arrivée des putes russes – blanches et sublimes – a bouleversé le marché.
Qu’est-ce que cela vous a appris ?
Vachement de choses. Et bizarrement, ça m’a rendu les garçons plutôt sympathiques, presque touchants – c’est la chance de n’avoir pas fait ce métier longtemps. Je voyais plutôt leur vulnérabilité et leur détresse. Et je pense que ces mecs se comportaient plutôt mieux avec une prostituée qu’avec une fille rencontrée dans un bar.
Vous avez écrit que cette expérience a été une étape cruciale de reconstruction après le viol.
Je le crois. Ça revalorise incontestablement. Ce sexe n’avait donc pas perdu de valeur puisque je pouvais le vendre, très cher, et de nombreuses fois. Ça me redonnait un pouvoir : c’est moi, cette fois, qui décidais de mon corps, et en tirait un avantage. Ce n’est certainement pas un hasard si j’ai écrit Baise-moi à ce moment-là et si j’ai voulu qu’il soit publié. C’était un signe de puissance. Je sortais du groupe et je reprenais la parole.
Est-ce à ce moment-là que vous vous interrogez sur ce qu’est vraiment la féminité ?
Non, j’ai toujours réfléchi à ça puisque ça n’a jamais été pour moi une évidence. Ma mère est féministe et j’ai lu très tôt à ce sujet. Je savais que ça ne tombe pas du ciel comme le Saint-Esprit et que c’est une construction. Mes réponses ont évolué dans le temps, en termes de look. Et plus le temps passait, plus je me disais : quelle histoire compliquée ! Et plus ma colère montait sur ce qu’on exige des filles au nom de « la féminité ».
Une étude publiée il y a cinq ans l’exprimait parfaitement. On faisait passer à des petits garçons et des petites filles de 5-6 ans un faux casting pour une pub de yaourt. Et sans leur dire, on avait salé le yaourt. Les petits garçons, sans exception, font beurk devant la caméra, car le yaourt est infect. Les petites filles, elles, font semblant de l’aimer. Elles ont compris qu’il faut d’abord penser à celui qui les regarde et lui faire plaisir. Eh bien c’est exactement cela la féminité : ne sois pas spontanée, pense à l’autre avant de penser à toi, avale et souris. Tout est dit.
Elle ne peut se résumer à cela !
Non, bien sûr. Et je ne vais pas expliquer à des femmes qui se sentent bien dans ce cadre qu’elles doivent en sortir. Mais franchement, quand je vois ce qu’on exige des femmes, le carcan de règles et de tenues qu’on leur impose, leur slalom périlleux sur le désir des mecs et la date de péremption qu’elles se prennent dans la gueule à 40 ans, je me dis que cette histoire de féminité, c’est de l’arnaque et de la putasserie. Ni plus ni moins qu’un art de la servilité.
Mais c’est si difficile de se soustraire à l’énorme propagande ! J’ai fini par en être imprégnée, moi aussi. Et en un réflexe de survie sociale, après le scandale du film Baise-moi qui m’a quand même torpillée, j’ai tenté de me fondre un peu dans le décor. Je suis devenue blonde, j’ai arrêté l’alcool, j’ai vécu en couple avec un homme… Et ça a raté.
Mais alors ? Vous ne seriez pas arrivée là, à cette période heureuse de votre vie où vos livres sont attendus, célébrés, si…
Si, à 35 ans, je n’étais pas devenue lesbienne.
Ce serait un choix ?
Je suis tombée amoureuse d’une fille. Et sortir de l’hétérosexualité a été un énorme soulagement. Je n’étais sans doute pas une hétéro très douée au départ. Il y a quelque chose chez moi qui n’allait pas avec cette féminité. En même temps, je n’en connais pas beaucoup chez qui c’est une réussite sur la période d’une vie. Mais l’impression de changer de planète a été fulgurante. Comme si on te mettait la tête à l’envers en te faisant faire doucement un tour complet. Woufff !
Et c’est une sensation géniale. On m’a retiré 40 kilos d’un coup. Avant, on pouvait tout le temps me signaler comme une meuf qui n’était pas assez ci, ou qui était trop comme ça. En un éclair le poids s’est envolé. Ça ne me concerne plus ! Libérée de la séduction hétérosexuelle et de ses diktats ! D’ailleurs je ne peux même plus lire un magazine féminin. Plus rien ne me concerne ! Ni la pipe, ni la mode.
Le discours vous semble partout hétéro-normé ?
Partout ! Et je comprends soudain la parole de Monique Wittig : « Les lesbiennes ne sont pas des femmes. » En effet. Elles ne sont pas au service des hommes dans leur quotidien. Le féminisme change heureusement les choses, c’est une des plus grandes révolutions qu’on ait connues. Mais historiquement, la femme est au foyer, elle est la mère des enfants, le repos du guerrier, son faire-valoir et sa servante. Et il ne faut pas qu’elle brille trop.
Cela m’a toujours frappée de voir que chaque fois qu’une femme scientifique, cinéaste, musicienne, écrivaine connaît un grand succès, elle perd son couple ou le met en danger. On plaint son compagnon. L’inverse est évidemment faux. Un homme qui connaît un énorme succès conserve son couple et se permet des maîtresses que sa femme, que l’on trouve chanceuse, a le devoir d’accepter.
La jalousie peut aussi exister dans un couple homosexuel.
Ça reste une histoire entre deux personnes, mais il n’y a pas de rôle attribué, rien de présupposé, rien de normé socialement. Et j’ai même l’impression que chacune aime le succès de l’autre. Ton rayonnement, a priori, ne repose pas sur l’idée que ta meuf t’est inférieure. Autant l’hétérosexualité peut te tirer vers le bas en tant que créatrice, autant l’homosexualité épanouit la création.
Il n’y a plus ce regard négatif qu’ont redouté beaucoup de femmes célèbres, artistes ou autres, qui n’ont jamais révélé leur homosexualité ?
Les choses ont bien changé. Et quand on y pense, si le ratio d’homos ou de bis parmi les créatrices est beaucoup plus important que dans la vraie vie, c’est parce que ça te libère. Ça te donne une autorisation à réussir. Ça ne met pas en danger ton couple. Tu n’as plus de freins. Pour moi, c’est un vrai apaisement.
La loi autorisant le mariage gay a-t-elle joué un rôle dans le changement de regard ?
Je ne souhaite le mariage à personne. Mais si tout le monde a les mêmes droits, cela facilite la vie. En participant à la dernière Gay Pride qui était si joyeuse, et en voyant ces milliers de jeunes gens, je me disais que c’était la première génération qui pouvait annoncer son homosexualité à ses parents sans qu’ils pleurent.
Pour les gens de mon âge, l’outing allait de « tragique » à « difficile ». Il y avait toujours un moment où les parents pleuraient. Et c’est super dur de faire pleurer tes parents pour ce que tu es. Aujourd’hui, ils peuvent se dire : ça va, tu ne seras pas forcément malheureux. Et ils peuvent même l’annoncer aux voisins.
« Passé 40 ans, tout le monde ressemble à une ville bombardée » avez-vous écrit quelque part. Vieillir vous fait peur ?
La cinquantaine venant, j’ai peur de mourir. C’est la direction. Mais ça va. C’est même plutôt cool. En fait, je me sens beaucoup mieux maintenant qu’il y a vingt ans. Et il y a des tas de femmes d’âge mûr, que j’appelle les « Madames », qui me fascinent et indiquent un joli cap. Je n’ai pas de modèle, je ne sais pas comment on va inventer ça, vieillir. Mais quand je vois sur scène Marianne Faithfull, même avec sa canne, je me dis : « Pas mal ». Et même : « J’adore. » Classe !
Son bien le plus précieux est une lettre dans laquelle son père lui dit qu’il est fier d’elle. Avez-vous cette reconnaissance de vos parents ?
On n’est pas proches, mais leur regard sur moi est bienveillant. Je crois qu’ils sont contents.
Et ça compte ?
Eh bien oui. Un des trucs qui m’a le plus touchée lorsque j’ai reçu le prix Renaudot, c’est que ça a fait plaisir à mon père. Ce n’est pas un super loquace. Il n’a pas marché sur les mains. Mais il l’a exprimé. Et c’est vachement important.
Propos recueillis par Annick Cojean
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lailleursetici · 4 years
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Eva Green : "Les castings sont monstrueux pour les actrices"Par Richard Gianorio  •  Le 23 juillet 2020
Star paradoxale, elle véhicule malgré elle un mystère très cinématographique. À l’affiche d’une mini-série britannique, The Luminaries, l’actrice aspire également à une vie écologique dans une ferme irlandaise.
Pendant le confinement, Eva Green était à Londres, chez elle, puis en Normandie, chez sa mère. Nous la joignons par téléphone dans les Alpes, où elle se ressource, «marche et médite» («dieu habite les montagnes», assure-t-elle) avant de rallier la Toscane, où l’attend sa sœur, Joy, l’autre élément des célèbres jumelles de Marlène Jobert. Eva Green est toujours en cavale quelque part dans le monde, en Tanzanie ou au Bhoutan, où elle part seule en randonnée, ou en Nouvelle-Zélande, où elle a tourné The Luminaries, mini-série britannique sur la ruée vers l’or (bientôt diffusée en France). Fuit-elle son anxiété chronique ? Ou a-t-elle tout simplement besoin de se confronter à des émotions fortes, elle qui se dit «trop timide et réservée, excepté au cinéma» ?
Une muse discrète
Personne n’est plus discret et mystérieux que cette actrice remarquable qui tourne au compte-gouttes dans des films américains et disparaît des radars de la célébrité entre deux projets. Paradoxale, elle fait le grand écart entre des petits films indépendants et des blockbusters de Tim Burton, dont elle est la muse gothique supposée (trois films ensemble). Eva Green ne squatte pas les red carpets, n’encombre pas les front rows des défilés de mode et ne se brade sur aucun compte Instagram. Personne ne sait si elle a un boyfriend, et personne n’a envie de troubler l’apparente quiétude de sa vie privée.
C’est une actrice au physique de femme fatale à l’ancienne - courbes de pin-up et voix grave impériale -, une travailleuse obsessionnelle - elle est notoirement très douée pour les accents - et une jeune femme attendrissante, facilement effarouchée, qui vient juste d’avoir 40 ans, ce qui ne l’enchante guère. Pour Madame Figaro, elle s’est prêtée à une séance photo bucolique, à l’extrême opposé de son image de créature ténébreuse aux cheveux de jais et aux lèvres rouges. Le hasard faisant bien les choses, Eva la «green» fervente rêve désormais d’une ferme en Irlande, qui comblerait sa passion pour la nature et les animaux et qui l’éloignerait un peu des basses-cours de cinéma.
Madame Figaro. - Ces photos montrent un autre aspect de vous, lumineuse, solaire et... green... Eva Green. - Mon implication va croissant. Le réchauffement climatique et la dégradation de la planète se sont accélérés depuis mon enfance. Par ailleurs, la période de confinement a été un révélateur : de nombreuses personnes ont enfin pris conscience de la gravité de la situation. Je recommande à tous de s’informer, de lire, de se responsabiliser : diminuer les effets de serre, se concentrer sur les énergies renouvelables. Tout démarre à une petite échelle : faire de petits gestes quotidiens, renoncer à certains produits, à certains aliments, et apprendre à recycler.
À titre personnel, la nature a sur moi un effet très particulier, apaisant, salvateur même : elle m’ancre à la terre, me rend plus active, plus réaliste. Mon projet de vie à court terme : une ferme, probablement en Irlande. Ce n’est pas un caprice d’actrice, c’est une aspiration très profonde à laquelle je réfléchis depuis pas mal d’années. La permaculture est un sujet qui m’intéresse, et j’ai même dans l’idée d’élever des alpagas, car j’aime passionnément les animaux. Je réfléchis sérieusement à une entreprise qui serait à la fois écologique et rentable.
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Est ce bien compatible avec le métier d’actrice ? Avec la crise du Covid-19, on s’est bien rendu compte que tout était fragile et vulnérable, en particulier mon métier. Tout s’est arrêté, et je ne retravaillerai plus avant 2021. Le monde de demain ? J’espère me tromper, mais il me semble déjà bien chaotique. Comment rester positif quand tout semble vaciller ? Pour ma part, j’essaie de nager dans les eaux troubles et de ne pas me laisser submerger par le spleen ou la colère.
Toujours sujette a l’anxiété ? Cette fois-ci, il y a des raisons objectives d’être préoccupés. Nous sommes tous passés par une période de sidération, de paralysie, puis il a fallu relativiser. La méditation m’a beaucoup aidée. Mais, indépendamment de ces circonstances extraordinaires, je suis d’une nature inquiète, et rien ne me rassure vraiment.
Pourtant, vous n’avez pas choisi le métier le plus stabilisant... Oui, c’est la catastrophe. J’ai l’impression que lorsque je retravaillerai, j’aurai des cheveux blancs ! En ce moment, j’ai du mal à me concentrer sur mon métier. Je suis en mode «purgatoire». (Elle rit.) Et pourtant, j’ai viscéralement besoin du cinéma : le cinéma me rend vivante et me fait vaincre mes peurs. Dans la vie, je suis trouillarde et très réservée. Au cinéma, je m’active, je me prépare physiquement - comme pour Dumbo, où j’ai appris le trapèze -, je fais des recherches, je travaille les accents.
Le cinéma est-il plus intéressant que la vie, comme l’assurait Truffaut ? Oui... enfin... je me fais violence pour que ma vie soit plus intéressante. Enfant déjà, j’avais l’impression de vivre dans le rêve de quelqu’un d’autre. J’étais lunaire, j’avais la sensation de flotter. C’est la raison pour laquelle je suis si attachée à la nature : je dois absolument être reliée à la terre. C’est aussi pourquoi je fais beaucoup de sport : j’aime les efforts, transpirer. Et on ne peut pas être heureux si l’on n’est pas ancré.
Vous venez de fêter vos 40 ans... Je ne vous dirai pas que ça me fait plaisir. C’est un grand chiffre, et une grande pression pour une actrice. Les anniversaires, ce n’est pas mon truc. Je préfère célébrer ceux de ma mère.
Est-ce que vous recevez beaucoup de scripts ? Mon agent filtre : je n’ai plus envie de jouer tous ces personnages dark and beautiful, les femmes fatales, les séductrices. Hélas, il se monte de moins en moins de films intéressants, et les productions indépendantes battent de l’aile. Aujourd’hui, la créativité s’est reportée sur les séries télé.
Vous avez adhéré au mouvement MeToo. Où en est-il aujourd’hui ? Tout le monde se révolte, on entend les voix des minorités, et c’est très sain. Il faut sans cesse poursuivre les combats. J’ai l’impression que les femmes sont davantage écoutées, davantage crues, qu’il y a moins d’obstacles pour porter plainte, par exemple.
Vous-même avez été harcelée par Harvey Weinstein... Oui, mais j’ai peut-être manqué de courage, je ne fais pas partie des premières qui ont parlé. Mais on avait tellement peur ! Il était intouchable et son pouvoir était immense. Le moment venu, je me suis défendue, mais j’étais traumatisée et j’ai passé beaucoup de temps à le fuir : il fallait absolument l’éviter, et je partais en voyage dès qu’il me sollicitait. Mais c’était sans fin : plus vous lui résistiez, plus il était excité - un malade mental. Nos routes ne se sont plus croisées.
Avez-vous été victime de discrimination ? Comme femme ? Comme Française ? Je n’en ai pas l’impression, même si nous, les actrices, continuons d’être moins bien payées que les acteurs. En revanche, si l’on évoque les castings, c’est monstrueux. On est du bétail, on pleure beaucoup, c’est très violent. J’ai la chance de ne plus en faire. On me demande parfois des essais, mais dans ce cas je me filme à la maison et j’envoie un enregistrement. Dans ce métier, on est remis en question à chaque nouveau projet. Et quand on n’est pas désiré, alors on n’existe plus. C’est affreux de dépendre du désir des autres, et, franchement, on ne guérit jamais de cela. La seule solution, c’est de trouver d’autres pôles d’intérêt. D’où mon projet agricole...
Le nouveau James Bond, le dernier avec Daniel Craig, sort bientôt. La rumeur dit qu’il y est question de Vesper Lynd, la fameuse James Bond girl que vous avez jouée, grand amour de 007, morte noyée à la fin de Casino Royal ... Ah bon ? C’est mon film le plus connu. C’est un beau film, le personnage est complexe, et cela a été un tremplin important. Mais j’ai fait tellement d’autres choses depuis. Aux États-Unis, on continue de me dire «I love your movie», comme si je n’en avais tourné qu’un...
The Luminaries, de Claire McCarthy, sur BBC 2. La série bientôt diffusée en France.
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