De Dru Ă Kit
Texte original de Cassandra Clare ©
Traduction dâEurydice Bluenight ©
Illustrations de Cassandra Jean ©
Le texte original est Ă lire ici : https://secretsofblackthornhall.tumblr.com/post/698374167105585152/dru-to-kit
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De Emma Ă Bruce
Cher Bruce,
JâespĂšre que tu ne mâen voudras pas dâĂȘtre un peu mĂ©ditative aujourdâhui. Il ne reste plus personne Ă Blackthorn Hall Ă part Julian et moi, et une sorte de paisible silence rĂšgne sur la maison. Jules est Ă lâĂ©tage dans son studio et je suis assise sur le lit, en train dâĂ©crire et de repenser Ă ces derniers mois.
Quelque chose prend fin, Bruce. Il se passe encore beaucoup de choses qui ne sont pas rĂ©solues, bien sĂ»r : Kit qui est menacĂ© par le Royaume des FĂ©es, et ce quâil peut bien se passer avec la Cohorte Ă Idris. Alec a Ă©tabli un contact restreint avec eux, mais qui sait comment ça va Ă©voluer. NĂ©anmoins, au milieu de tout ça, quelque chose prend fin pour Julian et moi, et je ne sais pas ce qui va suivre.
(Ah, donc on fait dans le dramatique, Emma ? Jâai une petite idĂ©e. Lis la suite.)
Peut-ĂȘtre que câest simplement parce que les entrepreneurs sont partis alors que je mâĂ©tais habituĂ©e Ă les entendre sâaffairer toute la journĂ©e. Round Tom nous a fait un discours dâadieu lyrique qui (a) a durĂ© cinq bonnes minutes, ce qui est trĂšs long pour que quelquâun dise au revoir, et (b) Ă©tait Ă la fois trĂšs aimable et incluait la phrase : « La passion et lâaventure vous accompagnent toujours, et je ne suis quâun modeste constructeur dâhabitations, jâespĂšre donc ne jamais revoir aucun dâentre vous de toute ma vie. »
Ăa a contrariĂ© Julian. Je lui ai fait remarquer que les elfes ne pouvaient pas mentir, et il mâa fait remarquer que Round Tom nâavait pas du tout besoin de mentionner ça. TrĂšs juste. Julian a ajoutĂ© que ce nâĂ©tait pas comme si le travail habituel de Tom pour les membres des Cours Ă©tait dĂ©nuĂ© de rebondissements. Un autre bon point pour Jules. Les elfes sont les CrĂ©atures Obscures les plus mĂ©lodramatiques. En tout cas, plus dramatiques que les vampires, et ils passent leur temps Ă dire « oh je suis un mort-vivant, oh je suis maudit, que je mette plus dâeyeliner ».
Enfin bref, nous ne cherchions Ă devenir des amis proches de Round Tom. Il a fait du bon travail, et il sâest montrĂ© poli concernant la joie quâil avait de quitter cette maison.
Une fois que lui et ses ouvriers Ă©taient tous partis, nous nous sommes baladĂ©s un peu dans les jardins, mais Julian avait lâimpression que chaque dĂ©tail de la maison et du terrain Ă©tait gravĂ© dans son cerveau. Nous avons quittĂ© la maison un moment pour aller le long du fleuve.
Il y a un petit parc en face de Chiswick de lâautre cĂŽtĂ© de la Tamise : câest un rĂ©servoir naturel qui sâappelle le Leg Oâ Mutton Reservoir, entourĂ© dâune jolie promenade. (Dâailleurs, nâest-ce pas le nom le plus anglais que tu aies jamais entendu ? Pourquoi y a-t-il tant de trucs aussi charmants dans Londres ?) Câest un peu pĂ©nible parce que nous devons marcher plus dâun kilomĂštre et demi jusquâau Barnes Bridge juste pour aller sur lâautre rive, mais câĂ©tait une agrĂ©able chaude soirĂ©e et câĂ©tait sympa de marcher, Julian et moi nous baladant tranquillement, lâune des choses que je prĂ©fĂšre.
Julian avait prĂ©parĂ© des sandwiches au poulet, et nous avions aussi emmenĂ© de la limonade. (Bruce, il se peut que jâaie dĂ©veloppĂ© une dangereuse addiction Ă la limonade britannique. Je suis certaine que câest possible dâen trouver Ă Los Angeles, non ? Câest possible ?!) Nous nous sommes assis sur une petite couverture Ă cĂŽtĂ© du rĂ©servoir et avons regardĂ© les cormorans qui pĂȘchaient.
JâĂ©tais sereine, paisible, alors bien Ă©videmment câĂ©tait le moment idĂ©al pour tout gĂącher en abordant un sujet dĂ©sagrĂ©able. JâĂ©tais trop dĂ©tendue pour me souvenir de mâen inquiĂ©ter.
- Câest tellement beau ici, ai-je commencĂ©. MaisâŠ
Julian sâest tournĂ© vers moi, pas soucieux, simplement curieux, alors jâai continuĂ©Â :
- Je ne suis pas sĂ»re de vouloir vivre Ă plein temps Ă Londres. Je sais que nous venons de passer du temps, de faire des efforts et de dĂ©penser de lâargent pour rĂ©nover le manoir de ta famille et tout ça.
Jâai cru que Julian allait ĂȘtre en colĂšre, ou triste, alors je ne mâattendais pas vraiment Ă sa vĂ©ritable rĂ©action, que je dĂ©crirais comme un air « dĂ©routé ».
- Je nâai jamais pensĂ© que nous vivrions ici Ă plein temps, a-t-il admis, comme si cette idĂ©e ne lui Ă©tait jamais passĂ©e par la tĂȘte. Jâai supposĂ© que nous partagerions notre temps entre LA et ici. Mais seulement si câĂ©tait ce que tu voulais.
Je ne sais pas pourquoi il a dit cette derniĂšre phrase, mais il voyait certainement que je nâĂ©tais plus inquiĂšte mais plutĂŽt sur le point de lâembrasser.
- Câest-Ă -dire, moitiĂ©-moitiĂ©Â ?
- Peu importe, ce qui nous conviendra, a-t-il rĂ©pondu avec un haussement dâĂ©paules. Los Angeles quand il fait froid et quâil pleut ici, Londres quand le soleil est brulant lĂ -bas.
Et je lâai embrassĂ© Ă ce moment-lĂ , alors je vais faire une ellipse sur les cinq minutes qui ont suivi, qui ne tâintĂ©ressent sĂ»rement pas, Bruce. Il y a eu beaucoup de baisers au gout de limonade puis Jules mâa embrassĂ© lâoreille (ce qui crĂ©e Ă chaque fois un feu dâartifice le long de ma colonne vertĂ©brale) en disant :
- Chez moi, câest lĂ oĂč tu es, tu le sais, ça ?
- Bien sûr.
CâĂ©tait mignon et romantique de sa part de dire ça, mais il avait lâair plus sĂ©rieux.
- Non, je veux dire⊠a-t-il lĂąchĂ© en secouant la tĂȘte. Ce nâest pas comme si nous allions partager notre temps entre ma maison ici Ă Londres et ta maison lĂ -bas Ă Los Angeles. Jâai aussi une maison Ă Los Angeles. Et tu as une maison ici. Blackthorn Hall appartient Ă ma famille et toi, Emma, tu es ma famille. Et nous serons toujours ensemble, a-t-il ajoutĂ© avec un regard intense. Sauf si ce nâest pas ce que tu souhaites. Tu es la seule personne pour qui jâaie jamais eu des sentiments, Emma. Et je veux que ça soit vrai pour le reste de ma vie.
Je nâai pas eu Ă prendre le temps de rĂ©flĂ©chir Ă ce que jâallais dire.
- Moi aussi.
Jâavais dĂ©jĂ pensĂ© Ă ce que ça signifierait pour nous de nous fiancer, mais jâai lâimpression que câest trop tĂŽt. Ce genre dâengagements, ces promesses, me semblent justes.
Il a souri et expirĂ©, comme sâil avait Ă©tĂ© un peu nerveux. Puis il sâest levĂ© et mâa tendu la main pour mâaider Ă me relever.
- Rentrons Ă la maison. Jâai quelque chose Ă te montrer, a-t-il annoncĂ©.
- Je nâen doute pas.
Dâhabitude, quand je dis quelque chose comme ça, sur ce ton-lĂ , ça nous mĂšne Ă cinq autres minutes que je ne vais pas dĂ©tailler ici. Mais tu sais, câest Julian, il Ă©tait obnubilĂ© par cette idĂ©e, et nous sommes rentrĂ©s Ă la maison un peu plus vite quâĂ lâaller.
Une fois arrivĂ©s, il est tout de suite montĂ© dans la salle de bal. Je savais ce quâil tramait, bien sĂ»r : son projet secret sur lequel il travaillait depuis que nous sommes ici. Je lâavais un peu oubliĂ©, entre le fantĂŽme, la malĂ©diction et tout le reste, et je ne mâĂ©tais pas rendu compte quâil avait continuĂ© pendant tout ce temps. Certainement tĂŽt le matin avant que quiconque (ou le soleil) ne soit levĂ©.
Il avait accrochĂ© un grand rideau devant, le blaireau, et jâallais me moquer de lui quand il lâa dĂ©crochĂ©, et jâai vu la fresque en entier. Ăa recouvre lâintĂ©gralitĂ© du mur et câest magnifique. Toute la famille est lĂ , tous les Blackthorn. Chacun estâŠ
Non, ce nâest pas exact.
Parce que je suis aussi dans la fresque. Je suis juste lĂ avec le reste de la famille, entourĂ©e. Chacun dâentre nous est au milieu de fleurs. Des fleurs blanches pour tous ceux qui ont disparu. MĂȘme Rupert est lĂ , et les parents de Julian, dans un cercle de pĂ©tales blancs. Et Livvy tout en haut, enveloppĂ©e dans des ailes blanches.
Et des fleurs rouges pour ceux qui sont toujours lĂ . Helen et Aline, Mark, Ty, Dru et TavvyâŠ
Je me suis mise Ă pleurer presque instantanĂ©ment, tu vois, ces pleurs de joies, dâamour et dâĂ©merveillement quand on est submergĂ© par lâĂ©motion.
- Ăa te plait ? a demandĂ© Julian.
Oui, ça me plait. Câest tellement beau et parfait pour ce moment, oĂč des choses prennent fin et de nouvelles choses vont commencer. Et ça fait de cette maison Blackthorn Hall Ă juste titre⊠la maison des Blackthorn que je connais, que jâaime, pas les gens bizarres du siĂšcle dernier qui Ă©taient responsables de ce qui est arrivĂ©. Ăa me donne lâimpression quâune immense roue a tournĂ© et que nous sommes Ă la fois au dĂ©but et Ă la fin de quelque chose de nouveau et dâexaltant. Pour la premiĂšre fois depuis que je suis arrivĂ©e ici, je suis allĂ©e mâassoir dans la chambre pour tâĂ©crire et je me suis dit « Je suis dans notre chambre dans notre maison » et jâen suis contente.
Bonne nuit, Bruce. Je vais te poser sur une Ă©tagĂšre quand jâaurai fini, celle de mon cĂŽtĂ© du lit. FĂ©licitations : maintenant tu fais aussi partie de Blackthorn Hall.
Emma.
Texte original de Cassandra Clare ©
Traduction dâEurydice Bluenight ©
Illustration dâAudrey Estok ©
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De Jem et Tessa Ă Alec
Memo Ă lâattention du Consul Alec Lightwood
Re : Relations avec les elfes sauvages
AprĂšs plusieurs jours de tensions, nous sommes soulagĂ©s dâannoncer que les menaces Ă lâencontre de Christopher Herondale et Wilhelmina Carstairs semblent avoir Ă©tĂ© Ă©liminĂ©es. Nous sommes entrĂ©s en contact avec Gwyn ap Nudd, de la Chasse Sauvage, qui nous confirme que la fĂ©e nâayant prĂȘtĂ© aucun serment connue sous le nom de MĂšre Hawthorn a Ă©tĂ© dĂ©placĂ©e dans un lieu isolĂ©, oĂč elle sera dĂ©tenue Ă lâavenir par la Chasse Sauvage.
Malheureusement, la sĂ©curitĂ© de Christopher Herondale nâest toujours pas assurĂ©e sur le long terme. Je vous prie de trouver ci-joint, Ă loisir, de la correspondance personnelle contenant davantage de remarques et questions informelles.
Nous soussignés,
James Carstairs
Tessa Herondale-Carstairs
Cher Alec,
Jâai demandĂ© Ă Jem dâĂ©crire la partie formelle de ce rapport parce que ça me donne la migraine. Je mâen voulais de lui demander, mais il a balayĂ© mes inquiĂ©tudes dâun revers de la main : apparemment aucun dâentre nous ne croirait la quantitĂ© de documents administratifs que les FrĂšres Silencieux doivent remplir. Jâen ai Ă©tĂ© Ă©tonnĂ©e parce que jâai du mal Ă associer « administratif » et « CitĂ© Silencieuse », mais bon.
Bref, le rapport est exact. Julian Blackthorn, intelligent comme il est, a contactĂ© Gwyn, qui a acceptĂ© de sâoccuper de MĂšre Hawthorn. (Julian nâen avait parlĂ© Ă personne, Ă©videmment, parce quâil aime ses rĂ©vĂ©lations spectaculaires, comme nous nous en souvenons tous trĂšs bien.) AprĂšs avoir eu si peur, câĂ©tait vraiment magnifique quand la Chasse Sauvage est apparue, a saisi MĂšre Hawthorn et nous a ramenĂ© Mina.
Dâailleurs, Mina est heureuse, en bonne santĂ© et absolument pas bouleversĂ©e, contrairement Ă ses parents. Elle Ă©tait ravie au plus au point de voir la Chasse Sauvage, et depuis elle nâarrĂȘte pas de nous dire avec enthousiasme quâelle a rencontrĂ© beaucoup de chevaux et que les chevaux sont ses amis. Kit, bien sĂ»r, est au moins aussi bouleversĂ© que nous, si ce nâest plus. Il lâa Ă peine quittĂ©e des yeux depuis son retour. Il dormait mĂȘme par terre dans sa chambre. (Nous y avons installĂ© un clic-clac aprĂšs les deux premiĂšres nuits). Ăa lâa fortement Ă©branlĂ©. Il nâa pas beaucoup souhaitĂ© en parler, mais câest Ă©videmment trĂšs pesant pour lui. Depuis lâincident, il a ce regard inquiet que nous lui connaissons bien. Nous craignons quâil ne commence Ă comprendre ce que son hĂ©ritage peut rĂ©ellement signifier, mĂȘme si nous avons tout fait pour lâen protĂ©ger.
MalgrĂ© lâaide de Gwyn, ni Julian ni nous ne savons ce quâil sâest passĂ© exactement entre la Chasse Sauvage et MĂšre Hawthorn, et nous sommes peu disposĂ©s Ă le demander. Nous savons que le Royaume des FĂ©es peut ĂȘtre cruel, quâil est le plus cruel envers son propre peuple, et quâil a un sens de la justice et de la discipline particulier, qui semble parfois trĂšs⊠inhumain. Ceci dit, nous faisons confiance Ă Gwyn, notamment parce que nous faisons confiance Ă Diana Wrayburn. Sâil dit que MĂšre Hawthorn nâembĂȘtera plus Kit, nous le croyons.
Nous ne savons toujours pas parfaitement ce que MĂšre Hawthorn a dit Ă Kit pendant quâils Ă©taient seuls â quand nous pouvions les voir, et Mina aussi, mais pas les entendre. DâaprĂšs Kit, câĂ©tait seulement ce Ă quoi nous pouvions nous attendre, mais quand il est revenu vers nous, il avait les yeux hagards. Je voudrais pouvoir exiger de savoir ce quâelle a dit, ou quelles Ă©taient ses menaces ou rĂ©vĂ©lations, mais je sais que je ne peux pas. Il nous parlera quand il sera prĂȘt.
Cela dit, nous ne savons pas si MĂšre Hawthorn a des alliĂ©s qui pourraient aussi connaitre le secret de Kit. Peu importe comment elle a essayĂ© dâamadouer Kit, nous savons quâelle a des intentions hostiles. Nous lâavions rencontrĂ© Ă Buenos Aires, avant mĂȘme de savoir que Kit existait, et elle Ă©tait trĂšs claire. Ses mots me sont restĂ©s en tĂȘte : « Un Premier HĂ©ritier existe encore dans ce monde. Quand le Premier HĂ©ritier Ă©mergera, dans toute la terrible gloire nĂ©e du sang de la Cour des LumiĂšres, de celui de la Cour des TĂ©nĂšbres et de celui des Nephilim, jâespĂšre quâil dĂ©truira les Chasseurs dâOmbres ainsi que le Royaume des FĂ©es. JâespĂšre que le monde entier sera perdu. »
Je ne peux pas regarder Kit â Ă©tendu sur le clic-clac dans la chambre de Mina, la main serrĂ©e autour dâune des lattes de son berceau, mĂȘme quand il dort â et penser « terrible gloire ». Il est comme nâimporte quel autre Chasseur dâOmbres, une sorte dâordinaire peu ordinaire. Il aime les films et les soirĂ©es spaghetti et il se ronge les ongles. Il nâest quâune personne, pas un destin.
Pour lâinstant, trĂšs peu de gens connaissent lâhĂ©ritage de Kit. Emma et Julian, bien sĂ»r, toi et Magnus, Jace et Clary⊠mĂȘme les frĂšres et sĆurs de Julian ne savent pas, ou connaissent seulement un vague semblant de vĂ©ritĂ©. Mais Ă qui dâautre MĂšre Hawthorn a pu en parler ? Pas Ă la Cour des LumiĂšres, certainement : nous sommes tous les deux sĂ»rs que la Reine aurait dĂ©jĂ pris des mesures pour sâemparer de Kit si elle savait. Kieran sait, Ă©videmment, mais nous ne savons Ă quels membres de la Cour il a pu en parler (dâaprĂšs Emma, Mark et Cristina connaissent la situation en partie seulement). Kieran est clairement un alliĂ©, et sa Cour lui est fidĂšle. Mais il est facile dâimaginer quâun courtisan audacieux (ou un elfe sauvage) ait pu dĂ©couvrir cette histoire et cherche Ă en tirer profit.
Nous ne pouvons pas ignorer la rĂ©alitĂ©Â : les secrets comme celui de Kit finissent par ĂȘtre dĂ©couverts et ne peuvent pas ĂȘtre protĂ©gĂ©s indĂ©finiment. Le garder au sein dâun petit cercle dâamis de confiance, rien quâentre les Chasseurs dâOmbres, ça fait quand mĂȘme une douzaine de personnes.
Ce qui nous amĂšne Ă notre premiĂšre vĂ©ritable demande : Magnus pourrait-il venir Ă Cirenworth rapidement, pour renforcer les sortilĂšges de protection contre les incursions de ceux qui pourraient vouloir du mal Ă Kit ? Nous devons reconnaitre que ce nâest quâune solution temporaire, mais pour lâinstant câest le mieux que nous puissions faire.
Pendant ce temps, nous sommes dâavis (et nous sommes certains que tu seras dâaccord) que nous devons essayer de devancer cette menace. Nous avons sollicitĂ© Kieran pour que ses espions prĂȘtent attention aux possibles rumeurs au sujet de Kit qui circuleraient dans le Royaume. Serais-tu disposĂ© Ă faire la mĂȘme chose, via lâAlliance ? Nous savons que ce nâest absolument pas le bon moment pour toi. Si nous avions pu, nous aurions tout Ă fait choisi un moment moins politiquement prĂ©caire pour prĂ©senter ce problĂšme Ă lâEnclave. Sache que nous te soutenons et serons toujours Ă tes cĂŽtĂ©s. Nous nous sommes peut-ĂȘtre retirĂ©s de la vie active des Chasseurs dâOmbres, mais nous serons toujours prĂ©sents si tu as besoin de nous.
Tu as assumĂ© toutes ces responsabilitĂ©s Ă un si jeune Ăąge. Ne semble-t-il pas que les responsabilitĂ©s se prĂ©sentent toujours Ă nous Chasseurs dâOmbres trop tĂŽt Ă lâaube de notre vie ? Je regarde mon cher Kit et je sais. Nous savons tous ce qui se prĂ©pare, comme lorsque lâon sait que le soleil va se coucher sur une journĂ©e que lâon souhaiterait infinie. La longue journĂ©e ensoleillĂ©e de lâenfance de Kit est presque terminĂ©e. Je tremble Ă lâidĂ©e de ce quâil va devoir affronter Ă la tombĂ©e de la nuit.
Avec toute notre amitié,
Jem et Tessa.
Texte original de Cassandra Clare ©
Traduction dâEurydice Bluenight ©
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De Emma Ă Cristina
ChĂšre Cristina,
Je suis dĂ©solĂ©e, je suis dĂ©solĂ©e, vraiment dĂ©solĂ©e ! Je me rends compte que le message que je viens de tâenvoyer nâa ni queue ni tĂȘte, alors aprĂšs lâavoir lu, jette-le et lis cette lettre. JâĂ©tais un peu hystĂ©rique quand je lâai Ă©crit ; je voulais tout te raconter au sujet de Mina qui avait disparue pendant plusieurs jours, mais je ne pouvais pas. Et quand jâai pu, je me suis complĂ©tement dĂ©chargĂ©e. Encore une fois, dĂ©solĂ©e.
CâĂ©tait horrible de ne pas pouvoir te parler de ce quâil se passait. Jâai toujours dĂ©testĂ© la politique, je ne tâapprends rien⊠mais mĂȘme si ta situation (et celle de Mark) est inhabituelle, la Cour des LumiĂšres considĂšre certainement que vous faites partie de la suite de Kieran, et on nous avait formellement interdit de rĂ©vĂ©ler Ă lâune ou lâautre Cour que Mina avait Ă©tĂ© enlevĂ©e dans sa propre chambre Ă Blackthorn Hall. Et nous avons obĂ©i Ă la lettre.
Alors, il sâavĂšre que la personne qui avait organisĂ© lâenlĂšvement Ă©tait MĂšre Hawthorn, la nourrice de la PremiĂšre HĂ©ritiĂšre, qui a choisi dâĂ©pouser un Chasseur dâOmbres. Depuis, elle a eu des relations compliquĂ©es avec les Chasseurs dâOmbres, surtout avec les Herondale (qui nâa pas de relations compliquĂ©es avec les Herondale, on se le demande). Et lĂ elle exigeait de parler Ă Kit comme condition pour que nous puissions rĂ©cupĂ©rer Mina.
Personne ne voulait que Kit y aille, mĂȘme si nous avions tous terriblement peur pour Mina. Mais il Ă©tait rĂ©solu. On ne pouvait pas lâarrĂȘter. Nous avons donc trouvĂ© un arrangement grĂące Ă quelques elfes intermĂ©diaires pour que Kit rencontre MĂšre Hawthorn. Elle avait demandĂ© Ă ce que le rendez-vous ait lieu prĂšs de lâeau dâun fleuve, alors nous sommes allĂ©s Ă la Promenade de Chiswick. Il y a un minuscule parc lĂ -bas, et un petit kiosque Ă musique. Tous ensemble (Julian et moi, Tessa, Jem et Kit), nous y sommes allĂ©s sans dire un mot et avec des mines sombres. Tessa nâarrĂȘtait pas de caresser Kit dans le dos, et câĂ©tait Ă©vident quâelle essayait de ne pas pleurer. Jem avait lâair de vouloir tuer quelquâun. Kit avait simplement lâair dĂ©terminĂ©. Et Jules⊠je parlerai de Jules aprĂšs.
Nous sommes restĂ©s un peu en arriĂšre pendant que Kit traversait la pelouse pour rejoindre le kiosque. A son approche, MĂšre Hawthorn est apparue de derriĂšre les arbres, avec Mina dans les bras, et sâest avancĂ©e vers lui.
Jules et moi nous sommes crispĂ©s, au cas oĂč Jem ou Tessa se serait ruĂ© vers le bĂ©bĂ©. Nous nâaurions pas pu leur en vouloir, mais nous savions que ce nâĂ©tait pas possible. Kit devait pouvoir rĂ©cupĂ©rer Mina sans violence. Tout ce que je peux dire, câest quâon voit quâils ont endurĂ© dâinnombrables Ă©preuves tous les deux au cours de leur longue vie. Ils se serraient les mains, immobiles, mais câĂ©tait clair quâils avaient dĂ©sespĂ©rĂ©ment envie de courir vers leurs enfants. Ils faisaient preuve dâun incroyable sang-froid, et ça me brisait le cĆur.
Kit et MĂšre Hawthorn se sont rejoints devant le kiosque. Evidemment nous nâentendions pas leur conversation, mais nous avons tout de suite vu Mina tendre les bras vers Kit. Il a tentĂ© de la prendre, mais MĂšre Hawthorn sâest interposĂ©e. Elle nâavait pas du tout lâintention de la rendre et ils ont commencĂ© Ă se disputer. Je voyais Ă quel point Kit Ă©tait Ă©nervĂ© mĂȘme sâil essayait de garder son calme. Il nâarrĂȘtait pas de faire non de la tĂȘte, presque Ă chaque fois que MĂšre Hawthorn prenait la parole.
Bref, ça a durĂ© quelques minutes, puis MĂšre Hawthorn sâest mise Ă rire. Elle a tournĂ© la tĂȘte (elle nous voyait, Ă©videmment, et sâen moquait) et a claquĂ© des doigts. Kit est tombĂ© Ă la renverse ; il a fait une pirouette et sâest relevĂ©. Mais des tiges noires Ă©mergeaient du sol, sâattaquaient Ă lui et sâenroulaient autour de ses jambes. Mina criait si fort que nous lâentendions.
- Câen est assez, a rugi Jem.
Il sâapprĂȘtait Ă traverser la rue, mais Julian a posĂ© une main sur son Ă©paule.
- Attends, lui a-t-il dit.
Nous lâavons tous regardĂ©, interloquĂ©s. Tu sais que jâai une confiance absolue en Julian, mais pendant une seconde, mĂȘme moi je me suis demandĂ©e sâil Ă©tait devenu fou.
Et ensuite. Et ensuite il y a eu un Ă©nooorme bruit. Jâai dâabord cru que câĂ©tait un hĂ©licoptĂšre, ou peut-ĂȘtre plusieurs hĂ©licoptĂšres, mais ensuite jâai compris que non, le bruit Ă©tait plus Ă©trange que ça⊠câĂ©tait des sabots qui frappaient le ciel. Ils sont passĂ©s au-dessus de nous⊠câĂ©tait Gwyn et Diana ! Enfin, câĂ©tait toute la Chasse Sauvage, ils Ă©taient plus dâune vingtaine, certains sur des chevaux, dâautres sur des crĂ©atures ailĂ©es que je nâavais encore jamais vues. Mais Ă lâavant galopait Gwyn, et Diana Ă©tait sur un autre cheval derriĂšre lui, ses cheveux flottant au vent.
Diana est descendue en piquĂ© et sâest emparĂ©e de Mina dans les bras de MĂšre Hawthorn. Gwyn la suivait et a saisi MĂšre Hawthorn dâun bras (ce gars est assez costaud, on dirait) et lâa jetĂ©e sur le dos de son cheval. Ăa paraissait plutĂŽt dangereux pour MĂšre Hawthorn, mais bon, on nâa pas beaucoup de sympathie pour les kidnappeuses.
Diana est descendue en piquĂ© (câest le truc de la Chasse Sauvage, les descentes en piquĂ©, tu te souviens) sur nous, et a dĂ©licatement rendue Mina Ă Jem et Tessa. Puis Diana nous a fait un clin dâĆil et est repartie dans le ciel. Elle, Gwyn et le reste de la Chasse Sauvage ont galopĂ© plus vite que je ne le croyais possible. Je pense quâils devaient Ă©loigner MĂšre Hawthorn de nous, ce qui Ă©tait logique. En un rien de temps, ils avaient disparu dans les nuages.
Je dois dire que le clin dâĆil de Diana Ă©tait vraiment cool. Je me rends compte que ça me manque un peu de faire des trucs cools. Je crois que jâirai dans le jardin avec Cortana ce soir pour sĂ©vĂšrement dĂ©capiter des mauvaises herbes.
Enfin bref. Kit nous rejoignait en courant, Tessa pleurait de soulagement et Jem ne quittait pas des yeux lâendroit oĂč la Chasse Sauvage avait disparue. Mina, Ă©videmment, se portait Ă merveille. Elle rĂ©pĂ©tait « Cheval ! Cheval ! », câĂ©tait hilarant, puis Kit est arrivĂ© et lâa cajolĂ©e. Julian et moi nous sommes Ă©loignĂ©s pour les laisser se retrouver tous les quatre.
Julian avait une de ces expressions sur le visage et jâai eu une intuition :
- CâĂ©tait toi, non ? Tu as contactĂ© la Chasse Sauvage ?
Il a haussé les épaules :
- MĂšre Hawthorn avait dit de ne contacter ni la Cour des LumiĂšres ni celle des TĂ©nĂšbres, mais la Chasse Sauvage nâappartient Ă aucune. Ils nâont prĂȘtĂ© allĂ©geance Ă personne.
- MÚre Hawthorn non plus, ai-je répondu. Donc tu as dit quelque chose comme « Fées sauvages, venez récupérer votre amie sauvage, elle devient trop sauvage » ?
- CâĂ©tait lâidĂ©e.
Il a dit ça dâun ton dĂ©sinvolte, mais je voyais quâil Ă©tait fier de lui. Et oui, dâaccord, jâĂ©tais fier de lui aussi, ce que je lui ai dit.
Sur le chemin du retour, nous avons demandĂ© Ă Kit ce que MĂšre Hawthorn lui voulait. Il a expliquĂ© quâelle voulait lui dire quâil Ă©tait le descendant de la premiĂšre tu-sais-qui (je sais que Kieran tâa parlĂ© de lâhĂ©ritage elfique de Kit, mais pas de tout, et peu de gens savent) et quâelle Ă©tait venue le chercher pour quâil aille vivre au Royaume des FĂ©es lĂ oĂč Ă©tait sa place. Il a essayĂ© de lui faire comprendre quâil nâavait aucune envie de vivre au Royaume des FĂ©es, que sa vie actuelle lui convenait (mais il a dit ça en regardant Jem et Tessa, et je crois quâil prĂ©fĂ©rait dire « convenir » plutĂŽt que ce quâil ressent vraiment, qui est bien plus que ça). Elle lui rĂ©pĂ©tait que câĂ©tait son destin et son devoir, son avenir le rattrapera bien assez vite sâil ne sây pliait pas, bla bla bla, des trucs de fĂ©es, tu sais comment elles sont. (Oh, ne le prend pas mal si tu lis aussi, Kieran.)
Mais je crois quâil ne disait pas toute la vĂ©ritĂ©, parce que MĂšre Hawthorn sâest donnĂ©e beaucoup de mal simplement pour envoyer un tel message. Enfin, elle aurait pu Ă©crire ça sur une carte postale. Ce nâĂ©tait rien que Kit ne savait pas dĂ©jĂ pour ainsi dire. Je suis certaine quâelle en a dit davantage que Kit ne souhaite pas rĂ©vĂ©ler, je le voyais Ă son regard. JâespĂšre quâil le dira Ă Jem et Tessa, quand il sera prĂȘt. Au moins, nous pouvons ĂȘtre sĂ»rs que Gwyn fera en sorte que MĂšre Hawthorn le laisse tranquille⊠un souci de moins.
Ce sont toutes les nouvelles que jâai, et je suis tellement soulagĂ©e de pouvoir enfin tâen parler. Je suppose que si Kieran veut en savoir plus, il devrait contacter Gwyn. Je crois tâavoir dit tout ce que je sais.
Prends soin de toi, et nous nous reparlerons bientÎt. Embrasse K et M pour moi !
Emma
Texte original de Cassandra Clare ©
Traduction dâEurydice Bluenight ©
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De Emma Ă Bruce
Bruce,
Je suis certaine que tu tâinquiĂštes pour Mina, comme nous tous. Eh bien, voilĂ la mauvaise nouvelle : elle nâest pas rentrĂ©e.
Il nây a pas de bonne nouvelle.
Reprenons depuis le dĂ©but. Tout le monde est passĂ© Ă lâaction dĂšs que nous avons trouvĂ© la poupĂ©e effrayante et la note. Nous avons fouillĂ© la maison et le jardin, mais bien sĂ»r personne ne croyait vraiment quâelle Ă©tait encore ici. Peut-ĂȘtre quâil y aurait une trace de la fĂ©e (ou des fĂ©es) qui lâont emmenĂ©e, avons-nous pensĂ©, mais Ă©videmment il nây avait rien que nous autres Chasseurs dâOmbres aurions pu remarquer. Julian a envoyĂ© un message de feu Ă Ty pour lui demander si le DĂ©tecteur pouvait ĂȘtre Ă nouveau modifiĂ© pour rechercher les elfes au lieu des fantĂŽmes. Ty a eu quelques idĂ©es, mais le seul rĂ©sultat a Ă©tĂ© que le DĂ©tecteur sonnait continuellement. Ce qui est logique vu que cette maison regorge dâartisanat elfique maintenant. Puisquâil est peu probable que les linteaux gravĂ©s des fenĂȘtres aient enlevĂ© Mina⊠ça ne nous aide pas.
Tessa a contactĂ© lâInstitut de Londres, qui a placĂ© lâEnclave en alerte maximale et a envoyĂ© quelques Chasseurs dâOmbres Ă la maison pour aider, ce qui a consistĂ© principalement Ă faire du thĂ© et des Bruits dâAnglais Inquiets (« oh ma pauvre, oh ma pauvre amie », « comment doncâŠÂ » et ainsi de suite). Jem est allĂ© poser des questions au MarchĂ© Obscur (je crois quâil a utilisĂ© le mot « interroger »), mais il est revenu bredouille quelques heures plus tard. Il a remarquĂ© que ce nâĂ©tait mĂȘme pas comme si les elfes avaient refusĂ© de parler : ils avaient honnĂȘtement lâair tout aussi stupĂ©fait que Round Tom ou que nous. Je suppose que la plupart des fĂ©es du MarchĂ© Obscur se tiennent aussi loin que possible des affaires des Cours, et tout le monde Ă©tait dâavis que lâenlĂšvement dâune Chasseuse dâOmbres devait ĂȘtre un coup dâune des Cours parce que les fĂ©es lambdas ne feraient pas une chose aussi stupide que de violer les Accords avec une telle impudence.
Oh, il y a ça aussi. Tessa a contactĂ© lâEnclave de Londres en tout dernier recours parce que maintenant ils sont au courant de cette Ă©norme violation des Accords et personne ne souhaite une guerre avec le Royaume des FĂ©es. (Ă moins peut-ĂȘtre le kidnapper ?) Dâun autre cĂŽtĂ©, jâai du mal Ă croire quâAlec Lightwood soit capable de dĂ©clarer la guerre avant que nous nâen sachions davantage. Mais ça ravive quand mĂȘme toutes les tensions, ce qui nâest pas une bonne chose.
Si jamais je rencontre Raziel, je vais lui demander⊠bon, dâaccord, je crois que si jamais je rencontre Raziel, le feu sacrĂ© anĂ©antira ma personne jusquâau dernier atome, mais si je peux poser une question avant, ce sera pourquoi ne peut-on pas Tracer les enfants. Je sais que câest parce quâils nâont pas encore de runes, mais ne sont-ils pas ceux que lâon a certainement le plus besoin de Tracer ? ça ne semble ĂȘtre un dĂ©faut de conception dans tout ce systĂšme. Je devrais en parler Ă Clary, peut-ĂȘtre quâelle pourra crĂ©er une sorte de rune Trouve-BĂ©bĂ© plus tard. Non pas que ça nous aide lĂ tout de suite.
La question la plus importante, en dehors dâoĂč est Mina et qui lâa enlevĂ©e, est : pourquoi quelquâun voudrait faire ça ? ça nâa aucun sens. Julian sâest demandĂ© si quelquâun voulait se venger de Jem ou Tessa, mais il nây avait personne selon eux. Round Tom a suggĂ©rĂ© que quelquâun essayait peut-ĂȘtre de faire accuser les elfes de lâenlĂšvement, mais encore une fois, pourquoi ? Dans tous les cas, nous nâavons pas encore contactĂ© ni Kieran ni Adaon puisquâon nous a averti de ne pas le faire.
Bruce, je me sens horrible. Tessa et Jem ne sont venus que pour nous aider avec la malĂ©diction, et maintenant ça. Jâen suis malade⊠peut-ĂȘtre quâil y a quelque chose de profondĂ©ment mauvais Ă Blackthorn Hall dont nous ne pouvons pas nous dĂ©barrasser mĂȘme en rompant une malĂ©diction. Ou peut-ĂȘtre que je mâinquiĂšte et que jâai des idĂ©es morbides. Câest probablement ça.
Julian mâappelle, je reviens.
#
Je suis de retour, et jâai des nouvelles. La ravisseuse a envoyĂ© une note ! Enfin⊠une autre note. Et elle a donnĂ© son nom !
Votre enfant vous sera rendue si, et seulement si, lâon mâaccorde une audience en privĂ© avec celui que vous nommez Christopher Herondale.
Alors dâabord, « celui que vous nommez » ⊠non mais vraiment ? Comment elle appelle Kit, LâIncroyable GĂ©nie ? Ensuite, câĂ©tait signĂ© « MĂšre Hawthorn », ce qui ne nous disait rien ni Ă moi ni Ă Julian, mais Jem et Tessa ont Ă©changĂ© un regard entendu, et Kit avait lâair abattu. En fait, elle Ă©tait la nourrice de la PremiĂšre HĂ©ritiĂšre. Je veux dire la premiĂšre PremiĂšre HĂ©ritiĂšre, il y a bien longtemps. (Elle nâa officiellement prĂȘtĂ© allĂ©geance ni Ă la Cour des LumiĂšres ni Ă la Cour des TĂ©nĂšbres, dâaprĂšs ce que nous avons appris, mais ça ne veut pas dire quâelle ne va pas se servir de tout ça comme dâun moyen de pression contre les Cours.)
Donc ça a Ă voir avec Kit, et la politique fĂ©Ă©rique, et câest le chaos. Je me sens trĂšs mal pour Kit, qui Ă©tait plus pĂąle et tendu que je ne lâaie jamais vu. (Et je nâai pas besoin de te rappeler, Bruce, que jâai vu Kit hyper pĂąle et tendu.)
Kit, Ă©videmment, a tout de suite acceptĂ©, il la rencontrerait, il ferait nâimporte quoi pour rĂ©cupĂ©rer Mina. Julian a fait remarquer que câĂ©tait peut-ĂȘtre un piĂšge, et Kit a explosĂ©Â :
- Ăvidemment que câest un piĂšge ! Mais je ne peux pas supporter quâon fasse du mal Ă Mina Ă cause de moi.
Je ne crois pas lâavoir jamais vu comme ça, Bruce. Si Ă©nervĂ©, si dĂ©terminĂ©. Il grandit. Il a grandi, en quelque sorte, un peu comme Julian a dĂ» grandir si vite ; ça me brise le cĆur. Kit a lâair de savoir Ă quoi il a affaire (pas seulement aujourdâhui, mais de maniĂšre gĂ©nĂ©rale) et il sait aussi quâil ne peut pas sâenfuir. Il doit y faire face.
Round Tom a soulignĂ© que MĂšre Hawthron Ă©tait imprĂ©visible mais mĂȘme elle hĂ©siterait avant de violer les Accords au point de faire du mal Ă Mina. Kit a rĂ©torquĂ© quâelle avait dĂ©jĂ violĂ© les Accords en commençant par la kidnapper.
En comprenant que Kit allait accepter le rendez-vous peu importe ce que nous lui dirions, Jem a suggĂ©rĂ© quâau moins nous ferions ça selon nos propres termes, dans un lieu que nous choisirions, et en prenant Ă©normĂ©ment de prĂ©cautions.
- Comme tu veux, a répondu Kit. Mais je vais rencontrer cette MÚre Hawthorn et récupérer Mina.
Et je sais quâils sont cousins au sixiĂšme degrĂ© ou quelque chose comme ça, mais il me faisait vraiment penser Ă Jace. Je crois que lâentĂȘtement des HĂ©rondale est ancrĂ© profondĂ©ment dans les gĂȘnes.
Julian Ă©tait Ă©tonnement silencieux depuis que Kit sâĂ©tait emportĂ©, et jâai cru quâil Ă©tait blessĂ©, mais ensuite je me suis rendu compte quâil avait cette expression qui signifie quâil avait une idĂ©e mais quâil nâĂ©tait pas encore prĂȘt Ă la partager. Tout le monde parlait de charmes anti-fĂ©e et des runes que Kit allait porter, alors que Julian restait Ă lâĂ©cart de tout ça et rĂ©flĂ©chissait⊠de cette maniĂšre quâil a de rĂ©flĂ©chir qui ne ressemble en rien Ă celle des autres. ComplĂštement absorbĂ© par les rĂ©flexions sur son plan.
Je me demande ce quâil prĂ©pare. Je pourrais essayer de lui tirer les vers du nez, mais jâai appris quâil vaut mieux le laisser mâen parler quand il est prĂȘt. Mais voir son expression mâa donnĂ© plus dâespoir que tout le reste de la conversation.
Emma.
Texte original de Cassandra Clare ©
Traduction dâEurydice Bluenight ©
Le texte original est Ă lire ici : https://secretsofblackthornhall.tumblr.com/post/695837806397898752/emma-to-bruce
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De Kit Ă Jace
Jace â
Je ne sais pas pourquoi jâĂ©cris, je ne sais pas pourquoi câest Ă toi que jâĂ©cris, jâessaye juste de garder mon calme mais jâai toutes ces idĂ©es dans la tĂȘte qui se rĂ©pĂštent encore et encore et jâai besoin de les mettre sur le papier et de les envoyer quelque part. Tu as dit que tu serais toujours lĂ si jâavais besoin de parler donc voilĂ , salut, oui, jâai besoin de parler. Je ne peux pas aller voir Jem et Tessa, ils sont tout aussi traumatisĂ©s que moi, peut-ĂȘtre plus. Et Emma et Julian Ă©taient lĂ et ils passaient un si bon moment et profitaient de leur maison qui Ă©tait enfin sĂ»re et agrĂ©able et chaleureuse et puis soudain un bĂ©bĂ© est enlevĂ© dans cette maison sĂ»re et agrĂ©able sans que personne ne sâen rende compte.
La vĂ©ritĂ©, câest⊠jâai refusĂ© de lâadmettre, mais la vĂ©ritĂ© câest que Mina a toujours Ă©tĂ© en danger. A cause de moi. Parce que jâai de trĂšs vieux ancĂȘtres elfiques, donc tous ceux dont je suis proche sont en danger. Je ne peux rien y faire, et je nâai rien fait pour mĂ©riter ça. Et ça veut dire aussi que Jem et Tessa, parce quâils mâont adoptĂ©, parce quâils mâaiment, se sont fait enlever leur fille malgrĂ© tout le mal quâils se sont donnĂ©.
Dâailleurs, vu que tu es aussi quelquâun qui compte pour moi, tu fais partie des personnes que jâai mises en danger. DĂ©solĂ©. Mais tu es Jace Herondale ! Le danger, tu en fais ton affaire. Le danger, tu lâenvoies promener et le pĂ©ril, tu lui en colles une. Tu tâen sortiras. Mais Mina⊠elle est tellement petite. Et elle nâa jamais Ă©tĂ© sĂ©parĂ©e de sa famille avant.
Je nâarrĂȘte pas de me rĂ©pĂ©ter quâils ne lui feront pas de mal. Ce nâest pas elle quâils veulent. Câest quelque chose dâautre.
Tout indique quâelle a Ă©tĂ© emmenĂ©e par des fĂ©es. La plupart des employĂ©s de Round Tom sont partis et nous ne savons pas si lâun dâentre eux est coupable, ou complice. Round Tom lui-mĂȘme dit quâil ne sait rien, il est tout aussi dĂ©concertĂ© que nous tous â il ne se prĂ©occupe jamais de la politique. Tout le monde se mĂ©fie quand mĂȘme de lui, mais bon, il ne peut pas mentir, et câest difficile dâinterprĂ©ter la phrase « Je nâavais pas connaissance de quoi que ce soit en rapport avec lâenlĂšvement de votre fille » dâune autre maniĂšre.
Mais ça nâa peut-ĂȘtre pas dâimportance. Si Mina a Ă©tĂ© enlevĂ©e par des fĂ©es⊠surtout des fĂ©es qui reçoivent leurs ordres directement de lâune des Cours⊠câest une violation des Accords. Et ça implique une guerre avec le Royaume des FĂ©es. Une autre guerre avec le Royaume des FĂ©es.
Comment on peut vivre comme ça, mec ? Comment on peut se lever le matin en sachant quâon met tout le monde en danger, simplement en existant ?
Je crois que je peux rĂ©pondre Ă cette question par moi-mĂȘme. On est ce que lâon est Ă cause de tout ce que lâon a traversĂ©. On gĂšre les choses parce quâon a dĂ» gĂ©rer des choses. Jem et Tessa mâont adoptĂ© en pensant quâils pourraient me protĂ©ger, mais peut-ĂȘtre que rien ne peut me protĂ©ger. Jâai suivi le mouvement, je me suis pris au jeu de la famille heureuse, mais la vĂ©ritĂ© câest que je dois changer. Ătre plus solide. Plus robuste. Plus puissant. Ătre quelquâun dont nos adversaires devraient avoir peur. Pas un enfant que lâon doit protĂ©ger. Il faut en finir.
Je ne suis plus un enfant.
Bref. Je viens de me rendre compte que tu sais dĂ©jĂ tout ce quâil se passe, parce que je suis sĂ»r quâAlec tâa dĂ©jĂ mis au courant. Mais ça mâaide de lâĂ©crire moi-mĂȘme, comme je lâai dit. Je ne crois pas que tu puisses faire quoi que ce soit, et je ne te demande pas de mâaider. Je me suis simplement dit que toi, mieux que quiconque, tu comprendrais. Que tu pourrais ĂȘtre quelquâun Ă qui je pourrais parler de ça. JâespĂšre que ça ne te dĂ©range pas dâĂȘtre cette personne pour moi.
Kit
Texte original de Cassandra Clare ©
Traduction dâEurydice Bluenight ©
Le texte original est Ă lire ici : https://secretsofblackthornhall.tumblr.com/post/695203276064505856/kit-to-jace
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De Emma Ă Bruce
Cher Bruce,
Nous avons réussi ! La malédiction est brisée ! Rupert est libre ! Longue vie à Rupert !
En y repensant, câest dingue que nous ayons essayĂ© de faire plein de choses nous-mĂȘmes. Nous aurions dĂ» nous douter que lorsque nous rĂ©ussirions enfin, ce serait avec toute lâĂ©quipe prĂ©sente â en lâoccurrence, Jem, Tessa, Kit et Magnus. (Mina a aidĂ© en nous remontant le moral et aussi en dessinant partout avec sa petite stĂšle.)
Tout le monde est encore là , et nous pouvons nous détendre un peu dans notre nouvelle maison dé-maudite. (Elle est assez chaleureuse, maintenant que nous avons fait le ménage et que, tu sais, nous nous sommes débarrassés de son aura démoniaque.) Tout le monde sauf Magnus, qui est reparti à New York en quatriÚme vitesse cet aprÚs-midi.
Nouveau paragraphe Ă ce sujet. Parce que jâai beaucoup de questions qui restent sans rĂ©ponse et je ne peux les poser quâĂ toi, Bruce. Bon, Magnus Ă©tait pressĂ© de rentrer pour assister Ă une rĂ©union quâAlec a organisĂ©e avec Luke et quelques autres CrĂ©atures Obscures au sujet des nĂ©gociations avec la Cohorte. Dâaccord, mais je trouve que la Cohorte nâa pas grand-chose Ă faire peser dans la balance. La situation est bien pire pour eux que pour nous. Nous devrions pouvoir attendre quâils se dĂ©cident Ă sortir⊠tu ne crois pas ?
Enfin, je suppose quâils ont un avantage symbolique. Nous sommes tous des Chasseurs dâOmbres et Idris, Alicante et le Lac Lyn nous manquent Ă tous. Nous sommes certainement nombreux Ă avoir laissĂ© des affaires lĂ -bas que nous ne pourrons pas rĂ©cupĂ©rer et puis, câest vrai, il y a aussi beaucoup de gens qui vivaient lĂ -bas et qui ont dĂ» Ă©vacuer pour aller aux quatre coins du monde et qui veulent rentrer chez eux. Je comprends ça. Mais, je veux dire⊠quâest-ce que la Cohorte peut bien manger lĂ -bas ? Il nây a pas vraiment de cultures Ă Idris. Est-ce quâils sont tous devenus fermiers ? Pour sâoccuper des rĂ©coltes ? Et battre le beurre ? Câest difficile dâimaginer Zara faire tout ça. Mais on ne sait jamais. Câest-Ă -dire quâil nây a mĂȘme pas de dĂ©mons Ă chasser. Ce qui nous rappelle que les Chasseurs dâOmbres ne sont absolument pas censĂ©s sâenterrer Ă Idris lĂ oĂč il nây a aucun dĂ©mon Ă chasser. Il me semble que Raziel a Ă©tĂ© trĂšs clair sur ce point-lĂ .
Ils doivent devenir fous dans leur enclos. JâespĂšre quâils ont trouvĂ© des jeux de sociĂ©tĂ© ou quelque chose pour sâoccuper.
Peut-ĂȘtre que Zara sâest dĂ©clarĂ©e Reine Ă Vie et quâelle nâa pas Ă cultiver quoi que ce soit parce quâelle se contente de parader en menaçant de tuer quiconque ne lui fait pas pousser une pomme de terre Ă lâinstant.
Ou peut-ĂȘtre que nous nâavons pas de nouvelles parce quâils sont tous devenus cannibales. Ou peut-ĂȘtre quâils se sont tous retournĂ©s contre Zara et câest quelquâun dâautre qui menace de tuer les gens maintenant.
Bon, assez de thĂ©ories sur la Cohorte. Je suis de bonne humeur, ou du moins, je lâĂ©tais avant de commencer Ă Ă©crire cette page. Nous passons du temps avec Jem, Tessa et Kit et câest vraiment gĂ©nial. Nous avons commandĂ© chinois (les livreurs ont toujours un peu peur de monter lâallĂ©e, mais nous leur donnons dâĂ©normes pourboires alors nous avons commencĂ© Ă ĂȘtre connus depuis notre arrivĂ©e). Nous avons allumĂ© des bougies (pour lâambiance et pas pour de la magie noire, qui lâeut cru ?) et avons mangĂ© des raviolis chinois jusquâĂ ĂȘtre trop rassasiĂ©s pour simplement nous lever, ce que je nâavais pas fait depuis le mariage de Magnus et Alec. Il faut croire que si on me propose des raviolis, jâen mangerai jusquâĂ en devenir un moi-mĂȘme. Moi, ce que jâen pense, câest que je ne refuserai jamais de devenir ce que jâaime le plus.
Bref. MĂȘme Kit Ă©tait moins morose ce soir par rapport Ă dâhabitude ! Il discutait avec Round Tom et ils semblaient bien sâentendre. Ah, jâallais presque oublier ! Comment puis-je oublier ? Les entrepreneurs ont trouvĂ© un cercueil enterrĂ© dans le jardin. Mais il nây avait pas du tout un Ă©pouvantable cadavre Ă lâintĂ©rieur, mais plutĂŽt un tas de vieux trucs ! ça mâa semblĂ© bizarre dâutiliser un cercueil en tant que capsule temporelle, mais aux tĂȘtes quâont fait Tessa et Jem et Ă ce quâils ont marmonnĂ©, jâai cru comprendre que câĂ©tait une histoire assez longue que nous leur demanderons de nous raconter plus tard.
Enfin bref, dans le cercueil se trouvait UN FOURREAU POUR CORTANA. Câest incroyable ! Tu le crois, ça ? Tessa a dit quâil avait appartenu Ă CordĂ©lia Carstairs, qui Ă©tait la propriĂ©taire de Cortana il y a plusieurs gĂ©nĂ©rations. Le fourreau doit ĂȘtre bien nettoyĂ© (vraiment bien nettoyĂ©) mais ensuite il pourra ĂȘtre rĂ©uni avec Cortana. (Dâailleurs, je crois quâil est plus la propriĂ©tĂ© de Cortana que de quiconque ; peut-ĂȘtre quâils seront contents dâĂȘtre rĂ©unis.)
Il y avait aussi une Ă©pĂ©e pour Julian : ce qui Ă©tait auparavant une Ă©pĂ©e de la famille Blackthorn, mais il nây a plus que la garde, la lame a complĂštement disparue, je ne sais pas du tout pourquoi. Il songe Ă la faire reforger. Surprise : Round Tom connait quelquâun. Triangular Jerry. Non, je blague pour le nom, mais Round Tom connait effectivement un forgeron et lui et Julian ont commencĂ© Ă planifier ça. (En fait, ce que Round Tom veut faire, câest installer une forge Ă Chiswick, ce qui est sympa, mais est-ce que nous voulons rajouter un chantier Ă tous les autres ? Enfin, peut-ĂȘtre⊠avoir une forge Ă la maison serait assez cool.)
Tu te demandes peut-ĂȘtre ce qui est arrivĂ© Ă la bague de Rupert, puisque ce nâest pas comme sâil pouvait lâemmener avec lui, et il nâest pas revenu la chercher dâune maniĂšre fantomatique. Magnus a vĂ©rifiĂ© et a dit quâelle nâavait plus rien de magique, câest juste une bague ordinaire que Tatiana a dĂ» ensorceler pour retenir Rupert. Mais personne ne va la porter, bien Ă©videmment. Alors nous lâavons posĂ©e sur le manteau de la cheminĂ©e dans le salon. OĂč elle va rester.
Les Gray-Carstairs-Herondale repartent Ă Cirenworth demain. CâĂ©tait trĂšs agrĂ©able de les avoir Ă la maison, mais tu sais, ce sera sympa quand il nây aura plus que Julian et moi ici, sans que ce soit effrayant tout le temps. Je pense que nous allons passer de bons moments.
#
Bruce, les bons moments, on annule. Tout va de travers. Je crois que le fait que tout aille bien mâa rendu un peu trop suffisante ; il fallait que lâunivers vienne tout bouleverser.
Mina a disparue.
Et par disparue, je veux dire quâelle a Ă©tĂ© kidnappĂ©e.
Et par kidnappée, je veux dire que le kidnapper a laissé à sa place une vieille poupée en porcelaine inquiétante (avec de grands yeux vides, beurk !), avec une note.
Je venais juste de finir dâĂ©crire ce quâil y a avant quand jâai entendu un horrible cri venant dâen haut et des pas trĂšs bruyants. Quand je suis arrivĂ©e, tout le monde Ă©tait rĂ©uni dans la chambre de Mina, frappĂ© dâeffroi.
Je me suis tout de suite dit : « Oh non, une autre malĂ©diction, ou la mĂȘme malĂ©diction, nous nâen avons pas fini avec la malĂ©diction. » Et peut-ĂȘtre que toi aussi, mais ce nâest pas ça. Ăa nâa rien Ă voir. Ăa a Ă voir avec les FĂ©es. Avec le Royaume des FĂ©es.
Tessa a pris la note, lâa lue et lâa donnĂ©e Ă Jem avec un regard sinistre. Julian ouvrait dĂ©jĂ la fenĂȘtre pour voir sâil y avait quelquâun dehors, et jâai lu par-dessus lâĂ©paule de Jem :
Texte original de Cassandra Clare ©
Traduction dâEurydice Bluenight ©
Illustration de Cassandra Jean ©
Photomontage dâEurydice Bluenight ©
Le texte original est Ă lire ici : https://secretsofblackthornhall.tumblr.com/post/694568297733177344/emma-to-bruce
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De Magnus Ă Alec
Mon cher dĂ©licieux muffin dâamour,
JâespĂšre que tu te portes Ă merveille au moment de recevoir cette lettre parfumĂ©e, et que toi et R et M passez un trĂšs bon moment pendant votre voyage en⊠euh, je crois que le mot que tu as utilisĂ© est « Nord ». Jâai entendu des lĂ©gendes sur ce Nord[1], mais jamais nâaurais-je pensĂ© que ma famille verrait de ses propres yeux ses montagnes, ses marchĂ©s fermiers kitchs, son Onde de lâHudson.
Mais plus sĂ©rieusement, jâespĂšre que les enfants apprĂ©cient leur sĂ©jour chez Grand-mĂšre, et jâespĂšre bien que tu appelles Maryse « Grand-mĂšre » aussi souvent que possible parce que jâadore la tĂȘte quâelle fait quand elle nous entend dire ça. Sur un sujet moins plaisant mais plus pressant, jâespĂšre que tu as eu lâoccasion de discuter avec Luke de ce quâil se passe avec la Cohorte et Idris.
Mais ne fatigue pas tes magnifiques mains Ă mâĂ©crire une rĂ©ponse. Je viendrai moi-mĂȘme te rejoindre dans le « Nord » plus tard dans lâaprĂšs-midi, puisque, je te lâannonce avec joie, lâaffaire de la maison maudite des petits Blackthorn est plus ou moins rĂ©solue. Bien que ce fĂ»t une rude Ă©preuve, crois-moi.
Je ne crois pas tâavoir montrĂ© la note que Jem mâavait envoyĂ©e, qui disait : « Emma et Julian essayent de ne pas tâembĂȘter davantage avec leur maison, et câest trĂšs gentil de leur part, mais contrairement Ă eux, je nâai pas le moindre scrupule Ă tâembĂȘter, alors câest moi, maintenant, par cette note, qui tâembĂȘte. Nous avons besoin dâun sorcier et tu es le meilleur que je connaisse pour faire face Ă notre problĂšme. Nous apprĂ©cierions tous grandement ton aide. »
Comme câest souvent le cas, jâĂ©tais Ă la fois lĂ©gĂšrement agacĂ© et lĂ©gĂšrement impressionnĂ© par Jem, qui avait rĂ©ussi Ă ĂȘtre trĂšs gentil tout en me rappelant que, lorsque lui et Tessa sont concernĂ©s, je suis une vraie dupe qui volera Ă leur secours dĂšs que possible. Parce que je suis une vĂ©ritable dupe lorsque lui et Tessa sont concernĂ©s, jâavais tout de suite rĂ©pondu que je viendrais.
Je sais ce que tu penses. « Pourquoi Tessa aurait-elle besoin dâun sorcier alors quâelle est elle-mĂȘme une sorciĂšre ? » DiffĂ©rents sorciers ont diffĂ©rents domaines de connaissance, comme tu le sais, et mĂȘme si Jem me flattait en disant que jâĂ©tais le meilleur choix, la vĂ©ritĂ© est que jâai bien eu Ă gĂ©rer beaucoup plus de malĂ©dictions que Tessa. Câest ce qui arrive quand on a passĂ© les derniĂšres dĂ©cennies Ă vendre ses services Ă nâimporte quel mĂ©crĂ©ant que lâon croise, au lieu dâagir intelligemment et de mener une paisible vie de chercheuse en magie dans le Labyrinthe en Spirale. Tessa a toujours Ă©tĂ© la plus maligne de nous tous.
Quoi quâil en soit, je dois accorder du mĂ©rite Ă Emma et Julian. Je mâattendais Ă les trouver en train de cogner les objets maudits les uns contre les autres ou quelque chose de cet ordre, mais ils avaient mis en place un cercle de protection plutĂŽt convenable et avaient mĂȘme trouvĂ© un sort. CâĂ©tait un vieux sort trĂšs gĂ©nĂ©ral qui, dâaprĂšs mon expĂ©rience, nâa souvent aucun effet sur les vraies malĂ©dictions Ă notre Ă©poque, mais tout de mĂȘme.
Assez bĂȘtement, jâai Ă©tabli le cercle dont je me sers habituellement pour rompre les malĂ©dictions, pour essayer. « BĂȘtement », parce que jâavais oubliĂ© qui avait crĂ©Ă© la malĂ©diction Ă lâorigine. Ton pire ancĂȘtre, Benedict Lightwood, passionnĂ© de dĂ©mons en tous genres et amateur de nĂ©cromancie. A quel point Benedict Ă©tait-il passionnĂ© par les dĂ©mons ? Il est littĂ©ralement mort de la vĂ©role dĂ©moniaque qui, si tu ne le sais pas, parce que tu es admirablement pur, mon Alec, est une maladie dĂ©moniaque sexuellement transmissible.
Mais jâavais oubliĂ© ça sur le moment, alors jâai Ă©tĂ© Ă©tonnĂ© quand la malĂ©diction a rĂ©sistĂ© avec force. Elle se tordait, se dĂ©battait, donnait des coups, comme Max quand on le plonge dans son bain. Une espĂšce de lueur vert fluo rayonnait aux points dâattache entre les objets maudits et la malĂ©diction. Jâai finalement compris que je devrais prĂ©cautionneusement dĂ©tacher chaque objet de la malĂ©diction un Ă un.
Je mâen suis sorti avec la flasque, la dague, et lâun des bougeoirs (ne me demande pas dâexpliquer comment jâai rĂ©alisĂ© cet exploit), mais aprĂšs ça, jâĂ©tais coincĂ©.
Ce nâest pas terrible quand un sorcier prend une remarquable pose magique et quâil ne se passe rien ensuite. Je suis certain que jâavais lâair ridicule, comme un magicien terrestre qui ne comprend pas pourquoi le lapin ne sort pas du chapeau. Julian et Emma, toujours trĂšs polis, ont patiemment attendu mais je me sentais fort idiot.
Et puis je me suis complĂ©tement dĂ©concentrĂ© pendant un moment parce que la porte sâest ouverte et Kit est entrĂ©. Il a rapidement observĂ© la scĂšne avant de dĂ©clarer :
- Le Professeur Violet dans la bibliothĂšque avec le bougeoir, Ă ce que je vois.
- Le violet est toujours une couleur appropriĂ©e pour un sorcier, ai-je rĂ©torquĂ©. Câest la couleur ornementale de la magie.
- Ta magie est bleue, est intervenue Emma, Ă©videmment, Madame-je-sais-tout.
- Peut-ĂȘtre quâil parlait de moi, a dit Julian. Je porte un sweat Ă capuche violet. Et câest aussi la couleur ornementale de la magie, a-t-il ajoutĂ© avec un hochement de tĂȘte Ă mon attention, ce que jâai apprĂ©ciĂ©.
- Vous pourriez peut-ĂȘtre mettre les objets sur une nappe violette au lieu dâune blanche, a suggĂ©rĂ© Kit.
Tout en parlant, il sâest rapprochĂ© pour jeter un Ćil.
Et dĂšs quâil a Ă©tĂ© prĂšs du cercle, Alec, jâai ressenti une sensation des plus Ă©tranges. Une sensation de⊠pouvoir, je suppose, qui rĂ©sonnait en Kit. Tu vois la façon dont le corps vibre dâune maniĂšre particuliĂšre quand il y a des bruits vraiment trĂšs graves ? Cette sorte de grondement ? CâĂ©tait comme ça, mais silencieux. Je nâavais jamais ressenti ça de toutes les fois oĂč jâavais vu Kit. Je voyais aussi que Kit ne ressentait rien dâanormal. Et si câĂ©tait le cas, il Ă©tait Ă©tonnement imperturbable.
Alors je lui ai proposĂ© de nous rejoindre autour du cercle pour quâil se concentre Ă©galement sur la magie.
- Dâautant plus que Jem et Tessa ont prĂ©fĂ©rĂ© aller se cacher quelque part plutĂŽt que de nous aider avec ça.
- Ils sont dans le jardin avec Mina, a répliqué Kit, un peu sur la défensive.
Jâai redirigĂ© lâattention de tout le monde sur les objets et concoctĂ© une version plus puissante de mon habituel sort anti-malĂ©diction. Jâai pris lâautre bougeoir et BOUM ! Plus aucune rĂ©sistance ! Il y a eu un grand Ă©clat de lumiĂšre bleue et tous les nĆuds magiques qui attachaient les objets Ă la malĂ©diction se sont dĂ©sintĂ©grĂ©s.
Nous nâen croyions pas nos yeux. Jâai fini par prononcer quelque chose comme :
- Eh bien, câĂ©tait plus que ce Ă quoi je mâattendais. Peut-ĂȘtre que la prĂ©sence de quatre personnes a fait la diffĂ©rence.
Jâai vĂ©rifiĂ©. La malĂ©diction semblait⊠avoir disparu. HonnĂȘtement, jâĂ©tais un peu secouĂ©. Je nâen ai pas parlĂ© Ă Tessa ni Ă Jem, parce que je ne veux pas en faire tout un plat, mais je pense que ça a fonctionnĂ© grĂące Ă Kit. Pas parce que nous avions besoin dâune quatriĂšme personne. Il se passe clairement quelque chose avec lui, une sorte de magie dont il ignore tout. Je suppose que câest liĂ© au fait quâil est un descendant de la PremiĂšre HĂ©ritiĂšre, mais je nâai jamais Ă©tĂ© un expert en ce qui concerne ce genre de magie elfique. (Et brĂ»le cette lettre aprĂšs lâavoir reçue â nous sommes peu nombreux Ă savoir que Kit est le Premier HĂ©ritier, et il vaut mieux que ça reste comme ça.)
Cette idĂ©e mâattriste. Kit est un bon garçon qui mĂ©rite une vie agrĂ©able et ordinaire. Je sais que câest ce que Jem et Tessa veulent pour lui, plus que tout, aprĂšs le chaos quâa Ă©tĂ© son enfance. Mais je ne suis pas sĂ»r quâil aura son mot Ă dire. Les fĂ©es ne lui laisseront peut-ĂȘtre pas le choix.
Julian a tendu la main pour prendre la flasque. Il lâa tenue pendant un certain temps en fronçant les sourcils.
- Quây a-t-il ? a demandĂ© Emma.
- Rien, a répondu Julian.
Puis il a levé les yeux vers moi :
- Câest tout ? Plus de malĂ©diction ?
- Plus de malĂ©diction, lui ai-je assurĂ©. JâespĂšre.
Et puis est descendu du plafond Rupert le FantĂŽme. Je nâai jamais rencontrĂ© Rupert quand il Ă©tait vivant. Je ne sais pas quoi penser de lui. Dâun cĂŽtĂ©, il semble avoir Ă©tĂ© un innocent qui se trouvait au mauvais endroit au mauvais moment, un esprit enfermĂ© dans une maison oĂč il nâa jamais vĂ©cu Ă cause dâun mal dont il ne connaissait rien de son vivant. Dâun autre cĂŽtĂ©, en rencontrant Tatiana Lightwood, il sâest dit « Cette demoiselle semble ĂȘtre un bon parti », alors il devait y avoir quelque chose de pas net chez lui.
Rupert Ă©tait juste au-dessus de la table et est descendu jusquâĂ la toucher. Il fixait un objet dessus.
- Quây a-t-il, Rupert ? lâa interrogĂ© Emma. Que regardes-tu ?
Kit a suivi son regard et a commencé à mettre les objets sur le cÎté.
- Câest la bague, a-t-il annoncĂ©.
- Quelle bague ? sâest Ă©tonnĂ©e Emma.
En effet, quelle bague ? Il nây avait pas de bague parmi les objets maudits. Mais il y avait une bague sur la table maintenant. Kit lâa prise. CâĂ©tait une bague sertie dâune pierre noire et gravĂ©e dâun motif dâĂ©pines.
- La bague de la famille Blackthorn ? sâest demandĂ© Kit.
- La plupart des bagues de famille ne ressemblent pas à ça, a remarqué Emma.
- Peut-ĂȘtre une alliance ?
- Les Chasseurs dâOmbres nâutilisent pas dâalliances.
Mais Julian affichait son habituelle expression pensive.
- Je suis lié à ce lieu par un anneau en argent, a-t-il dit doucement.
- Les Chasseurs dâOmbres peuvent Ă©changer des alliances, ai-je indiquĂ©. Ils nây sont pas obligĂ©s. Mais ils peuvent sâils le veulent.
Quoi que ce soit, ça appartenait Ă Rupert. Il avait suivi du regard la main de Kit qui avait pris la bague, et Ă ce moment il en approchait son fin bras fantomatique. Il a enveloppĂ© la bague de sa main, ce qui nâa eu aucun effet puisquâil est un fantĂŽme⊠Kit se contentait de la lui tenir. Puis il a fermĂ© les yeux (je parle de Rupert) et son visage a affichĂ© une expression de soulagement, de gratitude, de paix, et il sâest⊠évaporĂ©, juste lĂ . Il sâest lentement effacĂ© puis a disparu. Plus de Rupert. Parti pour, je lâespïżœïżœre, ne pas retrouver sa femme, puisquâelle Ă©tait aussi sa geĂŽliĂšre pendant plus de cent ans.
- Il nâa mĂȘme pas dit au revoir, a murmurĂ© Emma.
- Câest mieux, ai-je affirmĂ©. Il nâa jamais Ă©tĂ© censĂ© ĂȘtre ici.
- Eh bien, Rupert, si tu mâentends, a lancĂ© Emma, câĂ©tait sympa dâĂȘtre hantĂ©s par toi.
- Cinq Ă©toiles, a dit Kit sur un ton solennel en reposant la bague sur la table. Ăa me plairait dâĂȘtre hantĂ© Ă nouveau.
Et toutes les bougies de la piĂšce se sont Ă©teintes dâun coup. Ce qui Ă©tait aimable de la part de Rupert, si câĂ©tait lui. Ăa aurait trĂšs bien pu ĂȘtre un simple courant dâair.
Nous sommes tous sortis de la piĂšce en silence.
- Câest diffĂ©rent, a remarquĂ© Julian en regardant dans le couloir. Je le sens dĂ©jĂ .
Je le sentais moi aussi. Il y avait une lĂ©gĂšretĂ© nouvelle. Une sorte de domesticitĂ© chaleureuse quâon ressent dans une maison accueillante, et qui avait toujours manquĂ© Ă Chiswick House depuis que je la connaissais. Câest difficile Ă dĂ©crire, mais tout dâun coup câĂ©tait la maison de Julian et Emma, telle quâelle ne lâavait jamais Ă©tĂ© avant. Je lâai toujours vue comme un endroit hostile, puis comme une monstrueuse ruine. Pour la premiĂšre fois je me suis dit que câĂ©tait un endroit que les Blackthorn pourraient remplir de bonheur.
Et je suis certain quâils le feront.
A trĂšs bientĂŽt, mon amour. Je tâembrasserai jusquâĂ ce quâun bambin nous force Ă nous sĂ©parer et rĂ©clame toute notre attention. PrĂ©vois donc un baiser dâenviron trente Ă soixante secondes, dâaprĂšs les expĂ©riences passĂ©es. Mais jâaimerais, comme toujours, que ça dure infiniment.
Je tâaime,
Magnus.
Texte original de Cassandra Clare ©
Traduction dâEurydice Bluenight ©
Le texte original est Ă lire ici : https://secretsofblackthornhall.tumblr.com/post/693937002091053056/magnus-to-alec
[1] Blague de new-yorkais. Les habitants de la ville de New-York dĂ©signent lâintĂ©gralitĂ© de lâĂ©tat de New-York, sauf la ville, comme Ă©tant « upstate » (« le nord de lâĂ©tat »). Aller « upstate » (gĂ©nĂ©ralement juste au nord de la ville, dans la VallĂ©e de lâHudson) est souvent vu comme un voyage considĂ©rable mĂȘme si câest tout prĂšs.
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De Livvy Ă Julian
Cher Julian,
Tu peux voir les fantĂŽmes mais tu ne peux pas me voir. Tu ne me vois pas quand je viens mâasseoir Ă cĂŽtĂ© de toi pendant ton sommeil. Non plus quand je suis dans les mouvements des ombres sur la pelouse, ou derriĂšre un rideau qui sâagite. Tu ne mâentends pas, mĂȘme si je mâadresse Ă toi parce que jâai besoin de te parler.
Je veux te parler de Ty.
Il Ă©tait lĂ . Nous Ă©tions lĂ .
Tu ne sais pas que nous Ă©tions lĂ .
Kit le sait.
Reprenons depuis le début.
Ty dit que tu aimes les surprises. Ty nâaime pas les surprises, mais toi, si.
Il Ă©tudie les Portails, comment les ouvrir, comment les fermer. Il faut un sorcier. Mais Ty Ă©tudie et il sâamĂ©liore. Il voulait venir te voir et Ragnor a dit quâil aiderait.
Nous voulions venir te voir.
Ty avait prévenu Emma, mais il lui avait demandé de ne pas te prévenir, pour que ce soit une surprise.
Nous sommes donc arrivés ensemble.
Un fantĂŽme traverse un Portail comme nâimporte quel Chasseur dâOmbres. Je ne le savais pas. Câest drĂŽle, non ?
Moi, jâai trouvĂ© ça drĂŽle.
Le Portail sâest ouvert dans la cuisine.
La cuisine est jolie. Je ne suis quâun esprit coincĂ© entre le monde et le nĂ©ant, mais je trouve que tu as trĂšs bien choisi la couleur des murs. Tu as toujours su ce que tu faisais avec les couleurs.
En plus de la couleur, qui Ă©tait une surprise mais pas une mauvaise, il y avait une autre surprise dans la cuisine. Kit.
Kit Ă©tait dans la cuisine. Il portait cette veste quâil aime bien, avec le col en peluche. La lumiĂšre du soleil entrait par la fenĂȘtre et lâĂ©clairait.
Ty sâest complĂštement figĂ©. Je me suis moi-mĂȘme presque figĂ©e. Jâavais dĂ©jĂ vu Kit, Ă©videmment. Je lui rends visite parfois. Mais puisque je ne mâattendais pas Ă le voir, câĂ©tait saisissant Ă quel point il avait changĂ© depuis le temps oĂč il vivait avec nous Ă lâInstitut. Il a lâair plus vieux, et plus grand. Plus musclĂ©. Il se dĂ©place comme un Chasseur dâOmbres maintenant. Gracieusement. Il est magnifique.
Jâai entendu Ty inspirer comme jamais auparavant. Comme sâil avait le souffle coupĂ©, comme sâil avait reçu un coup quâil nâavait pas vu venir et quâil essayait et essayait de respirer, mais quâil nây arrivait pas.
- Ce nâest pas comme ça quâon nettoie un pistolet, a-t-il murmurĂ©.
DĂ©solĂ©e, jâaurais dĂ» le prĂ©ciser avant. Kit nettoyait un pistolet. Pourquoi y aurait-il un pistolet chez toi ? Blackthorn Hall est comme une pierre. Quand on la retourne, on trouve plein de choses en-dessous. Cette fois, il y avait un pistolet en-dessous.
Kit est devenu plus pĂąle que nâimporte quel fantĂŽme que jâai pu voir. Il a laissĂ© tomber le pistolet sur le plan de travail. Et il nâa rien dit. Je me demande sâil se demandait ce que je me demandais. Je me demandais comment Ty avait appris Ă nettoyer un pistolet. Comment il en savait assez pour dire que quelquâun dâautre sây prenait mal.
Peut-ĂȘtre quâil ne savait pas quoi dire, alors il a simplement dit ça.
Ensuite, ils se sont dévisagés.
Le temps ne passe ni vite ni lentement lĂ oĂč je suis. Et pourtant câĂ©tait assez long pour que jâaie lâimpression que le monde entier disparaissait, comme si plus rien dâautre nâexistait que Kit et Ty qui se regardaient.
- Tu ne devrais pas ĂȘtre lĂ , a lĂąchĂ© Kit.
Il ne mâa jamais parlĂ© comme ça. Avec une voix si froide. Il avait mis les mains dans ses poches. Il avait les Ă©paules en avant, comme sâil se montrait agressif, mais je voyais ses mains dans ses poches, toutes nouĂ©es. Je me demande si Ty le voyait aussi. Les doigts de Kit qui creusaient et creusaient dans la paume.
Mais Ty ne regardait pas Kit. Il regardait par la fenĂȘtre derriĂšre lui. Jâentendais les oiseaux, et les sons calmes de lâAngleterre, et la respiration de Ty.
- De combien de temps penses-tu avoir besoin pour me pardonner ? a-t-il demandé.
Kit sâest tournĂ© vers moi. Il avait lâair dĂ©pitĂ©, comme si jâavais su dâune maniĂšre ou dâune autre quâil serait lĂ et avait prĂ©parĂ© tout ça. Mais ce nâĂ©tait pas le cas.
- Je ne sais pas, a-t-il répondu.
- Mais pas maintenant, a soufflé Ty de la voix la plus faible.
- Non, a énoncé Kit. Pas maintenant.
Il nây avait donc plus de raison de rester.
Peut-ĂȘtre y avait-il une raison. Peut-ĂȘtre que câĂ©tait les mains de Kit qui se broyaient, jusquâĂ ce que je croie entendre les os se briser comme des cĆurs.
Mais Ty ne pouvait pas voir ça. Ty souffrait. Je me suis approchĂ©e de lui, lâai enveloppĂ© dans mes bras, lâai serrĂ© pendant que nous retraversions le Portail. JâĂ©tais triste. Jâavais trĂšs envie de te voir, Jules. Mais Ty avait besoin de moi avec lui.
Si tu rĂȘves de ça, tu sauras peut-ĂȘtre que nous Ă©tions lĂ chez toi. Je suis dĂ©solĂ©e que nous ne soyons pas restĂ©s.
Julian, je ne sais pas quoi faire. Kit manque Ă Ty plus quâil ne pensait que quiconque pourrait lui manquer. Il lui manque autant maintenant que le jour de son dĂ©part. Ty lâaime autant. Je pense quâil lâaimera toujours et ça me fait peur.
Kit a lâhabitude de nâavoir besoin de personne, mais Ty a besoin des gens. Il a peur dâavoir besoin dâeux, mais câest seulement parce quâil en a tellement besoin. Il ne va pas arrĂȘter dâavoir besoin de Kit. Je ne sais pas si Kit aura toujours besoin de Ty. Mais Ty aura toujours besoin de lui.
Irene te passe le bonjour. Je lui apprends Ă faire la morte.
Je tâaime.
Livvy
Texte original de Cassandra Clare ©
Traduction dâEurydice Bluenight ©
Illustration de Cassandra Jean ©
Le texte original est Ă lire ici : https://secretsofblackthornhall.tumblr.com/post/693299956246790144/livvy-to-julian
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De Kit Ă Ty
Ty,
Jâai besoin de parler Ă quelquâun et je ne veux pas que ce soit Julian ou Emma. Ni Jem ou Tessa. Alors ça doit ĂȘtre toi. Ce qui signifie que je ne pourrai jamais envoyer cette lettre et tu ne pourras jamais la lire. Je la brĂ»lerai dans le jardin quand jâaurai fini de lâĂ©crire pour ne pas ĂȘtre tentĂ© de lâenvoyer.
Les jardins sont vraiment magnifiques, dâailleurs. Je suppose que tu le sais puisque tu es dĂ©jĂ venu. Il y a une ancienne serre de la fin du XVIIIe siĂšcle, et un petit Ă©tang avec des nĂ©nuphars et des grenouilles, des bancs pour les regarder, un jardin clos, et câest vraiment sympa de se promener ici avec Mina. Je nâavais jamais eu ni frĂšre ni sĆur avant, tu le sais, mais passer du temps avec Mina me fait comprendre davantage ce que tu ressentais pour Livvy. Ressens toujours pour Livvy sĂ»rement. Je ne dis pas que je te pardonne. Seulement que je comprends peut-ĂȘtre mieux.
Blackthorn Hall est toujours en cours de rĂ©novation, Ă©videmment, et il y a des fĂ©es partout qui font les travaux. Ce sont des brownies, apparemment, et mĂȘme sâils ne font pas grand-chose dâintĂ©ressant (arracher les mauvaises herbes, transporter des brouettes pleines de terre, ce genre de trucs), je ne peux pas mâempĂȘcher de les observer. Je nâai vu presque aucun elfe depuis⊠eh bien depuis que nous avons eu cette bataille avec eux. Je suppose que je ne me rendais pas compte que jâĂ©tais scrupuleusement maintenu Ă lâĂ©cart. JusquâĂ maintenant.
Je ne devrais pas mâapprocher dâeux, parce quâĂ chaque fois que je suis assez prĂšs dâeux pour quâils me parlent, ce quâils font me fiche la trouille. Le chef de chantier, ce type Round Tom⊠il nâest pas si rond que ça honnĂȘtement⊠eh bien la premiĂšre fois que Round Tom mâa vu, il a fait une petite dance, il bondissait en cercle et faisait des gestes bizarres avec les bras, en finissant par une rĂ©vĂ©rence. Jâai seulement tournĂ© les talons et suis parti dans la direction opposĂ©e comme si je venais de me rendre compte que jâavais oubliĂ© quelque chose.
Et puis le GĂ©nĂ©ral Winter, câest-Ă -dire le GĂ©nĂ©ral Winter de Kieran, Ă©tait lĂ pour aider. (Julian dit quâil est lĂ pour mettre les ouvriers au pas parce quâils ont peur du GĂ©nĂ©ral Winter mais pas de Round Tom.) El lui, il savait que jâĂ©tais le Premier HĂ©ritier. Comme les Cavaliers.
Les Cavaliers dont jâai fait disparaitre les chevaux. Ou quelque chose comme ça. Je ne sais pas sâils sont revenus. Je crois que personne ne sait.
Jâai essayĂ© de faire semblant de ne pas avoir entendu le GĂ©nĂ©ral Winter mais nous Ă©tions dehors et ça aurait Ă©tĂ© trop Ă©vident. Alors quand il sâest adressĂ© Ă moi en mâappelant Premier HĂ©ritier, je nâai trouvĂ© dâautre Ă rĂ©pondre que :
- Câest moi. Du moins câest ce quâon mâa dit.
- Si on te lâa dit, a-t-il rĂ©pliquĂ©, alors câest vrai, car nous ne pouvons pas mentir.
Jâai eu envie de rĂ©torquer : « Mon pote, jâai travaillĂ© au MarchĂ© Obscur de Los Angeles pendant des annĂ©es. Les FĂ©es font des tas de trucs pas nets. » Au lieu de ça, je me suis contentĂ© de :
- Je ne sais pas vraiment ce que je suis censé faire par rapport à ça.
Le GĂ©nĂ©ral Winter mâa Ă©tudiĂ© avec un air pensif, avant de dĂ©clarer :
- Nul besoin de faire quoi que ce soit, pour lâinstant. Câest peut-ĂȘtre bien, pour le moment, la meilleure dĂ©cision. Car la situation du Royaume est Ă©trange.
- Quâest-ce que vous voulez dire ?
- Il y a des troubles, a-t-il articulé. Les rumeurs abondent au sujet de la Cour des LumiÚres. Et MÚre Hawthorn chemine à nouveau.
Avant que je nâaie pu lui demander ce que tout ça pouvait bien vouloir dire, Round Tom est arrivĂ© en courant :
- Cousins ! (Jâavais oubliĂ© que les elfes sâappelaient comme ça parfois, et ça mâa fait frissonner, comme sâil me disait « tu es lâun des nĂŽtres ».) Jâai trouvĂ© quelque chose. Accompagnez-moi sâil-vous-plait.
Il nous a menĂ©s jusquâĂ lâun des platanes. Non loin de lâarbre se trouvait un grand trou, et de lâautre cĂŽtĂ© du tronc on avait posĂ© un cercueil en Ă©quilibre sur deux trĂ©teaux.
Du moins je crois que câĂ©tait un cercueil. Il ne tenait quâĂ un fil, Ă©tait Ă moitiĂ© pourri, fissurĂ© de tous les cĂŽtĂ©s, recouvert de terre. CâĂ©tait clairement ce quâon avait sorti du trou.
- Une tombe ? sâest enquis le GĂ©nĂ©ral Winter alors que nous nous approchions.
Round Tom a secouĂ© la tĂȘte :
- Nous nâaurions pas touchĂ© Ă une tombe. Mais personne nâest enterrĂ© ici. Ce nâest que de la magie. Une magie noire et puissante. Regardez Ă lâintĂ©rieur.
Il sâest reculĂ©. Je me suis rapprochĂ©. Il y avait effectivement tout un tas de trucs Ă lâintĂ©rieur du cercueil. On aurait dit⊠tu vois, les anciens pharaons qui Ă©taient enterrĂ©s avec toutes leurs affaires ? ça ressemblait à ça, pour un Chasseur dâOmbres je suppose, sauf que ces affaires Ă©taient un drĂŽle dâensemble. CâĂ©tait sale et en morceaux, vraiment bon Ă jeter : des papiers, des petites fioles, des morceaux de tissu, la garde dâune Ă©pĂ©e sans lame, ce genre de choses.
- Ăa date de quand ? ai-je demandĂ©.
Round Tom a tendu la main et a sorti une bouteille dâalcool. LâĂ©tiquette Ă©tait un peu effacĂ©e et dĂ©chirĂ©e, mais câĂ©tait une Ă©tiquette imprimĂ©e dans un style victorien. Je me suis demandĂ© si Jem et Tessa avaient une idĂ©e de qui aurait pu possĂ©der ces affaires.
- Vous avez dit quâil y avait de la magie lĂ -dedans ? ai-je rĂ©pĂ©tĂ©.
- De la magie noire, a-t-il précisé sur un ton grave. De la magie sauvage.
- La malédiction ? a proposé le Général Winter
Lâexpression du visage de Round Tom a changĂ©. Il a haussĂ© les Ă©paules.
- Peut-ĂȘtre pas. Câest de nature bien moins dĂ©moniaque que la malĂ©diction de la maison. Mais venant des racines dâun arbre tout Ă fait banal, nous devions lâexaminer. Il y a deux objets qui vous intĂ©resseront peut-ĂȘtre davantage.
Il a fait un peu le tri dans le bazar et dĂ©voilĂ© un fourreau. CâĂ©tait un trĂšs joli fourreau. DĂ©solĂ©, ça ne le dĂ©crit pas vraiment. Un trĂšs trĂšs joli fourreau. Il fallait le nettoyer, mais il Ă©tait clairement magnifique et, jâen suis sĂ»r, de grande valeur. Il Ă©tait en acier mais avec des incrustations dâor en forme de feuilles et dâoiseaux sur toute la surface. Il y avait aussi quelques runes, il avait donc sans aucun doute appartenu Ă un Chasseur dâOmbre Ă une Ă©poque.
- Cool, ai-je commenté.
- Câest plus que « cool », a rectifiĂ© le GĂ©nĂ©ral Winter. Câest Ă©videmment le travail de Lady Melusine en personne. Vous voyez quâil nây a aucune dĂ©gradation ?
Round Tom a pris un air important :
- Toutefois, câest le moins intĂ©ressant des deux objets.
Avec un grand geste thĂ©Ăątral quâil avait clairement rĂ©pĂ©tĂ© avant, il a dĂ©gagĂ© tout le bazar dâun cĂŽtĂ© du cercueil, laissant apparaitreâŠ
- Est-ce que câest⊠un pistolet ? me suis-je exclamĂ©.
- Une de ces armes terrestres, oui, a acquiescé Round Tom.
Il lâa pris comme si le coup pouvait partir, mĂȘme sâil Ă©tait rouillĂ© et couvert de terre. CâĂ©tait un revolver. Il ressemblait en tous points aux revolvers quâon voit dans tous les films de gangsters et les Westerns â je pense que si jâenvoyais vraiment cette lettre Ă Ty, je devrais expliquer ce quâest un Western.
Bref, la grande diffĂ©rence, câĂ©tait que ce pistolet Ă©tait recouvert de gravures, de runes, de mots et que câĂ©tait clairement magique Ă donf. (Ce qui veut dire⊠oh, on sâen fiche de ce que ça veut dire.)
- Mais les Chasseurs dâOmbres nâutilisent pas de pistolets, ai-je remarquĂ©.
- Ce nâest jamais arrivĂ©, est intervenu le GĂ©nĂ©ral Winter.
Il a saisi le pistolet avec une Ă©tonnante familiaritĂ© et a visĂ© un arbre Ă proximitĂ©. Il a essayĂ© de tirer, et il nây a eu quâun dĂ©clic, le barillet nâa mĂȘme pas tournĂ©.
- Rongé par la rouille, certainement, a constaté Tom
Le GĂ©nĂ©ral Winter mâa tendu lâarme pour que jây jette un Ćil. Je ne connais pas assez bien les runes pour identifier celles qui y Ă©taient gravĂ©es. Je lâai pointĂ©e vers le mĂȘme arbre, un peu pour dĂ©conner, un peu pour la soupeser, et jâai appuyĂ© sur la gĂąchette. Et il y a eu un Ă©norme BANG et des Ă©clats de bois se sont envolĂ©s du tronc.
Mon bras a eu un mouvement de recul Ă cause de la force du coup. Et nous avons tous Ă©carquillĂ© les yeux. Mes oreilles sifflaient, mais jâai cru entendre Round Tom dire quelque chose au GĂ©nĂ©ral Winter. Je suis quasi certain que les mots « Premier HĂ©ritier » en faisaient partie.
Ce qui est sĂ»r, câest quâau moment oĂč jâai de nouveau tournĂ© les yeux vers eux, vers Round Tom et le GĂ©nĂ©ral Winter, leur expression Ă©tait circonspecte. FermĂ©e.
- Peut-ĂȘtre devrions-nous ramener cet objet Ă lâintĂ©rieur pour voir si les autres Nephilim le reconnaissent, a suggĂ©rĂ© le GĂ©nĂ©ral Winter dâune voix monotone.
- Je suis certain quâil ne fonctionne que pour les Chasseurs dâOmbres, ai-je tentĂ© de rassurer le GĂ©nĂ©ral, qui sâest contentĂ© de poser sur moi un regard confus sans rien dire. Dans tous les cas, je vais lâamener Ă lâintĂ©rieur.
Je sentais que le GĂ©nĂ©ral Winter et Round Tom mâobservaient traverser la pelouse en courant pour rejoindre la maison. Jem et Tessa Ă©taient assis dans le canapĂ© du salon et regardaient Mina qui dessinait avec des craies grasses sur du papier kraft.
DĂšs que je suis arrivĂ© avec le pistolet Ă la main, ils ont Ă©tĂ© tous les deux mĂ©dusĂ©s. Tessa sâest levĂ©e pour se mettre entre moi et Mina. Jâai essayĂ© de me convaincre quâelle se tenait entre le pistolet et Mina, mais jâen Ă©tais quand mĂȘme malade.
- Quâest-ce que⊠a commencĂ© Jem en se levant.
Mais il nâa pas fini sa phrase. Il mâa simplement scrutĂ©, moi et le pistolet.
- Round Tom lâa trouvĂ© dans le jardin, ai-je dit. Est-ce que câest un pistolet pour les Chasseurs dâOmbres ? (Je sentais que ma voix se serrait.) Les Chasseurs dâOmbres nâutilisent pas de pistolets.
- Il y a longtemps, Christopher Lightwood a essayĂ© de crĂ©er un pistolet avec lequel les Chasseurs dâOmbres pourraient tirer, a expliquĂ© Tessa.
Elle nâavait pas dĂ©tournĂ© les yeux du pistolet.
- Il Ă©tait dans un cercueil, ai-je indiquĂ©. Avec un tas dâautres trucs. Une Ă©pĂ©e cassĂ©e, un super fourreau.
- Je me demandais ce quâil en avait fait, a soufflĂ© Jem.
Il ? Câest qui, il ?
Jem et Tessa ont échangé un regard.
- Le pistolet appartenait Ă mon fils James, mâa-t-elle rĂ©vĂ©lĂ©.
Jâai cru que jâallais ĂȘtre malade. Tessa ne parlait presque jamais de ses enfants avec Will.
- Il Ă©tait le seul Ă pouvoir lâutiliser. Personne dâautre que lui ne pouvait faire feu avec.
- Jâai fait feu, ai-je lĂąchĂ©.
Ils ont tous les deux eu lâair stupĂ©fait, et ce nâĂ©tait pas une bonne chose.
- Tu es trÚs spécial Kit, a commenté Jem. Tu es le Premier Héritier. Nous ne connaissons pas encore tous les effets que ce pouvoir a sur toi.
- Câest peut-ĂȘtre simplement parce quâil a du sang de fĂ©e, a suggĂ©rĂ© Tessa.
Jâaurais pu dire que ce nâĂ©tait certainement pas simplement le sang de fĂ©e parce que le GĂ©nĂ©ral Winter nâa pas pu utiliser le pistolet et il nâa pas que du sang de fĂ©e, il a tout un corps de fĂ©e avec des organes de fĂ©e et tout le reste. Mais je me suis tu. Jâavais une sensation Ă©trange dans le ventre. Jâai dĂ©clarĂ© que je rangerais le pistolet et ne lâutiliserais pas, et Jem et Tessa ont semblĂ© penser que câĂ©tait la meilleure chose que je puisse faire, et Mina est intervenue en disant « Pi-tolet ! » et puis jâai eu lâimpression dâĂȘtre la pire personne sur Terre.
Et maintenant il est tard et je tâĂ©cris cette lettre que je vais brĂ»ler quand jâaurai fini, parce que je nâarrive pas Ă dormir. Parce que je nâai pas du tout envie dâĂȘtre la seule personne au monde qui peut tirer avec un pistolet magique. Je ne veux pas que le GĂ©nĂ©ral Winter se redresse dĂšs que je lâapproche comme si jâĂ©tais son supĂ©rieur. Je ne veux rien de tout ça. Pendant cinq minutes je me suis dit « ah cool, jâai trouvĂ© ce pistolet qui a lâair classe et je suis sĂ»r quâil y a une histoire derriĂšre, je me demande si je pourrais le garder ou si on doit le donner Ă un musĂ©e. » Et puis jâai fait feu et tout dâun coup⊠encore un autre truc bizarre chez moi.
Bonne nuit, Ty. Je nâenverrai jamais cette lettre et tu ne la liras jamais.
Kit
Texte original de Cassandra Clare ©
Traduction dâEurydice Bluenight ©
Le texte original est Ă lire ici : https://secretsofblackthornhall.tumblr.com/post/692032675967614976/kit-to-ty
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De Ty Ă Emma
Texte original de Cassandra Clare ©
Traduction dâEurydice Bluenight ©
Le texte original est Ă lire ici : https://secretsofblackthornhall.tumblr.com/post/691668923393916928/ty-to-emma
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De Emma Ă Bruce
Cher Bruce,
Bruce, Bruce, Bruce. Continuerai-je Ă Ă©crire sur tes pages quand tout aura Ă©tĂ© rĂ©novĂ©Â ? Quand le quotidien aura retrouvĂ© un air de normalitĂ©Â ? Ou bien la normalitĂ© est-elle perdue â la fissure dans le monde des Nephilim est-elle irrĂ©parable, ne fera-t-elle que sâagrandir avec le temps, apportant de plus en plus de changements, jusquâĂ ce quâil y ait finalement trop de changements pour que ce soit supportable ? Auquel cas, je suppose que je continuerai de tâĂ©crire, Bruce, comme Ă un tĂ©moin silencieux de lâĂ©trangetĂ© de cette Ă©poque.
DĂ©solĂ©e, dĂ©solĂ©e. Je suis dâhumeur un peu poĂ©tique ce soir parce que Jem, Tessa, Kit et Mina sont arrivĂ©s aujourdâhui et⊠eh bien, câest un peu de cette façon que Jem et Tessa sâexpriment. Vu quâils sont, tu vois⊠hyper vieux. Et parce que jâai lâimpression que nous en arrivons aux derniers chapitres de toute cette histoire de maison maudite et je nâai pas la moindre idĂ©e de ce que lâavenir nous rĂ©serve.
Quoi quâil en soit, nous ne nous sommes pas intĂ©ressĂ©s Ă la malĂ©diction aujourdâhui, nous avons simplement passĂ© du temps avec les Carstairs-Herondale, qui devraient certainement choisir un nom plus court par lequel nous pourrions les dĂ©signer. Team Ere Victorienne ? Team Ăpoque OĂč Tout Ătait TrĂšs Romantique Mais Aller OĂč Que Ce Soit Prenait Une ĂternitĂ©Â ? Hum. Je pense que je leur demanderai sâils ont des idĂ©es, puisque les miennes sont⊠euh⊠mauvaises.
Nous avons rencontrĂ© quelques complications quand ils sont arrivĂ©s. Nous avions choisi des chambres pour eux et avions demandĂ© aux brownies de les prĂ©parer, dây mettre des draps et des serviettes et tout ce quâil faut. Et puis nous Ă©tions allĂ©s vĂ©rifier avant lâarrivĂ©e de nos invitĂ©s. Et je suis contente de lâavoir fait parce que les fĂ©es avaient prĂ©parĂ© toutes les chambres pour⊠des oiseaux ? Genre, des oiseaux immenses, Ă taille humaine. Avec des nids gigantesques, de presque deux mĂštres, et des branches en guise de perchoirs. Et dâĂ©normes boules de graines pendaient du plafond. Nous avions donc dĂ» demander Ă des brownies trĂšs déçus de refaire les chambres. (Mais nous nâavions pas dit que les invitĂ©s Ă©taient des oiseaux ! Je ne sais pas du tout pourquoi ils ont cru ça !) Le pire dans tout ça, câest quâils avaient vraiment fait du bon travail : si ça avait bien Ă©tĂ© dâimmenses oiseaux qui nous rendaient visite, ils auraient Ă©tĂ© trĂšs Ă lâaise. Ils ont quand mĂȘme Ă©tĂ© confus quand tout le monde est arrivĂ© en voyant que Mina nâĂ©tait pas un gros Ćuf. Les fĂ©es, je te jure.
En parlant de Mina, qui nâest pas un gros Ćuf mais une petite bambine, elle est absolument adorable. Elle marche maintenant, ou plutĂŽt fait des premiers pas hĂ©sitants, et elle dit « mama » et « papa » et aussi « kish » pour appeler Kit semble-t-il. Et elle a une petite stĂšle en bois avec laquelle elle essaye tout le temps dâĂ©crire sur tout le monde. Apparemment Kit apprend les runes et Mina veut les apprendre aussi.
Nous aurions tout de suite dĂ» nous atteler Ă la malĂ©diction mais honnĂȘtement nous passions un si bon moment tous ensemble. Câest trĂšs agrĂ©able de passer du temps avec Tessa et Jem, ce qui change de la nervositĂ© de la plupart de nos autres amis. Je suppose quâavec tout ce qui leur est arrivĂ©, il en faut beaucoup pour les contrarier. La simple maniĂšre dont Jem parle de la malĂ©diction mâaide beaucoup Ă croire que nous pourrons arranger la situation, mĂȘme si nous ne savons pas vraiment ce que nous faisons ni ce que nous avons mal fait jusque-ici.
Ils ont aussi lâair vraiment impressionnĂ©s par la maison. Julian a lâair tout fier de lui, câest hyper mignon. Tessa sâest remĂ©morĂ© que la derniĂšre fois quâeux deux Ă©taient venus, câĂ©tait aprĂšs que Tatiana ait Ă©tĂ© arrĂȘtĂ©e et envoyĂ©e Ă la Citadelle pour devenir une SĆur de Fer. Ils fouillaient le manoir Ă la recherche dâactivitĂ©s dĂ©moniaques. (Bien sĂ»r, ils nâont presque rien trouvĂ©, a-t-elle admis. Au ton de sa voix, il semblait Ă©vident quâils nâavaient compris le danger que reprĂ©sentait Tatiana que lorsquâil Ă©tait trop tard. Je voudrais bien lui poser des questions Ă ce sujet, mais ça me semblait ĂȘtre de tristes souvenirs alors que nous passions tous un bon moment.) Jem a remarquĂ© quâĂ cette Ă©poque la propriĂ©tĂ© Ă©tait dĂ©jĂ en mauvais Ă©tat, mais Tessa a rĂ©vĂ©lĂ© quâelle avait vu la maison « à son apogĂ©e » lors dâun bal, puis elle a rougi un peu. Ce qui sâest passĂ© pendant ce bal devait ĂȘtre assez mĂ©morable pour que ça la fasse rougir 130 ans aprĂšs !
Ăvidemment, il y a toujours cette espĂšce de lourd stigmate qui recouvre la maison comme un linceul, et ce ne sont pas des murs repeints et des fenĂȘtres remplacĂ©es qui changeront ça. Câest Ă cause de la malĂ©diction. Mais cette soirĂ©e Ă©tait toute de mĂȘme la plus joviale que jâaie connue ici. Pour la premiĂšre fois, jâavais un peu lâimpression que câĂ©tait notre maison, que des amis Ă©taient venus nous rendre visite et câĂ©tait Ă©tonnement sympa et ordinaire. Tant que je ne pense pas Ă ce quâil se passe avec lâEnclave.
Une inquiĂ©tude : Kit. Il est restĂ© avec nous une bonne partie de la journĂ©e, mais il Ă©tait anormalement calme, et il sâest excusĂ© deux fois pour aller faire un tour dans le jardin. DâaprĂšs Julian, Kit a rompu avec sa petite-amie et câest peut-ĂȘtre ce qui le rend triste, mais je nâen suis pas sĂ»re. Il Ă©tait trĂšs nerveux en prĂ©sence des entrepreneurs et il les surveillait de prĂšs dĂšs quâils Ă©taient dans les environs. Round Tom sâest prĂ©sentĂ© et Kit a hochĂ© la tĂȘte sans rien dire, mĂȘme pas son nom. Enfin, on ne peut pas vraiment lui en vouloir. Sa relation avec les fĂ©es, et avec le Royaume des FĂ©es, est compliquĂ©e. Tessa a expliquĂ© que Cirenworth est exceptionnellement protĂ©gĂ© contre les intrusions fĂ©Ă©riques, de mĂȘme que la ville et les routes proches. Magnus et Catarina sâen sont assurĂ©s. Câest donc lâune des premiĂšres fois quâil est en compagnie dâelfes depuis la grande bataille aux abords dâAlicante. MĂȘme si ces fĂ©es-lĂ ne sont pas dangereuses, ça doit ĂȘtre bizarre pour lui.
Mais tu connais Kit. Il donne lâimpression quâil ne veut rĂ©pondre Ă aucune question au sujet de comment il va. Aujourdâhui, il Ă©tait sur le qui-vive, Ă regarder les elfes dans le jardin : peut-ĂȘtre quâils lâinquiĂštent, ou peut-ĂȘtre quâil veut les rejoindre ? Je ne sais pas. Peut-ĂȘtre que Julian et moi pourrons le faire parler un peu pendant son sĂ©jour ici. Ou peut-ĂȘtre que jâaurai lâoccasion de demander Ă Jem et Tessa sâils savent ce quâil se passe.
Bref, câest tout ce que jâai Ă te dire pour lâinstant, Bruce. Demain nous rompons une malĂ©diction ! JâespĂšre !
Emma
Texte original de Cassandra Clare ©
Traduction dâEurydice Bluenight ©
Le texte original est Ă lire ici : https://secretsofblackthornhall.tumblr.com/post/691398026631217153/emma-to-bruce
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De Emma Ă Jem
Cher Jem,
Comme promis, voilĂ les derniĂšres nouvelles concernant la Maison qui Sâaccrochait Ă sa MalĂ©diction. Spoiler : je pense que nous allons encore avoir besoin de ton aide. (Demande Ă Kit ce quâest un spoiler si tu ne connais pas le mot.)
Donc voilĂ oĂč nous en sommes : nous avons rassemblĂ© tous les objets â selon nous â qui sont liĂ©s Ă la malĂ©diction. Nous les avons installĂ©s dans la salle Ă manger et avons allumĂ© des bougies, mais il ne sâest rien passĂ©. Julian a dit que câĂ©tait comme si nous essayions de faire passer une soirĂ©e romantique Ă ces objets. Je crois que nous avons Ă©tĂ© optimistes en imaginant que ça pouvait ĂȘtre aussi simple !
Ces derniĂšres semaines, nous avons rĂ©cupĂ©rĂ© un certain nombre de livres qui expliquent comment rompre les malĂ©dictions. Nous avons aussi fait quelques recherches sur internet, mais je dois dire quâon ne peut jamais ĂȘtre sĂ»r que ce quâon trouve « en ligne » est une vraie formule magique ou quelque chose en rapport avec je ne sais quel jeu. Julian, Ă©videmment, avait dĂ©jĂ lu les livres et remarquĂ© les similitudes de la plupart des sorts pour rompre les malĂ©dictions. Dans tous les cas, il faut rĂ©unir les objets maudits et allumer des chandelles de suif. Heureusement nous avons pu acheter des chandelles de suif au MarchĂ© Obscur, et nous les avons disposĂ©es en cercle autour des objets. Quand nous les avons allumĂ©es, ça avait lâair trĂšs mystĂ©rieux et occulte.
Nous avons associĂ© plusieurs sorts en latin trouvĂ©s dans les livres pour essayer dâobtenir quelque chose qui nous convenait. LâidĂ©e, câĂ©tait « Nous demandons Ă ce que la malĂ©diction jetĂ©e sur ces objets soit rompue, au nom de lâAnge Raziel ». Nous avons fait de notre mieux pour avoir lâair important, comme si nous connaissions bien Raziel et allions le rejoindre au pub pour boire une pinte une fois que nous en aurions fini avec la malĂ©diction.
Bon, je suis sĂ»re que tu es horrifiĂ© par notre dĂ©cision dâavoir entrepris ça nous mĂȘme, et tu as raison, nous nâaurions pas dĂ», mais ça nous rĂ©jouissait tellement dâavoir tous les objets que nous avons pensĂ© que nous pouvions au moins essayer. AprĂšs tout, ça ne pouvait pas faire tant de mal que ça ?
Eh bien si ! Beaucoup de mal ! Tout de suite un vent froid et humide sâest levĂ© dans la salle Ă manger et a formĂ© des cercles, Ă©teignant la plupart des bougies. Je me suis mise Ă frissonner, non pas parce quâil faisait froid (mĂȘme sâil faisait effectivement trĂšs froid tout dâun coup), mais parce que jâavais la chair de poule. Jâavais une horrible impression de noirceur envahissante, comme si ma vision devenait plus floue sur les cĂŽtĂ©s. Julian a commencĂ© Ă feuilleter rapidement les livres, Ă la recherche dâun sort pour tout annuler.
Et puis, bien sĂ»r, la boite Ă musique sur le buffet sâest mise Ă jouer toute seule. Et ce nâĂ©tait pas du tout la mĂ©lodie quâelle joue dâhabitude, une valse de Strauss. CâĂ©tait une autre mĂ©lodie, quelque chose de dissonant et criard (enfin, aussi criard que les tintements dâune boite Ă musique puissent ĂȘtre). Et elle Ă©tait forte ! Bien plus forte que peut lâĂȘtre nâimporte quelle boite Ă musique, comme si le son Ă©tait amplifiĂ© et propagĂ© dans toute la piĂšce.
- Nooon.
Le mot avait Ă©tĂ© soufflĂ© sĂ©vĂšrement, et jâai senti une prĂ©sence qui se glissait dans la piĂšce. Rupert, semi-transparent et le regard furieux. Il a passĂ© une main lumineuse Ă travers les bougies pour en Ă©teindre les flammes. Par lâAnge, le vent est retombĂ© et lâair sâest rĂ©chauffĂ©. Et jâai senti que je pouvais de nouveau respirer. Julian et moi avons Ă©changĂ© un regard.
- Nephilim, a soufflé Rupert.
CâĂ©tait certainement le plus que nous lâayons entendu prononcer, en termes de vrais mots et phrases bien distincts. Je ne sais pas si câĂ©tait parce quâil Ă©tait en colĂšre, ou parce que le sort pour rompre la malĂ©diction avait eu un minuscule effet.
- Nephilim⊠ne jouez pas avec la magie. Tatiana joua avec la magie. Elle en fût⊠détruite.
Il Ă©tait si irritĂ© que les traits de son visage semblaient changer de forme. Ses yeux sâagrandissaient Ă tel point quâil ressemblait Ă un personnage dâaminĂ©. Les commissures de ses lĂšvres sâaffaissaient.
- Cela ne vaut pas la peine de vous détruire, a-t-il soupiré. Trouvez une autre solution. Ou laissez-moi emprisonné.
Sur ces mots, il a disparu â il sâest envolĂ© en plusieurs morceaux blanc argentĂ©, comme des papiers qui volent dans le vent.
Jâai eu un frisson dans le dos. Rupert. Je crois que je le prĂ©fĂ©rais quand il pouvait seulement dĂ©placer des objets dans la poussiĂšre.
Bref, nous aurions besoin de ton aide. Peut-ĂȘtre nous faut-il un sorcier pour prononcer la bonne formule magique. Mais plus nous observons les objets que nous avons rassemblĂ©s, plus nous nous demandons si lâun dâentre eux nâest pas le bon. Il faut dire que nous avons suivi des indices douteux pour les trouver. Et nous avons tellement ennuyĂ© Hypatia, Magnus et Ragnor que je ne pense pas que nous pourrions encaisser que lâun dâentre eux arrive pour nous dire que le problĂšme vient des objets.
Du coup⊠est-ce que toi et Tessa accepteriez de venir nous rendre visite et jeter un Ćil Ă la question ? Peut-ĂȘtre que vous pourrez nous en apprendre plus sur les objets puisque vous en avez reconnus certains. Et avec un ex-FrĂšre Silencieux et une sorciĂšre, je suis sĂ»re que nous aurons assez de sagesse magique pour comprendre ce que nous devrions faire. Nous aimerions bien vous voir tous les quatre, Ă vrai dire, si vous avez envie dâen faire une sortie en famille. Nous pourrons surveiller Mina pour vous ! Il y aura des scones ! Et maintenant que les elfes ont enlevĂ© toutes les berces qui envahissaient les jardins, ils sont trĂšs jolis ! AgrĂ©ables pour se promener, ou si Kit est dâhumeur adolescente Ă ruminer, ils sont bien aussi pour ruminer. Est-ce que jâai parlĂ© des scones ?
Je vous embrasse,
Emma
Texte original de Cassandra Clare ©
Traduction dâEurydice Bluenight ©
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De Ash Ă Janus
Janus,
Tu mâas demandĂ© si je les avais vus. Oui, je les ai vus.
JâĂ©tais dans la salle du trĂŽne, parmi la cour infĂ©rieure, dissimulĂ© sous un costume. Je tâai Ă©galement vu, avec ton masque de faucon ; je ne savais pas que tu chassais pour la Reine. Je comprends quâelle craint quâils sachent que je suis ici, parmi les elfes de la Cour des LumiĂšres, et quâils me cherchent. Il Ă©tait Ă©vident pour moi quâils ne savent rien. Il est certain quâils ne savent pas ce qui se prĂ©pare.
Tu mâas demandĂ© pourquoi jây Ă©tais allĂ©Â : jâĂ©tais curieux, et me souvenais dâeux Ă Thule. Et je me demandais si elle Ă©tait avec eux, mais ce nâĂ©tait pas le cas. CâĂ©tait une magie Ă©trange qui mâavait attirĂ© Ă elle, et je mâinterroge toujours Ă ce sujet, mais tu nâas nulle raison de tâinquiĂ©ter quâun quelconque sentiment soit liĂ© Ă mes rĂ©flexions. Les Nephilim mâintĂ©ressent, peut-ĂȘtre dâautant plus parce quâils ne comprennent pas quâils sont condamnĂ©s. Câest tout.
âAsh
Texte original de Cassandra Clare ©
Traduction dâEurydice Bluenight ©
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De Julian Ă Kieran
CORRESPONDANCE PRIVĂEÂ : TOUTE DIVULGATION ENTRAINERA LA PEINE DE MORT
De la part de : Julian Blackthorn de Blackthorn Hall
A lâattention de : Kieran, Roi de la Cour des TĂ©nĂšbres
Eh bien nous sommes revenus de la Cour des LumiĂšres. Bonne nouvelle : nous avons la pelle Ă poisson. Mauvaise nouvelle : nous nâavons pas appris grand-chose et nous avons Ă©veillĂ© beaucoup de soupçons. Mais je serai ravi de te raconter le dĂ©roulĂ© des Ă©vĂ©nements, en espĂ©rant que ça te soit utile. JâespĂšre aussi que tu considĂšreras que câest un Ă©change Ă©quitable contre la faveur que tu dois maintenant Ă un phouka. (Je suis quasiment certain que cette faveur impliquera de te demander dâacheter un chapeau.)
Nous Ă©tions assez nerveux Ă lâidĂ©e dây aller, mĂȘme avec lâinvitation dâAdaon : la derniĂšre fois que nous Ă©tions dans le Royaume des FĂ©es, ça ne sâĂ©tait pas bien passĂ©. Tout nâĂ©tait que fumĂ©e grise, neige, phalĂšnes et terres qui dĂ©pĂ©rissaient. Tout ça semble ĂȘtre du passĂ© maintenant, le Royaume a de nouveau lâair en pleine santĂ©. CâĂ©tait lâautomne lĂ -bas, et le sol Ă©tait recouvert de feuilles, toutes rouges et dorĂ©es.
Bref, nous avons suivi les instructions dâAdaon et sommes entrĂ©s dans le Royaume par un vieux tertre dans le parc de Primrose Hill. Nous nous sommes retrouvĂ©s dans une clairiĂšre oĂč deux immenses portes en bois Ă©mergeaient du sol. Et Adaon Ă©tait lĂ pour nous accueillir, ce qui Ă©tait sympathique de sa part.
Mais il nâavait pas du tout lâair content. Il sâest prĂ©cipitĂ© vers nous et nous a avouĂ© quâil avait dĂ» dire Ă la Reine que nous venions.
- Il ne se passe pas grand-chose sous son toit, a-t-il ajoutĂ©, dont elle nâa pas connaissance. Câest pour cette raison quâelle a la main mise sur le pouvoir depuis tout ce temps, en partie.
Il avait un regard si misĂ©rable quâEmma lui a assurĂ© que tout allait bien et que nous ne faisions rien que la Reine dĂ©sapprouverait, ni mĂȘme dont elle se soucierait. Il a vaguement secouĂ© la tĂȘte :
- Lâon ne sait jamais ce dont Sa MajestĂ© se souciera. Ni ce quâelle dĂ©sapprouvera. Elle mâa priĂ© de vous conduire tous les deux dans la salle du trĂŽne dĂšs votre arrivĂ©e, et câest donc ce que je dois faire.
LĂ , jâai commencĂ© Ă ĂȘtre un peu plus inquiet. Jâai rappelĂ© Ă Adaon quâil avait garanti notre sĂ©curitĂ©. Il a rĂ©pondu :
- Selon les lois de lâhospitalitĂ©, sans parler des Accords, elle ne peut pas vous faire de mal ni vous retenir contre votre grĂ©, si votre but est vertueux.
Mais il a de nouveau secouĂ© la tĂȘte.
- Laisse-moi deviner, ai-je lancé. La Reine seule a le pouvoir de déterminer si notre but est vertueux ou non.
Adaon a esquissé un faible sourire.
- Exactement.
Mais il nous a conduit vers la salle du trĂŽne.
Le thĂšme de lâautomne Ă©tait tout aussi prĂ©sent dans cette salle que dans la clairiĂšre. MĂȘme davantage. Mais ce nâĂ©tait pas par rapport Ă la fin de la pĂ©riode de vĂ©gĂ©tation, ni Ă la tristesse que lâĂ©tĂ© soit fini. CâĂ©tait plutĂŽt comme une cĂ©lĂ©bration des rĂ©coltes. Ce que je veux dire, câest quâil y avait des cornes dâabondance dĂ©bordant de calebasses, de pommes, de poires, dâĂ©pis de maĂŻs. Il y avait des ballots de foin, ce qui est assez drĂŽle parce que personne dans cette salle du trĂŽne nâa jamais fait de ballots de foin, crois-moi. Des pixies avec des ailes de papillon ardentes faisaient le tour du plafond.
La Reine Ă©tait, sans surprise, sur son trĂŽne. Elle portait une robe qui Ă©tait faite entiĂšrement, je te le jure, de scarabĂ©es dâun vert Ă©tincelant cousus ensemble. Ses cheveux encadraient son visage comme une explosion de flammes rouge dorĂ©. Elle nâa plus lâair chĂ©tif et dĂ©charnĂ©, tel que la derniĂšre fois que nous lâavions vue, et elle semblait irradier un pouvoir qui lui manquait avant.
Il y avait les groupes dâelfes habituels dispersĂ©s dans la salle â des courtisans, je suppose â commĂ©rant, gloussant, assis avec indĂ©cence. Donc tout paraissait normal de ce cĂŽtĂ©-lĂ . Ils nous ont Ă peine adressĂ© un regard. Ils ont simplement tendu le cou, compris que nous nâĂ©tions pas intĂ©ressants et repris leur flĂąnerie.
Je mâattendais Ă ce que la Reine se mette tout de suite Ă nous insulter, mais elle Ă©tait en rĂ©alitĂ© assez cordiale. Pas chaleureuse. Mais pas hostile non plus. Ăvidemment elle a voulu que nous la complimentions pour la dĂ©coration dâabord. Elle a dĂ©signĂ© la salle du trĂŽne dâun grand geste de la main et entamĂ© la conversation :
- Vous avez choisi une charmante saison pour venir nous rendre visite.
- Câest plus fun que la derniĂšre fois, a remarquĂ© Emma.
- Et pourtant, vous avez choisi de revenir, a commentĂ© la Reine comme si ça la rĂ©jouissait, malgré⊠lâabsence de fun lors de notre derniĂšre rencontre.
- Nous nâavions pas vu notre ami Adaon depuis longtemps, ai-je dĂ©clarĂ©. Le plaisir de sa compagnie nous manquait.
- Si telles sont vos paroles, a répliqué la Reine.
Je suppose que ça se traduit par « Câest clairement des conneries ».
- Comme vous vous en doutez certainement, je ne suis pas sans savoir que votre frĂšre est le consort du Roi de la Cour des TĂ©nĂšbres.
- Seulement lâun de ses consorts, a corrigĂ© Emma.
La Reine lâa ignorĂ©e.
- AssurĂ©ment, vous avez anticipĂ© que je vous soupçonnerais dâespionnage.
- Nous ne sommes pas ici pour le Roi de la Cour des TĂ©nĂšbres, ai-je dĂ©clarĂ©, mais plutĂŽt pour nos intĂ©rĂȘts Ă la Cour des LumiĂšres. Notre famille est en effet liĂ©e Ă la Cour des LumiĂšres de plusieurs maniĂšres. Comme vous le savez.
La Reine mâa Ă©galement ignorĂ©.
- Votre meilleure dĂ©fense, selon moi, est quâil est si Ă©vident que lâon vous choisisse comme espions, que certainement Kieran Kingson (je pense que câĂ©tait censĂ© ĂȘtre une insulte envers toi, ou moi, ou nous deux) ferait un choix plus rĂ©flĂ©chi.
- Câest bien vrai, est intervenue Emma.
- Eh bien, a lùché la Reine. Racontez-moi une fable. Quelle est la raison de votre venue ?
Jâai pensĂ© que nous nâavions rien Ă perdre avec la vĂ©ritĂ© â nous ne faisions vraiment rien dont la Reine aurait dĂ» se soucier. Alors je lui ai racontĂ© toute lâhistoire : nous avons hĂ©ritĂ© dâune maison Ă Londres, la maison est maudite, nous voulons rompre la malĂ©diction. Jâai insistĂ© sur le fait que ni la maison ni la malĂ©diction nâĂ©taient liĂ©es au Petit Peuple. (Je nâai pas mentionnĂ© Round Tom, puisque jâai pensĂ© que ça nous Ă©loignerait du sujet principal.)
Pour rompre la malĂ©diction, nous devons (entre autres choses) obtenir cette pelle Ă poisson. Nous avons appris quâelle Ă©tait ou avait Ă©tĂ© la propriĂ©tĂ© de Socks MacPherson le phouka. Nous sommes venus nĂ©gocier avec lui pour la rĂ©cupĂ©rer, et nous nous sommes arrangĂ©s avec Adaon pour recevoir une invitation parce que nous nâavions aucun moyen de contacter MacPherson directement.
- Tout ce que nous voulons, a continuĂ© Emma, câest faire du troc avec MacPherson pour rĂ©cupĂ©rer la pelle Ă poisson. Nous pouvons faire ça juste ici, dans la salle du trĂŽne, si lâon peut le faire appeler.
La Reine a semblĂ© trĂšs intĂ©ressĂ©e tout dâun coup :
- Vous ĂȘtes prĂȘt Ă rĂ©gler cette affaire ici, sans jamais visiter la Cour Ă proprement parler ?
Jâai confirmĂ© que nous partagions grandement le dĂ©sir de la Reine que nous ne visitions pas la Cour.
Elle a paru surprise, mais elle a appelĂ© lâun des courtisans et lui a chuchotĂ© quelque chose.
- On enverra chercher le phouka, a-t-elle annoncé. Prince Adaon, quand les Nephilim auront terminé leur négociation avec lui, vous les escorterez dehors et leur donnerez congé.
Adaon a répondu par une révérence.
- Et maintenant, a repris la Reine avec un rapide mouvement des yeux, je vous prie de mâexcuser, car je vois que lâon me demande.
Nous nous sommes dĂ©calĂ©s pour la laisser descendre de son trĂŽne. Jâai vu quâun homme Ă©tait entrĂ©. Je ne lâai pas reconnu, mais câĂ©tait clairement quelquâun dâimportant : il Ă©tait vĂȘtu complĂ©tement diffĂ©remment de toutes les autres personnes. Au lieu de la tenue appropriĂ©e pour la Cour, il portait une cape Ă capuche gris-vert, et son visage Ă©tait dissimulĂ© par un masque en forme de tĂȘte de faucon. Ses vĂȘtements Ă©taient plus appropriĂ©s pour la chasse en forĂȘt que pour autre chose, mais ils Ă©taient parfaitement propres. Je ne savais pas quoi penser de lui. Mais je me suis dit quâil valait mieux inclure sa description. Tu mâas dit de faire attention Ă tout ce qui pouvait ĂȘtre nouveau ou discordant, et je ne pouvais pas mâempĂȘcher de penser quâil lâĂ©tait.
Nous avons attendu en discutant avec Adaon pendant quelques minutes avant que Socks MacPherson nâarrive. Nous avions dĂ©jĂ rencontrĂ© quelques phoukas avant â lâun dâentre eux est le portier du MarchĂ© Obscur de Los Angeles, comme tu tâen souviens peut-ĂȘtre â et jâavais pensĂ© que MacPherson serait comme eux, mais non, câest un type complĂ©tement diffĂ©rent. Il portait un immense chapeau rond en fourrure dâoĂč dĂ©passaient ses oreilles. CâĂ©tait beaucoup pour un seul chapeau.
Il semblait surpris que la Reine nous ait laissĂ©s seuls. Il a affirmĂ© quâil Ă©tait dĂ©solĂ© si nous avions Ă©tĂ© tourmentĂ©s outre mesure Ă cause de lui. Je lui ai prĂ©cisĂ© quâelle avait probablement eu lâintention de nous surveiller de son regard menaçant mais quâelle avait dĂ» partir Ă lâimproviste. MacPherson a haussĂ© les Ă©paules :
- Elle croit que tout est un mouvement dans sa partie dâĂ©checs Ă cinq dimensions. Mais parfois, quelquâun veut simplement mâĂ©changer quelque chose contre un ustensile de cuisine. En parlant de ça, jâai la pelle Ă poisson.
Il avait avec lui une sorte de sac fourre-tout dont il a sorti la pelle. Tout de suite, le DĂ©tecteur de FantĂŽmes a sonnĂ© bruyamment. MacPherson a sursautĂ© et est allĂ© se cacher derriĂšre lâun des groupes de courtisans. Mais nous voyons toujours son chapeau. (Et ses oreilles qui tremblaient au-dessus du chapeau.) Alors nous nous sommes approchĂ©s et lui avons expliquĂ© que câĂ©tait simplement un outil qui dĂ©tectait les objets maudits que nous recherchions, et que le bruit Ă©tait une bonne nouvelle puisque ça confirmait que la pelle Ă poisson Ă©tait bien celle que nous recherchions. Puis les courtisans nous ont Ă©loignĂ©s ; nous les empĂȘchions de reprendre leur important badinage.
Socks a grommelĂ©, câĂ©tait Ă parier, ce « minable Spoon » lui avait donnĂ© une pelle Ă poisson maudite.
- Je ne sais pas pourquoi jâai acceptĂ© ce marchĂ©, a-t-il poursuivi. Je nâen ai mĂȘme pas lâutilitĂ©. Je suis vĂ©gĂ©tarien.
Il nous a enfin demandĂ© ce que nous avions Ă offrir, nous lui avons annoncĂ© que câĂ©tait une faveur de ta part et avons expliquĂ© en quoi nous Ă©tions qualifiĂ©s pour offrir une telle chose. Il a trouvĂ© lâoffre acceptable et nous avons ramenĂ© la pelle Ă poisson Ă la maison.
En rĂ©sumĂ©Â : Sock MacPherson est protĂ©gĂ© par la Cour des LumiĂšres mais nâa pas hĂ©sitĂ© une seule seconde Ă accepter une faveur de la Cour des TĂ©nĂšbres. La Reine reste mĂ©fiante, elle avait des soupçons sur nous. Mais il faut aussi sâen mĂ©fier parce que son comportement Ă©tait Ă©trange. Câest certain que la Cour des LumiĂšres cache quelque chose, Ă©tant donnĂ© que la Reine a Ă©tĂ© extrĂȘmement soulagĂ©e au moment mĂȘme oĂč elle sâest rendu compte que nous nâallions pas quitter la salle du trĂŽne pour aller jeter un Ćil Ă la Cour. Mon intuition, qui nâa pas vraiment de fondement, câest quâelle ne cache pas quelque chose, mais bien quelquâun â sâil sâagissait dâun objet, sĂ»rement pourrait-elle le cacher quelque part oĂč nous ne pourrions pas le voir ? Mais ce nâest quâune impression.
Câest tout. Je te suis infiniment reconnaissant, comme toujours, pour toute ton aide. Je suis sĂ»r que tu tâattendais Ă plus dâinformations que le contenu de cette lettre, mais jâespĂšre que tu y trouveras une utilitĂ©.
Embrasse Mark et Cristina pour nous. Nous tâembrassons Ă©galement. Et surtout, gloire Ă Kraig.
Julian
Texte original de Cassandra Clare ©
Traduction dâEurydice Bluenight ©
Le texte original est Ă lire ici : https://secretsofblackthornhall.tumblr.com/post/688227415184588800/julian-to-kieran
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