Hémorragie de mots
Hémorragie d'images
Temps surmenés
Heures répandues
Comment tirer la vie de toutes ses geôles?
La vie :
Essor du risque
Vendanges du hasard.
Andrée Chedid
Christiaen van Couwenbergh Nymphe et satyre
SUR LE PRESSOIR
Sous les étoiles de septembre
Notre cour a l’air d’une chambre
Et le pressoir d’un lit ancien ;
Grisé par l’odeur des vendanges
Je suis pris d’un désir
Né du souvenir des païens.
Couchons ce soir
Tous les deux, sur le pressoir !
Dis, faisons cette folie ?…
Couchons ce soir
Tous les deux sur le pressoir,
Margot, Margot, ma jolie !
Parmi les grappes qui s’étalent
Comme une jonchée de pétales,
Ô ma bacchante ! roulons-nous.
J’aurai l’étreinte rude et franche
Et les tressauts de ta chair blanche
Écraseront les raisins doux.
Sous les baisers et les morsures,
Nos bouches et les grappes mûres
Mêleront leur sang généreux ;
Et le vin nouveau de l’Automne
Ruissellera jusqu’en la tonne,
D’autant plus qu’on s’aimera mieux !
Au petit jour, dans la cour close,
Nous boirons la part de vin rose
Oeuvrée de nuit par notre amour ;
Et, dans ce cas, tu peux m’en croire,
Nous aurons pleine tonne à boire
Lorsque viendra le petit jour.
This weekend was the Montmartre Harvest Festival - Fêtes des Vendanges de Montmartre.
Once upon a time, Montmartre was a village outside of the city limits of Paris. Prior to this time, the ‘French village’ was populated by many windmills and plenty of farmland. Thanks to its rural nature, vines have been attested to have been grown on the Butte Montmartre since at least 944.
However the vineyard (Clos Montmartre a 0.15 hectares of land) you see today was actually created by the City of Paris in 1933 as a way of stopping real estate developers from purchasing the land.
By the time of the festival, the grapes have already been harvested and there is an auction of the wine produced. Around 1000 bottles are produced in the vineyard and the bottles are auctioned off, with the proceeds going to local charity projects. The wine is often noted to not be of the best quality but instead purchased to support local projects and for the chance to sample wine that has been created within intra-muros Paris itself.
Les chatons soyeux du saule marsault gorgés de pollens ouvraient le bal des senteurs printanières tandis que des effluves vaseuses montaient de l’étang vidé pendant la semaine sainte afin de récupérer les poissons vendus sur place à des habitués qui n’auraient en rien manqué l’événement. Puis violettes, coucous, pulmonaires mises à sécher dans l’obscurité d’une pièce bien aérée répandaient leur arôme fruité, avant-goût de délicieuses tisanes hivernales ; durant tout l’été reine des prés, centaurées, pensées sauvages et tant d’autres herborisées par ma grand-mère se succédaient.
Les incontournables du jardin : jacinthes, roses, lilas, pivoines prenaient la relève. Dans les lieux humides, les myosotis formaient un tapis d’azur dans une discrète odeur de marais.
En mai, tradition oblige, les bouquets de muguet cueillis dans les bois alentours embaumaient la maison, suivis en juin par le parfum apaisant des tilleuls, des foins fraîchement coupés, des fraises trop mûres et du seringat.
Après les moissons, s’échappaient des greniers la douce odeur du blé entassé. A l’automne, le bouquet du vin nouveau et des raisins fermentant dans la cuve remontait de la grange, tandis que l’alambic, distillant la gnole, parfumait toute la place.
L’hiver, tôt le matin se répandait en brume légère la fumée des feux de bois réchauffant les demeures où, à l’approche de midi, le fumet des matefaims, des soupes variées dont la succulente «bouilla » (une soupe de maïs torréfié) aiguisait l’appétit. L’odeur tenace des feuilles de tabac que les hommes brossaient, lustraient au chiffon de laine, mesuraient, réunissaient en manoques, envahissait toute la maison avec en plus l’odeur des cigarettes fumées sans modération. Pour ne pas léser la SEITA, ils découpaient à l’aide d’une machine rudimentaire les bourgeons bourrés de nicotine puis roulaient à la main les filaments obtenus dans le célèbre papier JOB.
Enfin le soir venu, seul refuge pour avoir chaud, qu’il était bon de s’installer dans le tas de paille de l’étable en compagnie des chiens et des chats blottis contre nous, dans l’odeur très campagnarde du fourrage, du lait frais et des animaux.