Claude de France (1499-1524)
Ou la reine qui ne compte pas que pour des prunes
Elle aurait pu être une référence dans la célèbre chanson de Lio mais hélas, c’est un peu pour cela que l’on retient la pauvre Claude de France : celle qui a donné son nom au célèbre fruit rapporté de l’Empire Ottoman via l’ambassadeur de France, merci Soliman le Magnifique !
Oui, Claude est l’une des grandes oubliées parmi les reines de France et il est vrai que face à la flamboyante Aliénor d’Aquitaine, à l’iconique Marie-Antoinette, à la badass Anne d’Autriche, la première épouse de François I peut faire pâle figure. Cependant, ce n’est pas parce que l’on est effacée que l’on n’est pas intéressante ou indigne d’être reconnue pour autre chose qu’un fruit.
Claude de France est la fille de de Louis XII (1462-1515) et de son épouse, Anne de Bretagne (1477-1514). Oui oui, la célèbre Anne de Bretagne, rien que ça ! D’ailleurs, son père n’est pas en reste : quand son cousin Charles VIII meurt le 07 avril 1498 après s’être cogné la tête contre un linteau de porte (ce qui est bête comme mort mais il est mort à 27 ans comme une rock star!), qu’est-ce que Louis fait ? Il pécho la veuve de son cousin, OKLM. En vérité, c’était surtout pour éviter que la France ne
perde la main sur le duché de Bretagne mais ça reste quand même bien cocasse.
Claude, donc, est la fille aînée du couple. Sa sœur Renée (1510-1574) marquera elle aussi l’histoire de France et mériterait son propre article mais on parle de Claude, là ! Bref, Claude a une sœur et pléthore d’adelphes hélas morts au berceau. Elle a quinze ans quand sa mère meurt de la gravelle, une maladie touchant le système urinaire et cause moult calculs rénaux. Anne n’ayant pas eu de fils survivants et les duchés pouvant être hérités par des femmes (Coucou Marie de Bourgogne!), c’est
donc l’adolescente qui est la légataire maternelle.
Je répète.
Quinze ans, duchesse de Bretagne.
Rien que ça !
Physiquement, Claude n’est pas un canon de beauté : elle est petite, elle a une scoliose et selon les ambassadeurs de l’époque, elle boîte et a un strabisme. Ses sept grossesses auront un impact sur sa silhouette et la cour se moquera bien d’elle, surtout après la mort de ses parents. Oui, le bodyshaming, ça existait déjà à la Renaissance. Mais quand on est princesse, la beauté est vite remplacée par les avantages et les dots qu’on apporte à son époux.
On l’a fiancée d’abord avec Charles Quint (1500-1558). Vous savez, celui qui a fondé l’Empire des Habsbourg… Mais elle est mariée à un cousin de son père, François de Valois, futur François I (1494-1547) mais comme Louis n’a pas renoncé à avoir un garçon, il épouse la belle Marie Tudor, sœur d’Henry VIII d’Angleterre. Il meurt d’épuisement, dit-on, tant il a essayé de lui faire un enfant mais l’anglaise n’est pas enceinte.
François devient François I et Claude est donc, en plus d’être duchesse de Bretagne, reine de France comme sa maman ! Alors certes, elle ne le sera pas deux fois comme Anne mais ça reste un beau cumul des mandats ! Comme quoi, on n’a rien inventé…
Alors oui, il est vrai qu’en tant que reine de France, Claude n’a pas été des plus prolixes. Elle s’est surtout concentrée sur la fondation d’établissements religieux, laissant la politique à son mari. Très vite après son mariage, elle tombe enceinte et donne naissance à une petite fille, Louise, prénommée ainsi en l’honneur de sa grand-mère paternelle, ce qui devait être une idée du papa vu comment la
belle-mère « (…) rudoyait fort » sa belle-fille selon Brantôme. Mais la fillette, hélas, meurt à l’âge de trois ans.
Ses grossesses sont très rapprochées : 1515, 1516, 1518, 1519, 1520, 1522 et 1523, au point qu’en 1524, épuisée, elle décède à l’âge de 24 ans. Certains historiens pensent qu’elle aurait pu avoir une tuberculose osseuse ou qu’elle aurait pu être affectée par une maladie vénérienne transmise par son époux qui n’était guère fidèle. Après tout, « une cour sans femmes est un jardin sans fleur »…
A sa mort, c’est son fils François qui devient duc de Bretagne avec son père comme régent mais comme il meurt sans enfant, c’est son frère Henri qui récupère le duché. Quand il sera couronné Henri II, la Bretagne intégrera définitivement le royaume de France.
Brantôme, toujours lui, nous peint le portrait de Claude : « Il faut parler de madame Claude de France, qui fust très bonne et très charitable, et fort douce à tout le monde, et ne fist jamais desplaisir ny mal à aucun de sa court ny de son royaume. Elle fust aussy fort aymée du roy Louys, et de la royne Anne, ses pere & mere, et estoit leur bonne fille et la bien-aymée, comme ilz luy monstrarent bien; car amprès que le roy fust paisible duc de Milan, ilz la firent déclarer et proclamer en sa court de parlement de Paris, à huys ouverts, duchesse des deux plus belles duchez de la chrestienté, qui estoient Milan et Bretaigne, l’une venant du pere et l’autre de la mere. Quelle heritiere! s’il vous plaist. Ces deux duchez joinctes ensemble eussent bien faict un beau royaume »
Alors oui, il est vrai que Claude n’est pas une grande guerrière, elle n’est pas quelqu’un qui déchaîne les passions ou qui fait rêver. Elle a eu le destin de nombreuses femmes avant elles : mourir trop jeune en mettant au monde des enfants tout en priant qu’ils leur survivent. Cependant, elle a fait ce que l’on attendait d’elle : Elle a soutenu son époux, n’a causé aucune esclandre, s’est montrée pieuse et douce, a assuré la descendance du royaume et de son duché. Etre « banale», ce n’est pas une tare non plus.
J’espère avoir pu vous en apprendre un peu plus sur la pauvre Claude et que désormais, quand on vous parlera d’une pauvre femme historique oubliée, vous penserez peut-être à elle !
Si toi aussi tu veux en lire plus sur Claude, tu peux aller regarder ces sources :
Les témoignages de Brantôme : http://www.corpusetampois.com/che-16-brantomeclaudedefrance1.html
Les reines de France au temps des Valois – Tome 1 – Le beau XVIe siècle par Simone
Bertière
Claude de France : première épouse de François Ier, mère de Henri II d’Henri Pigaillem
Claude de France : Femme de François Ier de Jean Alexis Neret
Image mise en avant : Portrait de Claude de France, 1550, Corneille de Lyon, Moscou (musée Pouchkine)
Billet de Marina Ka Fai
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